| [17a,5] Οἱ μὲν οὖν ἀρχαῖοι στοχασμῷ τὸ πλέον, οἱ δ´ ὕστερον 
 αὐτόπται γενηθέντες ᾔσθοντο ὑπὸ ὄμβρων θερινῶν 
 πληρούμενον τὸν Νεῖλον, τῆς Αἰθιοπίας τῆς ἄνω
 κλυζομένης, καὶ μάλιστα ἐν τοῖς ἐσχάτοις ὄρεσι, παυσαμένων 
 δὲ τῶν ὄμβρων παυομένην κατ´ ὀλίγον τὴν
 πλημμυρίδα· τοῦτο δ´ ὑπῆρξε μάλιστα δῆλον τοῖς
 πλέουσι τὸν Ἀράβιον κόλπον μέχρι τῆς κινναμωμοφόρου 
 καὶ τοῖς ἐκπεμπομένοις ἐπὶ τὴν τῶν ἐλεφάντων
 θήραν, καὶ εἴ τινες ἄλλαι χρεῖαι παρώξυνον ἐκεῖσε
 ἄνδρας προχειρίζεσθαι τοὺς τῆς Αἰγύπτου βασιλέας
 τοὺς Πτολεμαϊκούς. οὗτοι γὰρ ἐφρόντισαν τῶν τοιούτων, 
 διαφερόντως δ´ ὁ Φιλάδελφος ἐπικληθείς, φιλιστορῶν 
 καὶ διὰ τὴν ἀσθένειαν τοῦ σώματος διαγωγὰς 
 ἀεί τινας καὶ τέρψεις ζητῶν καινοτέρας. οἱ πάλαι
 δὲ βασιλεῖς οὐ πάνυ ἐφρόντισαν τῶν τοιούτων· καίπερ 
 οἰκεῖοι σοφίας γεγονότες καὶ αὐτοὶ καὶ οἱ ἱερεῖς,
 μεθ´ ὧν ἦν αὐτοῖς ὁ πλείων βίος· ὥστε καὶ θαυμάζειν
 ἄξιον καὶ διὰ τοῦτο καὶ διότι Σέσωστρις τὴν Αἰθιοπίαν 
 ἐπῆλθεν ἅπασαν μέχρι τῆς κινναμωμοφόρου, καὶ
 ὑπομνήματα τῆς στρατείας αὐτοῦ καὶ νῦν ἔτι δείκνυται 
 στῆλαι καὶ ἐπιγραφαί. Καμβύσης τε τὴν Αἴγυπτον
 κατασχὼν προῆλθε καὶ μέχρι τῆς Μερόης μετὰ τῶν
 Αἰγυπτίων· καὶ δὴ καὶ τοὔνομα τῇ τε νήσῳ καὶ τῇ
 πόλει τοῦτο παρ´ ἐκείνου τεθῆναί φασιν, ἐκεῖ τῆς
 ἀδελφῆς ἀποθανούσης αὐτῷ Μερόης· οἱ δὲ γυναῖκά
 φασι· τὴν ἐπωνυμίαν οὖν ἐχαρίσατο αὐτῇ τιμῶν τὴν
 ἄνθρωπον, θαυμαστὸν οὖν πῶς ἐκ τῶν τοιούτων ἀφορμῶν 
 οὐ τελέως ἐναργὴς ἦν ἡ περὶ τῶν ὄμβρων ἱστορία
 τοῖς τότε, καὶ ταῦτα τῶν ἱερέων φιλοπραγμονέστερον
 ἀναφερόντων εἰς τὰ ἱερὰ γράμματα καὶ ἀποτιθεμένων,
 ὅσα μάθησιν περιττὴν ἐπιφαίνει. εἰ γὰρ ἄρα, τοῦτ´
 ἐχρῆν ζητεῖν ὅπερ καὶ νῦν ἔτι ζητεῖται, τί δή ποτε θέρους, 
 χειμῶνος δὲ οὔ, καὶ ἐν τοῖς νοτιωτάτοις, ἐν δὲ
 τῇ Θηβαΐδι καὶ τῇ περὶ Συήνην οὐ συμπίπτουσιν ὄμβροι· 
 τὸ δ´ ὅτι ἐξ ὄμβρων αἱ ἀναβάσεις μὴ ζητεῖν,
 μηδὲ τοιούτων δεῖσθαι μαρτύρων οἵους Ποσειδώνιος
 εἴρηκε. φησὶ γὰρ Καλλισθένη λέγειν τὴν ἐκ τῶν ὄμβρων
 αἰτίαν τῶν θερινῶν παρὰ Ἀριστοτέλους λαβόντα,
 ἐκεῖνον δὲ παρὰ Θρασυάλκου τοῦ Θασίου (τῶν ἀρχαίων
 δὲ φυσικῶν εἷς οὗτος) ἐκεῖνον δὲ παρ´ ἄλλου, τὸν δὲ
 παρ´ Ὁμήρου διιπετέα φάσκοντος τὸν Νεῖλον „ἂψ δ´
 „εἰς Αἰγύπτοιο διιπετέος ποταμοῖο.“ ἀλλ´ ἐῶ ταῦτα
 πολλῶν εἰρηκότων ὧν ἀρκέσει δύο μηνῦσαι τοὺς ποιήσαντας 
 καθ´ ἡμᾶς τὸ περὶ τοῦ Νείλου βιβλίον, Εὔδωρόν 
 τε καὶ Ἀρίστωνα τὸν ἐκ τῶν περιπάτων· πλὴν γὰρ
 τῆς τάξεως τά γε ἄλλα καὶ τῇ φράσει καὶ τῇ ἐπιχειρήσει 
 ταὐτά ἐστι κείμενα παρ´ ἀμφοτέροις. ἐγὼ γοῦν 
 ἀπορούμενος ἀντιγράφων εἰς τὴν ἀντιβολὴν ἐκ θατέρου 
 θάτερον ἀντέβαλον· πότερος δ´ ἦν ὁ τἀλλότρια
 ὑποβαλλόμενος, ἐν Ἄμμωνος εὕροι τις ἄν. Εὔδωρος δ´
 ᾐτιᾶτο τὸν Ἀρίστωνα· ἡ μέντοι φράσις Ἀριστώνειος
 μᾶλλόν ἐστιν. οἱ μὲν οὖν ἀρχαῖοι τὸ οἰκούμενον αὐτὸ
 καὶ ποτιζόμενον ὑπὸ τοῦ Νείλου μόνον Αἴγυπτον ἐκάλουν 
 ἀπὸ τῶν περὶ Συήνην τόπων ἀρξάμενοι μέχρι τῆς
 θαλάττης, οἱ δ´ ὕστερον μέχρι νῦν προσέλαβον ἐκ μὲν
 τῶν πρὸς ἕω μερῶν {τὰ} μεταξὺ τοῦ Ἀραβίου κόλπου
 καὶ τοῦ Νείλου σχεδόν τι πάντα (οἱ δ´ Αἰθίοπες οὐ
 πάνυ χρῶνται τῇ Ἐρυθρᾷ θαλάττῃ), ἐκ δὲ τῶν ἑσπερίων 
 τὰ μέχρι τῶν αὐάσεων καὶ ἐν τῇ παραλίᾳ τὰ ἀπὸ
 τοῦ Κανωβικοῦ στόματος μέχρι Καταβαθμοῦ καὶ τῆς
 Κυρηναίων ἐπικρατείας. οἵ τε γὰρ ἀπὸ τοῦ Πτολεμαίου
 βασιλεῖς ἴσχυσαν τοσοῦτον, οἵ γε καὶ τὴν Κυρηναίαν
 αὐτὴν κατέσχον καὶ διενείμαντο πρὸς τὴν Αἴγυπτον
