[15,5] Εἰ δὲ θελήσαι λογοποιὸς Φρὺξ μῦθον πλάττειν,
ὅτι ἄρα δυσχεράνας ὁ ποῦς τῷ ἄλλῳ σώματι καὶ ἀπαγορεύσας
πρὸς τὸν κάματον, φέρων καὶ αἰωρῶν μετέωρον
τοσοῦτον ἄχθος, σχολὴν ἄγειν καὶ ἡσυχίαν
ἐπανείλετο· ἢ αὖ τῷ γομφίῳ, ὡς ἀλοῦντι καὶ ἐργαζομένῳ
τροφὴν τοσούτῳ ὄχλῳ ἀργῶν· κᾆτα ἔροιντο,
ἀπειπαμένων τὸ ἔργον τὸ αὑτῶν σκοπεῖν, εἰ ταῦτα
ἅμα γίγνοιτο· ἄλλό τι ἢ φθαρήσεται ὁ ἄνθρωπος ἐν
τῷ μύθῳ; Τοιοῦτο ἀμέλει ἐστὶν τὸ περὶ τὴν κοινωνίαν
τὴν πολιτικὴν γιγνόμενον· εἰ γὰρ ἐθελήσαι ἕκαστος
ὄκνῳ τοῦ πωλεῖν ἀφέμενος τοῦ παράγειν ἐπαναχωρεῖν
ἐκ τῆς κοινωνίας πρὸς τὴν αὑτοῦ σχολήν, τί κωλύει
διαλυθῆναι τὸ πᾶν καὶ φθαρῆναι; Ἢ τὰ μὲν ἰσχυρὰ
τῶν οἰκοδομημάτων τῇ πρὸς ἄλληλα ξυννεύσει τῶν
ἐν αὐτοῖς λίθων ξυνδέδεται καὶ ἕστηκεν καὶ μένει, εἰ
δὲ ἐξέλοις ὅ,τι οὖν τῆς ἁρμονίας, διαλύσεις τὸ πᾶν·
τὸν δὲ ξύμπαντα βίον οὐχ ἡγεῖ τὴν σωτηρίαν ἔχειν
ἐκ τῆς πρὸς ἑαυτὰ ξυννεύσεως τῶν ἐν αὐτῷ μερῶν;
Καὶ τῶν μὲν ἄλλων τοῦ πράττειν ἐξισταμένων οὐδεὶς
λόγος· οὐδὲ γὰρ ὁ Θερσίτης λιποτακτῶν ἐλύπησεν ἂν
τὸ Ἑλληνικόν· ὁ δὲ Ἀχιλλεὺς ὁ μηνίσας καὶ ἐπὶ σκηνῆς
ἀναπαυόμενος, καὶ δοὺς αὑτὸν σχολῇ καὶ κιθάρᾳ
καὶ τῇ ᾠδῇ, ἀνέπλησεν τὸ στρατόπεδον πολλῶν κακῶν·
οὗ γὰρ παρόντος ὠφελεῖσθαι ὑπάρχει, ἀπόντος τούτου
βλάπτεσθαι ἀνάγκη. Καὶ τὸ νῦν ὁ θεωρίαν καὶ ἀλήθειαν
καὶ σχολὴν ἀσπαζόμενος τίς ἂν εἴη ἄλλος, ἢ ὁ
φρόνιμος καὶ νοῦν ἔχων; Ἀλλὰ τί οὖν· ὁ μὴ κυβερνητικώτατος
ἐξίσταται τῆς αὑτοῦ ἕδρας τοῖς ἀτεχνοτάτοις,
καὶ ὁ στρατηγὸς ἐξίσταται τῆς ἀρχῆς τοῖς ἀναρχοτάτοις;
Τί δὲ καὶ τὴν ἀρχὴν σεμνὸν τὸ τἀληθῆ
εἰδέναι, καὶ τεταμιεῦσθαι ἐν τῇ ψυχῇ θησαυρὸν ἄγονον
καὶ ἀργὸν καὶ ἄκαρπον, μηδὲν αὐτῆς ὀνίνασθαι
μέλλοντα μηδὲ ὠφελήσειν ἑτέρους; πλὴν εἰ μὴ καὶ
ἀκοὴ καλόν, ἵνα ἔχωμεν, οὐχ ἵνα ἁρμονίας καὶ φωνῆς
συνῶμεν· καὶ ὄψις καλόν, ἵνα ἔχωμεν, οὐχ ἵνα ἴδωμεν
τὸ τοῦ ἡλίου φῶς· καὶ ὁ πλοῦτος καλόν, κἂν ἔχει τὶς
αὐτὸν κατορύξας ἐν γῇ, θησαυρὸν ἀργόν.
| [15,5] V. Si, à l’exemple de ce Phrygien, qui composait des apologues, nous
supposons que les pieds sont mécontents de tout le reste du corps,
qu’excédés de fatigue, las de soutenir debout un si grand poids, ils
veulent enfin ne rien faire et se reposer; que la mâchoire se lasse, à son
tour, de moudre et de triturer le manger nécessaire à une si grosse masse,
et que chacune de ces parties, refusant son ministère, demande de se
livrer à la contemplation; si tout cela arrive, l’individu, contre qui se
réalisera cette fabuleuse conjuration, ne doit-il pas mourir, de toute
nécessité? Il en est, sans doute, ainsi du corps politique. Si chacun de
ses membres, dégoûté du travail, cessant ses fonctions, voulait se
séquestrer de la société, pour se livrer à l’indolence et au repos, n’en
résulterait-il pas la ruine, la dissolution du corps social? Quoi! la
force d’un édifice consiste dans la liaison et la correspondance
réciproque des pierres qui le composent. C’est ce qui le soutient et en
fait la solidité, de manière qu’ôter une pierre quelconque de cet ensemble,
ce serait le faire crouler; et nous ne penserions pas que la société
est un tout, dont la conservation tient au concours de toutes ses parties!
Que certains individus se vouent à l’inertie, à la bonne heure. Que
Thersite quitte son poste, et décampe, l’armée des Grecs ne s’en
ressentira pas. Mais qu’Achille, bouillant de colère, se retire dans sa
tente, qu’il s’abandonne à l’inaction, qu’il passe son temps à chanter ou
à jouer de la lyre, ce sera, pour ses compagnons d’armes, une source de
calamités. Lorsqu’un individu doit faire du bien par sa présence, il faut,
de toute nécessité, que son absence soit funeste. Dira-t-on qu’il n’y a
qu’un homme de sens, qu’un homme prudent, qui embrasse la contemplation,
l’amour de la vérité, du repos? Mais quoi donc! Le pilote consommé
abandonne-t-il le timon à celui qui n’a pas les premiers éléments du
pilotage? Le Général habile remet-il le commandement à celui qui n’en a
nulle notion? Et quel mérite y a-t-il à connaître la vérité, à la
renfermer dans le sein de son âme, comme un bien oisif, stérile, et
sans fruit, qui ne sert ni à celui qui le possède, ni à autrui? A
moins que l’ouïe ne soit une belle chose, afin seulement que nous la
possédions, et non afin qu’elle soit pour nous le véhicule de la voix et
de l’harmonie: à moins que la vue ne soit une belle chose, afin seulement
que nous la possédions, et non afin qu’elle nous serve à voir la lumière
du soleil; à moins que la fortune ne soit une belle chose, afin seulement
que nous la possédions, comme un trésor inutile et caché sous terre.
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