[117] (117a) (ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Δέδοικα μὲν ἔγωγε ἤδη περὶ ἐμαυτοῦ, οἶμαι μέντοι
τὰ αὐτά.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκοῦν ὅτι οἶσθα; τοῦτ´ αἴτιον;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οἶμαι ἔγωγε.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Περὶ ὧν ἄρα ἄκων τἀναντία ἀποκρίνῃ, δῆλον ὅτι
περὶ τούτων οὐκ οἶσθα.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Εἰκός γε.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκοῦν καὶ περὶ τῶν δικαίων καὶ ἀδίκων καὶ καλῶν
καὶ αἰσχρῶν καὶ κακῶν καὶ ἀγαθῶν καὶ συμφερόντων καὶ
μὴ ἀποκρινόμενος φῂς πλανᾶσθαι; εἶτα οὐ δῆλον ὅτι διὰ
τὸ μὴ εἰδέναι περὶ αὐτῶν, διὰ ταῦτα πλανᾷ;
(117b) (ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἔμοιγε.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἆρ´ οὖν οὕτω καὶ ἔχει· ἐπειδάν τίς τι μὴ εἰδῇ,
ἀναγκαῖον περὶ τούτου πλανᾶσθαι τὴν ψυχήν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πῶς γὰρ οὔ;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τί οὖν; οἶσθα ὅντινα τρόπον ἀναβήσῃ εἰς τὸν οὐρανόν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Μὰ Δί´ οὐκ ἔγωγε.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἦ καὶ πλανᾶταί σου ἡ δόξα περὶ ταῦτα;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐ δῆτα.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τὸ δ´ αἴτιον οἶσθα ἢ ἐγὼ φράσω;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Φράσον.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ὅτι, ὦ φίλε, οὐκ οἴει αὐτὸ ἐπίστασθαι οὐκ ἐπιστάμενος.
(117c) (ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πῶς αὖ τοῦτο λέγεις;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ὅρα καὶ σὺ κοινῇ. ἃ μὴ ἐπίστασαι, γιγνώσκεις δὲ
ὅτι οὐκ ἐπίστασαι, πλανᾷ περὶ τὰ τοιαῦτα; ὥσπερ περὶ
ὄψου σκευασίας οἶσθα δήπου ὅτι οὐκ οἶσθα;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πάνυ γε.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Πότερον οὖν αὐτὸς περὶ ταῦτα δοξάζεις ὅπως χρὴ
σκευάζειν καὶ πλανᾷ, ἢ τῷ ἐπισταμένῳ ἐπιτρέπεις;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὕτως.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τί δ´ εἰ ἐν νηῒ πλέοις, ἆρα δοξάζοις ἂν πότερον
(117d) χρὴ τὸν οἴακα εἴσω ἄγειν ἢ ἔξω, καὶ ἅτε οὐκ εἰδὼς πλανῷο
ἄν, ἢ τῷ κυβερνήτῃ ἐπιτρέψας ἂν ἡσυχίαν ἄγοις;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Τῷ κυβερνήτῃ.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκ ἄρα περὶ ἃ μὴ οἶσθα πλανᾷ, ἄνπερ εἰδῇς ὅτι οὐκ οἶσθα;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐκ ἔοικα.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἐννοεῖς οὖν ὅτι καὶ τὰ ἁμαρτήματα ἐν τῇ πράξει
διὰ ταύτην τὴν ἄγνοιάν ἐστι, τὴν τοῦ μὴ εἰδότα οἴεσθαι εἰδέναι;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πῶς αὖ λέγεις τοῦτο;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τότε που ἐπιχειροῦμεν πράττειν, ὅταν οἰώμεθα
εἰδέναι ὅτι πράττομεν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ναί.
(117e) (ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ὅταν δέ γέ πού τινες μὴ οἴωνται εἰδέναι, ἄλλοις
παραδιδόασι;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πῶς δ´ οὔ;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκοῦν οἱ τοιοῦτοι τῶν μὴ εἰδότων ἀναμάρτητοι
ζῶσι διὰ τὸ ἄλλοις περὶ αὐτῶν ἐπιτρέπειν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ναί.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τίνες οὖν οἱ ἁμαρτάνοντες; οὐ γάρ που οἵ γε εἰδότες.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐ δῆτα.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἐπειδὴ δ´ οὔθ´ οἱ εἰδότες
| [117] (ALCIBIADE)
Je doute à présent de moi-même ; cependant je crois que je répondrais la même
chose.
