|
[700] ὃ τᾷδε θάλλει μέγιστα χώρᾳ,
γλαυκᾶς παιδοτρόφου φύλλον ἐλαίας·
τὸ μέν τις οὐ νεαρὸς οὐδὲ γήρᾳ
συνναίων ἁλιώσει χερὶ πέρσας· ὁ γὰρ αἰὲν ὁρῶν κύκλος
705 λεύσσει νιν μορίου Διὸς
χἀ γλαυκῶπις Ἀθάνα.
ἄλλον δ᾽ αἶνον ἔχω ματροπόλει τᾷδε κράτιστον
710 δῶρον τοῦ μεγάλου δαίμονος, εἰπεῖν, χθονὸς αὔχημα μέγιστον,
εὔιππον, εὔπωλον, εὐθάλασσον.
ὦ παῖ Κρόνου, σὺ γάρ νιν εἰς
τόδ᾽ εἷσας αὔχημ᾽, ἄναξ Ποσειδάν,
715 ἵπποισιν τὸν ἀκεστῆρα χαλινὸν
πρώταισι ταῖσδε κτίσας ἀγυιαῖς.
ἁ δ᾽ εὐήρετμος ἔκπαγλ᾽ ἁλία χερσὶ παραπτομένα πλάτα
θρῴσκει, τῶν ἑκατομπόδων
Νηρῄδων ἀκόλουθος.
(Ἀντιγόνη)
720 ὦ πλεῖστ᾽ ἐπαίνοις εὐλογούμενον πέδον,
νῦν σὸν τὰ λαμπρὰ ταῦτα δὴ φαίνειν ἔπη.
(Οἰδίπους) τί δ᾽ ἔστιν, ὦ παῖ, καινόν;
(Ἀντιγόνη) -- ἆσσον ἔρχεται
(Κρέων) ὅδ᾽ ἡμῖν οὐκ ἄνευ πομπῶν, πάτερ.
(Οἰδίπους)
ὦ φίλτατοι γέροντες, ἐξ ὑμῶν ἐμοὶ
725 φαίνοιτ᾽ ἂν ἤδη τέρμα τῆς σωτηρίας.
(Χορός)
θάρσει, παρέσται· καὶ γὰρ εἰ γέρων ἐγώ,
τὸ τῆσδε χώρας οὐ γεγήρακεν σθένος.
(Κρέων)
ἄνδρες χθονὸς τῆσδ᾽ εὐγενεῖς οἰκήτορες,
ὁρῶ τιν᾽ ὑμᾶς ὀμμάτων εἰληφότας
730 φόβον νεώρη τῆς ἐμῆς ἐπεισόδου,
ὃν μήτ᾽ ὀκνεῖτε μήτ᾽ ἀφῆτ᾽ ἔπος κακόν.
ἥκω γὰρ οὐχ ὡς δρᾶν τι βουληθείς, ἐπεὶ
γέρων μέν εἰμι, πρὸς πόλιν δ᾽ ἐπίσταμαι
σθένουσαν ἥκων, εἴ τιν᾽ Ἑλλάδος, μέγα.
735 ἀλλ᾽ ἄνδρα τόνδε τηλικόσδ᾽ ἀπεστάλην
πείσων ἕπεσθαι πρὸς τὸ Καδμείων πέδον,
οὐκ ἐξ ἑνὸς στείλαντος, ἀλλ᾽ ἀνδρῶν ὑπὸ
πάντων κελευσθείς, οὕνεχ᾽ ἧκέ μοι γένει
τὰ τοῦδε πενθεῖν πήματ᾽ εἰς πλεῖστον πόλεως.
740 ἀλλ᾽ ὦ ταλαίπωρ᾽ Οἰδίπους, κλύων ἐμοῦ
ἱκοῦ πρὸς οἴκους. πᾶς σε Καδμείων λεὼς
καλεῖ δικαίως, ἐκ δὲ τῶν μάλιστ᾽ ἐγώ,
ὅσῳπερ, εἰ μὴ πλεῖστον ἀνθρώπων ἔφυν
κάκιστος, ἀλγῶ τοῖσι σοῖς κακοῖς, γέρον,
745 ὁρῶν σε τὸν δύστηνον ὄντα μὲν ξένον,
ἀεὶ δ᾽ ἀλήτην κἀπὶ προσπόλου μιᾶς
βιοστερῆ χωροῦντα· τὴν ἐγὼ τάλας
οὐκ ἄν ποτ᾽ ἐς τοσοῦτον αἰκίας πεσεῖν
ἔδοξ᾽, ὅσον πέπτωκεν ἥδε δύσμορος,
| [700] et qui fleurit à une très grande hauteur dans ce pays;
l'olivier à la feuille bleuâtre qui ombrage le berceau de l'enfance,
élève dans cette contrée ses rameaux vigoureux.
Les chefs ennemis, jeunes ou vieux, ne pourront
jamais l'arracher ni le détruire; Zeus Morios et Athéna aux yeux
biens veillent sans cesse sur leur arbre chéri.
