[6,0] ΣΥΜΠΟΣΙΑΚΩΝ - ΒΙΒΛΙΟΝ ΕΚΤΟΝ.
Τιμόθεον τὸν Κόνωνος, ὦ Σόσσιε Σενεκίων, ὡς
ἐκ τῶν πολυτελῶν καὶ στρατηγικῶν δείπνων ἀναλαβὼν
ὁ Πλάτων ἐδείπνισεν ἐν Ἀκαδημίᾳ μουσικῶς καὶ ἀφελῶς
’ταῖς ἀφλεγμάντοις‘ ὥς φησιν ὁ Ἴων
’τραπέζαις‘, αἷς ὕπνοι τε καθαροὶ καὶ βραχυόνειροι φαντασίαι,
τοῦ σώματος εὐδίαν καὶ γαλήνην ἔχοντος, ἕπονται,
μεθ´ ἡμέραν {οὖν} ὁ Τιμόθεος αἰσθόμενος τῆς διαφορᾶς ἔφη
τοὺς παρὰ Πλάτωνι δειπνήσαντας καὶ τῇ ὑστεραίᾳ καλῶς
γίνεσθαι. μέγα γὰρ ὡς ἀληθῶς εὐημερίας ἐφόδιον εὐκρασία
σώματος ἀβαπτίστου καὶ ἐλαφροῦ καὶ παρεστῶτος
ἀνυπόπτως ἐπὶ πᾶσαν ἐνέργειαν. ἀλλ´ ἕτερον οὐκ ἔλαττον
ὑπῆρχε τοῦτο τοῖς παρὰ Πλάτωνι δειπνήσασιν, ἡ τῶν
λαληθέντων παρὰ πότον ἀναθεώρησις· αἱ μὲν γὰρ τῶν
ποθέντων ἢ βρωθέντων ἡδοναὶ τὴν ἀνάμνησιν ἀνελεύθερον
ἔχουσιν καὶ ἄλλως ἐξίτηλον, ὥσπερ ὀσμὴν ἕωλον ἢ
κνῖσαν ἐναπολειπομένην, προβλημάτων δὲ καὶ λόγων
φιλοσόφων ὑποθέσεις αὐτούς τε τοὺς μεμνημένους εὐφραίνουσιν,
ἀεὶ πρόσφατοι παροῦσαι, καὶ τοὺς ἀπολειφθέντας
οὐχ ἧττον ἑστιᾶν παρέχουσι τοῖς αὐτοῖς, ἀκούοντας
καὶ μεταλαμβάνοντας· ὅπου καὶ νῦν τῶν Σωκρατικῶν
συμποσίων μετουσία καὶ ἀπόλαυσίς ἐστι τοῖς
φιλολόγοις, ὥσπερ αὐτοῖς ἐκείνοις τοῖς τότε δειπνοῦσι.
καίτοι, εἰ τὰ σωματικὰ τὰς ἡδονὰς παρεῖχεν, ἔδει
καὶ Ξενοφῶντα καὶ Πλάτωνα μὴ τῶν λαληθέντων ἀλλὰ
τῶν παρατεθέντων ἐν Καλλίου καὶ Ἀγάθωνος ὄψων καὶ
πεμμάτων καὶ τραγημάτων ἀπογραφὴν ἀπολιπεῖν· νῦν
δ´ ἐκεῖνα μὲν οὐδέποτε, καίπερ ὡς εἰκὸς ἐκ παρασκευῆς
γενόμενα καὶ δαπάνης, λόγου τινὸς ἠξιώθη, τὰ δὲ φιλοσοφηθέντα
μετὰ παιδιᾶς σπουδάζοντες εἰς γραφὴν ἀπετίθεντο,
καὶ κατέλιπον παραδείγματα τοῦ μὴ μόνον
συνεῖναι διὰ λόγων ἀλλήλοις παρὰ πότον ἀλλὰ καὶ μεμνῆσθαι
τῶν λαληθέντων.
| [6,0] LIVRE SIXIÈME. PRÉAMBULE.
Mon cher Sossius Sénécion, Timothée, fils de Conon,
quittant ses festins somptueux, ses festins de général, était
allé dîner chez Platon qui l'avait invité à l'Académie. Il prit
place à cette table aussi intelligente que simple, où rien,
comme dit Ion, ne mettait les estomacs en feu. Il partagea
un de ces repas que suivent des sommeils purs, des rêves
peu compliqués, et qui maintiennent le corps dans la tranquillité
et le calme. Aussi le lendemain ayant apprécié cette
différence, il se prit à dire : « Quand on a dîné chez Platon
on s'en trouve bien, même le jour suivant. » Car, à dire vrai,
ce sont de grandes provisions de bonheur pour le voyage de
la vie que ce parfait tempérament, cet équilibre d'un corps
qui, léger de nourriture et non noyé de vin, est franchement
dispos à toute action que l'on veut entreprendre.
Mais un autre avantage non moins précieux était assuré
à ceux qui avaient dîné chez Platon : c'est qu'ils se rappelaient
les conversations tenues durant le repas. Le plaisir
de boire laisse un souvenir qui n'a rien de libéral, qui se
dissipe sans laisser de profit : comme un parfum évaporé,
comme l'odeur des ragoûts de la veille. Au contraire, des
questions variées et des discours philosophiques sont des
textes qui réjouissent même par le seul souvenir. Ils sont
toujours présents à l'esprit, toujours nouveaux; et ils ne
charment pas moins, ait-on été privé d'y assister, que si
on les avait entendus et qu'on y eût pris part. C'est ainsi
que maintenant encore les hommes studieux participent
aux festins de Socrate et en profitent, autant que ceux
mêmes qui alors soupèrent réellement avec lui. Remarquez
que si les satisfactions corporelles eussent pour de tels
convives résidé dans le plaisir, Xénophon et Platon, au
lieu de nous transmettre le récit de ces entretiens, nous
auraient laissé la description des plats servis chez Callias et
chez Agathon, des pâtisseries et des friandises dont la table
était couverte. Or ce sont des détails qu'ils n'ont jugés dignes
d'aucune mention; et pourtant, selon toute probabilité,
il n'y avait été épargné ni apprêts ni dépense. Ils ont mieux
aimé recueillir avec un soin religieux les questions philosophiques
qui s'y traitaient d'une manière enjouée; et ils
les ont consignées par écrit, pour nous laisser des exemples
destinés à faire voir que nous devons non-seulement échanger
des propos à table, mais encore nous souvenir plus tard
de ceux qui y ont été tenus.
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