[9] Οὕτως καὶ ὁ μέγας ποτὲ Ἀβραὰμ προθύμως τῷ θεῷ διὰ
θυσίας προσῆγε τὸν ἠγαπημένον υἱόν, εἰδὼς ὅτι πρὸς τὸ
κρεῖττόν τε καὶ θειότερον γενήσεται τῷ παιδὶ ἡ μετάστασις.
ὅσοι δὲ τῆς ἱστορίας ἐμπείρως ἔχετε, πάντως οὐκ ἀγνοεῖτε
(p. 468) τὰ περὶ αὐτοῦ διηγήματα. τί γάρ φησιν ἡ γραφή; ὅτι νέῳ
μὲν ὄντι τῷ Ἀβραὰμ θεόθεν περὶ τοῦ παιδὸς ἐπαγγελία γίνεται,
παρεληλυθότι δὲ τὴν ἀκμὴν καὶ ἤδη καταμαρανθέντι ὑπὸ
τοῦ χρόνου, ὅτε παύεται ἡ φύσις ἑαυτὴν αὔξουσα οὐκέτι τοῦ
γήρως ταῖς ὁρμαῖς ὑπακούοντος, τότε παρὰ τὰς ἀνθρωπίνας
ἐλπίδας εἰς πέρας ἡ ὑπόσχεσις ἄγεται, καὶ τίκτεται παῖς ὁ
Ἰσαάκ· καὶ συμμέτρου διαγεγονότος χρόνου, οἷόν τι ἔρνος
ἀναδραμὼν εἰς κάλλος καὶ μέγεθος, ἡδὺς ἦν τοῖς ὀφθαλμοῖς
τῶν γονέων τῷ τῆς νεότητος κάλλει λαμπόμενος. τότε
προσάγεται τῷ Ἀβραὰμ ἡ τῆς ψυχῆς δοκιμασία καὶ βάσανος,
εἰ ἀκριβῶς ἐν τῇ τῶν ὄντων φύσει διαγιγνώσκει τὸ κάλλιον,
εἰ μὴ πρὸς τὴν παροῦσαν βλέπει ζωήν, καί φησι πρὸς αὐτὸν
ὁ θεός· ἀνένεγκε τὸν υἱόν σου διὰ θυσίας εἰς ὁλοκάρπωσιν.
οἴδατε πάντως ὅσοι πατέρες ἐστὲ καὶ παῖδας ἔχετε καὶ τὴν
πρὸς τὰ τέκνα στοργὴν παρὰ τῆς φύσεως ἐδιδάχθητε, ὅπως
εἰκὸς διατεθῆναι τὸν Ἀβραάμ, εἰ πρὸς τὴν παροῦσαν μόνην
ἀφεώρα ζωήν, εἰ δοῦλος τῆς φύσεως ἦν, εἰ ἐν τῷ παρόντι
βίῳ τὸ γλυκὺ τῆς ζωῆς ἐλογίζετο. τί δὲ περὶ ἐκείνου φημί,
καταλιπὼν τὴν γυναῖκα, τὸ ἀσθενέστερον μέρος τῆς ἀνθρωπίνης
φύσεως; εἰ μὴ πεπαίδευτο κἀκείνη ὑπὸ τοῦ ἀνδρὸς
τὰ θειότερα, εἰ μὴ ἠπίστατο τὴν κεκρυμμένην ζωὴν εἶναι τῆς
φαινομένης ἀμείνονα, οὐκ ἂν ἐπέτρεπε τῷ ἀνδρὶ τοιαῦτα κατὰ
τοῦ παιδὸς ἐνεργῆσαι· πάντως γὰρ τοῖς μητρικοῖς συγκινηθεῖσα
σπλάγχνοις περιεχύθη τῷ τέκνῳ καὶ ταῖς ὠλέναις αὐτὸν
ἐμπλεξαμένη πρὸ αὐτοῦ τὴν καιρίαν ἐδέχετο. ἆρ´ οὐκ εἶπεν
ἂν πρὸς τὸν Ἀβραὰμ ταῦτα τὰ ῥήματα; φεῖσαι τοῦ παιδός,
ἄνερ, μὴ πονηρὸν γένῃ τοῦ βίου διήγημα, μὴ μῦθος τῷ μετὰ
(p. 469) ταῦτα χρόνῳ γενώμεθα, μὴ φθονήσῃς τῷ υἱῷ τῆς ζωῆς, μὴ
στερήσῃς αὐτὸν τῆς γλυκείας ἀκτῖνος· θάλαμος τέκνοις οὐ
τάφος παρὰ πατέρων σπουδάζεται, στέφανος γαμικὸς οὐ
ξίφος φονικόν, γαμήλιος λαμπὰς οὐ πῦρ ἐπιτάφιον· ταῦτα
λῃσταὶ καὶ πολέμιοι, οὐ πατέρων χεῖρες ἐπὶ τῶν τέκνων
ἐργάζονται· εἰ δὲ χρὴ πάντως γενέσθαι τὸ κακόν, μὴ ἴδοι
Σάρρας ὀφθαλμὸς νεκρούμενον τὸν Ἰσαάκ· ἰδοὺ δι´ ἀμφοτέρων
ὦσον τὸ ξίφος, ἀπ´ ἐμοῦ τῆς δειλαίας ἀρξάμενος· μία
τοῖς δυσὶν ἀρκέσει πληγή, κοινὸν ἐπ´ ἀμφοτέρων γενέσθω τὸ
χῶμα, μία στήλη τὴν κοινὴν συμφορὰν τραγῳδείτω.
