[4,3,10] καὶ ἀριστῶντι τῷ Ξενοφῶντι προσέτρεχον δύο νεανίσκω·
ᾔδεσαν γὰρ πάντες ὅτι ἐξείη αὐτῷ καὶ ἀριστῶντι καὶ δειπνοῦντι
προσελθεῖν καὶ εἰ καθεύδοι ἐπεγείραντα εἰπεῖν, εἴ τίς τι ἔχοι τῶν πρὸς τὸν
πόλεμον. (4.3.11) καὶ τότε ἔλεγον ὅτι τυγχάνοιεν φρύγανα συλλέγοντες ὡς ἐπὶ
πῦρ, κἄπειτα κατίδοιεν ἐν τῷ πέραν ἐν πέτραις καθηκούσαις ἐπ᾽ αὐτὸν τὸν
ποταμὸν γέροντά τε καὶ γυναῖκα καὶ παιδίσκας ὥσπερ μαρσίπους ἱματίων
κατατιθεμένους ἐν πέτρᾳ ἀντρώδει. (4.3.12) ἰδοῦσι δὲ σφίσι δόξαι ἀσφαλὲς εἶναι
διαβῆναι· οὐδὲ γὰρ τοῖς πολεμίοις ἱππεῦσι προσβατὸν εἶναι κατὰ τοῦτο. ἐκδύντες
δ᾽ ἔφασαν ἔχοντες τὰ ἐγχειρίδια γυμνοὶ ὡς νευσόμενοι διαβαίνειν· πορευόμενοι
δὲ πρόσθεν διαβῆναι πρὶν βρέξαι τὰ αἰδοῖα· (4.3.13) καὶ διαβάντες, λαβόντες τὰ
ἱμάτια πάλιν ἥκειν. εὐθὺς οὖν Ξενοφῶν αὐτός τε ἔσπενδε καὶ τοῖς νεανίσκοις
ἐγχεῖν ἐκέλευε καὶ εὔχεσθαι τοῖς φήνασι θεοῖς τά τε ὀνείρατα καὶ τὸν πόρον καὶ
τὰ λοιπὰ ἀγαθὰ ἐπιτελέσαι. σπείσας δ᾽ εὐθὺς ἦγε τοὺς νεανίσκους παρὰ τὸν
Χειρίσοφον, καὶ διηγοῦνται ταὐτά. (4.3.14) ἀκούσας δὲ καὶ ὁ Χειρίσοφος σπονδὰς
ἐποίει. σπείσαντες δὲ τοῖς μὲν ἄλλοις παρήγγελλον συσκευάζεσθαι, αὐτοὶ δὲ
συγκαλέσαντες τοὺς στρατηγοὺς ἐβουλεύοντο ὅπως ἂν κάλλιστα διαβαῖεν καὶ
τούς τε ἔμπροσθεν νικῷεν καὶ ὑπὸ τῶν ὄπισθεν μηδὲν πάσχοιεν κακόν. (4.3.15)
καὶ ἔδοξεν αὐτοῖς Χειρίσοφον μὲν ἡγεῖσθαι καὶ διαβαίνειν ἔχοντα τὸ ἥμισυ τοῦ
στρατεύματος, τὸ δ᾽ ἥμισυ ἔτι ὑπομένειν σὺν Ξενοφῶντι, τὰ δὲ ὑποζύγια καὶ τὸν
ὄχλον ἐν μέσῳ τούτων διαβαίνειν. (4.3.16) ἐπεὶ δὲ ταῦτα καλῶς εἶχεν ἐπορεύοντο·
ἡγοῦντο δ᾽ οἱ νεανίσκοι ἐν ἀριστερᾷ ἔχοντες τὸν ποταμόν· ὁδὸς δὲ ἦν ἐπὶ τὴν
διάβασιν ὡς τέτταρες στάδιοι. (4.3.17) πορευομένων δ᾽ αὐτῶν ἀντιπαρῇσαν αἱ
τάξεις τῶν ἱππέων. ἐπειδὴ δὲ ἦσαν κατὰ τὴν διάβασιν καὶ τὰς ὄχθας τοῦ
ποταμοῦ, ἔθεντο τὰ ὅπλα, καὶ αὐτὸς πρῶτος Χειρίσοφος στεφανωσάμενος καὶ
ἀποδὺς ἐλάμβανε τὰ ὅπλα καὶ τοῖς ἄλλοις πᾶσι παρήγγελλε, καὶ τοὺς λοχαγοὺς
ἐκέλευεν ἄγειν τοὺς λόχους ὀρθίους, τοὺς μὲν ἐν ἀριστερᾷ τοὺς δ᾽ ἐν δεξιᾷ
ἑαυτοῦ. καὶ οἱ μὲν μάντεις ἐσφαγιάζοντο εἰς τὸν ποταμόν· (4.3.18) οἱ δὲ πολέμιοι
ἐτόξευον καὶ ἐσφενδόνων· (4.3.19) ἀλλ᾽ οὔπω ἐξικνοῦντο· ἐπεὶ δὲ καλὰ ἦν τὰ
σφάγια, ἐπαιάνιζον πάντες οἱ στρατιῶται καὶ ἀνηλάλαζον, συνωλόλυζον δὲ καὶ
αἱ γυναῖκες ἅπασαι. πολλαὶ γὰρ ἦσαν ἑταῖραι ἐν τῷ στρατεύματι.
