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[8,45] Ἐν δὲ τούτῳ καὶ ἔτι πρότερον, πρὶν ἐς τὴν Ῥόδον αὐτοὺς ἀναστῆναι, τάδε
ἐπράσσετο. Ἀλκιβιάδης μετὰ τὸν Χαλκιδέως θάνατον καὶ τὴν ἐν Μιλήτῳ μάχην τοῖς
Πελοποννησίοις ὕποπτος ὤν, καὶ ἀπ' αὐτῶν ἀφικομένης ἐπιστολῆς πρὸς
Ἀστύοχον ἐκ Λακεδαίμονος ὥστ' ἀποκτεῖναι (ἦν γὰρ καὶ τῷ Ἄγιδι ἐχθρὸς καὶ
ἄλλως ἄπιστος ἐφαίνετο), πρῶτον μὲν ὑποχωρεῖ δείσας παρὰ Τισσαφέρνην,
ἔπειτα ἐκάκου πρὸς αὐτὸν ὅσον ἐδύνατο μάλιστα τῶν Πελοποννησίων τὰ
(8.45.2) πράγματα, καὶ διδάσκαλος πάντων γιγνόμενος τήν τε μισθοφορὰν
ξυνέτεμεν, ἀντὶ δραχμῆς Ἀττικῆς ὥστε τριώβολον καὶ τοῦτο μὴ ξυνεχῶς
δίδοσθαι, λέγειν κελεύων τὸν Τισσαφέρνην πρὸς αὐτοὺς ὡς Ἀθηναῖοι ἐκ
πλέονος χρόνου ἐπιστήμονες ὄντες τοῦ ναυτικοῦ τριώβολον τοῖς ἑαυτῶν
διδόασιν, οὐ τοσοῦτον πενίᾳ ὅσον ἵνα αὐτῶν μὴ οἱ ναῦται ἐκ περιουσίας
ὑβρίζοντες οἱ μὲν τὰ σώματα χείρω ἔχωσι δαπανῶντες ἐς τοιαῦτα ἀφ' ὧν ἡ
ἀσθένεια ξυμβαίνει, οἱ δὲ τὰς ναῦς ἀπολείπωσιν οὐχ ὑπολιπόντες ἐς ὁμηρείαν
τὸν (8.45.3) προσοφειλόμενον μισθόν· καὶ τοὺς τριηράρχους καὶ τοὺς
στρατηγοὺς τῶν πόλεων ἐδίδασκεν (ὥστε) δόντα χρήματα αὐτὸν πεῖσαι, ὥστε
ξυγχωρῆσαι ταῦτα ἑαυτῷ πλὴν τῶν Συρακοσίων· τούτων δὲ Ἑρμοκράτης
ἠναντιοῦτο μόνος ὑπὲρ (8.45.4) τοῦ παντὸς ξυμμαχικοῦ. τάς τε πόλεις δεομένας
χρημάτων ἀπήλασεν αὐτὸς ἀντιλέγων ὑπὲρ τοῦ Τισσαφέρνους ὡς οἱ μὲν Χῖοι
ἀναίσχυντοι εἶεν πλουσιώτατοι ὄντες τῶν Ἑλλήνων, ἐπικουρίᾳ δ' ὅμως
σῳζόμενοι ἀξιοῦσι καὶ τοῖς σώμασι καὶ τοῖς χρήμασιν ἄλλους ὑπὲρ τῆς ἐκείνων
ἐλευθερίας (8.45.5) κινδυνεύειν· τὰς δ' ἄλλας πόλεις ἔφη ἀδικεῖν, αἳ ἐς
Ἀθηναίους πρότερον ἢ ἀποστῆναι ἀνήλουν, εἰ μὴ καὶ νῦν καὶ τοσαῦτα καὶ ἔτι
πλείω ὑπὲρ σφῶν αὐτῶν ἐθελήσουσιν ἐσ(8.45.6) φέρειν. τόν τε Τισσαφέρνην
ἀπέφαινε νῦν μέν, τοῖς ἰδίοις χρήμασι πολεμοῦντα, εἰκότως φειδόμενον, ἢν δέ
ποτε τροφὴ καταβῇ παρὰ βασιλέως, ἐντελῆ αὐτοῖς ἀποδώσειν τὸν μισθὸν καὶ
τὰς πόλεις τὰ εἰκότα ὠφελήσειν.
| [8,45] XLV. - Sur ces entrefaites et même avant
l'expédition de Rhodes, voici ce qui se passa :
Alcibiade, après la mort de Khalkideus et le combat
de Milet, devint suspect aux Péloponnésiens.
