HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Sextus Empiricus, Les Hypotyposes ou Institutions Pyrrhoniennes, livre I

Chapitre 14d

  Chapitre 14d

[1,14d] Ἐπεὶ δὲ φίλαυτοί τινες ὄντες οἱ δογματικοί φασι δεῖν τῶν ἄλλων ἀνθρώπων ἑαυτοὺς προκρίνειν ἐν τῇ κρίσει τῶν πραγμάτων, ἐπιστάμεθα μὲν ὅτι ἄτοπός ἐστιν ἀξίωσις αὐτῶν (μέρος γάρ εἰσι καὶ αὐτοὶ τῆς διαφωνίας· καὶ ἐὰν αὑτοὺς προκρίνοντες οὕτω κρίνωσι τὰ φαινόμενα, πρὶν ἄρξασθαι τῆς κρίσεως τὸ ζητούμενον συναρπάζουσιν, ἑαυτοῖς τὴν κρίσιν ἐπιτρέποντες), ὅμως δ´ οὖν ἵνα καὶ ἐπὶ ἑνὸς ἀνθρώπου τὸν λόγον ἱστάντες, οἷον τοῦ παρ´ αὐτοῖς ὀνειροπολουμένου σοφοῦ, ἐπὶ τὴν ἐποχὴν καταντῶμεν, τὸν τρίτον τῇ τάξει τρόπον προχειριζόμεθα. Τοῦτον δ´ ἐλέγομεν τὸν ἀπὸ τῆς διαφορᾶς τῶν αἰσθήσεων. Ὅτι δὲ διαφέρονται αἱ αἰσθήσεις πρὸς ἀλλήλας, πρόδηλον. Αἱ γοῦν γραφαὶ τῇ μὲν ὄψει δοκοῦσιν εἰσοχὰς καὶ ἐξοχὰς ἔχειν, οὐ μὴν καὶ τῇ ἁφῇ. Καὶ τὸ μέλι τῇ μὲν γλώττῃ ἡδὺ φαίνεται ἐπί τινων, τοῖς δ´ ὀφθαλμοῖς ἀηδές· ἀδύνατον οὖν ἐστιν εἰπεῖν πότερον ἡδύ ἐστιν εἰλικρινῶς ἀηδές. Καὶ ἐπὶ τοῦ μύρου ὁμοίως· τὴν μὲν γὰρ ὄσφρησιν εὐφραίνει, τὴν δὲ γεῦσιν ἀηδίζει. Τό τε εὐφόρβιον ἐπεὶ τοῖς μὲν ὀφθαλμοῖς λυπηρόν ἐστι τῷ δὲ ἄλλῳ σώματι παντὶ ἄλυπον, οὐχ ἕξομεν εἰπεῖν, πότερον ἄλυπόν ἐστιν εἰλικρινῶς τοῖς σώμασιν ὅσον ἐπὶ τῇ ἑαυτοῦ φύσει λυπηρόν. Τό τε ὄμβριον ὕδωρ ὀφθαλμοῖς μέν ἐστιν ὠφέλιμον, ἀρτηρίαν δὲ καὶ πνεύμονα τραχύνει, καθάπερ καὶ τὸ ἔλαιον, καίτοι τὴν ἐπιφάνειαν παρηγοροῦν. Καὶ θαλαττία νάρκη τοῖς μὲν ἄκροις προστεθεῖσα ναρκᾶν ποιεῖ, τῷ δ´ ἄλλῳ σώματι ἀλύπως παρατίθεται. Διόπερ ὁποῖον μὲν ἔστι πρὸς τὴν φύσιν ἕκαστον τούτων οὐχ ἕξομεν λέγειν, ὁποῖον δὲ φαίνεται ἑκάστοτε δυνατὸν εἰπεῖν. Καὶ ἄλλα δὲ πλείω τούτων ἔνεστι λέγειν· ἀλλ´ ἵνα μὴ διατρίβωμεν, διὰ τὴν πρόθεσιν {τοῦ τρόπου} τῆς συγγραφῆς ἐκεῖνο λεκτέον. Ἕκαστον τῶν φαινομένων ἡμῖν αἰσθητῶν ποικίλον ὑποπίπτειν δοκεῖ, οἷον τὸ μῆλον λεῖον εὐῶδες γλυκὺ ξανθόν. Ἄδηλον οὖν πότερόν ποτε ταύτας μόνας ὄντως ἔχει τὰς ποιότητας, μονόποιον μέν ἐστιν, παρὰ δὲ τὴν διάφορον κατασκευὴν τῶν αἰσθητηρίων διάφορον φαίνεται, καὶ πλείονας μὲν τῶν φαινομένων ἔχει ποιότητας, ἡμῖν δ´ οὐχ ὑποπίπτουσί τινες αὐτῶν. Μονόποιον μὲν γὰρ εἶναι τοῦτο ἐνδέχεται λογίζεσθαι ἐκ τῶν ἔμπροσθεν ἡμῖν εἰρημένων περὶ τῆς εἰς τὰ σώματα ἀναδιδομένης τροφῆς καὶ τοῦ ὕδατος τοῦ εἰς τὰ δένδρα ἀναδιδομένου καὶ τοῦ πνεύματος τοῦ {ἐν} αὐλοῖς καὶ σύριγξι καὶ τοῖς παραπλησίοις ὀργάνοις ἐμπνεομένου· δύναται γὰρ καὶ τὸ μῆλον μονοειδὲς μὲν εἶναι, διάφορον δὲ θεωρεῖσθαι παρὰ τὴν διαφορὰν τῶν αἰσθητηρίων περὶ γίνεται αὐτοῦ ἀντίληψις. Πλείονας δὲ τῶν φαινομένων ἡμῖν ποιοτήτων ἔχειν τὸ μῆλον ποιότητας δύνασθαι οὕτως ἐπιλογιζόμεθα. Ἐννοήσωμέν τινα ἐκ γενετῆς ἁφὴν μὲν ἔχοντα καὶ ὄσφρησιν καὶ γεῦσιν, μήτε δὲ ἀκούοντα μήτε ὁρῶντα. Οὗτος τοίνυν ὑπολήψεται μήτε ὁρατόν τι εἶναι τὴν ἀρχὴν μήτε ἀκουστόν, ἀλλὰ μόνα ἐκεῖνα τὰ τρία γένη τῶν ποιοτήτων ὑπάρχειν ὧν ἀντιλαμβάνεσθαι δύναται. Καὶ ἡμᾶς οὖν ἐνδέχεται τὰς πέντε μόνας αἰσθήσεις ἔχοντας μόνον ἀντιλαμβάνεσθαι, ἐκ τῶν περὶ τὸ μῆλον ποιοτήτων, ὧν ἐσμεν ἀντιληπτικοί· ὑποκεῖσθαι δὲ ἄλλας οἷόν τέ ἐστι ποιότητας, ὑποπιπτούσας ἑτέροις αἰσθητηρίοις, ὧν ἡμεῖς οὐ μετεσχήκαμεν, διὸ οὐδὲ ἀντιλαμβανόμεθα τῶν κατ´ αὐτὰς αἰσθητῶν. Ἀλλ´ φύσις συνεμετρήσατο, φήσει τις, τὰς