[46] Πλάτων μὲν οὖν, ἤδη πρὸς τῷ τελευτᾶν γενόμενος,
ὕμνει τὸν αὑτοῦ δαίμονα καὶ τὴν τύχην, ὅτι πρῶτον μὲν
ἄνθρωπος, οὐκ ἄλογον τῇ φύσει θηρίον, εἶθ' Ἕλλην, οὐ
βάρβαρος γένοιτο, πρὸς δὲ τούτοις ὅτι τοῖς Σωκράτους (2)
χρόνοις ἀπήντησεν ἡ γένεσις αὐτοῦ. καὶ νὴ Δία τὸν Ταρσέα
λέγουσιν Ἀντίπατρον ὡσαύτως ὑπὸ τὴν τελευτὴν
ἀναλογιζόμενον ὧν τύχοι μακαρίων, μηδὲ τῆς εἰς Ἀθήνας
οἴκοθεν εὐπλοίας ἐπιλαθέσθαι, καθάπερ φιλοχρήστου τῆς
τύχης ἅπασαν δόσιν εἰς μεγάλην χάριν τιθέμενον καὶ σῴζοντα
τῇ μνήμῃ διὰ τέλους, ἧς οὐδέν (3) ἐστιν ἀνθρώπῳ ταμιεῖον
ἀγαθῶν βεβαιότερον. τοὺς δ' ἀμνήμονας καὶ ἀνοήτους ὑπεκρεῖ
τὰ γιγνόμενα μετὰ τοῦ χρόνου· διὸ μηθὲν στέγοντες μηδὲ
διατηροῦντες, ἀεὶ κενοὶ μὲν ἀγαθῶν, πλήρεις δ' ἐλπίδων, πρὸς
τὸ μέλλον (4) ἀποβλέπουσι, τὸ παρὸν προϊέμενοι. καίτοι τὸ μὲν
ἂν ἡ τύχη κωλῦσαι δύναιτο, τὸ δ' ἀναφαίρετόν ἐστιν· ἀλλ' ὅμως
τοῦτο τῆς ψυχῆς ὡς ἀλλότριον ἐκβάλλοντες, ἐκεῖνο (5) τὸ
ἄδηλον ὀνειρώττουσιν, εἰκότα πάσχοντες. πρὶν γὰρ ἐκ λόγου
καὶ παιδείας ἕδραν ὑποβαλέσθαι καὶ κρηπῖδα τοῖς ἔξωθεν
ἀγαθοῖς, συνάγοντες αὐτὰ καὶ συμφοροῦντες, ἐμπλῆσαι τῆς
ψυχῆς οὐ δύνανται τὸ ἀκόρεστον.
(6) Ἀποθνῄσκει δ' οὖν Μάριος, ἡμέρας ἑπτακαίδεκα τῆς
ἑβδόμης ὑπατείας ἐπιλαβών· καὶ μέγα ἔσχε παραυτίκα τὴν
Ῥώμην χάρμα καὶ θάρσος, ὡς χαλεπῆς τυραννίδος (7)
ἀπηλλαγμένην. ὀλίγαις δ' ἡμέραις ᾔσθοντο νέον
ἀντηλλαγμένοι καὶ ἀκμάζοντα ἀντὶ πρεσβύτου δεσπότην·
τοσαύτην ὁ υἱὸς αὐτοῦ Μάριος ὠμότητα καὶ πικρίαν
ἀπεδείξατο, τοὺς ἀρίστους καὶ δοκιμωτάτους ἀναιρῶν. δόξας
δὲ καὶ τολμητὴς καὶ φιλοκίνδυνος εἶναι πρὸς τοὺς πολεμίους,
ἐν ἀρχῇ παῖς Ἄρεως ὠνομάζετο, ταχὺ δὲ τοῖς (9) ἔργοις
ἐλεγχόμενος, αὖθις Ἀφροδίτης υἱὸς ἐκαλεῖτο. τέλος δὲ
κατακλεισθεὶς εἰς Πραινεστὸν ὑπὸ Σύλλα καὶ πολλὰ
φιλοψυχήσας μάτην, ὡς ἦν ἄφυκτα τῆς πόλεως ἁλισκομένης,
αὐτὸς αὑτὸν ἀπέκτεινεν.
| [46] Platon, au contraire, étant sur le point de mourir, remercia son génie et la
fortune de ce qu'il était né homme et non animal, Grec et non Barbare; mais surtout
de ce que sa vie avait concouru avec celle de Socrate. Antipater de Tarse, se
rappelant aussi, peu d'instants avant sa mort, ce qu'il avait eu d'heureux dans sa vie,
n'oublia pas sa navigation favorable de sa patrie à Athènes; il savait gré à la fortune
de ses moindres faveurs, et les conserva jusqu'à la fin dans sa mémoire, le
dépositaire le plus fidèle à qui l'homme puisse confier ses biens. LI. Mais les ingrats
et les insensés laissent s'écouler avec le temps le souvenir de tout ce qui leur arrive.
Comme ils ne mettent rien en réserve dans leur mémoire, toujours vides de biens
présents, toujours remplis d'espérances, pendant qu'ils portent leurs regards dans
l'avenir le présent leur échappe. Mais la fortune, qui peut leur ôter l'avenir, ne
saurait leur enlever le présent. Cependant ils rejettent les biens qu'ils ont déjà reçus
d'elle, comme s'ils leur étaient étrangers; et ils rêvent sans cesse à un avenir
incertain : juste punition de leur ingratitude. Trop pressés d'amasser le plus qu'ils
peuvent de ces biens extérieurs, avant que de leur avoir donné pour fondement et
pour appui la raison et la saine doctrine, ils ne sauraient jamais satisfaire la soif
insatiable qui les tourmente. LII. Marius mourut le dix-septième jour de son
consulat, et sa mort causa d'abord à Rome la plus grande joie, par la confiance
qu'elle eut d'être délivrée d'une tyrannie si cruelle. Mais dans peu de jours les
Romains sentirent qu'ils n'avaient fait que changer un maître vieux et cassé, pour un
maître jeune et plein de vigueur : tant le fils de Marius montra de cruauté et de
barbarie, en faisant mourir les personnes les plus distinguées par leur naissance et
par leurs vertus! L'audace et l'intrépidité dans les dangers, dont il avait d'abord
donné des preuves, l'avaient fait appeler le fils de Mars; mais ensuite ses actions
ayant montré en lui des qualités tout opposées, on l'appela le fils de Vénus. Enfin,
renfermé dans Préneste par Sylla, après avoir inutilement tout tenté pour sauver sa
vie, la prise de la ville ne lui laissant plus aucun moyen d'échapper, il se donna lui-même
la mort.
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