[11,931] τοὺς μὲν γὰρ (931a) τῶν θεῶν ὁρῶντες σαφῶς τιμῶμεν,
τῶν δ' εἰκόνας ἀγάλματα ἱδρυσάμενοι, οὓς ἡμῖν ἀγάλλουσι καίπερ
ἀψύχους ὄντας, ἐκείνους ἡγούμεθα τοὺς ἐμψύχους θεοὺς πολλὴν διὰ
ταῦτ' εὔνοιαν καὶ χάριν ἔχειν. πατὴρ οὖν ὅτῳ καὶ μήτηρ ἢ τούτων
πατέρες ἢ μητέρες ἐν οἰκίᾳ κεῖνται κειμήλιοι ἀπειρηκότες γήρᾳ,
μηδεὶς διανοηθήτω ποτὲ ἄγαλμα αὑτῷ, τοιοῦτον ἐφέστιον
ἵδρυμα ἐν οἰκίᾳ ἔχων, μᾶλλον κύριον ἔσεσθαι, ἐὰν δὴ κατὰ
τρόπον γε ὀρθῶς αὐτὸ θεραπεύῃ ὁ κεκτημένος.
(931b) (Κλεινίας) ίνα δὴ τὴν ὀρθότητα εἶναι φράζεις;
(Ἀθηναῖος) ἐγὼ ἐρῶ· καὶ γὰρ οὖν ἄξιον, ὦ φίλοι, ἀκούειν τά γε
δὴ τοιαῦτα.
(Κλεινίας) λέγε μόνον.
(Ἀθηναῖος)
Οἰδίπους, φαμέν, ἀτιμασθεὶς ἐπηύξατο τοῖς αὑτοῦ τέκνοις ἃ δὴ
καὶ πᾶς ὑμνεῖ τέλεα καὶ ἐπήκοα γενέσθαι παρὰ θεῶν,
Ἀμύντορά τε Φοίνικι τῷ ἑαυτοῦ ἐπαρᾶσθαι παιδὶ θυμωθέντα
καὶ Ἱππολύτῳ Θησέα καὶ ἑτέρους ἄλλοις μυρίους (931c) μυρίοις,
ὧν γέγονε σαφὲς ἐπηκόους εἶναι γονεῦσι πρὸς τέκνα θεούς·
ἀραῖος γὰρ γονεὺς ἐκγόνοις ὡς οὐδεὶς ἕτερος ἄλλοις,
δικαιότατα. μὴ δή τις ἀτιμαζομένῳ μὲν διαφερόντως πατρὶ
πρὸς παίδων καὶ μητρὶ θεὸν ἐπήκοον ἐν εὐχαῖς ἡγείσθω
γίγνεσθαι κατὰ φύσιν, τιμωμένῳ δὲ ἄρα καὶ περιχαρεῖ σφόδρα
γενομένῳ, καὶ διὰ τὰ τοιαῦτα εὐχαῖς λιπαρῶς εἰς ἀγαθὰ τοῖς
παισὶ παρακαλοῦντος θεούς, οὐκ ἄρα τὰ τοιαῦτα ἀκούειν ἐξ
(931d) ἴσου καὶ νέμειν ἡμῖν αὐτοὺς ἡγησόμεθα; ἀλλ' οὐκ ἄν ποτε
δίκαιοι νομῆς εἶεν ἀγαθῶν, ὃ δή φαμεν ἥκιστα θεοῖς εἶναι πρέπον.
(Κλεινίας) πολύ γε.
(Ἀθηναῖος)
οὐκοῦν διανοηθῶμεν, ὃ σμικρῷ πρότερον εἴπομεν, ὡς οὐδὲν
πρὸς θεῶν τιμιώτερον ἄγαλμ' ἂν κτησαίμεθα πατρὸς καὶ
προπάτορος παρειμένων γήρᾳ καὶ μητέρων τὴν αὐτὴν δύναμιν
ἐχουσῶν, οὓς ὅταν ἀγάλλῃ τις τιμαῖς, γέγηθεν ὁ θεός· οὐ γὰρ
ἂν ἐπήκοος ἦν αὐτῶν. θαυμαστὸν γὰρ δήπου (931e) τὸ
προγόνων ἵδρυμα ἡμῖν ἐστιν, διαφερόντως τῶν ἀψύχων· τὰ μὲν
γὰρ θεραπευόμενα ὑφ' ἡμῶν, ὅσα ἔμψυχα, συνεύχεται
ἑκάστοτε, καὶ ἀτιμαζόμενα τἀναντία, τὰ δ' οὐδέτερα, ὥστε ἂν
ὀρθῶς τις χρῆται πατρὶ καὶ προπάτορι καὶ πᾶσι τοῖς τοιούτοις,
πάντων πρὸς θεοφιλῆ μοῖραν κυριώτατα ἀγαλμάτων ἂν κεκτῇτο.
