[17,116] {LXXIV} Μετὰ δὲ τὴν ἐκφορὰν εἰς ἀνέσεις καὶ πανηγυρικὸν
βίον ἐκτραπέντος τοῦ βασιλέως, δοκοῦντος ἰσχύειν τότε
πλεῖστον καὶ μάλιστ' εὐδαιμονεῖν, ἡ πεπρωμένη συνῄρει
τὸν ὑπὸ τῆς φύσεως αὐτῷ συγκεχωρημένον τοῦ ζῆν
χρόνον. Εὐθὺ δὲ καὶ τὸ θεῖον ἐσήμαινε τὴν τελευτὴν
αὐτοῦ, πολλῶν καὶ παραδόξων οἰωνῶν καὶ σημείων
συντελουμένων. (2) Τοῦ γὰρ βασιλέως ἀλειφομένου καὶ
τῆς βασιλικῆς ἐσθῆτος καὶ διαδήματος ἐπί τινος θρόνου
τεθέντος τῶν ἐγχωρίων τις δεδεμένος ἐλύθη τὰς πέδας
αὐτομάτως καὶ λαθὼν τοὺς φύλακας διῆλθε διὰ τῶν
τῆς αὐλῆς θυρῶν ἀνεπικωλύτως. (3) Προσελθὼν δὲ τῷ
θρόνῳ καὶ τὴν βασιλικὴν ἐνδυσάμενος ἐσθῆτα καὶ τὸ
διάδημα περιθέμενος ἐκάθισεν ἐπὶ τὸν θρόνον καὶ τὴν
ἡσυχίαν ἦγε. Γνωσθείσης δὲ τῆς πράξεως ὁ βασιλεὺς
καταπλαγεὶς τὸ παράδοξον προσῆλθε τῷ θρόνῳ καὶ
χωρὶς καταπλήξεως ἡσυχῇ τὸν ἄνθρωπον ἀνέκρινε τίς
ὢν καὶ τί βουλόμενος τοῦτο ἔπραξε. (4) Τοῦ δὲ εἰπόντος
μηδὲν ἁπλῶς γινώσκειν τοῖς μάντεσι προσαναθέμενος
περὶ τοῦ σημείου τοῦτον μὲν κατὰ τὴν ἐκείνων κρίσιν
ἀπέκτεινεν, ὅπως τὰ σημαινόμενα δυσχερῆ εἰς ἐκεῖνον
τρέπηται, αὐτὸς δὲ ἀναλαβὼν τὴν ἐσθῆτα καὶ θεοῖς
ἀποτροπαίοις θύσας ἐν ἀγωνίᾳ καθειστήκει καὶ τῆς τῶν
Χαλδαίων προρρήσεως ἐμνημόνευσε καὶ τοὺς μὲν
συμπείσαντας φιλοσόφους παρελθεῖν εἰς τὴν Βαβυλῶνα
κατεμέμφετο, τὴν δὲ τέχνην τῶν Χαλδαίων καὶ τὴν τῶν
ἀνδρῶν ἀγχίνοιαν ἐθαύμαζε, καθόλου δὲ τοὺς ταῖς
εὑρησιλογίαις κατασοφιζομένους τὴν δύναμιν τῆς
πεπρωμένης ἐβλασφήμει. (5) Μετ' ὀλίγον δὲ ἄλλο
σημεῖον αὐτῷ περὶ τῆς βασιλείας τὸ δαιμόνιον
ἐπέστησε. Βουλομένου γὰρ αὐτοῦ θεάσασθαι τὴν περὶ
τὴν Βαβυλῶνα λίμνην καὶ πλέοντος μετὰ τῶν φίλων ἔν
τισιν ἀκάτοις ἐφ' ἡμέρας μέν τινας ἀποσχισθείσης τῆς
νεὼς ἀπὸ τῶν ἄλλων σκαφῶν ἐπλανήθη μόνος, ὥστε
καὶ τὴν σωτηρίαν ἀπογνῶναι· (6) ἔπειτα διά τινος
αὐλῶνος στενοῦ καὶ συμπεπυκασμένου δένδρεσι
διαπλέοντος καὶ τῶν μὲν ὑπερκειμένων, τοῦ δὲ
διαδήματος ὑπὸ τούτων ἀρθέντος καὶ πάλιν εἰς τὴν
λίμνην πεσόντος εἷς τῶν ἐρετῶν προσνηξάμενος καὶ
βουλόμενος ἀσφαλῶς σῶσαι τὸ διάδημα προσέθετο τῇ
κεφαλῇ καὶ προσενήξατο τῷ πλοίῳ. (7) Τρεῖς δὲ ἡμέρας
καὶ τὰς ἴσας νύκτας διαπλανηθεὶς διεσώθη καὶ τὸ
διάδημα περιθέμενος ἀνελπίστως πάλιν τοῖς μάντεσι
προσανέφερε περὶ τῶν προσημαινομένων.
