[15a,2] Δεῖ δ´ εὐγνωμόνως ἀκούειν περὶ αὐτῆς· καὶ γὰρ
ἀπωτάτω ἐστί, καὶ οὐ πολλοὶ τῶν ἡμετέρων κατώπτευσαν
αὐτήν· οἱ δὲ καὶ ἰδόντες μέρη τινὰ εἶδον, τὰ δὲ
πλείω λέγουσιν ἐξ ἀκοῆς· καὶ ἃ εἶδον δὲ ἐν παρόδῳ στρατιωτικῇ
καὶ δρόμῳ κατέμαθον· διόπερ οὐδὲ τὰ αὐτὰ
περὶ τῶν αὐτῶν ἐξαγγέλλουσι, καὶ ταῦτα συγγράψαντες
ὡς ἂν πεφροντισμένως ἐξητασμένα, τινὲς δ´ αὐτῶν καὶ
συστρατεύσαντες ἀλλήλοις καὶ συνεπιδημήσαντες, καθάπερ
οἱ Ἀλεξάνδρῳ συγκαταστρεψάμενοι τὴν Ἀσίαν·
ἀλλ´ ἕκαστος ἑκάστῳ τἀναντία λέγει πολλάκις. ὅπου
δὲ καὶ περὶ τῶν ὁραθέντων οὕτω διαφέρονται, τί δεῖ
νομίζειν περὶ τῶν ἐξ ἀκοῆς;
| [15a,2] Au préalable, nous réclamerons l'indulgence du lecteur pour ce que nous
avons à dire de l'Inde. L'Inde est un pays si reculé ! Il y a si peu de
Grecs jusqu'ici qui aient pu l'explorer ! Ajoutons que ceux-là mêmes qui
l'ont vue n'en ont vu que des parties et ont parlé de tout le reste sur de
simples ouï-dire ; que le peu qu'ils ont vu, ils l'ont mal vu, en courant,
à la façon de soldats qui traversent un pays sans s'arrêter ; qu'on
s'explique par là comment les mêmes choses ne sont pas dépeintes de même
dans des Histoires écrites toutes soi-disant avec la plus scrupuleuse
exactitude par des frères d'armes, par des compagnons de voyage (ce qui
est le cas de tous ceux qui suivirent Alexandre à la conquête de l'Inde) ;
comment il arrive même que le plus souvent ces auteurs disent tout le
contraire les uns des autres. Or, si leurs récits diffèrent à ce point sur
les choses qu'ils ont vues, que penser de celles qu'ils nous transmettent
sur de simples informations ?
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