Il reste encore à dire un des plus beaux titres de gloire de cette
auguste cité, don précieux d'un dieu puissant, l'art d'élever, de conduire
les coursiers, et celui de voguer sur les mers. Fils de Saturne,
souverain Poseidon, c'est toi qui l'as élevée à ce degré de gloire; c'est
grâce à toi qu'Athènes a connu la première le frein qui dompte les
coursiers, et que le vaisseau poussé par la rame que gouverne une
main habile vogue sur les flots avec rapidité, émule des Néréides aux
pieds agiles.
ANTIGONE. O contrée célébrée par tant d'éloges, voici le moment de
justifier cette brillante renommée.
OEDIPE. Qu'y a-t-il de nouveau, ma fille?
ANTIGONE. Mon père, voici Créon qui vient à nous : il n'est pas seul.
OEDIPE. Généreux vieillards, c'est de vous maintenant
que j'attends mon salut.
LE CHOEUR. Rassure-toi, j'en réponds. Si je suis vieux , la force
de cette contrée n'a point vieilli.
CRÉON. Nobles habitants de ce pays, je lis dans vos yeux la
crainte que vous inspire mon arrivée soudaine ; mais bannissez ces
alarmes, et abstenez-vous de paroles outrageantes. Je ne viens point
user ici de violence; je suis vieux , et cette ville, je le sais, est la plus
puissante de la Grèce. Je viens avec les seules armes de la persuasion
engager ce vieillard à me suivre aux champs Thébains ; et ce n'est
point un seul homme, c'est une ville entière qui m'envoie, à cause
de la parenté qui me rend, plus que tout autre, sensible aux maux
de cet infortuné. Pour toi, malheureux OEdipe, écoute-moi, et reviens
dans ta patrie. Tout le peuple de Thèbes te rappelle avec justice,
et moi plus que tous les Thébains. No dois-je pas, en effet (si
je ne suis le plus pervers des hommes) souffrir de tes misères, lorsque
je te vois malheureux, toujours errant, mendiant l'hospitalité, privé
de nourriture, sans autre appui que cette jeune fille? Hélas! pouvais-je
jamais penser qu'elle serait un jour réduite à l'état affreux ou je la vois,
| [750] ἀεί σε κηδεύουσα καὶ τὸ σὸν κάρα
πτωχῷ διαίτῃ, τηλικοῦτος, οὐ γάμων
ἔμπειρος, ἀλλὰ τοὐπιόντος ἁρπάσαι.
ἆρ᾽ ἄθλιον τοὔνειδος, ὦ τάλας ἐγώ,
ὠνείδισ᾽ εἰς σὲ κἀμὲ καὶ τὸ πᾶν γένος;
755 ἀλλ᾽ οὐ γὰρ ἔστι τἀμφανῆ κρύπτειν, σύ νιν
πρὸς θεῶν πατρῴων, (Οἰδίπους), πεισθεὶς ἐμοὶ
κρύψον, θελήσας ἄστυ καὶ δόμους μολεῖν
τοὺς σοὺς πατρῴους, τήνδε τὴν πόλιν φίλως
εἰπών· ἐπαξία γάρ· ἡ δ᾽ οἴκοι πλέον
760 δίκῃ σέβοιτ᾽ ἄν, οὖσα σὴ πάλαι τροφός.
(Οἰδίπους)
ὦ πάντα τολμῶν κἀπὸ παντὸς ἂν φέρων
λόγου δικαίου μηχάνημα ποικίλον,
τί ταῦτα πειρᾷ κἀμὲ δεύτερον θέλεις
ἑλεῖν ἐν οἷς μάλιστ᾽ ἂν ἀλγοίην ἁλούς;
765 πρόσθεν τε γάρ με τοῖσιν οἰκείοις κακοῖς
νοσοῦνθ᾽, ὅτ᾽ ἦν μοι τέρψις ἐκπεσεῖν χθονός,
οὐκ ἤθελες θέλοντι προσθέσθαι χάριν·
ἀλλ᾽ ἡνίκ᾽ ἤδη μεστὸς ἦ θυμούμενος
καὶ τοὐν δόμοισιν ἦν διαιτᾶσθαι γλυκύ,
770 τότ᾽ ἐξεώθεις κἀξέβαλλες, οὐδέ σοι
τὸ συγγενὲς τοῦτ᾽ οὐδαμῶς τότ᾽ ἦν φίλον·
νῦν τ᾽ αὖθις ἡνίκ᾽ εἰσορᾷς πόλιν τέ μοι
ξυνοῦσαν εὔνουν τήνδε καὶ γένος τὸ πᾶν,
πειρᾷ μετασπᾶν, σκληρὰ μαλθακῶς λέγων.
775 καίτοι τίς αὕτη τέρψις ἄκοντας φιλεῖν;
ὥσπερ τις εἴ σοι λιπαροῦντι μὲν τυχεῖν
μηδὲν διδοίη μηδ᾽ ἐπαρκέσαι θέλοι,
πλήρη δ᾽ ἔχοντι θυμὸν ὧν χρῄζοις, τότε
δωροῖθ᾽, ὅτ᾽ οὐδὲν ἡ χάρις χάριν φέροι·
780 ἆρ᾽ ἂν ματαίου τῆσδ᾽ ἂν ἡδονῆς τύχοις;
τοιαῦτα μέντοι καὶ σὺ προσφέρεις ἐμοί,
λόγῳ μὲν ἐσθλά. τοῖσι δ᾽ ἔργοισιν κακά.
