HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

PLUTARQUE, Oeuvres morales, De l'amour que l'on porte a sa progéniture

Chapitre 3

  Chapitre 3

[3] Ἀλλ´ οὔτ´ ἀληθὴς λόγος οὔτ´ ἄξιος ἀκούειν. γὰρ φύσις ὥσπερ ἐν φυτοῖς ἀγρίοις οἷον οἰνάνθαις ἐρινεοῖς κοτίνοις ἀρχὰς ἀπέπτους καὶ ἀτελεῖς ἡμέρων καρπῶν ἐνέφυσεν, οὕτω τοῖς μὲν ἀλόγοις τὸ πρὸς τὰ ἔγγονα φιλόστοργον ἀτελὲς καὶ οὐ διαρκὲς πρὸς δικαιοσύνην οὐδὲ τῆς χρείας πορρωτέρω προερχόμενον ἔδωκεν, ἄνθρωπον δέ, λογικὸν καὶ πολιτικὸν ζῷον, ἐπὶ δίκην καὶ νόμον εἰσάγουσα καὶ θεῶν τιμὰς καὶ πόλεων ἱδρύσεις καὶ φιλοφροσύνην, γενναῖα καὶ καλὰ καὶ φερέκαρπα τούτων σπέρματα παρέσχε τὴν πρὸς τὰ ἔγγονα χάριν καὶ ἀγάπησιν, ἀκολουθοῦσαν ταῖς πρώταις ἀρχαῖς· αὗται δ´ ἦσαν ἐν ταῖς τῶν σωμάτων κατασκευαῖς. πανταχοῦ μὲν γὰρ φύσις ἀκριβὴς καὶ φιλότεχνος καὶ ἀνελλιπὴς καὶ ἀπέριττος, ‘οὐδένὡς ἔφησεν Ἐρασίστρατοςἔχουσα ῥωπικόν’, τὰ δὲ περὶ τὴν γένεσιν ἀξίως οὐκ ἔστιν εἰπεῖν οὐδ´ εὐπρεπὲς ἴσως λίαν ἀκριβῶς τῶν ἀπορρήτων ἐμφύεσθαι τοῖς ὀνόμασι καὶ τοῖς ῥήμασιν, ἀλλ´ ἀποκειμένων καὶ κεκρυμμένων ἐπινοεῖν τὴν πρὸς τὸ γεννᾶν καὶ λοχεύεσθαι τῶν μορίων ἐκείνων εὐφυΐαν. ἀρκεῖ δ´ τοῦ γάλακτος ἐργασία καὶ οἰκονομία τὴν πρόνοιαν αὐτῆς ἐμφῆναι καὶ ἐπιμέλειαν. τοῦ γὰρ αἵματος ὅσον περίττωμα τῆς χρείας ἐν ταῖς γυναιξὶ δι´ ἀμβλύτητα καὶ μικρότητα τοῦ πνεύματος ἐπιπολάζον ἐμπλανᾶται καὶ βαρύνει, τὸν μὲν ἄλλον χρόνον εἴθισται καὶ μεμελέτηκεν ἐμμήνοις ἡμερῶν περιόδοις ὀχετοὺς καὶ πόρους αὐτῷ τῆς φύσεως ἀναστομούσης ἀποχεόμενον τὸ μὲν ἄλλο σῶμα κουφίζειν καὶ καθαίρειν, τὴν δ´ ὑστέραν οἷον ἀρότῳ καὶ σπόρῳ γῆν ἐν φυτοῖς ὀργῶσαν ἐν καιρῷ παρέχειν. ὅταν δὲ τὴν γονὴν ἀναλάβῃ προσπεσοῦσαν ὑστέρα καὶ περιστείλῃ ῥιζώσεως γενομένης (‘ γὰρ ὀμφαλὸς πρῶτον ἐν μήτρῃσινὥς φησι Δημόκριτοςἀγκυρηβόλιον σάλου καὶ πλάνης ἐμφύεται, πεῖσμα καὶ κλῆματῷ γεννωμένῳ καρπῷ καὶ μέλλοντι), τοὺς μὲν ἐμμήνους καὶ καθαρσίους ἔκλεισεν ὀχετοὺς φύσις, τοῦ δ´ αἵματος ἀντιλαμβανομένη φερομένου τροφῇ χρῆται καὶ κατάρδει τὸ βρέφος ἤδη συνιστάμενον καὶ διαπλαττόμενον, ἄχρι οὗ τοὺς προσήκοντας ἀριθμοὺς τῇ ἐντὸς αὐξήσει κυηθὲν ἑτέρας ἀνατροφῆς καὶ χώρας δέηται. τότ´ οὖν τὸ αἷμα παντὸς ἐμμελέστερον φυτουργοῦ καὶ ὀχετηγοῦ πρὸς ἑτέραν ἀφ´ ἑτέρας ἐκτρέπουσα καὶ μεταλαμβάνουσα χρείαν ἔχει παρεσκευασμένας οἷον ἐννέας τινας κρήνας νάματος ἐπιρρέοντος, οὐκ ἀργῶς οὐδ´ ἀπαθῶς ὑποδεχομένας | ἀλλὰ καὶ πνεύματος ἠπίῳ θερμότητι καὶ μαλακῇ θηλύτητι ἐκπέψαι καὶ λεᾶναι καὶ μεταβαλεῖν δυναμένας· τοιαύτην γὰρ μαστὸς ἔχει ἐντὸς διάθεσιν καὶ κρᾶσιν. ἐκροαὶ δὲ τοῦ γάλακτος οὐκ εἰσὶν οὐδὲ κρουνοὶ μεθιέντες ἀθρόως, εἰς δὲ σάρκα πιδακώδη καὶ πόροις ἀτρέμα λεπτοῖς διηθοῦσαν ἀπολήγων εὐμενὲς τῷ τοῦ νηπίου στόματι καὶ προσφιλὲς ψαῦσαι καὶ περιλαβεῖν ἐνδίδωσι ταμεῖον. ἀλλὰ τούτων γε τῶν τοσούτων ἐπὶ τὴν γένεσιν ἐργαλείων καὶ τοιούτων οἰκονομιῶν καὶ φιλοτιμίας καὶ προνοίας οὐδὲν ἦν ὄφελος, εἰ μὴ τὸ φιλόστοργον φύσις καὶ κηδεμονικὸν ἐνειργάσατο ταῖς τεκούσαις. ‘οὐ μὲν γάρ τί πού ἐστιν ὀιζυρώτερον ἀνδρός, πάντων ὅσσα τε γαῖαν ἔπι πνείει τε καὶ ἕρπει’— τοῦτ´ οὐ ψεύδεται