[6,5,40] Εἰ δέ τινες φοβοῦνται μὴ ἐὰν νῦν ἀναφύγωσιν οἱ Λακεδαιμόνιοι, ἔτι ποτὲ
πράγματα παρέχωσιν ὑμῖν, ἐνθυμήθητε ὅτι οὐχ οὓς ἂν εὖ ἀλλ᾽ οὓς ἂν κακῶς τις
ποιῇ φοβεῖσθαι δεῖ μή ποτε μέγα δυνασθῶσιν. ἐνθυμεῖσθαι δὲ καὶ τάδε χρή, ὅτι
κτᾶσθαι μέν τι ἀγαθὸν καὶ ἰδιώταις καὶ πόλεσι προσήκει, ὅταν ἐρρωμενέστατοι
ὦσιν, ἵνα ἔχωσιν, ἐάν ποτ᾽ ἀδύνατοι γένωνται, ἐπικουρίαν τῶν
προπεπονημένων.
(41) Ὑμῖν δὲ νῦν ἐκ θεῶν τινος καιρὸς παραγεγένηται, ἐὰν δεομένοις βοηθήσητε
Λακεδαιμονίοις, κτήσασθαι τούτους εἰς τὸν ἅπαντα χρόνον φίλους
ἀπροφασίστους. Καὶ γὰρ δὴ οὐκ ἐπ᾽ ὀλίγων μοι δοκοῦσι μαρτύρων νῦν ἂν εὖ
παθεῖν ὑφ᾽ ὑμῶν· ἀλλ᾽ εἴσονται μὲν ταῦτα θεοὶ οἱ πάντα ὁρῶντες καὶ νῦν καὶ εἰς
ἀεί, συνεπίστανται δὲ τὰ γιγνόμενα οἵ τε σύμμαχοι καὶ οἱ πολέμιοι, πρὸς δὲ
τούτοις καὶ ἅπαντες Ἕλληνές τε καὶ βάρβαροι· οὐδενὶ γὰρ τούτων ἀμελές.
(42) Ὥστε εἰ κακοὶ φανείησαν περὶ ὑμᾶς, τίς ἄν ποτε ἔτι πρόθυμος εἰς αὐτοὺς
γένοιτο; Ἐλπίζειν δὲ χρὴ ὡς ἄνδρας ἀγαθοὺς μᾶλλον ἢ κακοὺς αὐτοὺς
γενήσεσθαι· εἰ γάρ τινες ἄλλοι, καὶ οὗτοι δοκοῦσι διατετελεκέναι ἐπαίνου μὲν
ὀρεγόμενοι, αἰσχρῶν δὲ ἔργων ἀπεχόμενοι.
(43) Πρὸς δὲ τούτοις ἐνθυμήθητε καὶ τάδε. Εἴ ποτε πάλιν ἔλθοι τῇ Ἑλλάδι
κίνδυνος ὑπὸ βαρβάρων, τίσιν ἂν μᾶλλον πιστεύσαιτε ἢ Λακεδαιμονίοις; Τίνας
δὲ ἂν παραστάτας ἥδιον τούτων ποιήσαισθε, ὧν γε καὶ οἱ ταχθέντες ἐν
Θερμοπύλαις ἅπαντες εἵλοντο μαχόμενοι ἀποθανεῖν μᾶλλον ἢ ζῶντες
ἐπεισφρέσθαι τὸν βάρβαρον τῇ Ἑλλάδι; Πῶς οὖν οὐ δίκαιον ὧν τε ἕνεκα
ἐγένοντο ἄνδρες ἀγαθοὶ μεθ᾽ ὑμῶν καὶ ὧν ἐλπὶς καὶ αὖθις γενέσθαι πᾶσαν
προθυμίαν εἰς αὐτοὺς καὶ ὑμᾶς καὶ ἡμᾶς παρέχεσθαι;
(44) Ἄξιον δὲ καὶ τῶν παρόντων συμμάχων αὐτοῖς ἕνεκα προθυμίαν
ἐνδείξασθαι. Εὖ γὰρ ἴστε ὅτι οἵπερ τούτοις πιστοὶ διαμένουσιν ἐν ταῖς
συμφοραῖς, οὗτοι καὶ ὑμῖν αἰσχύνοιντ᾽ ἂν μὴ ἀποδιδόντες χάριτας. Εἰ δὲ μικραὶ
δοκοῦμεν πόλεις εἶναι αἱ τοῦ κινδύνου μετέχειν αὐτοῖς ἐθέλουσαι, ἐνθυμήθητε ὅτι
ἐὰν ἡ ὑμετέρα πόλις προσγένηται, οὐκέτι μικραὶ πόλεις ἐσόμεθα αἱ βοηθοῦσαι
αὐτοῖς.
