[250] Ὃ δὲ πάντων δεινότατον, ὅτι προκρίναιεν μὲν ἂν τὴν ψυχὴν
σπουδαιοτέραν εἶναι τοῦ σώματος, οὕτω δὲ γιγνώσκοντες ἀποδέχονται μᾶλλον τοὺς
γυμναζομένους τῶν φιλοσοφούντων. Καί τοι πῶς οὐκ ἄλογον τοὺς τοῦ φαυλοτέρου
ποιουμένους τὴν ἐπιμέλειαν ἐπαινεῖν μᾶλλον ἢ τοὺς τοῦ σπουδαιοτέρου, καὶ ταῦτα
πάντων εἰδότων διὰ μὲν εὐεξίαν σώματος οὐδὲν πώποτε τὴν πόλιν τῶν ἐλλογίμων
ἔργων διαπραξαμένην, διὰ δὲ φρόνησιν ἀνδρὸς εὐδαιμονεστάτην καὶ μεγίστην τῶν
Ἑλληνίδων πόλεων γενομένην;
(251) Πολὺ δ' ἄν τις ἔχοι πλείους τούτων ἐναντιώσεις συναγαγεῖν τῶν ἀκμαζόντων
τε μᾶλλον ἢ 'γὼ καὶ τοῦ καιροῦ τοῦ παρόντος μὴ φροντιζόντων· ἐπεὶ καὶ τάδε περὶ τῶν
αὐτῶν τούτων ἔνεστιν εἰπεῖν. Φέρε γὰρ εἴ τινες πολλὰ χρήματα παρὰ τῶν προγόνων
παραλαβόντες τῇ μὲν πόλει μηδὲν εἶεν χρήσιμοι, τοὺς δὲ πολίτας ὑβρίζοιεν καὶ τούς τε
παῖδας καὶ τὰς γυναῖκας αἰσχύνοιεν, ἔστιν ὅστις ἂν τοὺς αἰτίους τοῦ πλούτου
μέμψασθαι τολμήσειεν, ἀλλ' οὐκ ἂν αὐτοὺς τοὺς ἐξαμαρτάνοντας κολάζειν ἀξιώσειε;
(252) Τί δ' εἴ τινες ὁπλομαχεῖν μαθόντες πρὸς μὲν τοὺς πολεμίους μὴ χρῷντο ταῖς
ἐπιστήμαις, ἐπανάστασιν δὲ ποιήσαντες πολλοὺς τῶν πολιτῶν διαφθείραιεν, ἢ καὶ
πυκτεύειν καὶ παγκρατιάζειν ὡς οἷόν τ' ἄριστα παιδευθέντες τῶν μὲν ἀγώνων ἀμελοῖεν,
τοὺς δ' ἀπαντῶντας τύπτοιεν, τίς οὐκ ἂν τούτων τοὺς μὲν διδασκάλους ἐπαινέσειε, τοὺς
δὲ κακῶς χρωμένους οἷς ἔμαθον ἀποκτείνειεν; (253) Οὐκοῦν χρὴ καὶ περὶ τῶν λόγων
τὴν αὐτὴν ἔχειν διάνοιαν ἥν περ καὶ περὶ τῶν ἄλλων, καὶ μὴ περὶ τῶν ὁμοίων τἀναντία
γιγνώσκειν, μηδὲ πρὸς τοιοῦτο πρᾶγμα δυσμενῶς φαίνεσθαι διακειμένους, ὃ πάντων
τῶν ἐνόντων ἐν τῇ τῶν ἀνθρώπων φύσει πλείστων ἀγαθῶν αἴτιόν ἐστι. Τοῖς μὲν γὰρ
ἄλλοις οἷς ἔχομεν, ὅ περ ἤδη καὶ πρότερον εἶπον, οὐδὲν τῶν ἄλλων ζώων διαφέρομεν,
ἀλλὰ πολλῶν καὶ τῷ τάχει καὶ τῇ ῥώμῃ καὶ ταῖς ἄλλαις εὐπορίαις καταδεέστεροι
τυγχάνομεν ὄντες· (254) ἐγγενομένου δ' ἡμῖν τοῦ πείθειν ἀλλήλους καὶ δηλοῦν πρὸς
ἡμᾶς αὐτοὺς περὶ ὧν ἂν βουληθῶμεν, οὐ μόνον τοῦ θηριωδῶς ζῆν ἀπηλλάγημεν, ἀλλὰ
καὶ συνελθόντες πόλεις ᾠκίσαμεν καὶ νόμους ἐθέμεθα καὶ τέχνας εὕρομεν, καὶ σχεδὸν
ἅπαντα τὰ δι' ἡμῶν μεμηχανημένα λόγος ἡμῖν ἐστιν ὁ συγκατασκευάσας. (255) Οὗτος
γὰρ περὶ τῶν δικαίων καὶ τῶν ἀδίκων καὶ τῶν καλῶν καὶ τῶν αἰσχρῶν ἐνομοθέτησεν,
ὧν μὴ διαταχθέντων οὐκ ἂν οἷοί τ' ἦμεν οἰκεῖν μετ' ἀλλήλων. Τούτῳ καὶ τοὺς κακοὺς
ἐξελέγχομεν καὶ τοὺς ἀγαθοὺς ἐγκωμιάζομεν. Διὰ τούτου τοὺς τ' ἀνοήτους παιδεύομεν
καὶ τοὺς φρονίμους δοκιμάζομεν· τὸ γὰρ λέγειν ὡς δεῖ τοῦ φρονεῖν εὖ μέγιστον σημεῖον
