[7,22] Ὅτι μὲν οὐχ ὑπ´ ἀνάγκης τε καὶ ἀπορίας
βιασθεὶς ὁ δῆμος ἐποιήσατο τὴν ἀπόστασιν, ὦ πατέρες,
ἀλλὰ πονηρᾷ ἐλπίδι ἐπαρθεὶς ὡς καταλύσων τὴν ἀριστοκρατίαν
ὑμῶν καὶ πάντων αὐτὸς ἐσόμενος τῶν κοινῶν κύριος, σχεδὸν
οἶμαι πάντας ὑμᾶς ᾐσθῆσθαι τὰ
περὶ τὰς διαλλαγὰς αὐτοῦ πλεονεκτήματα ὁρῶντας· ᾧ
γ´ οὐκ ἀπέχρησε διαφθείραντι τὴν περὶ τὰ συμβόλαια
πίστιν καὶ τοὺς ἐπὶ ταύτῃ κειμένους ἀνελόντι νόμους
μηθὲν ἄλλο πολυπραγμονεῖν, καινὴν δὲ καταστησάμενος
ἀρχὴν ἐπὶ τῷ καθελεῖν τὴν τῶν ὑπάτων ἱερὰν καὶ
ἄσυλον ἐποίησεν αὐτὴν νόμῳ, καὶ νῦν τυραννικὴν ἐξουσίαν
περιβαλλόμενος, ὦ βουλή, τῷ νεωστὶ κυρωθέντι
νόμῳ λέληθεν ὑμᾶς. ὅταν γὰρ ἐπ´ ἐξουσίας πολλῆς οἱ
προεστηκότες αὐτοῦ πρόφασιν εὐπρεπῆ προβαλλόμενοι
τὸ δὴ τοῖς ἀδικουμένοις τῶν δημοτῶν βοηθεῖν διὰ τῆς
ἐξουσίας ταύτης ἄγωσι καὶ φέρωσιν, ὅς´ ἂν αὐτοῖς
δοκῇ, καὶ μηθεὶς ὁ κωλύσων τὰς παρανομίας αὐτῶν
ᾖ, μήτ´ ἰδιώτης μήτ´ ἄρχων δεδοικὼς τὸν νόμον, ὃς
ἀφαιρεῖται καὶ τὸν λόγον ἡμῶν ἅμα τοῖς ἔργοις θάνατον
ἐπιτιθεὶς ζημίαν τοῖς ἐλευθέραν φωνὴν ἀφιεῖσι, τί
προσῆκεν ὄνομα θέσθαι τῇ δυναστείᾳ ταύτῃ τοὺς νοῦν
ἔχοντας ἕτερον, ἢ τοῦθ´, ὅπερ ἐστὶν ἀληθὴς καὶ πάντες
ἂν ὁμολογήσετε, τυραννίδα; εἰ δ´ οὐχ ὑφ´ ἑνὸς ἀνδρός, ἀλλ´ ὑφ´
ὅλου τυραννούμεθα δήμου, τί τοῦτο
διαφέρει; τὸ γὰρ ἔργον ἐξ ἀμφοῖν ταὐτό. κράτιστον
μὲν οὖν ἦν μηδὲ τὸ σπέρμα τῆς ἐξουσίας ταύτης ἐᾶσαι
καταβαλλόμενον, ἀλλὰ πάντα ὑπομεῖναι πρότερον, ὡς
Ἄππιος ὁ βέλτιστος ἐκ πολλοῦ τὰ δεινὰ προορώμενος
ἠξίου, εἰ δὲ μή, νῦν γ´ ὁμοθυμαδὸν ἅπαντας ἐξορύξαντας αὐτὴν
πρόρριζον ἐκ τῆς πόλεως ἐκβαλεῖν, ἕως
ἀσθενής ἐστι καὶ προσπολεμηθῆναι ῥᾳδία. καὶ τοῦτ´
οὐ πρώτοις ἡμῖν, ὦ βουλή, οὐδὲ μόνοις ἐξεγένετο παθεῖν, πολλοῖς
δὲ καὶ πολλάκις ἤδη τοῖς εἰς ἀβουλήτους
ἀνάγκας καταστᾶσι γνώμης ἁμαρτοῦσι τῆς ἀρίστης περὶ
τὰ μέγιστα, ἐπειδὴ τὰς ἀρχὰς οὐκ ἐκώλυσαν τοῦ κακοῦ,
τὰς αὐξήσεις πειρᾶσθαι καθαιρεῖν· καὶ ἡ μετάνοια τῶν
ὀψὲ ἀρχομένων σωφρονεῖν ἥττων οὖσα τῆς προνοίας,
καθ´ ἕτερον αὖ τρόπον οὐ χείρων οὖσα ἀναφαίνεται
τῇ κωλύσει τοῦ τέλους ἀφανίζουσα τὸ ἐν τῇ ἀρχῇ
ἀγνοηθέν.