φράσω δὲ καὶ τοῖσδ᾽, ὥς σε δηλώσω κακόν.
ἥκεις ἔμ᾽ ἄξων, οὐχ᾽ ἵν᾽ ἐς δόμους ἄγῃς,
785 ἀλλ᾽ ὡς πάραυλον οἰκίσῃς, πόλις δέ σοι
κακῶν ἄνατος τῆσδ᾽ ἀπαλλαχθῇ χθονός.
οὐκ ἔστι σοι ταῦτ᾽, ἀλλά σοι τάδ᾽ ἔστ᾽, ἐκεῖ
χώρας ἀλάστωρ οὑμὸς ἐνναίων ἀεί·
ἔστιν δὲ παισὶ τοῖς ἐμοῖσι τῆς ἐμῆς
790 χθονὸς λαχεῖν τοσοῦτον, ἐνθανεῖν μόνον.
ἆρ᾽ οὐκ ἄμεινον ἢ σὺ τἀν Θήβαις φρονῶ;
πολλῷ γ᾽, ὅσῳπερ κἀκ σαφεστέρων κλύω,
Φοίβου τε καὐτοῦ Ζηνός, ὃς κείνου πατήρ.
τὸ σὸν δ᾽ ἀφῖκται δεῦρ᾽ ὑπόβλητον στόμα,
795 πολλὴν ἔχον στόμωσιν· ἐν δὲ τῷ λέγειν
κάκ᾽ ἂν λάβοις τὰ πλείον᾽ ἢ σωτήρια.
ἡμᾶς δ᾽ ἔα ζῆν ἐνθάδ᾽· οὐ γὰρ ἂν κακῶς
οὐδ᾽ ὧδ᾽ ἔχοντες ζῷμεν, εἰ τερποίμεθα.
| [750] forcée, pour conserver tes jours, d'implorer les secours
de la pitié, privée à son âge des douceurs de l'hymen, et exposée à
devenir la proie du premier ravisseur? Malheureux que je suis ! Quel
opprobre mes paroles ont jeté sur toi, sur moi, sur toute notre famille!
Mais si l'on ne peut cacher ce que tout le monde connaît, toi
du moins, je t'en conjure au nom des dieux de la patrie , cache aujourd'hui
ta honte, en consentant à rentrer dans la ville, dans le palais
de tes pères, et dis un tendre adieu à cette ville : elle le mérite,
mais la patrie a plus de droits à tes hommages :
c'est elle autrefois qui t'a nourri.
OEDIPE. Homme prêt à tout oser, et qui dans toutes tes actions
sais couvrir tes manoeuvres d'une apparence de justice, pourquoi
tenter encore de me tromper et de m'envelopper dans un piége où je
gémirais surtout de tomber? Lorsque naguère, accablé sous le poids
de mes infortunes domestiques, je n'aspirais qu'à l'exil, tu as refusé
rette grâce à mes voeux. Mais lorsque ensuite, mon désespoir apaisé,
il m'eût été doux de vivre dans ma patrie, alors tu m'as banni, tu
m'as chassé , et cette parenté dont tu parles n'éveilla en toi aucun
sentiment de tendresse. Aujourd'hui que tu vois cette ville et tout un
peuple m'accueillir avec bonté, tu veux m'arracher de cet asile , en
cachant ta cruauté sous une feinte douceur. C'est donc un bien grand
plaisir que d'aimer ceux qui rejettent votre amitié? Si quelqu'un,
après vous avoir refusé ce que vous demandiez avec instance, venait
vous l'accorder, alors que votre coeur rassasié ne désirerait plus rien,
et que le bienfait n'aurait plus de charmes pour vous, ne serait-ce
pas, je vous le demande , une vaine générosité? Telle est cependant
ton offre; elle cache sous des paroles bienveillantes des desseins
perfides. Je vais parler aussi à ces habitants, afin de dévoiler ta noirceur.
Tu viens m'emmener, dis-tu , mais ce n'est pas pour me conduire
dans mon palais ; c'est pour me reléguer sur les frontières de
Thèbes, et preserver ainsi ta ville des maux dont cette contrée la
menace. Mals tes efforts seront vains. Mon génie vengeur habitera
toujours au milieu de vous , et mes fils n'auront de mon héritage
qu'autant de terre qu'il leur en faut pour y mourir. Ne suis-je pas
mieux instruit que toi des destinées de Thèbes? Beaucoup mieux
sans doute, car j'ai des garants infaillibles, Apollon et Zeus qui lui
donna le jour. Tu es venu apporter ici des paroles pleines de fausseté
et d'artifice ; mais ton éloquence te sera plus funeste qu'utile. Retire-
toi donc ; car jamais tu ne réussiras à me persuader; laisse-nous
vivre en ces lieux ; même en l'état où nous sommes, nous ne pouvons
être malheureux, si notre sort nous plaît.
| | |