| [4]  Ἐπὶ τοὺς παλαιοὺς ἀνάγαγε τὸν λόγον, ὧν ταῖς μὲν
 τεκεῖν πρώταις, τοῖς δ´ ἰδεῖν συνέβη τικτόμενον βρέφος·
 οὔτε νόμος ἦν ἐκείνοις τεκνοτροφεῖν προστάττων οὔτε
 προσδοκία χάριτος ἢ τροφείων ‘ἐπὶ νέοις δανειζομένων’.
 χαλεπὰς δὲ μᾶλλον εἴποιμ´ ἂν εἶναι
 καὶ μνησικάκους τὰς τεκούσας τοῖς βρέφεσι, κινδύνων τε
 μεγάλων καὶ πόνων αὐταῖς γινομένων·
  ‘ὡς δ´ ὅταν ὠδίνουσαν ἔχῃ βέλος ὀξὺ γυναῖκα
 δριμύ, τό τε προϊᾶσι μογοστόκοι Εἰλείθυιαι,
 Ἥρης θυγατέρες, πικρὰς ὠδῖνας ἔχουσαι’ —
  ταῦτ´ οὐχ Ὅμηρον αἱ γυναῖκες ἀλλ´ Ὁμηρίδα γράψαι
 λέγουσι τεκοῦσαν ἢ τίκτουσαν ἔτι καὶ τὸ νύγμα τῆς ἀλγηδόνος
 ὁμοῦ πικρὸν καὶ ὀξὺ γινόμενον ἐν τοῖς σπλάγχνοις
 ἔχουσαν. ἀλλὰ τὸ φύσει φιλόστοργον ἔκαμπτε καὶ ἦγεν·
 ἔτι θερμὴ καὶ διαλγὴς καὶ κραδαινομένη τοῖς πόνοις οὐχ
 ὑπερέβη τὸ νήπιον οὐδ´ ἔφυγεν, ἀλλ´ ἐπεστράφη καὶ προσεμειδίασε
 καὶ ἀνείλετο καὶ ἠσπάσατο, μηδὲν ἡδὺ καρπουμένη
 μηδὲ χρήσιμον ἀλλ´ ἐπιπόνως καὶ ταλαιπώρως ἀναδεχομένη,
 τῶν σπαργάνων ‘ἐρειπίοις
  θάλπουσα καὶ ψήχουσα, καὶ πόνῳ πόνον
 ἐκ νυκτὸς ἀλλάσσουσα τὸν μεθ´ ἡμέραν’.
  τίνων ταῦτα μισθῶν ἢ χρειῶν ἐκείνοις; ἀλλ´ οὐδὲ τοῖς νῦν·
 αἱ γὰρ ἐλπίδες ἄδηλοι καὶ μακραί. ἀμπελῶν´ ἰσημερίας
 ἐαρινῆς σκάψας μετοπωρινῆς ἐτρύγησε, πυρὸν ἔσπειρε
 δυομένης Πλειάδος εἶτ´ ἀνατελλούσης θερίζει, βόες καὶ
 ἵπποι καὶ ὄρνιθες ἕτοιμα τίκτουσιν ἐπὶ τὰς χρείας· ἀνθρώπου
 δ´ ἡ μὲν ἐκτροφὴ πολύπονος ἡ δ´ αὔξησις βραδεῖα, τῆς
 δ´ ἀρετῆς μακρὰν οὔσης προαποθνῄσκουσιν οἱ πλεῖστοι
 πατέρες. οὐκ ἐπεῖδε τὴν Σαλαμῖνα Νεοκλῆς τὴν Θεμιστοκλέους
 οὐδὲ τὸν Εὐρυμέδοντα Μιλτιάδης τὸν Κίμωνος,
 οὐδ´ ἤκουσε Περικλέους Ξάνθιππος δημηγοροῦντος οὐδ´
 Ἀρίστων Πλάτωνος φιλοσοφοῦντος, οὐδ´ Εὐριπίδου καὶ
 Σοφοκλέους νίκας οἱ πατέρες ἔγνωσαν· ψελλιζόντων καὶ
 συλλαβιζόντων ἠκροῶντο καὶ κώμους καὶ πότους καὶ ἔρωτας
 αὐτῶν οἷα νέοι πλημμελούντων ἐπεῖδον· | ὥστ´ ἐπαινεῖσθαι
 καὶ μνημονεύεσθαι τοῦ Εὐήνου τοῦτο μόνον, ὡς
 ἐπέγραψεν
  ‘ἢ δέος ἢ λύπη παῖς πατρὶ πάντα χρόνον·’
 ἀλλ´ ὅμως οὐ παύονται παῖδας τρέφοντες μάλιστα δ´ οἱ
 παίδων ἥκιστα δεόμενοι. γελοῖον γάρ, εἴ τις οἴεται τοὺς
 πλουσίους θύειν καὶ χαίρειν γενομένων αὐτοῖς τέκνων,
 ὅτι τοὺς θρέψοντας ἕξουσι καὶ τοὺς θάψοντας· εἰ μὴ νὴ
 Δία κληρονόμων ἀπορίᾳ παῖδας τρέφουσιν· οὐ γὰρ ἔστιν
 εὑρεῖν οὐδ´ ἐπιτυχεῖν τοῦ τἀλλότρια βουλομένου λαμβάνειν.
