[133] (ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἐννενόηκας οὖν ὅτι τοῦ ἐμβλέποντος εἰς τὸν
(133a) ὀφθαλμὸν τὸ πρόσωπον ἐμφαίνεται ἐν τῇ τοῦ καταντικρὺ
ὄψει ὥσπερ ἐν κατόπτρῳ, ὃ δὴ καὶ κόρην καλοῦμεν, εἴδωλον
ὄν τι τοῦ ἐμβλέποντος;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀληθῆ λέγεις.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ὀφθαλμὸς ἄρα ὀφθαλμὸν θεώμενος, καὶ ἐμβλέπων
εἰς τοῦτο ὅπερ βέλτιστον αὐτοῦ καὶ ᾧ ὁρᾷ, οὕτως ἂν αὑτὸν ἴδοι.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Φαίνεται.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Εἰ δέ γ´ εἰς ἄλλο τῶν τοῦ ἀνθρώπου βλέποι ἤ τι
τῶν ὄντων, πλὴν εἰς ἐκεῖνο ᾧ τοῦτο τυγχάνει ὅμοιον, οὐκ
ὄψεται ἑαυτόν.
(133b) (ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀληθῆ λέγεις.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ὀφθαλμὸς ἄρ´ εἰ μέλλει ἰδεῖν αὑτόν, εἰς ὀφθαλμὸν
αὐτῷ βλεπτέον, καὶ τοῦ ὄμματος εἰς ἐκεῖνον τὸν τόπον
ἐν ᾧ τυγχάνει ἡ ὀφθαλμοῦ ἀρετὴ ἐγγιγνομένη· ἔστι δὲ
τοῦτό που ὄψις;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὕτως.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἆρ´ οὖν, ὦ φίλε Ἀλκιβιάδη, καὶ ψυχὴ εἰ μέλλει
γνώσεσθαι αὑτήν, εἰς ψυχὴν αὐτῇ βλεπτέον, καὶ μάλιστ´
εἰς τοῦτον αὐτῆς τὸν τόπον ἐν ᾧ ἐγγίγνεται ἡ ψυχῆς ἀρετή,
σοφία, καὶ εἰς ἄλλο ᾧ τοῦτο τυγχάνει ὅμοιον ὄν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἔμοιγε δοκεῖ, ὦ Σώκρατες.
(133c) (ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἔχομεν οὖν εἰπεῖν ὅτι ἐστὶ τῆς ψυχῆς θειότερον
ἢ τοῦτο, περὶ ὃ τὸ εἰδέναι τε καὶ φρονεῖν ἐστιν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐκ ἔχομεν.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τῷ θεῷ ἄρα τοῦτ´ ἔοικεν αὐτῆς, καί τις εἰς τοῦτο
βλέπων καὶ πᾶν τὸ θεῖον γνούς, θεόν τε καὶ φρόνησιν,
οὕτω καὶ ἑαυτὸν ἂν γνοίη μάλιστα.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Φαίνεται.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἆρ´ οὖν, ὅθ´ ὥσπερ κάτοπτρά ἐστι σαφέστερα τοῦ
ἐν τῷ ὀφθαλμῷ ἐνόπτρου καὶ καθαρώτερα καὶ λαμπρότερα,
οὕτω καὶ ὁ θεὸς τοῦ ἐν τῇ ἡμετέρᾳ ψυχῇ βελτίστου καθαρώτερόν
τε καὶ λαμπρότερον τυγχάνει ὄν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἔοικέ γε, ὦ Σώκρατες.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Εἰς τὸν θεὸν ἄρα βλέποντες ἐκείνῳ καλλίστῳ
ἐνόπτρῳ χρῴμεθ´ ἂν καὶ τῶν ἀνθρωπίνων εἰς τὴν ψυχῆς
ἀρετήν, καὶ οὕτως ἂν μάλιστα ὁρῷμεν καὶ γιγνώσκοιμεν
ἡμᾶς αὐτούς.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ναί.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τὸ δὲ γιγνώσκειν αὑτὸν ὡμολογοῦμεν σωφροσύνην
εἶναι;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πάνυ γε.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἆρ´ οὖν μὴ γιγνώσκοντες ἡμᾶς αὐτοὺς μηδὲ σώφρονες
ὄντες δυναίμεθ´ ἂν εἰδέναι τὰ ἡμέτερα αὐτῶν κακά τε καὶ ἀγαθά;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Καὶ πῶς ἂν τοῦτο γένοιτο, ὦ Σώκρατες;
(133d) (ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἀδύνατον γὰρ ἴσως σοι φαίνεται μὴ γιγνώσκοντα
Ἀλκιβιάδην τὰ Ἀλκιβιάδου γιγνώσκειν ὅτι Ἀλκιβιάδου ἐστίν.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀδύνατον μέντοι νὴ Δία.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐδ´ ἄρα τὰ ἡμέτερα ὅτι ἡμέτερα, εἰ μηδ´ ἡμᾶς αὐτούς;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πῶς γάρ;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Εἰ δ´ ἄρα μηδὲ τὰ ἡμέτερα, οὐδὲ τὰ τῶν ἡμετέρων;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐ φαίνεται.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκ ἄρα πάνυ τι ὀρθῶς ὡμολογοῦμεν ὁμολογοῦντες
ἄρτι εἶναί τινας οἳ ἑαυτοὺς μὲν οὐ γιγνώσκουσιν, τὰ δ´ αὑτῶν,
ἄλλους δὲ τὰ τῶν ἑαυτῶν. ἔοικε γὰρ πάντα ταῦτα εἶναι
(133e) κατιδεῖν ἑνός τε καὶ μιᾶς τέχνης, αὑτόν, τὰ αὑτοῦ, τὰ τῶν ἑαυτοῦ.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Κινδυνεύει.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ὅστις δὲ τὰ αὑτοῦ ἀγνοεῖ, καὶ τὰ τῶν ἄλλων που
ἂν ἀγνοοῖ κατὰ ταὐτά.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Τί μήν;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκοῦν εἰ τὰ τῶν ἄλλων, καὶ τὰ τῶν πόλεων ἀγνοήσει.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀνάγκη.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκ ἄρ´ ἂν γένοιτο ὁ τοιοῦτος ἀνὴρ πολιτικός.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐ δῆτα.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐ μὴν οὐδ´ οἰκονομικός γε.
