[20] Ὧν χρὴ μεμνημένους μὴ προπετῶς πιστεύειν τοῖς τῶν κατηγόρων λόγοις,
μηδὲ μετὰ θορύβου καὶ χαλεπότητος ἀκροᾶσθαι τῶν ἀπολογουμένων. Καὶ γὰρ αἰσχρὸν
ἐπὶ μὲν τῶν ἄλλων πραγμάτων ἐλεημονεστάτους ὁμολογεῖσθαι καὶ πραοτάτους
ἁπάντων εἶναι τῶν Ἑλλήνων, ἐπὶ δὲ τοῖς ἀγῶσι τοῖς ἐνθάδε γιγνομένοις τἀναντία τῇ
δόξῃ ταύτῃ φαίνεσθαι πράττοντας· (21) καὶ παρ' ἑτέροις μὲν ἐπειδὰν περὶ ψυχῆς
ἀνθρώπου δικάζωσι, μέρος τι τῶν ψήφων ὑποβάλλεσθαι τοῖς φεύγουσι, παρ' ὑμῖν δὲ
μηδὲ τῶν ἴσων τυγχάνειν τοὺς κινδυνεύοντας τοῖς συκοφαντοῦσιν, ἀλλ' ὀμνύναι μὲν
καθ' ἕκαστον τὸν ἐνιαυτὸν ἦ μὴν ὁμοίως ἀκροάσεσθαι τῶν κατηγορούντων καὶ τῶν
ἀπολογουμένων, (22) τοσοῦτον δὲ τὸ μεταξὺ ποιεῖν, ὥστε τῶν μὲν αἰτιωμένων ὅ τι ἂν
λέγωσιν ἀποδέχεσθαι, τῶν δὲ τούτους ἐξελέγχειν πειρωμένων ἐνίοτε μηδὲ τὴν φωνὴν
ἀκούοντας ἀνέχεσθαι, καὶ νομίζειν μὲν ἀοικήτους εἶναι ταύτας τῶν πόλεων ἐν αἷς ἄκριτοί
τινες ἀπόλλυνται τῶν πολιτῶν, ἀγνοεῖν δ' ὅτι τοῦτο ποιοῦσιν οἱ μὴ κοινὴν τὴν εὔνοιαν
τοῖς ἀγωνιζομένοις παρέχοντες. (23) Ὃ δὲ πάντων δεινότατον, ὅταν τις αὐτὸς μὲν
κινδυνεύων κατηγορῇ τῶν διαβαλλόντων, ἑτέρῳ δὲ δικάζων μὴ τὴν αὐτὴν ἔχῃ γνώμην
περὶ αὐτῶν. Καίτοι χρὴ τοὺς νοῦν ἔχοντας τοιούτους εἶναι κριτὰς τοῖς ἄλλοις, οἵων περ
ἂν αὐτοὶ τυγχάνειν ἀξιώσαιεν, λογιζομένους ὅτι διὰ τοὺς συκοφαντεῖν τολμῶντας
ἄδηλον ὅστις εἰς κίνδυνον καταστὰς ἀναγκασθήσεται λέγειν ἅπερ ἐγὼ νῦν πρὸς τοὺς
μέλλοντας περὶ αὐτοῦ τὴν ψῆφον διοίσειν.
(24) Οὐ γὰρ δὴ τῷ γε κοσμίως ζῆν ἄξιον πιστεύειν ὡς ἀδεῶς ἐξέσται τὴν πόλιν
οἰκεῖν· οἱ γὰρ προῃρημένοι τῶν μὲν ἰδίων ἀμελεῖν τοῖς δ' ἀλλοτρίοις ἐπιβουλεύειν οὐ τῶν
μὲν σωφρόνως πολιτευομένων ἀπέχονται, τοὺς δὲ κακόν τι δρῶντας εἰς ὑμᾶς
εἰσάγουσιν, ἀλλ' ἐν τοῖς μηδὲν ἀδικοῦσιν ἐπιδειξάμενοι τὰς αὑτῶν δυνάμεις παρὰ τῶν
φανερῶς ἐξημαρτηκότων πλέον λαμβάνουσιν ἀργύριον.
