[106] ἵνα μὴ μάτην (106a) διαλεγοίμην. νῦν δ´ ἐφῆκεν· νῦν γὰρ ἄν μου
ἀκούσαις.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πολύ γέ μοι, ὦ Σώκρατες, νῦν ἀτοπώτερος αὖ φαίνῃ,
ἐπειδὴ ἤρξω λέγειν, ἢ ὅτε σιγῶν εἵπου· καίτοι σφόδρα γε
ἦσθ´ ἰδεῖν καὶ τότε τοιοῦτος. εἰ μὲν οὖν ἐγὼ ταῦτα διανοοῦμαι
ἢ μή, ὡς ἔοικε, διέγνωκας, καὶ ἐὰν μὴ φῶ, οὐδέν
μοι ἔσται πλέον πρὸς τὸ πείθειν σε. εἶεν· εἰ δὲ δὴ ὅτι
μάλιστα ταῦτα διανενόημαι, πῶς διὰ σοῦ μοι ἔσται καὶ ἄνευ
σοῦ οὐκ ἂν γένοιτο; ἔχεις λέγειν;
(106b) (ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἆρ´ ἐρωτᾷς εἴ τιν´ ἔχω εἰπεῖν λόγον μακρόν, οἵους
δὴ ἀκούειν εἴθισαι; οὐ γάρ ἐστι τοιοῦτον τὸ ἐμόν· ἀλλ´
ἐνδείξασθαι μέν σοι, ὡς ἐγᾦμαι, οἷός τ´ ἂν εἴην ὅτι ταῦτα
οὕτως ἔχει, ἐὰν ἓν μόνον μοι ἐθελήσῃς βραχὺ ὑπηρετῆσαι.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀλλ´ εἴ γε δὴ μὴ χαλεπόν τι λέγεις τὸ ὑπηρέτημα, ἐθέλω.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἦ χαλεπὸν δοκεῖ τὸ ἀποκρίνασθαι τὰ ἐρωτώμενα;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐ χαλεπόν.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἀποκρίνου δή.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἐρώτα.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκοῦν ὡς διανοουμένου σου ταῦτα ἐρωτῶ, ἅ φημί σε
(106c) διανοεῖσθαι;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἔστω, εἰ βούλει, οὕτως, ἵνα καὶ εἰδῶ ὅτι καὶ ἐρεῖς.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Φέρε δή· διανοῇ γάρ, ὡς ἐγώ φημι, παριέναι συμβουλεύσων
Ἀθηναίοις ἐντὸς οὐ πολλοῦ χρόνου· εἰ οὖν μέλλοντός
σου ἰέναι ἐπὶ τὸ βῆμα λαβόμενος ἐροίμην· "Ὦ Ἀλκιβιάδη,
ἐπειδὴ περὶ τίνος Ἀθηναῖοι διανοοῦνται βουλεύεσθαι, ἀνίστασαι
συμβουλεύσων; ἆρ´ ἐπειδὴ περὶ ὧν σὺ ἐπίστασαι
βέλτιον ἢ οὗτοι;" τί ἂν ἀποκρίναιο;
(106d) (ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Εἴποιμ´ ἂν δήπου, περὶ ὧν οἶδα βέλτιον ἢ οὗτοι.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Περὶ ὧν ἄρ´ εἰδὼς τυγχάνεις, ἀγαθὸς σύμβουλος εἶ.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πῶς γὰρ οὔ;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκοῦν ταῦτα μόνον οἶσθα, ἃ παρ´ ἄλλων ἔμαθες ἢ
αὐτὸς ἐξηῦρες;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ποῖα γὰρ ἄλλα;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἔστιν οὖν ὅπως ἄν ποτε ἔμαθές τι ἢ ἐξηῦρες μήτε
μανθάνειν ἐθέλων μήτ´ αὐτὸς ζητεῖν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐκ ἔστιν.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τί δέ; ἠθέλησας ἂν ζητῆσαι ἢ μαθεῖν ἃ ἐπίστασθαι ᾤου;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐ δῆτα.
(106e) (ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἃ ἄρα νῦν τυγχάνεις ἐπιστάμενος, ἦν χρόνος ὅτε οὐχ
ἡγοῦ εἰδέναι;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀνάγκη.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἀλλὰ μὴν ἅ γε μεμάθηκας σχεδόν τι καὶ ἐγὼ οἶδα·
εἰ δέ τι ἐμὲ λέληθεν, εἰπέ. ἔμαθες γὰρ δὴ σύ γε κατὰ
μνήμην τὴν ἐμὴν γράμματα καὶ κιθαρίζειν καὶ παλαίειν· οὐ
γὰρ δὴ αὐλεῖν γε ἤθελες μαθεῖν. ταῦτ´ ἐστὶν ἃ σὺ ἐπίστασαι,
εἰ μή πού τι μανθάνων ἐμὲ λέληθας· οἶμαι δέ γε, οὔτε
νύκτωρ οὔτε μεθ´ ἡμέραν ἐξιὼν ἔνδοθεν.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀλλ´ οὐ πεφοίτηκα εἰς ἄλλων ἢ τούτων.
| [106] pour que mes paroles ne fussent pas perdues. Il m’y autorise à présent ;
car à présent tu peux m’entendre.
(ALCIBIADE)
CHAPITRE III. — Je t’avoue, Socrate, que je te trouve beaucoup plus étrange encore,
à présent que tu t’es mis à parler, que lorsque tu me suivais sans rien dire, et
cependant, même alors, tu le paraissais terriblement. Maintenant, que je
nourrisse ou non les projets que tu dis, ton siège est fait là-dessus, et
j’aurais beau le nier, je n’en serais pas plus avancé pour te persuader. Voilà
qui est entendu. Mais si j’admets que j’ai réellement ces desseins, comment
seront-ils réalisés grâce à toi, irréalisables sans toi ? Peux-tu l’expliquer ?
(SOCRATE)
Me demandes-tu si je puis le faire par un long discours, comme ceux que tu es
habitué à entendre ? Non, ce n’est pas ma manière ; mais je suis en état, je
crois, de te démontrer qu’il en est ainsi, pourvu seulement que tu consentes à
m’y aider un peu.
(ALCIBIADE)
J’y consens, si l’aide n’est pas trop difficile à donner.
(SOCRATE)
Est-il difficile, selon toi, de répondre à ce qu’on te demande ?
(ALCIBIADE)
Non, ce n’est pas difficile.
(SOCRATE)
Réponds-moi donc.
(ALCIBIADE)
Interroge-moi.
(SOCRATE)
Je vais donc te poser des questions comme si tu avais les desseins que je t’attribue.
(ALCIBIADE)
Pose-les ainsi, si tu le veux, je saurai enfin ce que tu as à dire.
(SOCRATE)
Eh bien, allons, tu te proposes donc, comme je l’affirme, de te présenter devant
les Athéniens sous peu de jours pour leur donner des conseils. Si donc, au
moment de monter à la tribune, je te prenais à part et te demandais :
« Alcibiade, sur quoi les Athéniens se proposent-ils de délibérer, que tu te lèves
pour leur donner des conseils ? N’est-ce pas sur un sujet que tu connais mieux
qu’eux ? », que répondrais-tu ?
(ALCIBIADE)
Je répondrais sans doute que c’est sur un sujet que je connais mieux qu’eux.
(SOCRATE)
Alors c’est à propos de choses que tu connais réellement que tu peux donner de
bons conseils ?
(ALCIBIADE)
Sans doute.
(SOCRATE)
Or les seules choses que tu connaisses, ne sont-ce pas celles que tu as apprises
d’autrui ou que tu as trouvées de toi-même ?
(ALCIBIADE)
Quelles autres pourrais-je connaître ?
(SOCRATE)
Maintenant, se peut-il que tu aies jamais appris ou découvert quelque chose sans
vouloir l’apprendre, ni le chercher toi-même ?
(ALCIBIADE)
C’est impossible.
(SOCRATE)
Mais dis-moi : aurais-tu consenti à chercher ou à apprendre ce que tu pensais
connaître ?
(ALCIBIADE)
Non, certes.
(SOCRATE)
Ainsi ce que tu sais présentement, il a été un temps où tu ne croyais pas le
connaître ?
(ALCIBIADE)
Nécessairement.
(SOCRATE)
Eh bien, les choses que tu as apprises, je pense pouvoir te les dire ; si j’en
oublie quelqu’une, nomme-la-moi. Tu as donc appris, si je m’en souviens bien, à
lire et à écrire, à toucher de la cithare et à lutter ; car pour la flûte, tu
n’as pas voulu l’apprendre. Voilà ce que tu connais, à moins que tu n’aies
appris quelque chose à mon insu, et, j’imagine, sans sortir de chez toi ni de
nuit ni de jour.
(ALCIBIADE)
Non, je n’ai pas pris d’autres leçons que celles que tu as dites.
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