[11] (1) Αὐτὸς δὲ τὸν στρατὸν καταστήσας
εἰς τὴν ὑπὸ Φαρναβάζῳ τεταγμένην χώραν οὐ μόνον ἐν ἀφθόνοις διῆγε πᾶσιν, ἀλλὰ
καὶ χρήματα συνῆγε πολλά· καὶ προελθὼν ἄχρι Παφλαγονίας προσηγάγετο τὸν βασιλέα
τῶν Παφλαγόνων, Κότυν, ἐπιθυμήσαντα τῆς φιλίας αὐτοῦ δι’ ἀρετὴν καὶ πίστιν. (2) ὁ δὲ
Σπιθριδάτης, ὡς ἀποστὰς τοῦ Φαρναβάζου τὸ πρῶτον ἦλθε πρὸς τὸν ᾿Αγησίλαον, ἀεὶ
συναπεδήμει καὶ συνεστράτευεν αὐτῷ, κάλλιστον υἱὸν μὲν ἔχων, Μεγαβάτην, οὗ
παιδὸς ὄντος ἤρα σφοδρῶς ᾿Αγησίλαος, καλὴν δὲ καὶ θυγατέρα παρθένον ἐν ἡλικίᾳ
γάμου. (3) ταύτην ἔπεισε γῆμαι τὸν Κότυν ὁ ᾿Αγησίλαος· καὶ λαβὼν παρ’ αὐτοῦ χιλίους
ἱππεῖς καὶ δισχιλίους πελταστὰς αὖθις ἀνεχώρησεν εἰς Φρυγίαν, καὶ κακῶς ἐποίει
τὴν Φαρναβάζου χώραν οὐχ ὑπομένοντος οὐδὲ πιστεύοντος τοῖς ἐρύμασιν, ἀλλὰ ἔχων
ἀεὶ τὰ πλεῖστα σὺν ἑαυτῷ τῶν τιμίων καὶ ἀγαπητῶν ἐξεχώρει καὶ ὑπέφευγεν ἄλλοτε
ἀλλαχόσε τῆς χώρας μεθιδρυόμενος, μέχρι οὗ παραφυλάξας αὐτὸν ὁ Σπιθριδάτης καὶ
παραλαβὼν ῾Ηριππίδαν τὸν Σπαρτιάτην ἔλαβε τὸ στρατόπεδον καὶ τῶν χρημάτων
ἁπάντων ἐκράτησεν. (4) ἔνθα δὴ πικρὸς ὢν ὁ ῾Ηριππίδας ἐξεταστὴς τῶν κλαπέντων, καὶ
τοὺς βαρβάρους ἀναγκάζων ἀποτίθεσθαι, καὶ πάντα ἐφορῶν καὶ διερευνώμενος,
παρώξυνε τὸν Σπιθριδάτην, ὥστε ἀπελθεῖν εὐθὺς εἰς Σάρδεις μετὰ τῶν Παφλαγόνων.
(5) Τοῦτο λέγεται τῷ ᾿Αγησιλάῳ γενέσθαι πάντων ἀνιαρότατον. ἤχθετο μὲν γὰρ ἄνδρα
γενναῖον ἀποβεβληκὼς τὸν Σπιθριδάτην καὶ σὺν αὐτῷ δύναμιν οὐκ ὀλίγην, ᾐσχύνετο
δὲ τῇ διαβολῇ τῆς μικρολογίας καὶ ἀνελευθερίας, ἧς οὐ μόνον αὑτόν, ἀλλὰ καὶ τὴν
πατρίδα καθαρεύουσαν ἀεὶ παρέχειν ἐφιλοτιμεῖτο. (6) χωρὶς δὲ τῶν ἐμφανῶν τούτων
ἔκνιζεν αὐτὸν οὐ μετρίως ὁ τοῦ παιδὸς ἔρως ἐνεσταγμένος, εἰ καὶ πάνυ παρόντος
αὐτοῦ τῷ φιλονείκῳ χρώμενος ἐπειρᾶτο νεανικῶς ἀπομάχεσθαι πρὸς τὴν ἐπιθυμίαν.