(25) Ἅπερ Λυσίμαχος διανοηθεὶς εἰς τουτονὶ τὸν κίνδυνόν με κατέστησεν,
ἡγούμενος τὸν ἀγῶνα τὸν πρὸς ἐμὲ παρ' ἑτέρων αὑτῷ χρηματισμὸν ποιήσειν, καὶ
προσδοκῶν, ἢν ἐμοῦ περιγένηται τοῖς λόγοις, ὅν φησι διδάσκαλον εἶναι τῶν ἄλλων,
ἀνυπόστατον τὴν αὑτοῦ δύναμιν ἅπασιν εἶναι δόξειν. (26) Ἐλπίζει δὲ ῥᾳδίως τοῦτο
ποιήσειν· ὁρᾷ γὰρ ὑμᾶς μὲν λίαν ταχέως ἀποδεχομένους τὰς αἰτίας καὶ τὰς διαβολάς,
ἐμὲ δ' ὑπὲρ αὐτῶν οὐ δυνησόμενον ἀξίως τῆς δόξης ἀπολογήσασθαι καὶ διὰ τὸ γῆρας
καὶ διὰ τὴν ἀπειρίαν τῶν τοιούτων ἀγώνων. (27) Οὕτω γὰρ βεβίωκα τὸν παρελθόντα
χρόνον, ὥστε μηδένα μοι πώποτε μήτ' ἐν ὀλιγαρχία μήτ' ἐν δημοκρατία μήθ' ὕβριν μήτ'
ἀδικίαν ἐγκαλέσαι, μηδ' εἶναι μήτε διαιτητὴν μήτε δικαστὴν ὅστις περὶ τῶν ἐμοὶ
πεπραγμένων φανήσεται κριτὴς γεγενημένος· ἠπιστάμην γὰρ αὐτὸς μὲν εἰς τοὺς ἄλλους
μηδὲν ἐξαμαρτάνειν, ἀδικούμενος δὲ μὴ μετὰ δικαστηρίου ποιεῖσθαι τὰς τιμωρίας, ἀλλ'
ἐν τοῖς φίλοις τοῖς ἐκείνων διαλύεσθαι περὶ τῶν ἀμφισβητουμένων. Ὧν οὐδέν μοι πλέον
γέγονεν, (28) ἀλλ' ἀνεγκλητεὶ μέχρι ταυτησὶ τῆς ἡλικίας βεβιωκὼς εἰς τὸν αὐτὸν
καθέστηκα κίνδυνον, εἰς ὅνπερ ἂν εἰ πάντας ἐτύγχανον ἠδικηκώς. Οὐ μὴν παντάπασιν
ἀθυμῶ διὰ τὸ μέγεθος τοῦ τιμήματος, ἀλλ' ἐάν περ ἐθελήσητε μετ' εὐνοίας
ἀκροάσασθαι, πολλὰς ἐλπίδας ἔχω τοὺς μὲν διεψευσμένους τῶν ἐμῶν ἐπιτηδευμάτων
καὶ πεπεισμένους ὑπὸ τῶν βουλομένων βλασφημεῖν ταχέως μεταπεισθήσεσθαι περὶ
αὐτῶν, τοὺς δὲ τοιοῦτον εἶναί με νομίζοντας οἷός περ εἰμί, βεβαιότερον ἔτι ταύτην ἕξειν
τὴν διάνοιαν. (29) Ἵνα δὲ μὴ λίαν ἐνοχλῶ πολλὰ πρὸ τοῦ πράγματος λέγων, ἀφέμενος
τούτων, περὶ ὧν οἴσετε τὴν ψῆφον, ἤδη πειράσομαι διδάσκειν ὑμᾶς.
Καί μοι ἀνάγνωθι τὴν γραφήν. Γραφή.