Astyokhos reçut de Lacédémone une lettre lui
enjoignant de le faire périr : Alcibiade était ennemi
d'Agis, d'ailleurs sa perfidie était reconnue.
Pris de crainte, il se réfugia auprès de Tissaphernès
et fit tout ce qu'il put auprès de ce satrape pour
compromettre la situation des Péloponnésiens.
C'est lui qui inspirait toutes les décisions. Il fit
réduire la solde d'une drachme attique à trois
oboles, d'ailleurs payées irrégulièrement. A son
instigation, Tissaphernès invoqua comme
argument que les Athéniens, dont l'expérience
maritime était plus ancienne que la leur, ne
donnaient à leurs équipages que trois oboles ;
c'était moins par pauvreté, que pour éviter aux
matelots de se pervertir par l'abondance ; de ruiner
par leurs dépenses leur santé et de perdre leur
énergie, ou d'abandonner les vaisseaux, en laissant
en gage ce qui leur restait dû sur leur solde. Il
décida également Tissaphernès à gagner à prix
d'argent les triérarques et les généraux des villes.
Alors tous, à l'exception des Syracusains, lui
laissèrent les mains libres. Seul Hermokratès
s'opposa à cette mesure, pour l'ensemble des alliés.
Lorsque les villes demandaient de l'argent,
Alcibiade les éconduisait au nom de Tissaphernès.
Les gens de Khios, prétendait-il, étaient d 'une
impudence extrême, puisqu'ils avaient beau être
les plus riches des Grecs et devoir leur salut au
secours qu'on leur apportait du dehors, ils n'en
réclamaient pas moins que d'autres exposassent à
leur place pour leur liberté leur vie et leur fortune.
Quant aux autres villes, c'était bien mal de leur
part, elles qui avant leur défection étaient
tributaires d'Athènes, de ne pas vouloir dépenser
pour leur salut autant et plus que naguère. Enfin il
faisait valoir que Tissaphernès, qui subvenait de
ses deniers à la guerre, avait parfaitement raison
de se montrer économe ; mais que, le jour où le Roi
lui enverrait des fonds, il paierait solde entière et
donnerait aux villes de justes compensations.
| [8,46] παρῄνει δὲ καὶ τῷ Τισσαφέρνει μὴ ἄγαν ἐπείγεσθαι
τὸν πόλεμον διαλῦσαι, μηδὲ βουληθῆναι κομίσαντα ἢ ναῦς
Φοινίσσας ἅσπερ παρεσκευάζετο ἢ Ἕλλησι πλέοσι μισθὸν πορίζοντα τοῖς
αὐτοῖς τῆς τε γῆς καὶ τῆς θαλάσσης τὸ κράτος δοῦναι, ἔχειν δ' ἀμφοτέρους ἐᾶν
δίχα τὴν ἀρχήν, καὶ βασιλεῖ ἐξεῖναι αἰεὶ ἐπὶ τοὺς αὐτῷ λυπηροὺς τοὺς ἑτέρους
ἐπάγειν. (8.46.2) γενομένης δ' ἂν καθ' ἓν τῆς ἐς γῆν καὶ θάλασσαν ἀρχῆς
ἀπορεῖν ἂν αὐτὸν οἷς τοὺς κρατοῦντας ξυγκαθαιρήσει, ἢν μὴ αὐτὸς βούληται
μεγάλῃ δαπάνῃ καὶ κινδύνῳ ἀναστάς ποτε διαγωνίσασθαι. εὐτελέστερα δὲ τάδ'
εἶναι, βραχεῖ μορίῳ τῆς δαπάνης καὶ ἅμα μετὰ τῆς ἑαυτοῦ ἀσφαλείας (8.46.3)
αὐτοὺς περὶ ἑαυτοὺς τοὺς Ἕλληνας κατατρῖψαι. ἐπιτηδειοτέρους τε ἔφη τοὺς
Ἀθηναίους εἶναι κοινωνοὺς αὐτῷ τῆς ἀρχῆς· ἧσσον γὰρ τῶν κατὰ γῆν ἐφίεσθαι,
τὸν λόγον τε ξυμφορώτατον καὶ τὸ ἔργον ἔχοντας πολεμεῖν· τοὺς μὲν γὰρ
ξυγκαταδουλοῦν ἂν σφίσι τε αὐτοῖς τὸ τῆς θαλάσσης μέρος καὶ ἐκείνῳ ὅσοι ἐν
τῇ βασιλέως Ἕλληνες οἰκοῦσι, τοὺς δὲ τοὐναντίον ἐλευθερώσοντας ἥκειν, καὶ
οὐκ εἰκὸς εἶναι Λακεδαιμονίους ἀπὸ μὲν σφῶν τῶν Ἑλλήνων ἐλευθεροῦν νῦν
