[36] Ὁ δὲ πρεσβύτης Μάριος ὡς ἀνήχθη, πνεύματι φορῷ
κομιζόμενος παρὰ τὴν Ἰταλίαν, ἐφοβήθη Γεμίνιόν τινα τῶν ἐν
Ταρρακίνῃ δυνατῶν ἐχθρὸν αὑτοῦ, καὶ τοῖς (2) ναύταις
προεῖπεν εἴργεσθαι Ταρρακίνης. οἱ δ' ἐβούλοντο μὲν αὐτῷ
χαρίζεσθαι, τοῦ δὲ πνεύματος εἰς πελάγιον μεθισταμένου καὶ
κλύδωνα κατάγοντος πολύν, οὔτε τὸ πορθμεῖον ἐδόκει
περικλυζόμενον ἀνθέξειν, τοῦ τε Μαρίου δυσφοροῦντος καὶ
κακῶς ἔχοντος ὑπὸ ναυτίας, μόλις (3) ἀντιλαμβάνονται τῶν
περὶ τὸ Κίρκαιον αἰγιαλῶν. τοῦ δὲ χειμῶνος αὐξανομένου καὶ
τῶν σιτίων ἐπιλιπόντων, ἐκβάντες ἐπλάζοντο πρὸς οὐδένα
σκοπόν, ἀλλ' οἷα συμβαίνει ταῖς μεγάλαις ἀπορίαις ἀεὶ φεύγειν
ἐκ τοῦ παρόντος ὡς χαλεπωτάτου καὶ τὰς ἐλπίδας ἔχειν ἐν τοῖς
ἀδήλοις. (4) ἐπεὶ πολεμία μὲν ἐκείνοις ἡ γῆ πολεμία δ' ἡ
θάλασσα, φοβερὸν δ' ἦν ἀνθρώποις περιπεσεῖν, φοβερὸν δὲ μὴ
(5) περιπεσεῖν δι' ἔνδειαν τῶν ἀναγκαίων. οὐ μὴν ἀλλ' ὀψέ που
βοτῆρσιν ὀλίγοις ἐντυγχάνουσιν, οἳ δοῦναι μὲν οὐδὲν ἔσχον
αὐτοῖς δεομένοις, γνωρίσαντες δὲ τὸν Μάριον ἐκέλευον
ἀπαλλάττεσθαι τὴν ταχίστην· ὀλίγον γὰρ ἔμπροσθεν αὐτόθι
κατὰ ζήτησιν αὐτοῦ συχνοὺς ἱππέας (6) ὀφθῆναι
διεξελαύνοντας. ἐν παντὶ δὴ γεγονὼς ἀπορίας, μάλιστα δὲ
νηστείᾳ τῶν περὶ αὐτὸν ἀπαγορευόντων, τότε μὲν
ἐκτραπόμενος τῆς ὁδοῦ καὶ καταβαλὼν ἑαυτὸν εἰς (7) ὕλην
βαθεῖαν, ἐπιπόνως διενυκτέρευσε. τῇ δ' ὑστεραίᾳ συνηγμένος
ὑπ' ἐνδείας, καὶ τῷ σώματι πρὶν ἐκλελύσθαι παντάπασι
χρήσασθαι βουλόμενος, ἐχώρει παρὰ τὸν αἰγιαλόν,
ἐπιθαρσύνων τοὺς ἑπομένους καὶ δεόμενος μὴ προαποκάμνειν
τῆς τελευταίας ἐλπίδος, ἐφ' ἣν ἑαυτὸν (8) φυλάττει μαντεύμασι
παλαιοῖς πιστεύων. νέος γὰρ ὢν ἔτι παντελῶς καὶ διατρίβων
κατ' ἀγρόν, ὑποδέξασθαι τῷ ἱματίῳ καταφερομένην ἀετοῦ
νεοττιὰν ἑπτὰ νεοττοὺς ἔχουσαν· ἰδόντας δὲ τοὺς γονεῖς καὶ
θαυμάσαντας διαπυνθάνεσθαι τῶν μάντεων· τοὺς δ' εἰπεῖν, ὡς
ἐπιφανέστατος ἀνθρώπων ἔσοιτο, καὶ τὴν μεγίστην ἡγεμονίαν
(9) καὶ ἀρχὴν ἑπτάκις αὐτὸν λαβεῖν ἀναγκαῖον εἴη. ταῦθ' οἱ μὲν
ἀληθῶς τῷ Μαρίῳ συντυχεῖν οὕτω λέγουσιν, οἱ δὲ (του)τοὺς
τότε καὶ παρὰ τὴν ἄλλην φυγὴν ἀκούσαντας αὐτοῦ καὶ
πιστεύσαντας ἀναγράψαι, πρᾶγμα κομιδῇ (10) μυθῶδες. ἀετὸς
γὰρ οὐ τίκτει πλείονα τῶν δυεῖν, ἀλλὰ καὶ Μουσαῖον ἐψεῦσθαι
λέγουσιν, εἰπόντα περὶ τοῦ ἀετοῦ·
ὃς τρία μὲν τίκτει, δύο δ' ἐκλέπει, ἓν δ' ἀλεγίζει.