| [7,22] IV. « VOUS n'ignorez pas, Sénateurs, que ce n'est ni la pauvreté ni
la nécessité qui ont obligé le peuple à sortir de Rome, mais qu'il l'a fait à
mauvaise intention dans la vue de détruire la puissance de la noblesse et
de se rendre le maître absolu. Je suis persuadé que vous l'avez tous
assez compris par les conditions du traité de réconciliation qui lui sont si
avantageuses. Non content d'avoir violé la foi des contrats et les lois
saintes qui leur servaient de sûreté, il a poussé plus loin ses pernicieuses
intrigues. Il a établi une nouvelle dignité pour abolir celle des consuls, et
après l'avoir rendue sacrée et inviolable par une loi faite exprès, il vient de
porter tout récemment une autre loi par laquelle il s'est emparé d'une
autorité tyrannique sans que vous vous en soyez, pour ainsi dire, aperçus.
Les magistrats du peuple déjà si puissants, se servent du spécieux
prétexte de protéger les plébéiens maltraités, pour étendre leur autorité,
pour couper, trancher, faire et défaire tout ce qu'ils jugeront à propos : il
n'y a ni particulier ni magistrat qui ose s'opposer à leurs injustices : ils ont
su vous lier les mains et vous fermer la bouche, par une loi qui vous ôte la
liberté de parler et d'agir, et qui menace de mort quiconque dira son avis
avec liberté. Quel autre nom pouvons-nous donner à cette puissance,
que celui de tyrannie? Peut-on l'appeler autrement, et n'en convenez-vous
pas vous-mêmes ? Car enfin, que nous importe d'être dominés par la
tyrannie d'un seul homme ou par celle de tout un peuple ? L'un ou l'autre
n'est-ce pas toujours la même chose ? Il aurait donc mieux valu ne point
laisser jeter les premières semences de cette puissance, mais souffrir
plutôt tout, suivant les salutaires avis d'Appius, ce sage magistrat qui
prévoyait de loin les maux qui nous devaient arriver. Mais puisque nous
ne l'avons pas fait, du moins réunissons-nous aujourd'hui tous ensemble
pour nous délivrer, nous et la ville de Rome, de cette redoutable tyrannie,
tandis qu'elle est encore faible et qu'elle n'a pas poussé de profondes
racines. Vous ne serez ni les premiers ni les seuls à qui il soit arrivé d'en
user ainsi. Vous avez devant vos yeux l'exemple de plusieurs peuples, qui
réduits à la dernière extrémité pour n'avoir pas suivi de bons conseils
dans les affaires importantes ni arrêté le mal dans son commencement,
n'ont pas laissé dans la suite de faire leurs efforts pour en arrêter les
progrès : s'ils ont commencé trop tard à devenir prudents, leur repentir,
quoiqu'il ne puisse pas être mis en parallèle avec une sage prévoyance,
leur a néanmoins été fort utile : et il leur est glorieux d'avoir su profiter de
leurs premières fautes pour empêcher les suites funestes qu'elles
pouvaient avoir.
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