[9] Πρὸς δὲ θυσίαν τινὰ τῶν Ἀθηναίων αἰτούντων
ἐπιδόσεις, καὶ τῶν ἄλλων ἐπιδιδόντων, κληθεὶς πολλάκις ἔφη·
"τούτους αἰτεῖτε τοὺς πλουσίους· ἐγὼ δ' αἰσχυνοίμην ἄν, εἰ
τούτῳ μὴ ἀποδιδοὺς ὑμῖν ἐπι<δι>δοίην", (2) δείξας Καλλικλέα
τὸν δανειστήν. ὡς δ' οὐκ ἐπαύοντο κεκραγότες καὶ
καταβοῶντες, λόγον εἶπεν αὐτοῖς τοῦτον· "ἀνὴρ δειλὸς ἐπὶ
πόλεμον ἐξῄει, φθεγξαμένων δὲ κοράκων, τὰ ὅπλα θεὶς
ἡσύχαζεν· εἶτ' ἀναλαβὼν αὖθις ἐξῄει, καὶ φθεγγομένων πάλιν
ὑπέστη· καὶ τέλος εἶπεν· ὑμεῖς (3) κεκράξεσθε μὲν μέγιστον ὡς
δυνατόν, ἐμοῦ δ' οὐ γεύσεσθε." πάλιν δέ ποτε τῶν Ἀθηναίων
ἐξαγαγεῖν αὐτὸν ἐπὶ τοὺς πολεμίους κελευόντων, ὡς <δ'> οὐκ
ἐβούλετο, δειλὸν καὶ ἄνανδρον ἀποκαλούντων, "οὔθ' ὑμεῖς"
εἶπεν "ἐμὲ δύνασθε ποιῆσαι θαρσαλέον, οὔτ' ἐγὼ ὑμᾶς δειλούς.
οὐ μὴν (4) ἀλλ' ἴσμεν ἀλλήλους." ἐν δὲ καιροῖς ἐπισφαλέσι
τραχυνομένου τοῦ δήμου πρὸς αὐτὸν σφόδρα, καὶ τῆς
στρατηγίας εὐθύνας ἀπαιτοῦντος, "σώθητε" (5) εἶπεν "ὦ
μακάριοι πρῶτον." ἐπεὶ δὲ πολεμοῦντες μὲν ἦσαν ταπεινοὶ καὶ
περιδεεῖς, γενομένης δ' εἰρήνης ἐθρασύνοντο καὶ κατεβόων τοῦ
Φωκίωνος ὡς ἀφῃρημένου τὴν νίκην αὐτῶν, "εὐτυχεῖτε" εἶπεν
"ἔχοντες στρατηγὸν (6) εἰδόθ' ὑμᾶς· ἐπεὶ πάλαι ἂν
ἀπωλώλειτε." τοῖς δὲ Βοιωτοῖς οὐ βουλομένων αὐτῶν
δικάζεσθαι περὶ τῆς χώρας, ἀλλὰ πολεμεῖν, συνεβούλευε διὰ
τῶν λόγων ἐν οἷς εἰσι κρείττους, μὴ διὰ τῶν ὅπλων ἐν οἷς
ἥττους, μάχεσθαι. λέγοντα δ' αὐτὸν οὐ προσιεμένων οὐδ'
ὑπομενόντων ἀκούειν, "ἐμέ" εἶπεν "ὑμεῖς ἃ μὴ βούλομαι ποιεῖν
βιάσασθαι δύνασθε, λέγειν δ' (8) ἃ μὴ δεῖ παρὰ γνώμην οὐκ
ἀναγκάσετε." τῶν δ' ἀντιπολιτευομένων αὐτῷ ῥητόρων,
Δημοσθένους μὲν εἰπόντος "ἀποκτενοῦσί σ' Ἀθηναῖοι," (9)
Φωκίων· "ἂν μανῶσιν", εἶπε· "σὲ δ' ἂν σωφρον<ής>ωσι·"
Πολύευκτον δὲ τὸν Σφήττιον ὁρῶν ἐν καύματι συμβουλεύοντα
τοῖς Ἀθηναίοις πολεμεῖν πρὸς Φίλιππον, εἶθ' ὑπ' ἄσθματος
πολλοῦ καὶ ἱδρῶτος, ἅτε δὴ καὶ ὑπέρπαχυν ὄντα, πολλάκις
ἐπιρροφοῦντα τοῦ ὕδατος, "ἄξιον" ἔφη "τούτῳ πιστεύσαντας
ὑμᾶς ψηφίσασθαι τὸν πόλεμον, ὃν τί οἴεσθε ποιήσειν ἐν τῷ
θώρακι καὶ τῇ ἀσπίδι τῶν πολεμίων ἐγγὺς ὄντων, ὅτε (10)
λέγων πρὸς ὑμᾶς ἃ ἔσκεπται κινδυνεύει πνιγῆναι;" τοῦ δὲ
Λυκούργου πολλὰ βλάσφημα πρὸς αὐτὸν εἰπόντος ἐν
ἐκκλησίᾳ, καὶ πρὸς ἅπασιν ὅτι δέκα τῶν πολιτῶν ἐξαιτοῦντος
Ἀλεξάνδρου συνεβούλευεν ἐκδοῦναι, εἶπε· "πόλλ' ἐγὼ
συμβεβούλευκα καλὰ καὶ συμφέροντα τούτοις, ἀλλ' οὐ
πείθονταί μοι."