  ‘οὐ ψάμμος ἢ κόνις ἢ πτερὰ ποικιλοθρόων οἰωνῶν
 τόσσον ἂν χεύαιτ´ ἀριθμόν’,
 ὅσος ἐστὶν ὁ τῶν κληρονομούντων.
  ‘Δαναὸς ὁ πεντήκοντα θυγατέρων πατήρ’,
 εἰ δ´ ἄτεκνος ἦν, πλείονας ἂν εἶχε κληρονομοῦντας, καὶ
 οὐχ ὁμοίους. οἱ μὲν γὰρ παῖδες χάριν οὐδεμίαν ἔχουσιν οὐδ´
 ἕνεκα τούτου θεραπεύουσιν οὐδὲ τιμῶσιν, ὡς ὀφείλημα
 τὸν κλῆρον ἐκδεχόμενοι· τῶν δ´ ἀλλοτρίων περὶ τὸν
 ἄτεκνον φωνὰς ἀκούεις ταῖς κωμικαῖς ἐκείναις ὁμοίας,
  ‘ὦ Δῆμε, λοῦσαι πρῶτον ἐκδικάσας μίαν,
 ἔνθου ῥόφησον ἔντραγ´ ἔχε τριώβολον’ 
  τὸ δ´ ὑπὸ τοῦ Εὐριπίδου λεγόμενον, ‘τὰ
 χρήματ´ ἀνθρώποισιν εὑρίσκειν φίλους δύναμίν τε πλείστην
 τῶν ἐν ἀνθρώποις ἔχειν,’ οὐχ ἁπλῶς ἀληθές, ἀλλ´
 ἐπὶ τῶν ἀτέκνων· τούτους οἱ πλούσιοι δειπνίζουσιν, οἱ
 ἡγεμόνες θεραπεύουσιν, οἱ ῥήτορες μόνοις τούτοις προῖκα
 συνηγοροῦσιν. ‘ἰσχυρόν ἐστι πλούσιος ἀγνοούμενον ἔχων
 κληρονόμον’. πολλοὺς γοῦν πολυφίλους
 καὶ πολυτιμήτους ὄντας ἓν παιδίον γενόμενον ἀφίλους καὶ
 ἀδυνάτους ἐποίησεν. ὅθεν οὐδὲ πρὸς δύναμιν οὐδέν ἐστιν
 ὠφέλιμον ἀπὸ τῶν τέκνων, ἀλλὰ τῆς φύσεως τὸ πᾶν κράτος
 οὐχ ἧττον ἐν ἀνθρώποις ἢ θηρίοις.
 | [4] Reportez votre pensée aux temps primitifs. Figurez-vous 
les premières femmes à qui il arriva d'être mères et de voir 
un fruit sortir de leurs entrailles. Il n'y avait point de loi qui 
obligeât alors de nourrir les enfants. Il n'y avait ni de la reconnaissance 
ni un prix quelconque à attendre de ces petits 
êtres en échange des soins prodigués à leur faiblesse. Je dirai 
plutôt que les mères devaient les haïr et les détester, par souvenir 
des dangers extrêmes et des douleurs qu'elles venaient de subir.
"C'est ainsi que d'un trait aigu les Ilythies, 
Ces filles de Junon, frappent cruellement
La femme en proie aux maux d'un dur enfantement. 
Leur présence fatale est pour les jeunes mères 
Le gage trop certain de souffrances amères".
Ces vers ne sont pas du chantre de l'Iliade, disent les femmes. 
Ils ont été écrits par une Homéride qui avait enfanté ou qui 
enfantait encore, et qui ressentait dans ses entrailles les atteintes, 
à la fois sourdes et perçantes, de la douleur. Mais la 
tendresse naturelle a fléchi et dirigé la mère. Encore chaude, 
endolorie et palpitante du travail de l'accouchement, elle n'a 
pas fui ou repoussé le petit être. Au contraire elle s'est 
tournée vers lui, et, l'accueillant avec un sourire, elle l'a pris, 
elle l'a couvert de baisers. Va-t-elle en recueillir quelque 
douceur, quelque avantage? Non : elle ne subira que fatigues et tourments.
