[16] Ὁ δὲ τούτων μὲν οὐκ ἐφρόντιζεν, ἐν δὲ τῷ χάρακι τοὺς
στρατιώτας συνεῖχε, καὶ καθήπτετο πικρῶς τῶν
θρασυνομένων, καὶ τοὺς προπίπτοντας ὑπὸ θυμοῦ καὶ
μάχεσθαι βουλομένους προδότας ἀπεκάλει τῆς πατρίδος. (2) οὐ
γὰρ ὑπὲρ θριάμβων τὴν φιλοτιμίαν εἶναι καὶ τροπαίων, ἀλλ'
ὅπως νέφος τοσοῦτον πολέμου καὶ σκηπτὸν ὠσάμενοι (3)
διασώσουσι τὴν Ἰταλίαν. ταῦτα μὲν ἰδίᾳ πρὸς τοὺς ἡγεμόνας
καὶ τοὺς ὁμοτίμους ἔλεγε, τοὺς δὲ στρατιώτας ὑπὲρ τοῦ
χάρακος ἱστὰς ἀνὰ μέρος καὶ θεᾶσθαι κελεύων, εἴθιζε τὴν
μορφὴν ἀνέχεσθαι τῶν πολεμίων καὶ τὴν φωνὴν ὑπομένειν,
ὅλως οὖσαν ἀλλόκοτον καὶ θηριώδη, σκευήν τε καὶ κίνησιν
αὐτῶν καταμανθάνειν, ἅμα τῷ χρόνῳ τὰ φαινόμενα δεινὰ
ποιουμένους τῇ διανοίᾳ χειροήθη διὰ τῆς ὄψεως· ἡγεῖτο γὰρ
πολλὰ μὲν ἐπιψεύδεσθαι τῶν οὐ προσόντων τὴν καινότητα τοῖς
φοβεροῖς, ἐν δὲ τῇ συνηθείᾳ καὶ τὰ τῇ φύσει δεινὰ τὴν ἔκπληξιν
ἀποβάλλειν. (5) τῶν δ' οὐ μόνον ἡ καθ' ἡμέραν ὄψις ἀφῄρει τι
τοῦ θάμβους, ἀλλὰ καὶ πρὸς τὰς ἀπειλὰς τῶν βαρβάρων καὶ
τὸν κόμπον οὐκ ἀνεκτὸν ὄντα θυμὸς αὐτοῖς παριστάμενος
ἐξεθέρμαινε καὶ διέφλεγε τὰς ψυχάς, οὐ μόνον ἀγόντων καὶ
φερόντων τὰ πέριξ ἅπαντα τῶν πολεμίων, ἀλλὰ καὶ τῷ χάρακι
ποιουμένων προσβολὰς μετὰ πολλῆς ἀσελγείας καὶ (6)
θρασύτητος· ὥστε φωνὰς καὶ διαγανακτήσεις τῶν (7)
στρατιωτῶν πρὸς τὸν Μάριον ἐκφέρεσθαι· "τίνα δὴ καταγνοὺς
ἀνανδρίαν ἡμῶν Μάριος εἴργει μάχης ὥσπερ γυναῖκας ὑπὸ
κλεισὶ καὶ θυρωροῖς; φέρε παθόντες ἀνδρῶν πάθος ἐλευθέρων
ἐρώμεθα, πότερον ἄλλους ἀναμένει μαχουμένους ὑπὲρ τῆς
ἐλευθερίας τῆς Ἰταλίας, ἡμῖν δὲ λειτουργοῖς χρήσεται διὰ
παντός, ὅταν δέῃ(ται) τάφρους ὀρύσσειν καὶ πηλὸν
ἐκκαθαίρειν καὶ ποταμούς τινας (8) παρατρέπειν; ἐπὶ ταῦτα
γὰρ ὡς ἔοικεν ἤσκει τοῖς πολλοῖς πόνοις ἡμᾶς, καὶ ταῦτα τῶν
ὑπατειῶν ἀποδειξάμενος (9) ἔργα τοῖς πολίταις ἐπάνεισιν. ἢ τὰ
Κάρβωνος αὐτὸν φοβεῖ καὶ Καιπίωνος, οὓς ἐνίκησαν οἱ
πολέμιοι, πολὺ μὲν αὐτοὺς τῆς Μαρίου δόξης καὶ ἀρετῆς
ἀποδέοντας, πολὺ δὲ χείρονα (10) στρατὸν ἄγοντας; ἀλλὰ καὶ
παθεῖν τι δρῶντας ὡς ἐκεῖνοι κάλλιον, ἢ καθῆσθαι
πορθουμένων τῶν συμμάχων θεατάς."
| [16] Ce général, qui s'inquiétait peu de leurs défis, retint ses soldats dans le camp, et fit
de sévères réprimandes à ceux qui, témoignant une fierté déplacée, et n'écoutant que
leur colère, voulaient aller combattre. Il les appelait traîtres à la patrie, et leur
représentait que l'objet de leur ambition devait être, non d'obtenir des triomphes et
d'élever des trophées, mais de dissiper cette nuée foudroyante qui les menaçait, et de
sauver l'Italie. C'était le langage qu'il tenait en particulier aux capitaines et aux
principaux officiers; pour les soldats, il les plaçait les uns après les autres sur les
remparts du camp, d'où ils pouvaient voir les ennemis, afin de les accoutumer à leur
figure, au ton rude et sauvage de leur voix, à leur armure et à leurs mouvements
extraordinaires. Il leur rendit ainsi familier, par l'habitude, ce qui d'abord leur avait
paru si effrayant; car il savait que la nouveauté fait souvent illusion et exagère les
choses que l'on craint, au lieu que l'habitude ôte même à celles qui sont redoutables
une grande partie de l'effroi qu'elles inspirent. Cette vue continuelle des ennemis
diminua peu à peu l'étonnement dont ils avaient été d'abord frappés; et bientôt leur
colère, ranimée par les menaces et les bravades insupportables de ces Barbares,
échauffa et enflamma leur courage. Car les ennemis, non contents de piller et de
ravager tous les environs, venaient les insulter, jusque dans leur camp, avec une
audace et une insolence si révoltantes, qu'indignés de leur inaction, il se livrèrent à
des plaintes qui parvinrent enfin jusqu'à Marius. « Quelle lâcheté, disaient-ils, Marius
a-t-il donc reconnue en nous, pour nous empêcher de combattre; pour nous tenir,
comme des femmes, sous des clefs et des geôliers? Osons lui faire voir que nous
sommes des hommes libres, allons lui demander s'il attend d'autres soldats qui
combattent pour la liberté, et s'il compte ne jamais nous employer que comme de
simples travailleurs, pour creuser des fossés, nettoyer des bourbiers, ou détourner
des rivières. C'est sans doute pour ces glorieux ouvrages qu'il nous a exercés à tant
de travaux; ce sont là les exploits de ses deux consulats qu'il se propose de présenter
à ses concitoyens. Craint-il le sort de Carbon et de Cépion, que les ennemis ont
vaincus? Mais ces généraux étaient bien au-dessous de Marius en réputation et en
courage, et leurs armées moins fortes que la sienne. Encore vaudrait-il mieux
essuyer quelque perte en combattant, que de rester, dans l'inaction, spectateurs des
dégâts que souffrent nos alliés. »
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