(11) τὸ μέντοι πολλάκις ἐν τῇ φυγῇ καὶ ταῖς ἐσχάταις ἀπορίαις
Μάριον εἰπεῖν, ὡς ἄχρις ἑβδόμης ὑπατείας πρόεισιν,
ὁμολογούμενόν ἐστιν.
| [36] Cependant le vieux Marius,
ayant mis à la voile, côtoyait l'Italie, poussé par un vent favorable; mais craignant de
tomber entre les mains d'un des principaux habitants de Terracine, nommé
Géminius, son ennemi personnel, il avait averti ses matelots d'éviter cette ville. Ils
auraient bien voulu faire ce qu'il désirait; mais le vent ayant changé, et venant à
souffler de la haute mer, il s'éleva une si furieuse tempête, qu'ils crurent que le
vaiseau ne résisterait pas à l'effort des vagues. D'ailleurs, Marius se trouvant fort
incommodé de la mer, ils gagnèrent avec peine le rivage de Circée. La tempête,
qui devenait toujours plus violente, et le défaut de vivres les ayant forcés de
descendre à terre, ils errèrent de côté et d'autre, sans avoir de but certain; et, comme
il arrive toujours dans les dangers pressants, ils cherchaient à éviter celui qui était
présent, comme le plus redoutable, et mettaient leur espérance dans ce qu'ils ne
connaissaient pas. La terre n'était pas pour eux moins dangereuse que la mer; et s'ils
avaient à redouter la rencontre des hommes, ils n'avaient pas moins à craindre, dans
l'extrême disette où ils étaient, de n'en pas rencontrer. Enfin, sur le soir, ils
trouvèrent des bouviers qui n'eurent rien à leur donner, mais qui, ayant reconnu
Marius, l'avertirent de s'éloigner promptement, parce qu'ils venaient de voir passer
plusieurs cavaliers qui le cherchaient. Privé de toute ressource, affecté surtout de
voir ceux qui l'accompagnaient près de mourir de faim, il quitta le grand chemin, et
se jeta dans un bois épais, où il passa la nuit. XXXVIII. Le lendemain, cédant à la
nécessité, et voulant avant que ses forces fussent épuisées, les employer utilement, il
se remit en chemin le long de la mer; en marchant il encourageait les gens de sa
suite ; il les exhortait à attendre encore une dernière espérance pour laquelle il se
réservait, par la confiance qu'il avait en d'anciens oracles. Il leur raconta qu'un jour,
dans son enfance, pendant qu'il vivait à la campagne, il était tombé dans sa robe
l'aire d'un aigle, qui contenait sept aiglons; que ses parents, surpris de cette
singularité, consultèrent les devins, qui leur répondirent que cet enfant deviendrait
un des hommes les plus célèbres; qu'il obtiendrait sept fois la première dignité de la
république, et jouirait de la plus grande autorité. Les uns disent que ce prodige
arriva réellement à Marius; d'autres assurent que ceux qui le suivaient le lui ayant
entendu raconter alors, et dans une autre de ses fuites, y ajoutèrent foi, et écrivirent
ensuite ce récit, qui n'était qu'une fable de son invention, car l'aigle ne fait jamais plus
de deux aiglons ; aussi accuse-t-on de mensonge le poëte Musée pour avoir dit
de cet oiseau : "Un aigle pond trois oeufs, mais il en exclut deux, Et n'en nourrit qu'un
seul, qu'il rend plus vigoureux". Quoi qu'il en soit, tout le monde convient que Marius
dans sa fuite, et dans ses plus grandes détresses, disait souvent qu'il parviendrait au
septième consulat.
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