 καὶ τὴν Κύπρον, Ῥωμαῖοί τε οἱ διαδεξάμενοι τὴν ἐκείνων 
 ἐπαρχίαν κρίναντες τὴν Αἴγυπτον ἐν τοῖς αὐτοῖς
 ὅροις διεφύλαξαν. αὐάσεις δ´ οἱ Αἰγύπτιοι καλοῦσι τὰς
 οἰκουμένας χώρας περιεχομένας κύκλῳ μεγάλαις ἐρημίαις 
 ὡς ἂν νήσους πελαγίας· πολὺ δὲ τοῦτ´ ἔστι κατὰ
 τὴν Λιβύην, τρεῖς δ´ εἰσὶν αἱ πρόσχωροι τῇ Αἰγύπτῳ
 καὶ ὑπ´ αὐτῇ τεταγμέναι.
 
 | [17a,5] Les auteurs anciens et modernes, les anciens généralement sur de 
simples conjectures, les modernes sur la foi d'observations personnelles, 
ont attribué le phénomène des crues du Nil aux pluies torrentielles qui 
tombent l'été dans la haute Ethiopie, et en particulier dans les montagnes 
situées aux derniers confins de ce pays, le fleuve commençant à décroître 
peu à peu une fois que les pluies de l'Ethiopie ont cessé. Mais la chose a 
pris un caractère d'évidence surtout pour les navigateurs qui ont poussé 
l'exploration du golfe Arabique jusqu'à la Cinnamômophore, ainsi que pour 
les chasseurs envoyés à la découverte dans la région de l'éléphant, et en 
général pour tous les agents ou représentants que les rois d'Egypte de la 
dynastie des Ptolémées, dans un but d'utilité quelconque, ont dirigés vers 
ces contrées lointaines. Les Ptolémées, on le sait, s'intéressaient aux 
questions de ce genre, le second surtout dit Philadelphe, qui, curieux et 
chercheur de sa nature, avait en outre besoin, vu son état valétudinaire, 
de changer continuellement de distractions et de passe-temps. Les anciens 
rois, au contraire, n'attachaient pas grande importance à ces recherches 
scientifiques, et cependant, tout comme les prêtres, dans la société 
desquels se passait la meilleure partie de leur vie, ils faisaient 
profession d'aimer et d'étudier la philosophie. Il y a donc là quelque 
chose qui pourrait déjà étonner ; mais ce qui étonne encore davantage, 
c'est que Sésostris avait parcouru l'Ethiopie tout entière jusqu'à la 
Cinnamômophore, témoin mainte stèle, mainte inscription, qu'il a laissée 
comme monument de sa marche conquérante et qu'on peut voir encore dans le 
pays ; c'est que Cambyse, lui aussi, une fois maître de l'Egypte, s'était 
avancé avec une armée composée {en grande partie} d'Egyptiens jusqu'à 
Méroé (on prétend même que, si l'île et la ville de Méroé portent ce nom, 
c'est de lui qu'elles l'ont reçu, parce que sa soeur, d'autres disent sa 
femme, Méroé, était morte en ce lieu, et qu'il avait voulu apparemment 
rendre ainsi un dernier hommage à cette princesse et honorer sa mémoire en 
perpétuant son nom). Il y a donc lieu de s'étonner, je le répète, qu'avec 
des circonstances si favorables à l'observation on n'ait pas, dès lors, 
éclairci complètement cette question des pluies, quand on pense surtout au 
soin extrême qu'apportaient les prêtres à consigner dans leurs livres 
sacrés et à y conserver comme en dépôt tous les problèmes dont la solution 
exige une science supérieure. Or c'était bien à le cas : voici en effet 
quelle était la question, question non encore résolue à l'heure qu'il est : 
«Pourquoi est-ce l'été et non l'hiver, pourquoi est-ce dans les régions 
les plus méridionales, et non dans la Thébaïde et aux environs de Syène, 
que tombent les pluies ?» Il ne s'agissait nullement de prouver que les 