τοὺς Ἕλληνας, ἀπὸ δ' ἐκείνων (τῶν βαρβάρων), (8.46.4) ἢν μή ποτε αὐτοὺς μὴ
ἐξέλωσι, μὴ ἐλευθερῶσαι. τρίβειν οὖν ἐκέλευε πρῶτον ἀμφοτέρους, καὶ
ἀποτεμόμενον ὡς μέγιστα ἀπὸ τῶν Ἀθηναίων ἔπειτ' ἤδη τοὺς Πελοποννησίους
(8.46.5) ἀπαλλάξαι ἐκ τῆς χώρας. καὶ διενοεῖτο τὸ πλέον οὕτως ὁ Τισσαφέρνης,
ὅσα γε ἀπὸ τῶν ποιουμένων ἦν εἰκάσαι. τῷ γὰρ Ἀλκιβιάδῃ διὰ ταῦτα ὡς εὖ περὶ
τούτων παραινοῦντι προσθεὶς ἑαυτὸν ἐς πίστιν τήν τε τροφὴν κακῶς ἐπόριζε
τοῖς Πελοποννησίοις καὶ ναυμαχεῖν οὐκ εἴα, ἀλλὰ καὶ τὰς Φοινίσσας φάσκων
ναῦς ἥξειν καὶ ἐκ περιόντος ἀγωνιεῖσθαι ἔφθειρε τὰ πράγματα καὶ τὴν ἀκμὴν
τοῦ ναυτικοῦ αὐτῶν ἀφείλετο γενομένην καὶ πάνυ ἰσχυράν, τά τε ἄλλα
καταφανέστερον ἢ ὥστε λανθάνειν οὐ προθύμως ξυνεπολέμει.
| [8,46] XLVI. - Alcibiade conseillait également à
Tissaphernès de ne pas trop se hâter de terminer la
guerre ; de ne pas donner au même peuple la
suprématie sur terre et sur mer, en appelant la
flotte phénicienne qu'il faisait équiper et en
augmentant le nombre des mercenaires grecs. Il
fallait, au contraire, laisser la domination sur terre
et sur mer partagée entre les deux peuples et offrir
continuellement au Roi la latitude d'opposer l'un
d'eux à celui qui lui causerait de l'embarras. Par
contre, si la suprématie sur terre et sur mer venait
à être concentrée dans les mêmes mains, le Roi ne
saurait à quels alliés faire appel pour ruiner le
peuple le plus puissant et il se verrait obligé
d'engager plus tard une lutte coûteuse et pleine de
périls. Les risques seraient moins grands, la
dépense moins forte, sa sécurité complète, s'il
laissait les Grecs se détruire les uns les autres.
Mieux valait, disait-il, associer les Athéniens à
l'empire du Roi, ils étaient moins portés à chercher
la domination sur terre ; tant en actions qu'en
paroles, c'était leur concours qui pour la guerre
était le plus utile ; ils soumettraient à leur propre
pouvoir les contrées maritimes et au pouvoir du
Roi les Grecs de son empire. Au contraire, les
Lacédémoniens viendraient les délivrer. Il ne fallait
pas attendre d'eux qu'affranchissant du joug des
Athéniens d'autres Grecs, ils ne les affranchissent
pas également du joug des Perses. Le seul moyen
état de les empêcher de terrasser les Athéniens.
Alcibiade conseillait donc à Tissaphernès d'user les
uns par les autres et quand dans la mesure du
possible il aurait amoindri les Athéniens, de
chasser les Péloponnésiens du pays.
Telles étaient aussi, en général, les vues de
Tissaphernès, autant qu'on peut en juger par les
événements. Les conseils d'Alcibiade lui
paraissaient excellents et il lui accordait sa
confiance. Aussi subvint-il chichement à la solde
des Péloponnésiens et refusa-t-il de les laisser
combattre sur mer. En prétendant que la flotte
phénicienne allait arriver et qu'on aurait alors une
supériorité manifeste, il compromit leurs affaires,
affaiblit le mordant de leur marine devenue alors
très puissante. En tout, il montra une mauvaise
volonté évidente à les aider dans la conduite de la
guerre.
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