[17,107] {LIX} Ὁ δὲ βασιλεὺς περὶ τούτων διακούσας τοῖς μὲν
ἡγουμένοις τοῦ στόλου παρήγγειλεν ἐπὶ τὸν Εὐφράτην
καταπλεῦσαι, αὐτὸς δὲ μετὰ τῆς δυνάμεως πολλὴν
χώραν διελθὼν συνῆψε τοῖς Σουσιανοῖς ὅροις. Περὶ δὲ
τοὺς καιροὺς τούτους Κάρανος ὁ ᾿Ινδός, ἐν φιλοσοφίᾳ
μεγάλην ἔχων προκοπὴν καὶ τιμώμενος ὑπ'
᾿Αλεξάνδρου, παράδοξον ἐποιήσατο τὴν τοῦ βίου
καταστροφήν. (2) Βεβιωκὼς γὰρ ἔτη τρία πρὸς τοῖς
ἑβδομήκοντα καὶ πάντα τὸν χρόνον ἀπείρατος γεγονὼς
ἀρρωστίας ἔκρινεν ἑαυτὸν ἐκ τοῦ ζῆν μεταστῆσαι ὡς τὸ
τέλειον τῆς εὐδαιμονίας παρά τε τῆς φύσεως καὶ τῆς
τύχης ἀπειληφώς. (3) Καταπειραθεὶς δ' ὑπ' ἀρρωστίας
καὶ καθ' ἡμέραν αἰεὶ μᾶλλον βαρυνόμενος ἠξίωσε τὸν
βασιλέα πυρὰν αὐτῷ μεγάλην κατασκευάσαι καὶ
προσαναβάντος ἐπὶ ταύτην αὐτοῦ προστάξαι τοῖς
ὑπηρέταις πῦρ ἐνεῖναι. (4) Ὁ δὲ ᾿Αλέξανδρος τὸ μὲν
πρῶτον αὐτὸν ἀποτρέπειν ἐπειρᾶτο ταύτης τῆς
ἐπιβολῆς, ὡς δ' οὐχ ὑπήκουσεν, ὡμολόγησε συντελέσειν
περὶ ὧν ἠξιωκὼς ἦν. Διαγγελθείσης δὲ τῆς πράξεως ἡ
μὲν πυρὰ κατεσκευάσθη, τὸ δὲ πλῆθος κατήντησεν ἐπὶ
τὴν παράδοξον θέαν. (5) Ὁ δὲ Κάρανος ἀκολουθήσας
τοῖς ἰδίοις δόγμασι τεθαρρηκότως ἐπέστη τῇ πυρᾷ καὶ
μετὰ ταύτης καταφλεχθεὶς ἐτελεύτησεν. Τῶν δὲ
παρόντων οἱ μὲν μανίαν αὐτοῦ κατέγνωσαν, οἱ δὲ
κενοδοξίαν ἐπὶ καρτερίᾳ, τινὲς δὲ τὴν εὐψυχίαν καὶ τὴν
τοῦ θανάτου καταφρόνησιν ἐθαύμασαν. (6) Ὁ δὲ
βασιλεὺς τοῦτον μὲν ἔθαψε πολυτελῶς, αὐτὸς δὲ
παρελθὼν εἰς Σοῦσα τὴν μὲν πρεσβυτέραν τῶν Δαρείου
θυγατέρων Στάτειραν ἔγημεν, τὴν δὲ νεωτέραν
῾Ηφαιστίωνι συνῴκισε Δρυπῆτιν. Ἔπεισε δὲ καὶ τοὺς
ἐπιφανεστάτους τῶν φίλων γῆμαι καὶ συνῴκισεν αὐτοῖς
τὰς εὐγενεστάτας παρθένους Περσίδας.
| [17,107] Le roi ayant écouté tout ce récit avec beaucoup de satisfaction, fit
rembarquer ces navigateurs et leur ordonna de l'aller attendre aux
embouchures de l’Euphrate. Lui-même cependant à la tête de ses troupes visitant
par terre beaucoup de régions; arriva sur les confins de la Susiane.
Vers ce temps-là l'Indien Calanus qui avait fait de grands progrès dans la
philosophie, et qui était fort estimé d'Alexandre, arriva à une fin de vie
extraordinaire, (2) âgé de soixante et treize ans, et n'ayant éprouvé
jusqu'alors aucune espèce d'incommodité, il résolut de se donner lui-même
la mort comme ayant joui assez longtemps de tous les avantages que la
nature et la fortune pouvaient procurer à un mortel. (3) Attaqué alors de sa
première maladie, qui s'augmentait de jour en jour, il pria le roi de lui faire
dresser un bûcher, sous lequel, dès qu'il y ferait monté, le roi voudrait bien
ordonner à ses esclaves de faire mettre le feu : (4) Alexandre essaya
d'abord de le détourner d'un projet si extraordinaire : mais n'ayant pu en
venir à bout, il consentit à la demande du philosophe. Le jour d'un pareil
spectacle ayant été annoncé, tout le monde s'assembla dans la place où
l'on devait le donner : (5) et Calanus, soutenant sa résolution jusqu'au
bout, monta courageusement sur l'échafaud et se jeta dans le bûcher où il
fut consumé. Entre les spectateurs, les uns traitèrent cette action de folie,
les autres l'imputèrent à une vaine gloire : mais des interprètes plus
favorables y trouvèrent de la grandeur d'âme et un généreux mépris de la
mort. (6) Le roi lui fit faire des funérailles magnifiques ; après quoi il se
rendit à Suse, où il épousa Statira la fille aînée de Darius, et fit épouser la
seconde nommée Drupétis à son favori Hephestion. Il engagea même les
officiers de sa cour les plus considérables et qui lui étaient les plus chers,
à épouser les filles des familles les plus distinguées parmi les Perses.
|