crues du fleuve ont pour cause les pluies ; il n'était pas besoin surtout, 
pour démontrer un fait semblable, d'appeler en témoignage les imposantes 
autorités qu'énumère Posidonius. «Callisthène, dit Posidonius, proclamait 
que la cause des crues du Nil est dans les pluies de la saison d'été ; 
mais cette explication, il l'avait recueillie de la bouche d'Aristote, qui 
lui-même la tenait de Thrasyalcès de Thasos, l'un des membres de la secte 
des anciens physiciens, Thrasyalcès l'ayant empruntée à son tour de 
Thalès, qui avouait enfin l'avoir trouvée dans Homère, puisque Homère, à 
en juger par le passage où il dit :
«avant d'avoir revu les bords du fleuve Aegyptus, de ce fleuve tombé du 
sein de Zeus» (Od. IV, 581),
fait bien réellement naître le Nil des eaux du ciel».
Mais je ne veux pas insister et répéter ce que tant d'autres ont déjà dit, 
ce qu'ont dit notamment {pour ne citer que ces deux noms} Eudore et 
Ariston le péripatéticien, deux de mes contemporains, dans leur Livre sur 
le Nil : {je dis à dessein DANS LEUR LIVRE au singulier,} car, si l'on 
excepte l'ordre des matières, tout le reste chez ces deux auteurs est 
tellement semblable, on retrouve tellement chez l'un et chez l'autre les 
mêmes phrases, les mêmes raisonnements, qu'ayant à vérifier un jour divers 
passages dans un de ces deux traités je pus, à défaut d'une double copie 
de ce même traité, le collationner avec le texte de l'autre. Lequel des 
deux maintenant était le plagiaire ? Allez le demander à Ammon. Eudore, je 
le sais, a accusé Ariston de plagiat, il m'a semblé pourtant que le style 
de l'ouvrage était plus dans la manière d'Ariston. Tous les auteurs 
anciens ne donnaient le nom d'Egypte qu'à la partie habitable de la 
vallée, c'est-à-dire à la partie comprise dans les limites des 
débordements du fleuve depuis Syène jusqu'à la mer ; mais plus tard on 
prêta à cette dénomination une bien autre extension, et il fut d'usage 
d'appeler Egypte (comme on le fait encore aujourd'hui) : 1° du côté de 
l'est, presque tout l'intervalle qui sépare le Nil du golfe Arabique, vu 
que les Ethiopiens n'usent pour ainsi dire pas de la mer Rouge ; 2° du 
côté de l'ouest, tout ce qui se prolonge dans l'intérieur jusqu'aux Auasis 
et sur la côte de la bouche Canopique au Catabathmus et à l'ancien royaume 
de Cyrène. Telles étaient, en effet, les limites véritables du royaume des 
successeurs de Ptolémée, bien qu'à plusieurs reprises ces princes eussent 
occupé la Cyrénaïque elle-même et en eussent fait une sorte d'annexe 
politique de l'Egypte et de Cypre ; et les Romains, à leur tour, héritiers 
des Ptolémées, conservèrent à l'Egypte, devenue province romaine, en vertu 
d'un décret {du Sénat,} les mêmes limites que ces princes lui avaient 
assignées. - Sous le nom d'Auasis, les Egyptiens désignent certains 
cantons fertiles et habités, mais entourés de tout côté par d'immenses 
déserts, ce qui les fait ressembler à des îles perdues au milieu de 
l'Océan. La présence d'auasis est un fait fréquent en Libye. L'Egypte, 
elle, en a trois dans son voisinage immédiat, et qui administrativement 
dépendent d'elle.
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