λέγων ἐπὶ νηπίου καὶ ἀρτιγενοῦς. οὐδὲν γάρ ἐστιν οὕτως ἀτελὲς οὐδ´ ἄπορον οὐδὲ γυμνὸν οὐδ´ ἄμορφον οὐδὲ μιαρὸν ὡς ἄνθρωπος ἐν γοναῖς ὁρώμενος· μόνῳ σχεδὸν οὐδὲ καθαρὰν ἔδωκεν εἰς φῶς ὁδὸν φύσις, ἀλλ´ αἵματι πεφυρμένος καὶ λύθρου περίπλεως καὶ φονευομένῳ μᾶλλον γεννωμένῳ ἐοικὼς οὐδενός ἐστιν ἅψασθαι καὶ ἀνελέσθαι καὶ ἀσπάσασθαι καὶ περιλαβεῖν τοῦ φύσει φιλοῦντος. διὸ τῶν μὲν ἄλλων ζῴων ὑπὸ τὴν γαστέρα τὰ οὔθατα χαλᾷ τοὺς μαστοὺς, ταῖς δὲ γυναιξὶν ἄνω γεγόνασιν περὶ τὸ στέρνον ἐν ἐφικτῷ τοῦ φιλῆσαι καὶ περιπτύξαι καὶ κατασπάσασθαι τὸ νήπιον, ὡς τοῦ τεκεῖν καὶ θρέψαι τέλος οὐ χρείαν ἀλλὰ φιλίαν ἔχοντος. [3] Mais une telle supposition n'a rien de vrai, et ne mériterait pas d'être écoutée. Car, de même que la nature met dans les plantes non cultivées par l'homme, dans les vignes, dans les figuiers, dans les oliviers qui sont sauvages une séve âpre et des sucs imparfaits destinés à faire naître plus tard des fruits pleins de douceur, de même elle a inspiré aux brutes à l'égard de leurs petits une tendresse incomplète, qui ne suffit pas pour être regardée comme de la justice et qui ne s'étend jamais au delà du besoin. Au contraire l'homme, animal raisonnable, fait pour la société politique, appelé par son origine même à pratiquer la justice, à obéir aux lois, à honorer les Dieux, à fonder des villes, à contracter des liens d'amitié, l'homme a reçu de la nature de nobles, de beaux, de fertiles germes de toutes ces vertus. Ces germes, il les trouve dans la tendresse et dans l'amour dont il est animé pour ses enfants : amour et tendresse qui sont le développement de principes innés, de principes se rattachant eux-mêmes à sa constitution physique. Tous les ouvrages de la nature sont parfaits sans doute, et portent l'empreinte de la sagesse et de la bonté du Créateur. Il ne s'y trouve rien de défectueux, rien de trop, rien, comme disait Erasistrate, qui vise uniquement à l'effet et à l'apparat. Mais tout ce qui regarde en particulier la génération ne saurait s'exprimer dignement. Peut-être n'est-il pas décent de nommer par leurs noms les organes destinés à cette oeuvre. Qu'ils restent donc à l'écart et cachés : c'est assez de les savoir merveilleusement aptes à la conception et à l'enfantement. La formation du lait et sa distribution suffisent pour attester combien la nature est prévoyante et soigneuse. Il y a chez les femmes une masse de sang inutile et surabondant qui, à cause de la faiblesse et de la pauvreté des esprits vitaux, flotte sans consistance et devient fatigante pour elles. Dans les autres circonstances ce sang a l'habitude et le soin de s'écouler périodiquement tous les mois par les conduits et les canaux que la nature aménagés : c'est un soulagement et une purgation pour le reste du corps. La matrice surtout, comme un sol que le labour et la semence ont rendu propice aux végétaux, se trouve, par suite de cet écoulement, disposée à recevoir les germes qui lui sont confiés. Elle se resserre quand elle les