HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales, Préceptes politiques

Chapitre 11-12

  Chapitre 11-12

[11] Τὴν δ´ ἀσφαλῆ καὶ σχολαίαν εἵλοντο πολλοὶ τῶν ἐνδόξων, Ἀριστείδης, Φωκίων, Παμμένης Θηβαῖος, Λεύκολλος ἐν Ῥώμῃ, Κάτων, Ἀγησίλαος Λακεδαιμόνιος· τούτων γὰρ ἕκαστος, ὥσπερ οἱ κιττοὶ τοῖς ἰσχύουσι τῶν δένδρων περιπλεκόμενοι συνεξανίστανται, προσδραμὼν ἀνδρὶ πρεσβυτέρῳ νέος ἔτι καὶ ἄδοξος ἐνδόξῳ, κατὰ μικρὸν αἰρόμενος ὑπὸ τῆς περὶ ἐκεῖνον δυνάμεως καὶ συναυξανόμενος ἤρεισε καὶ κατερρίζωσεν ἑαυτὸν εἰς τὴν πολιτείαν. Ἀριστείδην μὲν γὰρ ηὔξησε Κλεισθένης καὶ Φωκίωνα Χαβρίας, Λεύκολλον δὲ Σύλλας, Κάτωνα δὲ Μάξιμος, Ἐπαμεινώνδας δὲ Παμμένη, καὶ Λύσανδρος Ἀγησίλαον· ἀλλ´ οὗτος μὲν ὑπὸ φιλοτιμίας ἀκαίρου καὶ ζηλοτυπίας διὰ δόξαν ὑβρίσας ἀπέρριψε ταχὺ τὸν καθηγεμόνα τῶν πράξεων· οἱ δ´ ἄλλοι καλῶς καὶ πολιτικῶς καὶ ἄχρι τέλους ἐθεράπευσαν καὶ συνεπεκόσμησαν, ὥσπερ τὰ πρὸς ἥλιον ὑφιστάμενα σώματα, τὸ λαμπρῦνον αὑτοὺς πάλιν ἀφ´ ἑαυτῶν αὔξοντες καὶ συνεκφωτίζοντες. οἱ γοῦν Σκιπίωνι βασκαίνοντες ὑποκριτὴν αὐτὸν ἀπεφαίνοντο τῶν πράξεων ποιητὴν δὲ Λαίλιον τὸν ἑταῖρον, δὲ Λαίλιος ὑπ´ οὐδενὸς ἐπήρθη τούτων ἀλλ´ ἀεὶ διετέλεσε τῇ Σκιπίωνος ἀρετῇ καὶ δόξῃ συμφιλοτιμούμενος. Ἀφράνιος δὲ Πομπηίου φίλος, εἰ καὶ πάνυ ταπεινὸς ἦν, ὅμως ἐπίδοξος ὢν ὕπατος αἱρεθήσεσθαι, Πομπηίου σπουδάζοντος ἑτέροις, ἀπέστη τῆς φιλοτιμίας εἰπὼν οὐκ ἂν οὕτω λαμπρὸν αὐτῷ γενέσθαι τὸ τυχεῖν ὑπατείας, ὡς ἀνιαρὸν ἅμα καὶ δυσχερές, εἰ Πομπηίου μὴ θέλοντος μηδὲ συμπράττοντος· ἐνιαυτὸν οὖν ἀνασχόμενος μόνον οὔτε τῆς ἀρχῆς ἀπέτυχε καὶ τὴν φιλίαν διετήρησε. τοῖς δ´ οὕτω χειραγωγουμένοις ὑφ´ ἑτέρων ἐπὶ δόξαν ἅμα συμβαίνει χαρίζεσθαί τε πολλοῖς, κἄν τι συμβαίνῃ δύσκολον, ἧττον ἀπεχθάνεσθαι· διὸ καὶ Φίλιππος Ἀλεξάνδρῳ παρῄνει κτᾶσθαι φίλους, ἕως ἔξεστι, βασιλεύοντος ἑτέρου πρὸς χάριν ὁμιλοῦντα καὶ φιλοφρονούμενον. [11] Il est une seconde manière, moins périlleuse et plus lente, suivie par plusieurs hommes d'État bien illustres, par les Aristide, les Phocion, les Pammène à Thèbes, les Lucullus et les Caton à Rome, les Agésilas à Lacédémone. Chacun de ces personnages, à l'exemple du lierre qui s'attache autour d'un arbre vigoureux et s'élance avec lui, s'était accouplé jeune à un vieillard, et obscur à un homme illustre. Élevés peu à peu à l'ombre de cette puissance, ils avaient grandi avec elle, et s'étaient affermis, s'étaient enracinés dans l'administration. Ainsi Aristide fut poussé en avant par Clisthène ; Phocion, par Chabrias ; Lucullus, par Sylla; Caton, par Fabius Maximus; Épaminondas, par Pammène; Agésilas, par Lysandre. Ce dernier, il est vrai, dont l'ambition et la jalousie étaient souverainement déplacées, fit tort à sa propre réputation en repoussant bientôt celui qui l'avait guidé dans ses actes. Tous les autres montrèrent une reconnaissance aussi honorable que conforme aux devoirs d'un homme d'État. Jusqu'à la fin ils entourèrent d'égards et de soins les auteurs de leur avancement; et, comme