[30] Μάριος δὲ τὸν Σατορνῖνον ἀντὶ τῆς ὑπουργίας ταύτης
ἐπὶ πᾶν προϊόντα τόλμης καὶ δυνάμεως περιορᾶν
ἀναγκαζόμενος, ἔλαθεν οὐκ ἀνεκτὸν ἀπεργασάμενος κακόν,
ἀλλ' ἄντικρυς ὅπλοις καὶ σφαγαῖς ἐπὶ τυραννίδα (2) καὶ
πολιτείας ἀνατροπὴν πορευόμενον. αἰδούμενος δὲ τοὺς
κρατίστους, θεραπεύων δὲ τοὺς πολλούς, ἔργον (3)
ἀνελεύθερον ἐσχάτως ὑπέμεινε καὶ παλίμβολον. ἐλθόντων γὰρ
ὡς αὐτὸν ὑπὸ νύκτα τῶν πρώτων ἀνδρῶν καὶ παρακαλούντων
ἐπὶ τὸν Σατορνῖνον, ἑτέραις θύραις ἐκεῖνον ὑπεδέξατο τούτων
ἀγνοούντων· εἶτα πρόφασιν λέγων πρὸς ἀμφοτέρους κοιλίας
διάρροιαν, νῦν μὲν ὡς τούτους, νῦν δ' ὡς ἐκεῖνον ἐπὶ τῆς οἰκίας
ἀνὰ μέρος (4) διατρέχων, συνέκρουε καὶ παρώξυνεν. οὐ μὴν
ἀλλὰ καὶ τῆς βουλῆς καὶ τῶν ἱππέων συνισταμένων καὶ
ἀγανακτούντων, ἐξήνεγκεν εἰς ἀγορὰν τὰ ὅπλα, καὶ
καταδιωχθέντας αὐτοὺς εἰς τὸ Καπετώλιον εἷλε δίψει· τοὺς γὰρ
ὀχετοὺς ἀπέκοψεν, οἱ δ' ἀπειπόντες ἐκεῖνον ἐκάλουν καὶ
παρέδωκαν σφᾶς αὐτοὺς διὰ τῆς λεγομένης δημοσίας πίστεως.
(5) ἐπεὶ δὲ παντοῖος γενόμενος ὑπὲρ τοῦ σῶσαι τοὺς ἄνδρας
οὐδὲν ὤνησεν, ἀλλὰ κατιόντες εἰς ἀγορὰν ἀνῃρέθησαν, ἐκ
τούτου τοῖς τε δυνατοῖς ἅμα καὶ τῷ δήμῳ προσκεκρουκώς,
τιμητείας παραπεσούσης ἐπίδοξος ὢν οὐ μετῆλθεν, ἀλλ' εἴασεν
ἑτέρους ὑποδεεστέρους αἱρεθῆναι, (6) δεδιὼς ἀποτυχεῖν. ἄλλως
δ' αὐτὸς ἐκαλλωπίζετο πολλοῖς μὴ θέλειν ἀπεχθάνεσθαι, τοὺς
βίους αὐτῶν καὶ τὰ ἤθη πικρῶς ἐξετάζων.
| [30] XXXII. Le service important que Saturninus venait de rendre à Marius imposait
à celui-ci la nécessité de souffrir toutes ses violences; il ne sentait pas que c'était faire
à la république une plaie incurable; que ses lâches complaisances pour ce tribun
audacieux l'autorisaient à se frayer par les armes et par les meurtres un chemin à la
tyrannie et à la ruine du gouvernement. Conservant donc quelques égards pour les
nobles, et voulant toujours se ménager la faveur du peuple, il fit l'action de l'homme
le plus vil et le plus faux. Les principaux citoyens étant allés chez lui pendant la nuit
pour l'engager à réprimer les excès de Saturninus, et ce tribun y étant venu aussi, il
le fit entrer, à leur insu, par une autre porte. Ensuite feignant une indisposition, et
allant, sous ce prétexte, des uns aux autres, il ne fit que les aigrir et les irriter
davantage. Enfin, le sénat et les chevaliers s'étant réunis, et ayant fait éclater leur
indignation, Marius fut obligé de faire venir sur la place des gens armés, qui
chassèrent les séditieux et les poursuivirent jusqu'au Capitole, où on les prit par la
soif, en coupant les conduits d'eau. N'ayant donc plus aucun espoir, ils appelèrent
Marius et se rendirent à lui, sans la sauvegarde de la foi publique. Il fit son possible
pour les sauver; mais toutes ses démarches furent inutiles : à peine descendus sur la
place, ils furent assommés par la multitude. Cette conduite lui avait tellement aliéné
la noblesse et le peuple, que le temps de la nomination des censeurs étant venu,
quoiqu'on s'attendît qu'il se mettrait sur les rangs, il n'osa pas se présenter, et,
craignant un refus, il laissa choisir des censeurs qui lui étaient inférieurs en dignité.
Il voulut cependant s'en faire un mérite, en disant qu'il ne s'était pas présenté, de
peur que la recherche sévère qu'il aurait été obligé de faire des moeurs et de la
conduite des citoyens ne lui eût attiré la haine du peuple.
|