a reçus et qu'ils ont pris racine. Le nombril se forme en premier lieu dans le sein de la mère. C'est, suivant l'expression de Démocrite, un ancrage contre toute agitation et tout déplacement. C'est encore la queue, la tige, où adhère le fruit déjà né qui doit se produire un jour. Dés ce moment la nature a fermé les conduits destinés aux évacuations menstruelles. Elle s'empare du sang qui se portait vers ces conduits : elle l'emploie à nourrir et à humecter le fétus déjà consistant et formé. Lorsqu'il a resté dans le sein de la mère durant le nombre de mois nécessaires à son entier accroissement, il lui faut une autre nourriture, et il change de résidence. Que devient alors ce sang? Plus intelligente que tous les cultivateurs, que tous les ingénieurs du monde, la nature lui donne une autre direction et l'emploie à d'autres usages. Elle a préparé des espèces de réservoirs intérieurs, dans lesquels viennent s'en répandre les flots. Mais ce n'est pas pour qu'il y séjourne oisif et sans action. Élaboré par la douce chaleur des esprits et par l'influence délicate du sexe, il subit une sorte de cuisson, d'épuration. Il se dénature complétement, et c'est dans les mamelles que s'opèrent ce travail et ces résultats. Le lait, à son tour, ne s'écoule pas au dehors comme par des fontaines à jets copieux. Il circule lentement à travers les chairs, dont le tissu spongieux se compose de vaisseaux minces et déliés; et par le bout des mamelles que sa bouche saisit et suce, l'enfant puise à une source bienfaisante et délicieuse. Mais ces instruments qui concourent à la génération, ces appareils, cette sollicitude empressée, cette prévoyance, tout serait en pure perte si la nature n'avait placé dans le coeur des mères le besoin d'aimer et de soigner leurs enfants. "Nul être ne respire et ne rampe sur terre Plus malheureux que l'homme". Ces vers ne sont pas un mensonge si on les applique au petit enfant qui vient de naître. Il n'y a point de créature aussi imparfaite, aussi dénuée, aussi informe, aussi sale, que la créature humaine vue au sortir du sein maternel. C'est presque le seul être à qui la nature n'ait pas même accordé une entrée pure dans la vie. Il y entre souillé de sang, rempli d'ordures, moins semblable à une créature vivante qu'à un être qu'on vient de massacrer. On ne peut le toucher, le prendre, l'embrasser, l'entourer de soins, à moins d'y être porté par le sentiment d'une tendresse instinctive. Aussi dans les femelles des animaux, la nature fait-elle pendre les mamelles au bas du ventre , tandis que chez la femme les seins se trouvent placés au-dessus de la poitrine, afin que la mère ait toute facilité pour baiser son enfant, pour l'envelopper dans ses bras et lui prodiguer ses caresses. La nature veut donner à entendre par là, que l'enfantement et l'allaitement sont moins des actes de nécessité que des élans de tendresse.


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Dernière mise à jour : 8/09/2005