(45) Ἐγὼ δέ, ὦ ἄνδρες Ἀθηναῖοι, πρόσθεν μὲν ἀκούων ἐζήλουν τήνδε τὴν πόλιν
ὅτι πάντας καὶ τοὺς ἀδικουμένους καὶ τοὺς φοβουμένους ἐνθάδε καταφεύγοντας
ἐπικουρίας ἤκουον τυγχάνειν· νῦν δ᾽ οὐκέτ᾽ ἀκούω, ἀλλ᾽ αὐτὸς ἤδη παρὼν ὁρῶ
Λακεδαιμονίους τε τοὺς ὀνομαστοτάτους καὶ μετ᾽ αὐτῶν τοὺς πιστοτάτους
φίλους αὐτῶν πρὸς ὑμᾶς τε ἥκοντας καὶ δεομένους αὖ ὑμῶν ἐπικουρῆσαι.
(46) Ὁρῶ δὲ καὶ Θηβαίους, οἳ τότε οὐκ ἔπεισαν Λακεδαιμονίους
ἐξανδραποδίσασθαι ὑμᾶς, νῦν δεομένους ὑμῶν (μὴ) περιιδεῖν ἀπολομένους
τοὺς σώσαντας ὑμᾶς. Τῶν μὲν οὖν ὑμετέρων προγόνων καλὸν λέγεται, ὅτε τοὺς
Ἀργείων τελευτήσαντας ἐπὶ τῇ Καδμείᾳ οὐκ εἴασαν ἀτάφους γενέσθαι:· ὑμῖν δὲ
πολὺ κάλλιον ἂν γένοιτο, εἰ τοὺς ἔτι ζῶντας Λακεδαιμονίων μήτε ὑβρισθῆναι
μήτε ἀπολέσθαι ἐάσαιτε.
(47) Καλοῦ γε μὴν κἀκείνου ὄντος, ὅτε σχόντες τὴν Εὐρυσθέως ὕβριν διεσώσατε
τοὺς Ἡρακλέους παῖδας, πῶς οὐ καὶ ἐκείνου τόδε κάλλιον, εἰ μὴ μόνον τοὺς
ἀρχηγέτας, ἀλλὰ καὶ ὅλην τὴν πόλιν περισώσαιτε; Πάντων δὲ κάλλιστον, εἰ
ψήφῳ ἀκινδύνῳ σωσάντων ὑμᾶς τότε τῶν Λακεδαιμονίων, νῦν ὑμεῖς σὺν ὅπλοις
τε καὶ διὰ κινδύνων ἐπικουρήσετε αὐτοῖς.
(48) Ὁπότε δὲ καὶ ἡμεῖς ἀγαλλόμεθα οἱ συναγορεύοντες βοηθῆσαι ἀνδράσιν
ἀγαθοῖς, ἦ που ὑμῖν γε τοῖς ἔργῳ δυναμένοις βοηθῆσαι γενναῖα ἂν ταῦτα φανείη,
εἰ πολλάκις καὶ φίλοι καὶ πολέμιοι γενόμενοι Λακεδαιμονίοις μὴ ὧν ἐβλάβητε
μᾶλλον ἢ ὧν εὖ ἐπάθετε μνησθείητε καὶ χάριν ἀποδοίητε αὐτοῖς μὴ ὑπὲρ ὑμῶν
αὐτῶν μόνον, ἀλλὰ καὶ ὑπὲρ πάσης τῆς Ἑλλάδος, ὅτι ἄνδρες ἀγαθοὶ ὑπὲρ αὐτῆς
ἐγένοντο. »
(49) Μετὰ ταῦτα ἐβουλεύοντο οἱ Ἀθηναῖοι, καὶ τῶν μὲν ἀντιλεγόντων οὐκ
ἠνείχοντο ἀκούοντες, ἐψηφίσαντο δὲ βοηθεῖν πανδημεί, καὶ Ἰφικράτην
στρατηγὸν εἵλοντο. Ἐπεὶ δὲ τὰ ἱερὰ ἐγένετο καὶ παρήγγειλεν ἐν Ἀκαδημείᾳ
δειπνοποιεῖσθαι, πολλοὺς ἔφασαν προτέρους αὐτοῦ Ἰφικράτους ἐξελθεῖν. Ἐκ δὲ
τούτου ἡγεῖτο μὲν ὁ Ἰφικράτης, οἱ δ᾽ ἠκολούθουν, νομίζοντες ἐπὶ καλόν τι ἔργον
ἡγήσεσθαι. Ἐπεὶ δὲ ἀφικόμενος εἰς Κόρινθον διέτριβέ τινας ἡμέρας, εὐθὺς μὲν
ἐπὶ ταύτῃ τῇ διατριβῇ πρῶτον ἔψεγον αὐτόν· ὡς δ᾽ ἐξήγαγέ ποτε, προθύμως μὲν
ἠκολούθουν ὅποι ἡγοῖτο, προθύμως δ᾽, εἰ πρὸς τεῖχος προσάγοι,
προσέβαλλον.
| [6,5,40] Si quelques-uns d'entre vous craignent que les Lacédémoniens, échappés au péril du
moment, ne vous créent encore des embarras par la suite, songez que ce n'est pas ceux à qui
l'on fait du bien, mais ceux à qui l'on fait du mal qu'il faut craindre de voir devenir très puissants.