| [9] Aussi lorsque Abraham, ce vénérable patriarche, quitte sa maison pour offrir, sans murmure
et sans plainte, son fils en sacrifice, pensez-vous qu’il ait des doutes sur le sort glorieux qui
attend, après la mort, l’objet de son affection ? — Ceux qui ont quelques connaissances
d’histoire n’ignorent pas, je pense, ce que l’Écriture raconte ; que dit-elle en effet ? Le voici,
mes frères : Abraham jeune encore avait reçu de Dieu la promesse d’avoir un fils ; il était
cependant parvenu à cet âge où la force et la vigueur nous abandonnent, à cet âge où, accablée
et affaiblie par les années, la nature est impuissante à se reproduire, car la vieillesse est sourde
à la voix des passions, quand envers et contre l’attente des hommes, la promesse reçoit son
effet ; Isaac vient au monde. Quelques années s’étaient à peine écoulées, et semblable à une
plante, il avait grandi en beauté et en sagesse ; mais tandis que le bel éclat de son âge faisait
les délices des auteurs de ses jours, le coeur du vénérable père fut mis à l’essai et soumis à la
plus rude épreuve. Le Seigneur voulut savoir s’il connaissait le seul bien désirable, et s’il
n’était pas trop attaché à cette vie mortelle : “Immole ton fils, lui dit-il, et offre-le-moi en
holocauste”. Vous qui êtes père, vous qui avez des enfants et qui puisez dans la nature la
tendresse que vous leur portez, vous seuls pouvez sentir combien, dans une pareille
circonstance, la douleur et l’affliction doivent être naturelles à l’homme, et combien le coeur
d’Abraham aurait dû être saisi et pénétré, s’il n’avait considéré que la vie de ce monde, s’il
avait été l’esclave de la nature, si enfin il avait fait consister le bonheur dans les jours que l’on
passe sur la terre ? Mais que raconté-je du saint patriarche ? et pourquoi ne pas m’arrêter un
instant pour considérer la modération de sa femme, sexe faible par nature ! si son époux ne lui
eût pas révélé les secrets de Dieu, si elle n’avait été convaincue que les biens de ce monde ne
sont rien en comparaison des délices de l’autre, pensez-vous qu’elle aurait consenti à voir un
fils sacrifié par son père ? Non, mes frères, la tendresse maternelle aurait fait entendre sa voix,
vous l’eussiez vue rester à côté de son fils, le serrer contre son sein, et dans cette position,
recevoir la première le coup de la mort, ou bien, s’adressant à Abraham ; cher époux, se
serait-elle écriée, épargnez mon enfant ! que votre nom ne passe pas ainsi taché à la postérité !
Arrêtez votre bras ! n’encourons pas la malédiction des hommes ! Ne tranchez pas les jours de
notre fils, laissez-le jouir en paix de la douceur de cette lumière, et comme un bon père,
préparez et ornez son lit nuptial et non son tombeau ! Tressez une couronne pour le jour de
ses noces et déposez cette épée meurtrière ! Songez à son mariage et non aux apprêts du
bûcher funèbre, et si un holocauste doit être offert et un sacrifice fait à Dieu, laissez-en le soin
aux assassins et aux barbares. Mais épargnez au coeur de Sara un spectacle si terrible, et pour
que mes yeux n’en soient pas les témoins, passez votre épée au travers de mon corps ; que je
sois la première victime, car je suis la plus malheureuse ! Frappez ! un seul coup suffira pour
nous détruire tous deux. Que nos cendres reposent dans le même tombeau et qu’une même
inscription annonce au monde notre fin déplorable.
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