ποιούμεθα, καὶ λόγος ἀληθὴς καὶ νόμιμος καὶ δίκαιος ψυχῆς ἀγαθῆς καὶ πιστῆς εἴδωλόν
ἐστι. (256) Μετὰ τούτου καὶ περὶ τῶν ἀμφισβητησίμων ἀγωνιζόμεθα καὶ περὶ τῶν
ἀγνοουμένων σκοπούμεθα· ταῖς γὰρ πίστεσιν, αἷς τοὺς ἄλλους λέγοντες πείθομεν, ταῖς
αὐταῖς ταύταις βουλευόμενοι χρώμεθα, καὶ ῥητορικοὺς μὲν καλοῦμεν τοὺς ἐν τῷ πλήθει
λέγειν δυναμένους, εὐβούλους δὲ νομίζομεν οἵτινες ἂν αὐτοὶ πρὸς αὑτοὺς ἄριστα περὶ
τῶν πραγμάτων διαλεχθῶσιν. (257) Εἰ δὲ δεῖ συλλήβδην περὶ τῆς δυνάμεως ταύτης
εἰπεῖν, οὐδὲν τῶν φρονίμως πραττομένων εὑρήσομεν ἀλόγως γιγνόμενον, ἀλλὰ καὶ τῶν
ἔργων καὶ τῶν διανοημάτων ἁπάντων ἡγεμόνα λόγον ὄντα, καὶ μάλιστα χρωμένους
αὐτῷ τοὺς πλεῖστον νοῦν ἔχοντας. Ὧν οὐδὲν ἐνθυμηθεὶς Λυσίμαχος κατηγορεῖν
ἐτόλμησε τῶν ἐπιθυμούντων τοιούτου πράγματος, ὃ τοσούτων τὸ πλῆθος καὶ
τηλικούτων τὸ μέγεθος ἀγαθῶν αἴτιόν ἐστιν.
(258) Καὶ τί δεῖ τούτου θαυμάζειν, ὅπου καὶ τῶν περὶ τὰς ἔριδας σπουδαζόντων
ἔνιοί τινες ὁμοίως βλασφημοῦσι περὶ τῶν λόγων τῶν κοινῶν καὶ τῶν χρησίμων ὥσπερ
οἱ φαυλότατοι τῶν ἀνθρώπων, οὐκ ἀγνοοῦντες τὴν δύναμιν αὐτῶν, οὐδ' ὅτι τάχιστ' ἂν
οὗτοι τοὺς χρωμένους ὠφελήσαιεν, ἀλλ' ἐλπίζοντες, ἢν τούτους διαβάλλωσι, τοὺς
αὑτῶν ἐντιμοτέρους ποιήσειν. (259) Περὶ ὧν δυνηθείην μὲν ἂν ἴσως διαλεχθῆναι πολὺ
πικρότερον ἢ 'κεῖνοι περὶ ἡμῶν, οὐδέτερον δ' οἶμαι δεῖν, οὔθ' ὅμοιος γίγνεσθαι τοῖς ὑπὸ
τοῦ φθόνου διεφθαρμένοις, οὔτε ψέγειν τοὺς μηδὲν μὲν κακὸν τοὺς συνόντας
ἐργαζομένους, ἧττον δ' ἑτέρων εὐεργετεῖν δυναμένους. Οὐ μὴν ἀλλὰ μικρά γε
μνησθήσομαι περὶ αὐτῶν, μάλιστα μὲν ὅτι κἀκεῖνοι περὶ ἡμῶν, ἔπειθ' ὅπως ἂν ὑμεῖς
σαφέστερον εἰδότες τὴν δύναμιν αὐτῶν οὕτω διακέησθε πρὸς ἑκάστους ἡμῶν ὥσπερ
δίκαιόν ἐστι,
| [250] Mais voici ce qu'il y a de plus monstrueux :
c'est que, regardant l'âme comme étant d'une nature plus noble
que le corps, ils accueillent néanmoins ceux qui se livrent aux exercices gymnastiques
avec plus de faveur que ceux qui s'adonnent à la philosophie. N'est-il pas absurde de
louer les hommes qui s'attachent aux choses d'une valeur secondaire, plutôt que ceux
qui se consacrent aux travaux les plus importants, et cela, quand personne n'ignore
que jamais notre patrie n'a accompli aucun fait éclatant par la supériorité des forces
corporelles, tandis que, par l'effet de la haute intelligence d'un seul homme, elle est
devenue la plus heureuse et la plus puissante des villes de la Grèce?
