[38] (1) Ταύτην καὶ δὶς γενέσθαι τὴν φωνὴν μυθολογοῦσιν, ἀγενήτοις ὅμοια καὶ
χαλεπὰ πεισθῆναι πείθοντες ἡμᾶς. (2) ἰδίοντα μὲν γὰρ ἀγάλματα φανῆναι καὶ
δακρυρροοῦντα καί τινας μεθιέντα νοτίδας αἱματώδεις οὐκ ἀδύνατόν ἐστι· καὶ
γὰρ ξύλα καὶ λίθοι πολλάκις μὲν εὐρῶτα συνάγουσι γόνιμον ὑγρότητος, πολλὰς
δὲ καὶ χρόας ἀνιᾶσιν ἐξ αὑτῶν, καὶ δέχονται βαφὰς ἐκ τοῦ περιέχοντος, οἷς ἔνια
σημαίνειν τὸ δαιμόνιον οὐδὲν ἂν δόξειε κωλύειν. (3) δυνατὸν δὲ καὶ μυγμῷ καὶ
στεναγμῷ ψόφον ὅμοιον ἐκβαλεῖν ἄγαλμα κατὰ ῥῆξιν ἢ διάστασιν μορίων
βιαιοτέραν ἐν βάθει γενομένην. ἔναρθρον δὲ φωνὴν καὶ διάλεκτον οὕτω σαφῆ
καὶ περιττὴν καὶ ἀρτίστομον ἐν ἀψύχῳ γενέσθαι παντάπασιν ἀμήχανον, εἰ μηδὲ
τὴν ψυχὴν καὶ τὸν θεὸν ἄνευ σώματος ὀργανικοῦ καὶ διηρμοσμένου μέρεσι
λογικοῖς γέγονεν ἠχεῖν καὶ διαλέγεσθαι. (4) ὅπου δ´ ἡμᾶς ἡ ἱστορία πολλοῖς
ἀποβιάζεται καὶ πιθανοῖς μάρτυσιν, ἀνόμοιον αἰσθήσει πάθος ἐγγινόμενον τῷ
φανταστικῷ τῆς ψυχῆς συναναπείθει τὸ δόξαν, ὥσπερ ἐν ὕπνοις ἀκούειν οὐκ
ἀκούοντες καὶ βλέπειν οὐ βλέποντες δοκοῦμεν. (5) οὐ μὴν ἀλλὰ τοῖς ὑπ´ εὐνοίας
καὶ φιλίας πρὸς τὸν θεὸν ἄγαν ἐμπαθῶς ἔχουσι καὶ μηδὲν ἀθετεῖν μηδ´
ἀναίνεσθαι τῶν τοιούτων δυναμένοις μέγα πρὸς πίστιν ἐστὶ τὸ θαυμάσιον καὶ μὴ
καθ´ ἡμᾶς τῆς τοῦ θεοῦ δυνάμεως. (6) οὐδενὶ γὰρ οὐδαμῶς ἀνθρωπίνῳ
προσέοικεν οὔτε φύσιν οὔτε κίνησιν οὔτε τέχνην οὔτ´ ἰσχύν, οὐδ´ εἴ τι ποιεῖ τῶν
ἡμῖν ἀποιήτων καὶ μηχανᾶται τῶν ἀμηχάνων, παράλογόν ἐστιν, ἀλλὰ μᾶλλον
ἐν πᾶσι διαφέρων πολύ, μάλιστα τοῖς ἔργοις ἀνόμοιός ἐστι καὶ παρηλλαγμένος.
(7) ἀλλὰ τῶν μὲν θείων τὰ πολλά, καθ´ Ἡράκλειτον, "ἀπιστίῃ διαφυγγάνει μὴ
γινώσκεσθαι".
| [38] (1) Cette voix se fit entendre à deux reprises, à ce
que racontent des gens qui voudraient nous faire croire des
choses qui ont tout l'air de ne s'être jamais produites et
sont bien difficiles à admettre. (2) Que des statues aient
paru suer, ruisseler de larmes et distiller une humidité
sanglante, ce n'est pas impossible. Bois et pierres
secrètent souvent une moisissure qui génère de l'humidité;
ils tirent d'eux-mêmes quantité de couleurs et reçoivent
aussi des teintes de l'air ambiant: phénomènes par lesquels
rien n'empêche, semblerait-il, que la divinité fasse
certains signes. (3) Il est possible aussi qu'une statue
émette un bruit semblable à un murmure ou à un gémissement,
sous l'effet d'une déchirure ou d'une distension assez
violente survenue dans la profondeur de ses éléments. En
revanche, qu'une voix articulée et un langage si clair, si
extraordinaire et de prononciation si nette naisse en un
corps inanimé, là, il n'y a absolument pas moyen: aussi bien
n'est-il pas arrivé non plus que notre âme ou la divinité
résonne et parle sans avoir, en guise d'instrument, un corps
composé d'éléments servant à la parole. (4) Là où l'histoire
tente de nous faire violence en produisant quantité de
témoins dignes de foi, c'est qu'intervient, dans l'élément
imaginatif de l'âme, une impression bien différente de la
perception véritable et qui nous amène à nous fier à une
apparence -- de la même façon, dans le sommeil, nous croyons
entendre alors que nous n'entendons pas, et voir alors que
nous ne voyons pas. (5) Assurément, pour les gens
excessivement imprégnés d'amour et d'attachement à l'égard
des dieux, incapables de repousser ni de refuser aucun fait
de ce genre, le merveilleux de la puissance divine -- fût-il
même sans rapport avec nous -- aide grandement à croire. (6)
Car cette puissance ne ressemble en aucune façon à rien
d'humain, ni par sa nature, ni par son mouvement, ni par son
art ou sa force: quand bien même réalise-t-elle une chose
infaisable pour nous, opère-t-elle l'impossible, il n'y a là
rien d'absurde; différant beaucoup de nous sous tous
rapports, c'est surtout par ses oeuvres que le dieu est
dissemblable et éloigné de nous. (7) Mais selon Héraclite,
la majorité des faits divins "de par notre incrédulité,
échappent à notre connaissance".
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