| [4,3,10] Pendant que Xénophon dînait, deux jeunes Grecs accoururent à lui ; car tout
le monde savait qu'il était permis de l'aborder pendant ses repas, et de le réveiller même
lorsqu'il dormait pour lui parler de ce qui concernait la guerre. Ces jeunes gens lui dirent
qu'en ramassant des broussailles sèches pour faire du feu, ils avaient vu au-delà du
Centrite, entre des rochers qui descendaient jusqu'à son lit, un vieillard, sa
femme et de jeunes filles déposer, dans une caverne qui formait le roc, des
espèces de sacs qui paraissaient contenir des habits ; qu'ils avaient cru
pouvoir y passer en sûreté, parce que le sol ne permettait pas à la cavalerie
ennemie d'en approcher ; qu'ils avaient dépouillé leurs vêtements, et, n'ayant
qu'un poignard nu à la main, s'étaient jetés dans le fleuve comme pour nager,
mais qu'ils l'avaient traversé sans avoir de l'eau, jusqu'à la ceinture ; qu'ils
avaient pris les habits cachés, par les Arméniens, et étaient revenus.
Aussitôt Xénophon fit lui-même des libations ; il ordonna qu'on versât du vin à
ces jeunes gens pour qu'ils en fissent aussi, et conjurassent les dieux qui lui
avaient envoyé le songe et fait connaître un gué, de confirmer, par des succès,
de si heureux présages. Après cet acte de religion, il les mena aussitôt à
Chirisophe : ils lui répétèrent le même récit. Chirisophe, quand il eut entendu
leur rapport, fit à son tour des libations ; puis ayant donné ordre à toute
l'armée de plier ses équipages, on assembla les autres généraux, et l'on
délibéra sur les meilleures dispositions à faire pour passer le fleuve sans
perte, repousser les ennemis qui étaient sur l'autre rive, et n'être point
entamés par ceux qu'on laissait derrière soi. On décida que Chirisophe
marcherait à la tête, et traverserait le Centrite, suivi de la moitié de l'armée ;
que Xénophon resterait en deçà avec l'autre moitié ; et que les équipages et
les esclaves passeraient le gué entre ces deux corps. Après avoir bien arrêté ce
projet, on se mit en marche. Les jeunes gens, servaient de guides ; l'armée
longeait le fleuve et l'avait à sa gauche : elle fit ainsi à peu près quatre
stades pour arriver au gué.
Pendant la marche la cavalerie ennemie se portait toujours à la hauteur des
Grecs sur la rive opposée. Quand on fut vis-à-vis du gué, on posa les armes à
terre, en ordre, sur le bord du fleuve. Puis Chirisophe, le premier, la tête
ceinte d'une couronne, quitta ses habits, reprit ses armes et donna ordre aux
troupes d'en faire autant. Il dit aux chefs de former l'armée en colonnes par
lochos, et de marcher à la même hauteur, les uns à sa droite, les autres à sa
gauche. Les sacrificateurs immolèrent des victimes sur le bord du fleuve. Les
ennemis se servirent en vain de leurs arcs et de leurs frondes ; les Grecs
étaient hors de portée. Quand les entrailles eurent été jugées favorables, toute
l'armée chanta le péan et poussa des cris de guerre. Toutes les femmes y
joignirent leurs voix ; car beaucoup de Grecs avaient des maîtresses à leur suite.
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