(7) καί ποτε τοῦ Μεγαβάτου προσιόντος ὡς ἀσπασομένου καὶ φιλήσοντος ἐξέκλινεν. ἐπεὶ
δὲ ἐκεῖνος αἰσχυνθεὶς ἐπαύσατο καὶ τὸ λοιπὸν ἄπωθεν ἤδη προσηγόρευεν, ἀχθόμενος
αὖ πάλιν καὶ μεταμελόμενος τῇ φυγῇ τοῦ φιλήματος, ὁ ᾿Αγησίλαος προσεποιεῖτο
θαυμάζειν ὅ τι δὴ παθὼν αὐτὸν ὁ Μεγαβάτης ἀπὸ στόματος οὐ φιλοφρονοῖτο. (8) "Σὺ γὰρ
αἴτιος" οἱ συνήθεις ἔφασαν "οὐχ ὑποστάς, ἀλλὰ τρέσας τὸ φίλημα τοῦ καλοῦ καὶ
φοβηθείς· ἐπεὶ καὶ νῦν ἂν ἔλθοι σοι πεισθεὶς ἐκεῖνος ἐντὸς φιλήματος· ἀλλ’ ὅπως
αὖθις οὐκ ἀποδειλιάσεις." (9) χρόνον οὖν τινα πρὸς ἑαυτῷ γενόμενος ὁ ᾿Αγησίλαος καὶ
διασιωπήσας, "Οὐδέν" ἔφη "δεινὸν πείθειν ὑμᾶς ἐκεῖνον· ἐγὼ γάρ μοι δοκῶ τήναν
τὰν μάχαν τὰν περὶ τοῦ φιλάματος ἅδιον ἂν μάχεσθαι πάλιν ἢ πάντα ὅσα τεθέαμαι
χρυσία μοι γενέσθαι." (10) τοιοῦτος μὲν ἦν τοῦ Μεγαβάτου παρόντος, ἀπελθόντος γε μὴν
οὕτω περικαῶς ἔσχεν ὡς χαλεπὸν εἰπεῖν εἰ πάλιν αὖ μεταβαλομένου καὶ φανέντος
ἐνεκαρτέρησε μὴ φιληθῆναι.
| [11] (1) Lui-même établit son armée dans le pays soumis au gouvernement de
Pharnabaze, où non seulement il avait tout en abondance, mais encore où il
ramassait beaucoup d'argent. Il poussa jusqu'en Paphlagonie, où il gagna l'appui
du Roi Cotys, à qui le mérite et la loyauté d'Agésilas faisaient désirer son
amitié. (2) Or Spithridatès qui, depuis qu'il avait abandonné Pharnabaze pour se
rallier à Agésilas, prenait part à tous ses déplacements et à toutes ses
campagnes, avait un fils très beau, Mégabate, qui, depuis son enfance, était
fort aimé d'Agésilas, et une belle fille en âge de se marier. (3) Agésilas
décida Cotys à l'épouser; et, après avoir reçu de lui mille cavaliers et deux
mille hommes d'infanterie légère, il revint en Phrygie. Il continuait de faire
du mal au pays de Pharnabaze; mais ce satrape évitait de lui tenir tête; et,
loin de se fier aux fortifications, il avait toujours avec lui la plupart des
objets précieux auxquels il tenait davantage, se retirait et s'esquivait
constamment, s'arrêtant pour camper tantôt en un lieu, tantôt en un autre. Ce
manège dura jusqu'au moment où Spithridatès, qui le guettait, assisté du
Spartiate Hérippidas, prit son camp et s'empara de tous ses trésors. (4) Mais
Hérippidas, âpre contrôleur des moindres détournements, obligeait les Barbares à
rendre à la masse ce qui avait été distrait du butin. À force de surveiller et
d'épier tout, il mécontenta Spithridatès, qui partit aussitôt pour Sardes avec
ses Paphlagoniens. (5) Ce fut, dit-on, l'accident le plus irrémédiable qu'eut à
subir Agésilas. Car, s'il regrettait de perdre en Spithridatès un homme de
coeur, et, avec lui, une armée importante, il rougissait aussi de prêter le
flanc aux reproches de mesquinerie et d'indélicatesse, dont il avait l'ambition
de tenir toujours à l'abri non seulement sa personne, mais sa patrie. (6) En
dehors de ces motifs avouables, ce qui ne le tourmentait pas médiocrement,
c'était son amour profond pour le fils de Spithridatès, bien qu'ayant cet enfant
près de lui il s'efforçât, avec la ténacité qui lui donnait d'ordinaire la
victoire, de combattre sa propre passion de toutes les forces d'une âme encore
jeune. (7) Une fois même que Mégabatès s'approchait pour l'embrasser et lui
donner d'autres marques de tendresse, il se détourna. Mais comme cet enfant,
honteux de son audace, ne la renouvelait pas, et que désormais il le saluait de
loin, Agésilas, contrarié à son tour et se repentant d'avoir évité le baiser
offert, feignait de se demander ce que Mégabatès pouvait bien avoir pour ne plus
le cajoler de si près. (8) Ses amis lui dirent: "C'est ta faute; au lieu
d'accepter le baiser de ce beau garçon, tu t'y es dérobé en tremblant.
Maintenant encore il se laisserait facilement décider à reprendre ses relations
avec toi, baiser inclus; mais à condition de ne pas t'effaroucher une fois de
plus!" (9) Après s'être recueilli quelque temps en silence, Agésilas reprit: "Il
ne faut absolument pas chercher à le faire revenir; car il me semble que ce
combat contre le baiser, j'aurais plus de plaisir à l'engager une seconde fois
qu'à voir autour de moi tout se changer en or!" (10) Tel était Agésilas tant que
Mégabatès fut là; mais, après le départ de l'adolescent, il s'enflamma de telle
sorte qu'il est difficile de dire si, un nouveau changement l'ayant fait
reparaître, Agésilas se serait obstiné à refuser l'amour.
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