(251) 26-24. Un orateur dans la force de l'âge et qui, plus que moi, serait du
nombre de ceux qui ne se préoccupent pas des intérêts du moment, pourrait réunir un
beaucoup plus grand nombre d'objections ; mais voici ce qu'il m'est encore possible
d'ajouter sur ce sujet. Si des hommes qui auraient reçu de leurs ancêtres des biens
considérables ne se rendaient en rien utiles à leur pays, s'ils insultaient les citoyens,
s'ils déshonoraient les enfants et les femmes, est-il quelqu'un qui songeât à incriminer
les auteurs de leurs richesses, au lieu de punir les coupables ? (252) Ou bien encore,
si quelques hommes ayant appris l'art de l'escrime, au lieu d'employer contre les
ennemis de leur pays le talent qu'ils auraient acquis, excitant une sédition, causaient la
mort d'un grand nombre de citoyens ; ou si, après avoir porté au plus haut degré la
connaissance du pugilat et du pancrace, ils négligeaient les luttes régulières et
frappaient les hommes qu'ils rencontreraient sur leur passage, qui pourrait, tout en
louant leurs maîtres, ne pas envoyer à la mort ceux qui se seraient livrés à un si
criminel usage delà science qu'ils leur auraient apprise ? (253) Il faut, à l'égard de
l'éloquence, être dans la même disposition d'esprit qu'à l'égard des autres facultés de
l'homme, et il ne faut pas porter des jugements opposés sur des choses de même
nature ; comme aussi l'on ne doit pas s'abandonner à des sentiments de colère contre
celui de tous les dons accordés à la nature humaine, qui est la source des plus
nombreux avantages. Par les autres facultés dont nous sommes doués et que j'ai déjà
indiquées, nous n'avons aucune supériorité sur les animaux ; nous sommes même
inférieurs à un grand nombre d'entre-eux par la rapidité, la force ou d'autres qualités;
(254) tandis que, par la puissance qui nous est donnée de nous persuader
mutuellement et de nous rendre compte à nous-mêmes de nos volontés, non
seulement nous nous sommes affranchis de la vie sauvage, mais nous nous sommes
réunis, nous avons bâti des villes, établi des lois, inventé des arts ; enfin, presque
toutes les merveilles enfantées par le génie de l'homme, c'est la parole qui les a
préparées. (255) C'est elle qui, par des lois, a posé les limites de l'équité et de
l'injustice, de l'honneur et de la honte, et si ces limites n'avaient pas été posées, nous
serions incapables de vivre en société. C'est par elle que nous flétrissons le vice et
que nous louons la vertu. C'est par elle que nous instruisons les ignorants et que nous
explorons les pensées des sages. Parler comme il convient est la marque la plus
certaine que l'on pense avec sagesse ; et un discours en harmonie avec la vérité,
l'ordre et la justice, est l'image d'une âme droite et sincère. (256) A l'aide de la parole,
nous discutons sur les choses controversées, et nous découvrons celles qui sont
inconnues; les arguments qui nous servent pour agir sur l'esprit des autres hommes,
nous les employons également pour délibérer avec nous-mêmes. Nous appelons
éloquents ceux qui savent parler en présence du peuple, et nous considérons comme
des conseillers prudents ceux qui, se plaçant en quelque sorte vis-à-vis d'eux-mêmes,
analysent le mieux les affaires. (257) S'il faut tout dire en un mot sur cette grande
faculté de l'homme, rien de ce qui a été fait avec sagesse ne l'a été sans le secours de
la parole ; elle est le guide de nos actions comme de toutes nos pensées, et les
hommes qui ont le plus de génie sont ceux qui en font le plus d'usage. C'est donc
parce que Lysimaque n'a réfléchi sur aucune de ces vérités, qu'il a osé attaquer
devant vous des hommes ambitieux de posséder une science qui est la cause de si
nombreux et de si grands bienfaits.
(258) 20-25. Mais pourquoi s'étonnerait-on de la conduite de Lysimaque, lorsque,
même parmi les hommes qui s'occupent de discours de controverse, il en est qui
calomnient également les discours sans valeur et ceux qui sont utiles, comme le font
les hommes les plus stupides? Ils n'ignorent pas cependant et la puissance de ces
discours, et les avantages rapides qu'ils procurent ; mais ils espèrent, en les dénigrant,
donner plus de relief à leurs compositions. (259) Je pourrais m'exprimer à leur égard
en termes beaucoup plus amers qu'ils ne le peuvent faire relativement à moi ; mais je
ne crois pas devoir imiter des hommes que l'envie dévore, ni blâmer ceux qui, sans
nuire à leurs disciples, sont seulement moins que d'autres en état de leur être utiles.
Je ferai néanmoins quelque mention de ces hommes ; je le ferai surtout parce qu'ils
ont parlé de moi, et ensuite pour que, sachant plus positivement ce qu'ils valent, vous
puissiez être plus justes envers chacun de nous;
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