"Des langes l'ont reçu : la mère infatigable 
Échaude ou rafraîchit l'objet de son amour, 
Et le mal de la nuit succède au mal du jour".
Quelle était donc la récompense, l'utilité pour les mères 
de ces premiers temps-là ? Aucune, pas plus que pour les 
mères d'aujourd'hui. Tout se borne à des espérances incertaines 
et fort éloignées. Une vigne avait été labourée à 
l'équinoxe du printemps : on y a vendangé à l'équinoxe 
d'automne. Du blé avait été semé au coucher des Pléiades : 
on le moissonne à leur lever. Les vaches, les juments, les volatiles 
produisent des petits desquels on peut incontinent tirer 
du profit. Mais la créature humaine demande beaucoup de 
peine pour être élevée, beaucoup de temps pour grandir; 
et comme le mérite ne s'acquiert que dans un avenir bien 
éloigné, la plupart des pères meurent avant d'avoir pu apprécier 
ce que valent leurs enfants. Néoclès ne vit pas la 
victoire de Thémistocle à Salamine, ni Miltiade, celle de 
Cimon aux plaines que l'Eurymédon arrose. Xanthippe
n'entendit pas Périclès haranguer le peuple. Ariston ne 
vit pas Platon enseigner la philosophie. Le père d'Euripide, 
le père de Sophocle, ne furent pas témoins des succès 
de leurs fils. Entendre leurs enfants bégayer et épeler, 
les voir ensuite rechercher festins, orgies, maîtresses 
et autres divertissements d'une jeunesse évaporée, voilà le 
lot des parents. Aussi y a-t-il lieu de louer et de citer ce 
seul vers d'Evenus, quand il dit :
"Qu'est pour le père un fils, sinon crainte et chagrin"?
Cependant on ne laisse pas d'élever ses enfants, surtout 
lorsqu'on est dans une position où l'on a le moins besoin 
d'eux. Car il serait ridicule de supposer que quand les riches 
sacrifient et se réjouissent à la naissance d'un de leurs enfants, 
ils comptent sur eux pour qu'un jour ceux-ci les 
nourrissent et leur rendent les honneurs de la sépulture. 
Serait-ce encore, qu'on élève ses fils pour être sûr de ne 
pas manquer d'héritiers? Comme s'il était difficile de trouver 
et de rencontrer des gens empressés à recueillir le bien d'autrui!
"Les grains de poussière et de sable, 
Les plumes des oiseaux à la voix agréable",
seraient moins difficiles à compter que ne le sont les aspirants 
aux héritages.
"Danaüs engendra, dit-on, cinquante filles".
Mais s'il ne les avait pas eues, il aurait trouvé un nombre 
non moins considérable d'héritiers. Seulement les positions 
eussent été différentes. Les enfants ne savent à leurs parents 
aucun gré des successions que leur laissent ceux-ci. Pour 
les obtenir, ils ne se donnent pas la peine de prodiguer les 
soins et les hommages : ils y comptent comme sur une 
chose qui leur est dire. Mais que des étrangers entourent
un homme sans enfants, vous entendrez ces étrangers lui 
dire, comme dans les pièces de comédie :
"Prenez d'abord un bain; ne jugez qu'une cause. 
Buvez bien; mangez bien, par-dessus toute chose, 
Cher Démus, et prenez ces trois oboles-ci".
Quant à ces deux vers d'Euripide :
"L'or donne des amis toujours en abondance,
Et c'est de lui que vient la plus grande puissance",
ils ne sont pas absolument vrais, si ce n'est pour ceux qui 
sont privés d'enfants. Les riches leur donnent des festins, 
les puissants les flattent. Ils sont les seuls à qui les orateurs 
prêtent gratuitement leur éloquence.
"Au riche qui n'a pas un héritier légal
On accorde toujours un pouvoir sans égal".
Bien des gens étaient entourés d'amis et de considération, 
et la naissance d'un seul enfant les a privés soudain de leurs 
amis et de leur pouvoir. Ainsi donc, pour ce qui est de la 
puissance, il n'y a des enfants à retirer aucun profit. Le 
sentiment de la paternité doit toute sa force à la nature, et 
il n'est pas moins impérieux pour l'espèce humaine que 
pour les animaux les plus sauvages.
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