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[10,145] XIX. Ὁ ἄπειρος χρόνος ἴσην ἔχει τὴν ἡδονὴν καὶ ὁ πεπερασμένος, ἐάν
τις αὐτῆς τὰ πέρατα καταμετρήσῃ τῷ λογισμῷ.
XX. Ἡ μὲν σὰρξ ἀπέλαβε τὰ πέρατα τῆς ἡδονῆς ἄπειρα, καὶ ἄπειρος αὐτὴν
χρόνος παρεσκεύασεν. Ἡ δὲ διάνοια τοῦ τῆς σαρκὸς τέλους καὶ πέρατος
λαβοῦσα τὸν ἐπιλογισμὸν καὶ τοὺς ὑπὲρ τοῦ αἰῶνος φόβους ἐκλύσασα τὸν
παντελῆ βίον παρεσκεύασεν, καὶ οὐθὲν ἔτι τοῦ ἀπείρου χρόνου προσεδεήθημεν·
ἀλλ' οὔτ' ἔφυγε τὴν ἡδονήν, οὔθ' ἡνίκα τὴν ἐξαγωγὴν ἐκ τοῦ ζῆν τὰ πράγματα
παρεσκεύαζεν, ὡς ἐλλείπουσά τι τοῦ ἀρίστου βίου κατέστρεφεν.
| [10,145] XIX. Si le plaisir du corps devait être sans bornes, le temps qu'on
en jouit le serait aussi.
XX. Cette volupté que l'esprit se propose pour la fin de sa félicité dépend
entièrement de la manière dont on se défait de ces sortes d'opinions
chimériques, et de tout ce qui peut avoir quelque affinité avec elles
parce qu'elles font le trouble de l'esprit.
XX. S'il était possible que l'homme pût toujours vivre, le plaisir qu'il
aurait ne serait pas plus grand que celui qu'il goûte dans l'espace limité
de sa vie, s'il pouvait assez élever sa raison pour en bien considérer les
bornes. Celui qui considère la fin du corps et les bornes de sa durée, et
qui se délivre des craintes de l'avenir, rend par ce moyen la vie
parfaitement heureuse ; de sorte que l'homme, satisfait de sa manière de
vivre, n'a point besoin pour sa félicité de l'infinité des temps; il n'est
pas même privé de plaisir, quoiqu'il s'aperçoive que sa condition mortelle
le conduit insensiblement au tombeau, puisqu'il y trouve ce qui termine
heureusement sa course.
| [10,146] XXI. Ὁ τὰ πέρατα τοῦ βίου κατειδὼς οἶδεν, ὡς εὐπόριστόν ἐστι τὸ <τὸ>
ἀλγοῦν κατ' ἔνδειαν ἐξαιροῦν καὶ τὸ τὸν ὅλον βίον παντελῆ καθιστάν· ὥστε
οὐδὲν προσδεῖται πραγμάτων ἀγῶνας κεκτημένων.
XXII. Τὸ ὑφεστηκὸς δεῖ τέλος ἐπιλογίζεσθαι καὶ πᾶσαν τὴν ἐνάργειαν, ἐφ' ἣν
τὰ δοξαζόμενα ἀνάγομεν· εἰ δὲ μή, πάντα ἀκρισίας καὶ ταραχῆς ἔσται μεστά.
XXV. Εἰ μάχῃ πάσαις ταῖς αἰσθήσεσιν, οὐχ ἕξεις οὐδ' ἃς ἂν φῇς αὐτῶν
διεψεῦσθαι πρὸς τί ποιούμενος τὴν ἀναγωγὴν κρίνῃς.
| [10,146] XXI.
Celui qui a découvert de quelle manière la nature a tout borné pour vivre
a connu sans doute le moyen de bannir la douleur qui se fait sentir au
corps quand il lui manque quelque chose, et fait l'heureux secret de bien
régler le cours de sa vie; de sorte qu'il n'a que faire de chercher sa
félicité dans toutes les choses dont l'acquisition est pleine
d'incertitudes et de dangers.
XXII. Il faut avoir un principe d'évidence auquel on rapporte ses jugements,
sans quoi il s'y mêlera toujours de la confusion.
XXIII. Si vous rejetez tous les sens, vous n'aurez aucun moyen de discerner la
vérité d'avec le mensonge.
| [10,147] XXIV. Εἴ τιν' ἐκβαλεῖς ἁπλῶς αἴσθησιν καὶ μὴ διαιρήσεις τὸ
δοξαζόμενον κατὰ τὸ προσμένον καὶ τὸ παρὸν ἤδη κατὰ τὴν αἴσθησιν καὶ τὰ
πάθη καὶ πᾶσαν φανταστικὴν ἐπιβολὴν τῆς διανοίας, συνταράξεις καὶ τὰς
λοιπὰς αἰσθήσεις τῇ ματαίῳ δόξῃ, ὥστε τὸ κριτήριον ἅπαν ἐκβαλεῖς. Εἰ δὲ
βεβαιώσεις καὶ τὸ προσμένον ἅπαν ἐν ταῖς δοξαστικαῖς ἐννοίαις καὶ τὸ μὴ
τὴν ἐπιμαρτύρησιν, οὐκ ἐκλείψεις τὸ διεψευσμένον· ὡς τετηρηκὼς ἔσῃ πᾶσαν
ἀμφισβήτησιν κατὰ πᾶσαν κρίσιν τοῦ ὀρθῶς ἢ μὴ ὀρθῶς.
| [10,147] XXIV.
Si vous en rejetez quelqu'un, et que vous ne distinguiez pas entre ce que
vous croyez avec quelque doute et ce qui est effectivement selon les sens,
les mouvements de l'âme et les idées, vous n'aurez aucun caractère de
vérité et ne pourrez vous fier aux autres sens. Si vous admettez comme
certain ce qui est douteux, et que vous ne rejetiez pas ce qui est faux,
vous serez dans une perpétuelle incertitude.
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