| [9] X.
Les Athéniens demandaient un jour, pour quelque sacrifice, une contribution générale, à
laquelle tous les autres citoyens avaient déjà fourni leur part; Phocion, appelé
plusieurs fois pour donner la sienne, répondit enfin : « Demandez aux riches; pour
moi, j'aurais honte de vous donner, quand je n'ai pas encore payé celui-ci, il montrait
l'usurier Calliclès; et comme on ne cessait pas de crier après lui, il leur conta cet
apologue : « Un homme lâche allait partir pour la guerre, lorsqu'il entendit des
corbeaux croasser; effrayé de leurs cris, il pose les armes et reste chez lui; un moment
après il s'arme de nouveau, et se met en marche. Les corbeaux recommencent leurs
cris, et l'homme rentre dans sa maison, en disant : "Vous croasserez tant qu'il vous
plaira; mais vous ne tâterez pas de ma peau." Les Athéniens voulaient le forcer de
les mener à l'ennemi; et comme il le refusa, ils le traitèrent de poltron. « Vous ne
pouvez, leur dit-il, me rendre brave, ni moi vous rendre timides; au reste, nous nous
connaissons assez les uns les autres". Dans des temps difficiles, le peuple s'emportait
contre lui avec beaucoup de rudesse, et voulait que sur-le-champ il rendît compte de
son administration. "Eh! mes amis, leur dit-il, songez d'abord à vous tirer du mauvais
pas où vous êtes." Pendant la guerre, les Athéniens étaient timides et souples; mais,
rendus insolents par la paix, ils se plaignaient hautement de Phocion, et lui
reprochaient de leur avoir enlevé la victoire des mains : « Vous êtes bien heureux,
leur dit-il, d'avoir un général qui vous connaisse; sans cela, il y a longtemps que vous
seriez perdus. » XI. Les Athéniens refusaient de terminer en justice les différends
qu'ils avaient avec les Béotiens pour leur territoire, et voulaient les décider par la voie
des armes. Phocion leur conseilla de disputer avec eux en paroles, genre d'escrime où
ils étaient les plus forts, et de laisser les armes, en quoi ils étaient les plus faibles. Un
jour que son avis leur déplaisait, et qu'ils ne voulaient pas même l'écouter : « Vous
pouvez, leur dit-il, me forcer à faire ce que je ne veux pas; mais vous ne sauriez me
contraindre à dire, contre mon sentiment, ce qu'il ne faut pas. » Démosthène, un des
orateurs qui lui étaient opposés dans le gouvernement, lui dit un jour : « Phocion, si
les Athéniens entrent en fureur, ils vous feront mourir. — Oui, repartit Phocion; mais
s'ils reviennent à leur bon sens, ce sera vous. » Polyeucte le Sphettien, haranguant le
peuple un jour qu'il faisait fort chaud, lui conseillait de déclarer la guerre à Philippe.
Comme il était fort gros, il se mettait hors d'haleine en parlant, et suait à grosses
gouttes; en sorte que, pendant son discours, il demanda plusieurs fois à boire :
« Athéniens, dit Phocion, il est bien juste que vous vous en rapportiez à cet homme
pour ordonner la guerre. Que ne ferat-il pas lorsqu'il sera sous la cuirasse et le
bouclier, et que les ennemis seront proches, lui qui, pour vous dire seulement ce qu'il
a préparé, se met en risque d'étouffer? » L'orateur Lycurgue vomissait mille injures
contre lui dans l'assemblée du peuple, et lui reprochait surtout d'avoir conseillé aux
Athéniens de livrer les dix orateurs qu'Alexandre avait demandés : "Souvent, lui dit
Phocion, j'ai donné au peuple des conseils sages et salutaires; mais il n'en suit aucun".
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