αἰσθήσεις πρὸς τὰ αἰσθητά. Ποία φύσις, διαφωνίας τοσαύτης ἀνεπικρίτου παρὰ τοῖς δογματικοῖς οὔσης περὶ τῆς ὑπάρξεως τῆς κατ´ αὐτήν; γὰρ ἐπικρίνων αὐτὸ τοῦτο εἰ ἔστι φύσις, εἰ μὲν ἰδιώτης εἴη, ἄπιστος ἔσται κατ´ αὐτούς, φιλόσοφος δὲ ὢν μέρος ἔσται τῆς διαφωνίας καὶ κρινόμενος αὐτὸς ἀλλ´ οὐ κριτής. Πλὴν ἀλλ´ εἰ ἐνεχώρει καὶ ταύτας μόνας ὑποκεῖσθαι παρὰ τῷ μήλῳ τὰς ποιότητας ὧν ἀντιλαμβάνεσθαι δοκοῦμεν, καὶ πλείους τούτων, πάλιν μηδὲ τὰς ἡμῖν ὑποπιπτούσας, ἄδηλον ἡμῖν ἔσται ὁποῖόν ἐστι τὸ μῆλον. δὲ αὐτὸς καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων αἰσθητῶν λόγος. Τῶν αἰσθήσεων μέντοι μὴ καταλαμβανουσῶν τὰ ἐκτός, οὐδὲ διάνοια ταῦτα δύναται καταλαμβάνειν, σφαλλουσῶν αὐτὴν τῶν ὁδηγῶν ὥστε καὶ διὰ τοῦτον τὸν λόγον περὶ τῶν ἐκτὸς ὑποκειμένων ἐποχὴ συνάγεσθαι δόξει. [1,14d] Du troisième moyen de l'Époque. Les dogmatiques, séduits par leur amour propre, prétendent qu'on doit les préférer aux autres hommes, quand il s'agit de juger des choses. C'est là une demande absurde, s'il y en eut jamais. Car enfin ils sont parties intéressées dans cette dispute et quand ils se jugent eux-mêmes dignes de décider, préférablement aux autres, et qu'en conséquence de cela, ils veulent juger définitivement de la vérité interne des phénomènes; par cela qu'ils s'attribuent ce jugement, ils se conduisent à l'égard de ces apparences dont il s'agit de juger, comme si elles étaient jugées, avant même qu'ils aient commencé à en juger. Mais supposons maintenant qu'il n'y ait qu'un seul homme, tel que pourrait être le sage idéal ou imaginaire des stoïciens. Je dis que le troisième moyen de l'Époque nous obligera encore à suspendre notre jugement. Ce troisième moyen est pris de la diversité des sens qui est tout évidente. Les tableaux de plate peinture, par exemple, semblent aux yeux avoir quelques parties sortantes et relevées, et d'autres enfoncées ; mais au toucher, cela ne paraît pas de même. Le miel paraît agréable à la langue pour quelques-uns, mais il leur est désagréable à voir: ainsi on ne peut pas dire si par lui même il est agréable ou désagréable. Il faut dire la même chose du parfum liquide ; il est agréable à l'odorat, et désagréable au goût. Tel est encore l'euphorbe, qui incommode les yeux, mais non pas le reste du corps : ce qui fait que nous ne pouvons pas dire, s'il est purement et simplement mauvais aux corps, ou s'il ne l'est pas. L'eau de pluie est bonne pour les yeux, mais elle enroue et elle incommode la trachée artère, et le poumon ; comme fait aussi l'huile, quoiqu'elle adoucisse la peau. Outre cela la torpille de mer, appliquée aux extrémités du corps, engourdit ; et si on l'applique sur quelque autre partie, elle ne fait point de mal. C'est pourquoi nous ne pouvons pas dire quelle est la nature de ces choses là, mais seulement quelles elles paraissent à nos sens. Nous pourrions rapporter encore ici plusieurs choses ; mais pour ne pas nous y arrêter plus longtemps que ne le demande le dessein de cet ouvrage, nous dirons seulement que toutes les choses sensibles tombent sous nos sens en diverses manières, et causent en nous de différentes perceptions. Telle est, par exemple, une pomme qui nous paraît polie, de bonne