(SOCRATE)
N’est-ce pas parce que tu sais ? n’est-ce pas là la cause ?
(ALCIBIADE)
Je le crois.
(SOCRATE)
Donc, quand tu fais malgré toi des réponses contradictoires sur une chose, c’est
une marque infaillible que tu ne la connais pas.
(ALCIBIADE)
C’est probable.
(SOCRATE)
Et n’avoues-tu pas sur le juste et l’injuste, le beau et le laid, le mal et le
bien, l’utile et son contraire, que tu varies dans tes réponses ? Dès lors
n’est-il pas évident que, si tu varies, c’est parce que tu ne sais pas ?
(ALCIBIADE)
C’est cela.
(SOCRATE)
CHAPITRE XIII. — Il faut donc admettre que, quand on ignore une chose,
l’esprit n’en peut former que des opinions flottantes.
(ALCIBIADE)
Il n’en peut être autrement.
(SOCRATE)
Dis-moi maintenant : sais-tu de quelle façon tu pourrais monter au ciel ?
(ALCIBIADE)
Non, par Zeus !
(SOCRATE)
Est-ce que tu varies aussi d’opinion sur ce sujet ?
(ALCIBIADE)
Non, certes.
(SOCRATE)
En sais-tu la raison, ou veux-tu que je te la dise ?
(ALCIBIADE)
Dis-la.
(SOCRATE)
C’est, mon ami, que, ne connaissant pas le moyen, tu ne crois pas le connaître.
(ALCIBIADE)
Ici encore, que veux-tu dire ?
(SOCRATE)
Vois un peu avec moi. Quand tu ignores une chose et que tu sais que tu
l’ignores, varies-tu d’opinion sur elle ? Par exemple, la préparation des
aliments, tu sais bien, n’est-ce pas, que tu n’y connais rien ?
(ALCIBIADE)
Je le sais fort bien.
(SOCRATE)
Eh bien, as-tu une opinion personnelle sur la manière dont il faut les apprêter
et varies-tu d’opinion là-dessus, ou t’en rapportes-tu à celui qui s’y connaît ?
(ALCIBIADE)
Je m’en rapporte à lui.
(SOCRATE)
Et si tu étais en mer sur un vaisseau, déciderais-tu s’il convient de tourner la
barre en dedans ou en dehors et, ne le sachant pas, varierais-tu de sentiment,
ou bien, t’en remettant au pilote, te tiendrais-tu tranquille ?
(ALCIBIADE)
Je m’en remettrais au pilote.
(SOCRATE)
Tu ne varies donc pas sur les choses que tu ignores, si tu sais que tu les ignores ?
(ALCIBIADE)
Non, à ce qu’il me semble.
(SOCRATE)
Eh bien, ne comprends-tu pas que les erreurs de conduite proviennent aussi de
cette ignorance qui consiste à croire qu’on sait quand on ne sait pas ?
(ALCIBIADE)
Ici encore, que veux-tu dire ?
(SOCRATE)
Nous n’entreprenons de faire une chose que quand nous croyons connaître ce que
nous faisons, n’est-il pas vrai ?
(ALCIBIADE)
Oui.
(SOCRATE)
Et quand on croit qu’on ne le sait pas, on s’en remet à d’autres ?
(ALCIBIADE)
Sans doute.
(SOCRATE)
Ainsi les ignorants de cette espèce ne font pas de faute dans la vie, parce
qu’ils s’en remettent à d’autres de ce qu’ils ignorent ?
(ALCIBIADE)
C’est vrai.
(SOCRATE)
Quels sont donc ceux qui font des fautes ? Ce ne sont pas, je pense, ceux qui
savent.
(ALCIBIADE)
Assurément non.
(SOCRATE)
Mais puisque ce ne sont ni ceux qui savent
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