[1,1,10] Ὥσπερ οὖν τὰ ἔσχατα καὶ τὰ κύκλῳ τῆς οἰκουμένης οἶδε καὶ
φράζει σαφῶς ὁ ποιητής, οὕτω καὶ τὰ τῆς θαλάττης τῆς ἐντός.
Περιέχει γὰρ ταύτην ἀπὸ Στηλῶν ἀρξαμένοις Λιβύη τε καὶ Σἴγυπτος
καὶ Φοινίκη, ἑξῆς δὲ ἡ πέριξ τῆς Κύπρου, εἶτα Σόλυμοι καὶ Λύκιοι
καὶ Κᾶρες, μετὰ δὲ τούτους ἡ μεταξὺ Μυκάλης καὶ τῆς Τρῳάδος ἠιὼν
καὶ αἱ προκείμεναι νῆσοι, ὧν ἁπάντων μέμνηται· καὶ ἐφεξῆς τῶν
περὶ τὴν Προποντίδα καὶ τοῦ Εὐξείνου μέχρι Κολχίδος καὶ τῆς
Ἰάσονος στρατείας. Καὶ μὴν καὶ τὸν Κιμμερικὸν Βόσπορον οἶδε, τοὺς
Κιμμερίους εἰδώς· οὐ δήπου τὸ μὲν ὄνομα τῶν Κιμμερίων εἰδὼς,
αὐτοὺς δὲ ἀγνοῶν, οἳ κατ' αὐτὸν ἢ μικρὸν πρὸ αὐτοῦ μέχρι Ἰωνίας
ἐπέδραμον τὴν γῆν τὴν ἐκ Βοσπόρου πᾶσαν. Αἰνίττεται γοῦν καὶ τὸ
κλίμα τῆς χώρας αὐτῶν ζοφῶδες ὄν, καὶ ὡς φησίν,
Ἠέρι καὶ νεφέλῃ κεκαλυμμένοι· οὐδέ ποτ' αὐτοὺς
ἠέλιος φαέθων ἐπιλάμπεται,
ἀλλ' ἐπὶ νὺξ ὀλοὴ τέταται.
Γνωρίζει δὲ καὶ τὸν Ἴστρον, μεμνημένος γε Μυσῶν, ἔθνους Θρᾳκίου
παροικοῦντος τὸν Ἴστρον. Καὶ μὴν καὶ τὴν ἑξῆς παραλίαν οἶδε,
Θρᾳκίαν οὖσαν μέχρι Πηνειοῦ, Παίονάς τε ὀνομάζων καὶ Ἄθω καὶ
Ἀξιὸν καὶ τὰς προκειμένας τούτων νήσους. Ἑξῆς δέ ἐστιν ἡ τῶν
Ἑλλήνων παραλία μέχρι Θεσπρωτῶν, ἧς ἁπάσης μέμνηται. Καὶ μὴν
καὶ τὰ τῆς Ἰταλίας ἄκρα οἶδε, Τεμέσην καλῶν καὶ Σικελούς, καὶ τὰ
τῆς Ἰβηρίας ἄκρα καὶ τὴν εὐδαιμονίαν αὐτῶν, ἣν ἀρτίως ἔφαμεν. Εἰ
δέ τινα ἐν τοῖς μεταξὺ διαλείμματα φαίνεται, συγγνοίη τις ἄν· καὶ
γὰρ ὁ γεωγραφῶν ὄντως πολλὰ παρίησι τῶν ἐν μέρει. Συγγνοίη δ'
ἂν, καὶ εἰ μυθώδη τινὰ προσπέπλεκται τοῖς λεγομένοις ἱστορικῶς καὶ
διδασκαλικῶς, καὶ οὐ δεῖ μέμφεσθαι. Οὐδὲ γὰρ ἀληθές ἐστιν, ὅ
φησιν Ἐρατοσθένης, ὅτι ποιητὴς πᾶς στοχάζεται ψυχαγωγίας, οὐ
διδασκαλίας (χ άριν)· τἀναντία γὰρ οἱ φρονιμώτατοι τῶν περὶ
ποιητικῆς τι φθεγξαμένων πρώτην τινὰ λέ γουσι φιλοσοφίαν τὴν
ποιητικήν. Ἀλλὰ πρὸς Ἐρατοσθένη μὲν αὖθις ἐροῦμεν διὰ πλειόνων,
ἐν οἷς καὶ περὶ τοῦ ποιητοῦ πάλιν ἔσται λόγος.
| [1,1,10] 10. Mais, si Homère a exactement connu et décrit les extrémités et la
bordure circulaire de la terre, il n'a pas moins bien connu et décrit la mer
Intérieure. Les pays qui entourent cette mer, à partir des colonnes
d'Hercule, sont, comme on sait, la Libye, l'Égypte et la Phénicie, et plus
loin la côte qui avoisine Chypre; puis viennent les Solymes, les Lyciens,
les Cariens, et le littoral compris entre Mycale et la Troade, avec les des
adjacentes : or, tous ces lieux, le poète les a mentionnés en termes
exprès, comme il a parlé aussi et des contrées ultérieures qui bordent le
Propontide et des côtes de l'Euxin jusqu'à la Colchide et de l'expédition
de Jason. Il connaissait, en outre, le Bosphore Cimmérien, et
naturellement les Cimmériens eux-mêmes on ne s'expliquerait pas, en
effet, comment il eût pu connaître le nom des Cimmériens et ignorer leur
existence, l'existence d'un peuple, qui, de son vivant ou peu de temps
avant lui, avait, depuis le Bosphore, couru et ravagé tout le pays
intermédiaire jusqu'à l'Ionie? Mais non, il les connaissait, et ce qui le
prouve, c est qu'il a fait allusion à la nature brumeuse du climat de leur pays :
«Un voile, dit-il, un voile de vapeurs et de nuages les enveloppe ; l'éclat du
soleil ne resplendit jamais pour eux, et a la funeste nuit plane toujours au-
dessus de leurs têtes».
Il connaissait pareillement l'Ister (du moins nomme-t-il les Mysiens, nation
thracique, riveraine de ce fleuve) et aussi tout le littoral à partir de l'Ister,
autrement dit la Thrace jusqu'au Pénée, puisqu'il mentionne les
Paeoniens et qu'il signale l'Athos, l'Axius et les îles situées vis-à-vis.
Quant au littoral de la Grèce, prolongement de celui de la Thrace, il a été
décrit par lui en entier jusqu'aux frontières de la Thesprotie. Il connaissait
enfin l'extrémité de l'Italie, à en juger par la mention qu'il a faite de
Temesa et des Sicèles, et l'extrémité de l'Ibérie, ainsi que la richesse et la
prospérité des peuples qui l'occupaient, et dont nous parlions tout à
l'heure. Si maintenant, dans l'intervalle, se laissent apercevoir quelques
lacunes, on peut les lui par-donner, le géographe de profession lui-même
omettant sou-vent bien des détails. Il est excusable aussi et ne mérite
aucun blâme s'il a cru devoir mêler, çà et là, quelques circonstances
fabuleuses à ses récits, d'ailleurs tout historiques et didactiques, car il
n'est pas vrai, comme le prétend Ératosthène, que tout poète vise
uniquement à plaire et jamais à instruire : tout au contraire, ceux qui ont
traité le plus pertinemment les questions de poétique proclament la
poésie une sorte de philosophie primitive. Mais nous réfuterons plus
longuement ce jugement d'Ératosthène, quand nous aurons, plus loin, à
reparler du poète.
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