odeur, douce, et d'une certaine couleur : mais nous ne sommes pas certains, si elle a ces seules qualités, ou si plutôt elle n'en a qu'une ; et si elle ne paraît avoir toutes ces qualités différentes, qu'à cause que les organes de nos sens se trouvent constitués de différentes manières ; ou enfin si elle n'a pas plus de qualités que celles qui nous paraissent, quelques-unes de ces qualités ne pouvant pas tomber sous nos sens. On pourrait dire que cette pomme n'a peut-être qu'une seule qualité, si l'on fait attention à ce que nous avons dit d'une seule et même nourriture qui se digère, et qui se distribue dans toutes les parties de nos corps; et si l'on pense à ce que nous avons dit de l'eau qui se partage dans les arbres, et du souffle des trompettes, des flûtes, et d'autres instruments semblables. Il pourrait arriver de même que la pomme n'eût qu'une seule qualité, et que néanmoins nous y en remarquassions plusieurs, à cause de la diversité des organes des sens, qui nous la font apercevoir. On pourrait dire aussi que la pomme a peut-être plus de qualités qu'il ne nous paraît ; et voici comment. Imaginons-nous qu'un homme n'a depuis sa naissance que le toucher, l'odorat, et le goût, et qu'il est privé de l'ouïe et de la vue. Cet homme-là croira qu'il n'y a rien qui puisse être aperçu par la vue et par l'ouïe, et qu'il n'y a que les trois sortes de qualités qu'il aperçoit par ses trois sens. Il peut donc arriver que comme nous n'avons que cinq sens, nous n'apercevons de plusieurs qualités qui sont réellement dans la pomme, que celles que nos sens nous permettent d'y apercevoir; et que plusieurs autres qualités de cette pomme pourraient tomber sous d'autres organes des sens, que nous n'avons pas : ce qui est cause que nous n'apercevons pas ces choses, qui seraient sensibles par le moyen de ces organes. Mais la nature (dira quelqu'un) a proportionné les sens aux choses sensibles. De quelle nature entend-on parler, lorsque les dogmatiques disputent encore avec force sur ce que c'est que la nature, sans avoir pu liquider cette affaire jusqu'à présent ? Si quelqu'un veut décider cette question, ce que c'est que la nature, et que ce quelqu'un soit un ignorant, les dogmatiques eux-mêmes le croiront indigne de toute croyance ; et, s'il est philosophe, il sera une des parties discordantes, et bien loin d'être juge, il faudra examiner son opinion et en juger. Disons donc que s'il n'y a point d'absurdité à dire que les qualités différentes que nous croyons apercevoir dans une pomme, y sont effectivement, et plusieurs autres encore avec celles-là, ou bien à dire au contraire, que ces qualités mêmes, qui tombent sous nos sens n'existent point au-dehors, nous ne saurons pas certainement quelle est cette pomme, et nous raisonnerons de la même manière à l'égard de toutes les choses sensibles. Or si les objets extérieurs sont incompréhensibles aux sens, l'entendement ne pourra pas non plus les comprendre, et par cette raison encore nous conclurons, que nous devons nous arrêter à l'Époque, et suspendre notre jugement à l'égard des objets extérieurs.


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Dernière mise à jour : 9/10/2008