| [17,116] Mais après avoir satisfait à un devoir que son inclination lui avait fait
porter si loin, il ne songeait plus qu'à mener une vie de plaisir et de
réjouissance continuelle; et il se croyait arrivé au plus haut point de la
puissance, de la gloire et de la félicité humaine, lorsque l'arrêt irrévocable
de la destinée se fit apercevoir à lui par divers pronostiques très singuliers
d'une mort prochaine. (2) Pendant que le roi se faisait oindre le corps,
après avoir fait mettre ses habits et son diadème sur une table dans une
chambre voisine, un prisonnier de la ville se voyant délivré de ses fers qui
étaient tombés d'eux-mêmes subitement, traversa toutes les salles du
palais sans que personne l'arrêta à aucune porte ; (3) et étant entré dans la
chambre à côté de laquelle était le roi, il se revêtit de ses habits royaux et
posa son diadème sur son front ; après quoi il s'assit lui-même
tranquillement sur le trône. Le roi averti d'un fait si singulier, vint lui-même
dans la chambre où était cet homme et lui demanda sans s'émouvoir quel
était le motif d'une pareille comédie ? (4) Cet homme répondit qu'il n'en
savait rien lui-même. Ainsi le roi eut recours aux devins, sur l'avis desquels
il fit d'abord tuer cet homme, pour faire tomber sur lui tout ce qu'il pouvait y
avoir de sinistre dans le prodige : après quoi reprenant sa robe et sacrifiant
aux dieux Apotropées, Averrunques, ou qui détournent les malheurs ; le
fond de son âme n'en fut pas moins agité par le souvenir qu'il se rappela
des prédictions des Chaldéens. Il conçut une grande haine contre les
philosophes qui l'avaient enhardi à entrer dans Babylone ; il admirait le
profond savoir des Chaldéens et il s'emportait vivement contre tous ceux
qui par de longs sophismes prétendaient combattre les arrêts et le pouvoir
de la destinée. (5) Mais il survint bientôt de la part des dieux un nouveau
prodige sur le changement qui menaçait l'empire d'Alexandre. Car voulant
visiter le grand lac qui environnait Babylone et s'étant fait accompagner de
ses amis placés eu différentes barques, il arriva que ces barques
s'écartèrent de la sienne, au point qu'elles la laissèrent seule et en danger
pendant trois jours. (6) Passant ensuite dans un canal étroit et dont les
deux bords étaient chargés d'arbres extrêmement touffus, dont les
branchages s'étendaient sur l'eau de part et d'autre, il arriva que son
diadème fut accroché et tomba dans l'eau. Aussitôt un des rameurs se jeta
à la nage pour le reprendre, et le mettant sur sa tête pour n'en être pas
embarrassé, il revint enfin à la barque d'Alexandre. (7) Le roi après avoir
erré trois jours et trois nuits sur ce lac, et ayant recouvré son diadème
contre toute espérance, arriva pourtant à bon port et alla aussitôt consulter
les devins sur toutes les circonstances de son aventure :
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