| [133] (SOCRATE)
Eh bien, as-tu remarqué que le visage de celui qui regarde dans l’oeil d’un
autre se montre dans la partie de l’oeil qui lui fait face, comme dans un
miroir. C’est ce que nous appelons pupille, parce que c’est une sorte
d’image de celui qui regarde dedans.
(ALCIBIADE)
C’est exact.
(SOCRATE)
Donc un oeil qui regarde un autre oeil et qui se fixe sur ce qu’il y a de
meilleur en lui, ce par quoi il voit, peut ainsi se voir lui-même.
(ALCIBIADE)
Evidemment.
(SOCRATE)
Mais s’il regarde quelque autre partie du corps ou quelque autre objet, hors
celui auquel il ressemble, il ne se verra plus.
(ALCIBIADE)
Tu dis vrai.
(SOCRATE)
Si donc l’oeil veut se voir lui-même, il faut qu’il regarde un autre oeil et
dans cet endroit de l’oeil où se trouve la vertu de l’oeil, c’est-à-dire la vision ?
(ALCIBIADE)
C’est bien cela.
(SOCRATE)
Eh bien, mon cher Alcibiade, l’âme aussi, si elle veut se reconnaître, devra,
n’est-ce pas ? regarder une âme et surtout cet endroit de l’âme où se trouve la
vertu de l’âme, la sagesse, ou tout autre objet qui lui est semblable.
(ALCIBIADE)
Il me le semble, Socrate.
(SOCRATE)
Or, dans l’âme, pouvons-nous trouver une partie plus divine que celle où
résident la connaissance et la pensée ?
(ALCIBIADE)
Nous ne le pouvons pas.
(SOCRATE)
C’est donc au divin que ressemble cette partie de l’âme et, si l’on regarde
cette partie et qu’on y voie tout ce qu’elle a de divin, Dieu et la pensée,
c’est alors qu’on est le mieux à même de se connaître.
(ALCIBIADE)
Il y a bien de l’apparence, Socrate.
(SOCRATE)
N’est-ce point parce que, comme les miroirs sont plus clairs, plus purs et plus
lumineux que le miroir de l’oeil, de même Dieu est plus pur et plus lumineux que
la partie la meilleure de notre âme ?
(ALCIBIADE)
Il le semble, Socrate.
(SOCRATE)
C’est donc en regardant Dieu que nous trouverons le plus beau miroir des choses
humaines pour reconnaître la vertu de l’âme, et c’est ainsi que nous pourrons le
mieux nous voir et nous connaître nous-mêmes.
(ALCIBIADE)
Oui.
(SOCRATE)
Mais se connaître soi-même, ne convenons-nous pas que c’est être sage ?
(ALCIBIADE)
Certainement.
(SOCRATE)
CHAPITRE XXIX. — Mais alors, si nous ne nous connaissons pas nous-mêmes
et si nous ne sommes pas sages, pouvons-nous connaître les choses qui nous
appartiennent, mauvaises ou bonnes ?
(ALCIBIADE)
Comment pourrions-nous les connaître, Socrate ?
(SOCRATE)
C’est que sans doute tu vois qu’il est impossible à qui ne connaît pas Alcibiade
de savoir si ce qui appartient à Alcibiade est bien à lui.
(ALCIBIADE)
Oui, par Zeus, c’est impossible.
(SOCRATE)
Ni si ce qui est à nous est bien à nous, si nous ne nous connaissons même pas
nous-mêmes.
(ALCIBIADE)
Assurément.
(SOCRATE)
Et si nous ne connaissons même pas ce qui est à nous, nous ne connaissons pas
non plus ce qui en dépend.
(ALCIBIADE)
Evidemment non.
(SOCRATE)
Nous n’avons donc pas trop bien raisonné, quand nous sommes convenus qu’il y a
des gens qui ne se connaissent pas eux-mêmes, mais qui connaissent les choses
qui sont à eux, et d’autres qui connaissent ce qui dépend des choses qui sont à
eux. Car il semble bien qu’il appartient au même homme et au même art de
discerner ces trois choses : soi-même, ce qui est à soi-même et les choses qui
dépendent de ce qui est à soi-même.
(ALCIBIADE)
Il semble que oui.
(SOCRATE)
Mais tout homme qui ignore ce qui est à lui, ignore de même aussi ce qui est aux
autres.
(ALCIBIADE)
Sans doute.
(SOCRATE)
Et s’il ignore ce qui est aux autres, il ignorera aussi ce qui est à l’Etat.
(ALCIBIADE)
Nécessairement.
(SOCRATE)
Un tel homme ne saurait donc devenir un homme d’Etat.
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