| [20] 10. Il faut donc, pleins du souvenir de ces vérités, ne pas donner,
témérairement votre confiance aux paroles dès accusateurs, et ne pas écouter en
tumulte et avec irritation ceux qui sont obligés de se justifier. Ce serait une chose
honteuse, si, lorsque, dans toutes les autres circonstances, vous êtes reconnus pour
les plus compatissants des Grecs et les plus accessibles à la pitié, on vous voyait,
dans les luttes qui ont lieu parmi vous, faire des actes contraires à la renommée dont
vous jouissez ; (21) si, lorsque d'autres peuples accordent aux accusés un certain
nombre de suffrages, dans les jugements où la vie est engagée, ceux qui
comparaissent devant vous n'obtenaient pas même les avantages que vous accordez
aux calomniateurs ; si, lorsque vous faites, chaque année, le serment d'écouter avec
une égale impartialité les accusateurs et les accusés, (22) vous mettiez entre eux une
telle distance, qu'on vous vît accueillir favorablement les discours des accusateurs, et
quelquefois ne pas même supporter la voix de ceux qui essayent de les confondre;
enfin, si, lorsque vous regardez comme indignes d'être habitées les villes où quelques
citoyens ont été mis à mort sans jugement, vous ignoriez que ceux-là font une action
semblable qui n'accordent pas une bienveillance égale aux hommes qui soutiennent
des intérêts opposés. (23) Mais voici quelque chose de plus odieux encore : celui qui,
appelé devant la justice, s'élève contre les délateurs, ne conserve plus le même
sentiment lorsqu'il est chargé de la rendre. Les hommes raisonnables devraient être
cependant pour les autres des juges tels qu'ils désireraient en rencontrer pour
eux-mêmes ; et penser que, par suite de l'audace des sycophantes, il est impossible de
prévoir quel est celui qui, exposé aux mêmes ! chances que moi, ne sera pas obligé
de dire ce que je dis maintenant à ceux qui doivent prononcer sur mon sort.
(24) 11. Et en effet, vivre d'une vie sans reproche n'est pas un motif suffisant pour
espérer habiter sans crainte notre ville : les hommes qui, par système, négligent le
soin de leur propre fortune et cherchent à envahir le bien des autres n'ont pas pour
habitude de respecter ceux qui remplissent avec sagesse les devoirs de la vie civile, et
d'amener devant vous ceux qui ont commis des crimes ; mais de montrer ce qu'ils
peuvent contre les innocents, afin de pouvoir arracher des sommes plus considérables
de ceux qui évidemment sont coupables.
(25) 12. Telle a été la pensée de Lysimaque lorsqu'il m'a créé ce danger. Il a
regardé la lutte qu'il engageait contre moi comme un moyen de se faire donner de
l'argent par d'autres citoyens, persuadé, que si la force de son éloquence l'emportait
sur moi, qu'il dit être le précepteur des autres, la puissance de ses discours paraîtrait
irrésistible à tous. (26) Il compte d'ailleurs sur un succès facile, en voyant, d'une part,
la promptitude, avec laquelle vous accueillez les accusations et les calomnies, et, de
l'autre, l'impossibilité où je serai de lui opposer sur ce terrain une défense digne de ma
réputation, à cause de ma vieillesse et à cause de mon inexpérience dans les luttes
de cette nature. (27) En effet, pendant tout le cours de ma vie passée, soit durant
l'oligarchie, soit sous la démocratie, j'ai réglé mon existence de telle manière que
personne ne m'a jamais accusé de violence ou d'injustice, et qu'on ne trouvera pas un
juge, pas un arbitre légal, appelé à prononcer sur mes actions. Je savais m'abstenir de
toute injure envers mes concitoyens, et moi-même, lorsque j'étais victime d'une
injustice, je n'en poursuivais pas la vengeance devant un tribunal, mais je m'adressais
aux amis de ceux qui m'avaient offensé, pour terminer nos différends. Je n'ai recueilli
néanmoins aucun avantage de ma conduite : (28) et, après avoir vécu jusqu'à l'âge
avancé où je suis parvenu, sans avoir été l'objet d'une seule attaque, je me vois
aujourd'hui exposé au même danger que si j'eusse offensé tout le monde. Quoi qu'il en
soit, je ne me sens pas découragé par la valeur considérable de l'amende, et si vous
voulez m'écouter avec bienveillance, j'ai l'espoir le plus complet que ceux, qui ont été
trompés sur la manière dont je vis, et qui se sont laissé persuader par mes
calomniateurs, changeront bientôt de pensée à leur égard, en même temps que
l'opinion de ceux qui me voient tel que je suis, se trouvera confirmée. (29) Mais afin de
ne pas vous fatiguer outre mesure par des considérations préliminaires, je les
abandonne désormais pour essayer de vous montrer la vérité relativement au débat
sur lequel vous donnerez votre suffrage. Lisez-moi l'accusation. ACCUSATION.
|