font les corps placés sous l'action du soleil, ils augmentaient par eux-mêmes et rendaient plus éblouissant l'éclat qui les illustrait. Ainsi les détracteurs de Scipion disaient qu'il n'était que l'acteur de ses beaux exploits et que c'était Lélius, son compagnon, qui était le poète de ce beau drame. Mais Lelius n'en tira jamais vanité, et il continua toujours à rehausser, sans avoir d'autre point d'honneur, le mérite et la gloire de Scipion. Afranius, ami de Pompée, avait, malgré l'humilité de sa naissance, tout espoir d'être nommé consul; mais comme Pompée s'intéressait à d'autres concurrents, il se désista de sa candidature, en disant "qu'il lui serait moins honorable d'être promu au consulat, qu'amer et pénible de n'avoir ni l'assentiment ni la coopération de Pompée." Aussi au bout d'une seule année de patience il ne manqua pas d'obtenir la dignité qu'il briguait, et il conserva, de plus, une précieuse amitié. Les hommes d'État que d'autres ont ainsi conduits à la gloire comme par la main, ont cet avantage, qu'en restant les amis d'un seul ils se concilient l'amitié de tous et que, s'ils subissent un échec, ils en sont moins haïs. C'est pourquoi Philippe recommandait aussi à Alexandre de se faire des amis, tant que cela lui était possible, sous le règne d'un autre, et de conquérir la popularité par des manières affables et obligeantes.
[12] Αἱρεῖσθαι δὲ δεῖ τὸν ἀρχόμενον πολιτείας ἡγεμόνα μὴ ἁπλῶς τὸν ἔνδοξον καὶ δυνατόν, ἀλλὰ καὶ τὸν δι´ ἀρετὴν τοιοῦτον. ὡς γὰρ οὐ πᾶν δένδρον ἐθέλει προσίεσθαι καὶ φέρειν περιπλεκομένην τὴν ἄμπελον ἀλλ´ ἔνια καταπνίγει καὶ διαφθείρει τὴν αὔξησιν αὐτῆς, οὕτως ἐν ταῖς πόλεσιν οἱ μὴ φιλόκαλοι, φιλότιμοι δὲ καὶ φίλαρχοι μόνον, οὐ προΐενται τοῖς νέοις πράξεων ἀφορμάς, ἀλλ´ ὥσπερ τροφὴν ἑαυτῶν τὴν δόξαν ἀφαιρουμένους πιέζουσιν ὑπὸ φθόνου καὶ καταμαραίνουσιν· ὡς Μάριος ἐν Λιβύῃ καὶ πάλιν ἐν Γαλατίᾳ πολλὰ διὰ Σύλλα κατορθώσας ἐπαύσατο χρώμενος, ἀχθεσθεὶς μὲν αὐτοῦ τῇ αὐξήσει, πρόφασιν δὲ τὴν σφραγῖδα ποιησάμενος ἀπέρριψεν· γὰρ Σύλλας, ὅτε τῷ Μαρίῳ στρατηγοῦντι συνῆν ταμιεύων ἐν Λιβύῃ, πεμφθεὶς ὑπ´ αὐτοῦ πρὸς Βῶκχον ἤγαγεν Ἰογόρθαν αἰχμάλωτον· οἷα δὲ νέος φιλότιμος, ἄρτι δόξης γεγευμένος, οὐκ ἤνεγκε μετρίως τὸ εὐτύχημα, γλυψάμενος δ´ εἰκόνα τῆς πράξεως ἐν σφραγῖδι τὸν Ἰογόρθαν αὐτῷ παραδιδόμενον ἐφόρει· καὶ τοῦτ´ ἐγκαλῶν Μάριος ἀπέρριψεν αὐτόν· δὲ πρὸς Κάτουλον καὶ Μέτελλον ἄνδρας ἀγαθοὺς καὶ Μαρίῳ διαφόρους μεταστὰς ταχὺ τὸν Μάριον ἐξήλασε καὶ κατέλυσε τῷ ἐμφυλίῳ πολέμῳ μικροῦ δεήσαντα τὴν Ῥώμην ἀνατρέψαι. Σύλλας μέντοι καὶ Πομπήιον ἐκ νέου μὲν ἦρεν ὑπεξανιστάμενος αὐτῷ καὶ τὴν κεφαλὴν ἀποκαλυπτόμενος ἐπιόντι, καὶ τοῖς ἄλλοις νέοις πράξεων ἡγεμονικῶν μεταδιδοὺς ἀφορμάς, ἐνίους δὲ καὶ παροξύνων ἄκοντας, ἐνέπλησε φιλοτιμίας καὶ ζήλου τὰ στρατεύματα· καὶ πάντων ἐκράτησε βουλόμενος εἶναι μὴ μόνος ἀλλὰ πρῶτος καὶ μέγιστος ἐν πολλοῖς καὶ μεγάλοις. τούτων οὖν ἔχεσθαι δεῖ τῶν ἀνδρῶν καὶ τούτοις ἐμφύεσθαι, μή, καθάπερ Αἰσώπου βασιλίσκος