Vous devez encore réfléchir à ceci, c'est que les États comme les particuliers doivent acquérir
des ressources au moment où ils sont les plus forts, afin que, si un jour ils perdent leur
puissance, ils trouvent pour leur venir en aide les fruits de leurs travaux antérieurs.
41. Or un dieu vous donne aujourd'hui l'occasion, si vous secourez les Lacédémoniens dans le
besoin, de vous en faire pour toujours des amis dévoués sans réserve. Car ce n'est pas, ce me
semble, en présence d'un petit nombre de témoins qu'ils recevraient aujourd'hui ce bienfait de
votre part; mais les dieux, qui voient tout, le sauront maintenant et à jamais, et ce qui se passe
n'échappe pas à la connaissance de vos alliés et de vos ennemis, non plus qu'à tout le monde
grec et aux barbares, car personne ne voit cette guerre d'un oeil indifférent.
42. Si donc on les voyait vous maltraiter, qui jamais voudrait encore leur être dévoué ? Mais il
y a lieu d'espérer qu'ils seront plutôt bons que méchants; car, si jamais peuple a toujours été
épris de gloire et s'est abstenu de toute action honteuse, c'est bien celui-là.
43. Autre considération encore : si jamais quelque nouveau danger menaçait la Grèce du côté
des barbares, sur qui pourriez-vous mieux compter que sur les Lacédémoniens ? Qui aimeriez-
vous mieux avoir à vos côtés que ceux dont les ancêtres, postés aux Thermopyles, préférèrent
tous mourir en combattant plutôt que de vivre en livrant l'entrée de la Grèce aux barbares ?
Puis donc qu'ils se sont montrés braves avec vous et qu'il y a lieu d'espérer qu'ils le seront
encore, n'est-il pas juste que nous leur témoignions, vous et nous, un zèle sans réserve ?
44. Il est bien aussi que vous fassiez preuve de zèle à leur égard à cause des alliés qui sont
présent avec eux. Car sachez bien que ceux qui leur restent fidèles dans les revers, ceux-là
rougiraient de ne pas vous témoigner aussi leur reconnaissance. Si nous, qui consentons à
partager leurs dangers, nous ne sommes que de petits États, songez que, si votre cité se joint
à nous, ce ne seront plus de petites villes qui leur viendront en aide.
45. Pour moi, Athéniens, j'ai toujours envié votre ville pour ce qu'on disait d'elle. J'ai entendu
dire en effet que tous les opprimés et ceux qui avaient peur trouvaient assistance en se
réfugiant ici. Maintenant je n'entends plus dire, mais je vois de mes propres yeux les
Lacédémoniens, ce peuple si renommé, et avec eux les plus fidèles de leurs alliés, venir à vous
et vous prier de les secourir.
46. Et je vois aussi les Thébains, qui jadis ne purent persuader aux Lacédémoniens de vous
réduire en esclavage, vous prier aujourd'hui de laisser périr ceux qui vous ont sauvés. On
rapporte, à la gloire de vos ancêtres, qu'ils ne permirent pas que les Argiens morts devant la
Cadmée fussent privés de sépulture; mais vous, vous feriez une action beaucoup plus
belle de ne pas laisser outrager ni détruire les Lacédémoniens encore vivants.
47. Si ce fut un beau trait de votre part de réprimer l'insolence d'Eurysthée et de sauver les
enfants d'Héraclès, ne serait-ce pas un trait plus beau encore de sauver non seulement
les fondateurs de la ville, mais encore la ville tout entière ? Mais la plus belle action que vous
puissiez faire serait, qu'après avoir été sauvés par les Lacédémoniens grâce à un vote sans
danger, vous les secouriez à présent les armes à la main et en bravant le danger.
48. Si nous-mêmes nous sommes fiers de porter secours à des braves en parlant pour eux,
vous qui pouvez le faire par des actes, vous feriez voir un beau trait de générosité, si, après
avoir été souvent amis et ennemis des Lacédémoniens, vous vous souveniez moins de leurs
torts que de leurs bienfaits et si vous leur témoigniez votre reconnaissance, non seulement en
votre nom, mais au nom de toute la Grèce pour la bravoure qu'ils ont déployée à la défendre. »
49. Après ce discours, les Athéniens délibérèrent, et, sans vouloir prêter l'oreille à ceux qui
soutenaient un avis opposé, ils décrétèrent qu'ils iraient au secours des Lacédémoniens avec
toutes leurs forces et ils choisirent Iphicrate comme général. Quand celui-ci eut obtenu des
auspices favorables et fait passer à ses hommes l'ordre de dîner à l'Académie, on dit que
beaucoup s'y rendirent avant Iphicrate lui-même. Puis il se mit à la tête de ses troupes qui le
suivirent, persuadées qu'il allait les conduire à quelque action glorieuse; mais arrivé à Corinthe,
il s'y attarda plusieurs jours et aussitôt les soldats commencèrent à le critiquer sur cette perte
de temps. Lorsque enfin il les fit sortir de la ville, ils le suivirent avec ardeur partout où il les
conduisait, et ils attaquaient avec ardeur toutes les places contre lesquelles il les menait.
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