[21] Γράψαντος δὲ τοῦ Ἀλεξάνδρου περὶ τριήρων ὅπως
ἀποστείλωσιν αὐτῷ, καὶ τῶν ῥητόρων ἐνισταμένων, τῆς δὲ
βουλῆς τὸν Φωκίωνα λέγειν κελευούσης, "λέγω τοίνυν ὑμῖν"
εἶπεν "ἢ τοῖς ὅπλοις κρατεῖν ἢ τοῖς κρατοῦσι φίλους εἶναι."
(2) Πρὸς δὲ Πυθέαν, ἀρχόμενον τότε πρῶτον ἐντυγχάνειν
Ἀθηναίοις, ἤδη δὲ λάλον ὄντα καὶ θρασύν, "οὐ σιωπήσεις" ἔφη,
"καὶ ταῦτα νεώνητος ὢν τῷ δήμῳ;"
(3) Ἐπεὶ δ' Ἅρπαλος μετὰ χρημάτων πολλῶν ἀποδρὰς
Ἀλέξανδρον ἐκ τῆς Ἀσίας τῇ Ἀττικῇ προσέβαλε, καὶ τῶν
εἰωθότων ἀπὸ τοῦ βήματος χρηματίζεσθαι δρόμος ἦν καὶ
ἅμιλλα φθειρομένων πρὸς αὐτόν, τούτοις μὲν ἀπὸ πολλῶν
μικρὰ δελεάζων προήκατο καὶ διέρριψε, τῷ δὲ Φωκίωνι
προσέπεμψε διδοὺς ἑπτακόσια τάλαντα, καὶ τἆλλα πάντα καὶ
μετὰ πάντων (4) ἑαυτὸν (ἐπ') ἐκείνῳ μόνῳ παρακατατιθέμενος.
ἀποκριναμένου δὲ τραχέως τοῦ Φωκίωνος, οἰμώξεσθαι τὸν
Ἅρπαλον εἰ μὴ παύσεται διαφθείρων τὴν πόλιν, τότε μὲν
συσταλεὶς ἀπέστη, μετ' ὀλίγον δὲ βουλευομένων Ἀθηναίων
ἑώρα τοὺς μὲν εἰληφότας τὰ χρήματα παρ' αὐτοῦ
μεταβαλλομένους καὶ κατηγοροῦντας, ἵνα μὴ φανεροὶ
γένωνται, Φωκίωνα δὲ τὸν μηδὲν λαβόντα μετὰ τοῦ κοινοῦ
συμφέροντος ἅμα καὶ τὴν ἐκείνου σωτηρίαν ἔν τινι (5) λόγῳ
τιθέμενον. πάλιν οὖν ἐνεχθεὶς ἐπὶ τὸ θεραπεύειν ἐκεῖνον,
αὐτὸν μὲν ὡς ἔρυμα πανταχόθεν ἀνάλωτον ὑπὸ τοῦ χρυσίου
περιοδεύων ἑώρα, Χαρικλέα δὲ τὸν γαμβρὸν αὐτοῦ
ποιησάμενος συνήθη καὶ φίλον ἐνέπλησε δόξης πονηρᾶς,
πάντα πιστεύων καὶ πάντα χρώμενος ἐκείνῳ.
| [21] XXIV. Les orateurs d'Athènes s'étant opposés à l'envoi des galères
qu'Alexandre avait fait demander aux Athéniens, le peuple ordonna à Phocion d'en
dire son avis. "Je pense, leur dit-il, que vous devez être ou les plus forts par les armes,
ou les amis de ceux qui le sont." L'orateur Pythéas, qui commençait à peine à parler
devant le peuple, montrait beaucoup d'audace dans ses discours, et étourdissait
l'assemblée de son babil. « Ne te tairas-tu point, lui dit Phocion, toi si nouvellement
acheté dans cette ville?" Harpalus, qui commandait en Asie pour Alexandre,
s'étant enfui avec d'immenses richesses, aborda dans l'Attique. Aussitôt tous ceux qui
avaient coutume de s'enrichir à la tribune courent à lui, à l'envi les uns des autres,
déjà corrompus par l'espoir de son argent. Harpalus jette à chacun d'eux, comme une
amorce, une petite portion de ses grands trésors ; mais il envoie à Phocion sept cents
talents et ne confie qu'à lui seul tout le reste de ses richesses, et sa personne même.
Phocion ayant répondu avec dureté qu'il ferait repentir Harpalus de ses démarches
s'il ne cessait de corrompre la ville, Harpalus se retira fort affligé de cette réponse.
Peu de temps après, les Athéniens ayant délibéré sur son affaire, il vit que les
orateurs, qui avaient reçu de l'argent, entièrement changés, l'accusaient lui-même,
afin d'éviter le soupçon de s'être laissé corrompre. Phocion seul, qui n'avait voulu
rien accepter, en ne proposant dans ses avis que l'intérêt général, ne laissait pas que
de travailler à sauver Harpalus, qui essaya de nouveau de le gagner; mais il eut beau
tenter tous les moyens de le séduire, il le trouva, tel qu'une forteresse, toujours
inaccessible à l'appât de l'or. Il se contenta donc de former avec Charicles, gendre de
Phocion, une amitié particulière; ce qui fit à Chariclès une très mauvaise réputation,
parce qu'on voyait Harpalus avoir en lui la plus grande confiance, et l'employer dans
toutes ses affaires,
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