ἐπὶ τῶν ὤμων τοῦ ἀετοῦ κομισθεὶς αἰφνίδιον ἐξέπτη καὶ προέφθασεν, οὕτω τὴν ἐκείνων δόξαν ὑφαρπάζοντας αὐτοὺς ἀλλὰ παρ´ ἐκείνων ἅμα μετ´ εὐνοίας καὶ φιλίας λαμβάνοντας, ὡς οὐδ´ ἄρξαι καλῶς τοὺς μὴ πρότερον ὀρθῶς δουλεύσαντας, φησιν Πλάτων, δυναμένους. [12] Il faut choisir pour son premier guide dans la carrière politique un personnage qui ne soit pas simplement entouré de gloire et de puissance, mais qui doive cette puissance et cette gloire à la vertu. Car, de même que tout arbre ne veut pas accepter et soutenir les enlacements de la vigne, et que quelques-uns d'eux étouffent et arrêtent son développement; de même, dans les cités, ceux qui n'aiment point la vertu et qui ne recherchent que les honneurs et le commandement, ne ménagent pas aux jeunes gent les occasions de prendre part aux affaires. Il semble que la gloire soit une nourriture que ces ambitieux se réservent exclusivement. Ils étouffent les autres par jalousie et les laissent se dessécher. Ainsi Marius, après avoir tiré de beaux et bons services de Sylla en Afrique et plus tard en Gaule, cessa de l'utiliser parce qu'il s'impatientait de le voir grandir; et prenant pour prétexte certain cachet il le renversa complétement. Voici l'histoire. Lorsque dans l'expédition d'Afrique Sylla eut accompagné Marius en qualité de tribun, le général l'envoya vers Bocchus, et il ramena Jugurtha prisonnier. Comme un jeune ambitieux qui n'avait goûté que depuis peu à la gloire, Sylla ne sut pas soutenir avec modération un tel succès. Il fit graver une image qui en rappelait le souvenir : c'était un cachet représentant Jugurtha remis entre ses mains, et il portait toujours cet anneau. Marius lui en fit un crime, et l'éloigna de sa personne. Sylla se rejetant alors vers Catulus et Metellus, deux citoyens vertueux et ennemis de Marius, souleva une guerre civile ; et bientôt il eut chassé et renversé Marius, qui avait mis Rome à deux doigts de sa perte. Ce même Sylla, au contraire, ménagea l'élévation de Pompée encore jeune homme : il se levait et se découvrait la tête à son approche. Aux autres jeunes gens il fournissait aussi des occasions de se distinguer. Il allait jusqu'à en exciter quelques-uns malgré eux, et il remplit les armées de beaucoup d'émulation et d'ardeur. Il assurait ainsi sa supériorité en voulant, non pas être le seul, mais le premier et le plus grand, au milieu de beaucoup d'autres, grands eux-mêmes. Voilà les hommes qu'il faut choisir, et auxquels il faut s'attacher, au lieu d'imiter le roitelet d'Esope, qui, porté sur les ailes de l'aigle, prit soudain son vol et arriva avant lui. Loin de dérober furtivement la gloire à leurs protecteurs, les débutants doivent l'accepter d'eux avec bienveillance et dévouement, convaincus qu'il n'est possible de bien com- mander, Platon l'a dit, que quand on a su d'abord bien obéir.


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Dernière mise à jour : 3/11/2005