(Κλεινίας) κάλλιστ' εἶπες.
(Ἀθηναῖος)
πᾶς δὴ νοῦν ἔχων φοβεῖται καὶ τιμᾷ γονέων εὐχάς, εἰδὼς
πολλοῖς καὶ πολλάκις ἐπιτελεῖς γενομένας·
| [11,931] Il y a en effet des dieux que nous honorons, parce que
nous les voyons de nos yeux ; il y en a d'autres dont nous ne voyons que
les images et les statues que nous leur avons dressées. En les honorant,
bien qu'elles soient inanimées, nous croyons que les dieux animés en
conçoivent pour nous beaucoup de bienveillance et nous en savent gré.
C'est pourquoi, si quelqu'un a, parmi les trésors de sa maison, un père,
une mère, des grands-pères et des grand-mères épuisés par la vieillesse,
qu'il se garde bien de croire, quand il possède un tel trésor dans sa
maison et à son foyer, qu'aucune statue puisse avoir plus d'influence sur
sa destinée, s'il l'honore comme il le doit.
(CLINIAS) Quelle est donc, selon toi, la vraie manière de l'honorer ?
(L'ATHÉNIEN) Je vais te le dire ; car ce sont, mes amis, des choses qu'il
vaut la peine d'écouter.
(CLINIAS) Tu n'as qu'à parler.
(L'ATHÉNIEN) Je dis donc qu'Oedipe, se voyant méprisé par ses enfants,
lança contre eux des imprécations, qui, comme tout le monde le dit, furent
entendues et accomplies par les dieux. Amyntor aussi, emporté par la
colère, maudit son fils Phoenix ; Thésée et une infinité d'autres
maudirent aussi leurs enfants, et l'événement a fait voir que les dieux
prêtent l'oreille aux imprécations des parents contre leurs enfants. Il
n'y en a pas en effet de plus efficaces que celles d'un père, et c'est
justice. Mais, s'il est naturel de croire que Dieu entend les prières d'un
père ou d'une mère gravement méprisés par leurs enfants, ne devons-nous
pas croire aussi que, quand on les honore, et que, dans la joie vive
qu'ils en ressentent, ils adressent d'instantes prières aux dieux pour le
bonheur de leurs enfants, les dieux les écoutent également et leur
accordent leurs demandes. Autrement, les dieux ne seraient pas équitables
dans la distribution des biens, ce qui, je l'affirme, serait inconciliable
avec la divinité.
(CLINIAS) Tout à fait inconciliable.
(L'ATHÉNIEN) Mettons-nous donc dans l'esprit ce que nous disions tout à
l'heure, que nous ne saurions posséder de statue plus vénérable aux yeux
des dieux qu'un père et un grand-père accablé par la vieillesse et que des
mères clans le même état. Quand on les honore, Dieu s'en réjouit ;
autrement, il n'exaucerait pas leurs prières. Les statues vivantes de nos
ancêtres ont pour nous une merveilleuse supériorité sur les statues
inanimées ; car si nous les honorons, celles qui sont animées joignent
leurs prières aux nôtres et nous maudissent quand nous les outrageons,
celles qui sont inanimées ne font ni l'un ni l'autre. Aussi, quand on
traite comme on le doit son père, son grand-père et tous ses ancêtres, on
possède en eux les plus puissantes de toutes les statues pour avoir part
aux biens distribués par les dieux.
(CLINIAS) C'est très bien dit.
(L'ATHÉNIEN) Tout homme sensé craint donc et apprécie à leur juste prix les
prières de ses parents, sachant qu'en maintes rencontres elles ont eu leur effet.
|