[3,6,14] Τί οὖν; Μὴ οὔσης οὐδὲν ὑπέστη ἄν; Ἢ οὐδὲ εἴδωλον κατόπτρου μὴ ὄντος ἤ τινος τοιούτου. Τὸ γὰρ ἐν ἑτέρῳ πεφυκὸς γίνεσθαι ἐκείνου μὴ ὄντος οὐκ ἂν γένοιτο· τοῦτο γὰρ φύσις εἰκόνος τὸ ἐν ἑτέρῳ. Εἰ μὲν γάρ τι ἀπῄει ἀπὸ τῶν ποιούντων, καὶ ἄνευ τοῦ ἐν ἑτέρῳ ἦν ἄν. Ἐπεὶ δὲ μένει ἐκεῖνα, εἰ ἐμφαντασθήσεται ἐν ἄλλῳ, δεῖ τὸ ἄλλο εἶναι ἕδραν παρέχον τῷ οὐκ ἐλθόντι, τῇ δ´ αὐτοῦ παρουσίᾳ καὶ τῇ τόλμῃ καὶ οἷον προσαιτήσει καὶ πενίᾳ οἷον βιασάμενον λαβεῖν καὶ ἀπατηθὲν τῇ οὐ λήψει, ἵνα μένῃ ἡ πενία καὶ ἀεὶ προσαιτῇ. Ἐπεὶ γὰρ ἅρπαξ ὑπέστη, ὁ μὲν μῦθος αὐτὴν ποιεῖ προσαιτοῦσαν ἐνδεικνύμενος αὐτῆς τὴν φύσιν, ὅτι ἀγαθοῦ ἔρημος. Αἰτεῖ τε ὁ προσαιτῶν οὐχ ἃ ἔχει ὁ διδούς, ἀλλ´ ἀγαπᾷ ὅ τι ἂν λάβῃ· ὥστε καὶ τοῦτο ἐνδείκνυσθαι, ὡς ἕτερον τὸ ἐν αὐτῇ φανταζόμενον. Τό τε ὄνομα ὡς οὐ πληρουμένης. Τὸ δὲ τῷ Πόρῳ συγγίνεσθαι οὐ τῷ ὄντι δηλοῦντός ἐστι συγγίνεσθαι οὐδὲ τῷ κόρῳ, ἀλλά τινι πράγματι εὐμηχάνῳ· τοῦτο δέ ἐστι τῇ σοφίᾳ τοῦ φαντάσματος.
Ἐπεὶ γὰρ οὐχ οἷόν τε τοῦ ὄντος πάντη μὴ μετέχειν ὅ τι περ ὁπωσοῦν ἔξω ὂν αὐτοῦ ἐστιν—αὕτη γὰρ ὄντος φύσις εἰς τὰ ὄντα ποιεῖν — τὸ δὲ πάντη μὴ ὂν ἄμικτον τῷ ὄντι, θαῦμα τὸ χρῆμα γίγνεται, πῶς μὴ μετέχον μετέχει, καὶ πῶς οἷον παρὰ τῆς γειτνιάσεως ἔχει τι καίπερ τῇ αὑτοῦ φύσει μὲν οἷον κολλᾶσθαι ἀδυνατοῦν. Ἀπολισθάνει οὖν ὡς ἂν ἀπὸ φύσεως ἀλλοτρίας ὃ ἔλαβεν ἄν, οἷον ἠχὼ ἀπὸ τόπων λείων καὶ ὁμαλῶν· ὅτι μὴ μένει ἐκεῖ, τούτῳ καὶ ἐφαντάσθη ἐκεῖ κἀκεῖθεν εἶναι.
Εἰ δ´ ἦν μετασχοῦσα καὶ οὕτω δεξαμένη, ὥσπερ τις ἀξιοῖ, καταποθὲν ἂν εἰς αὐτὴν τὸ προσελθὸν ἔδυ. Νῦν δὲ φαίνεται, ὅτι μὴ κατεπόθη, ἀλλ´ ἔμεινεν ἡ αὐτὴ οὐδὲν δεξαμένη, ἀλλ´ ἐπισχοῦσα τὴν πρόσοδον ὡς ἕδρα ἀπωθουμένη καὶ εἰς τὸ αὐτὸ τῶν προσιόντων κἀκεῖ μιγνυμένων ὑποδοχή, οἷον ὅσα πρὸς ἥλιον πῦρ ζητοῦντες λαβεῖν ἱστᾶσι λεῖα, τὰ δὲ καὶ πληροῦντες ὕδατος, ἵνα μὴ διέλθῃ κωλυομένη ὑπὸ τοῦ ἔνδον ἐναντίου ἡ φλόξ, ἔξω δὲ συνίσταιτο. Γίνεται οὖν αἰτία τῆς γενέσεως οὕτω καὶ τὰ ἐν αὐτῇ συνιστάμενα τοιοῦτον συνίσταται τρόπον.
| [3,6,14] Quoi ! rien ne subsisterait-il {dans le monde sensible} si la matière n'existait pas? Rien. C'est comme pour un miroir: enlevez-le, les images s'évanouissent. En effet, ce qui est par sa nature destiné à exister dans une autre chose ne saurait exister sans cette chose ; or, la nature de toute image est d'exister en une autre chose. Si l'image était une émanation des causes mêmes, elle pourrait subsister sans être en une autre chose ; mais, comme ces causes demeurent en elles-mêmes, pour que leur image se reflète ailleurs, il faut qu'il y ait une autre chose destinée à servir de lieu à ce qui n'y entre pas réellement ; une chose, dis-je, qui par sa présence, son audace, ses sollicitations et son indigence, obtienne de force en quelque sorte, mais qui soit trompée parce qu'elle n'obtient rien réellement; de sorte qu'elle conserve son indigence et qu'elle continue de solliciter. Dès que Penia {la Pauvreté} existe, elle demande sans cesse, comme le raconte un mythe ; cela montre assez qu'elle est naturellement dénuée de tout bien. Elle ne demande pas à obtenir tout ce que possède celui qui lui donne ; il lui suffit d'en avoir quelque chose, en sorte que nous voyons par là combien les simulacres qui apparaissent dans la matière sont différents des êtres véritables. Le nom même de Penia, qu'on donne à la matière, indique qu'elle est insatiable. Si l'on dit qu'elle s'unit à Poros {l'Abondance}, cela ne signifie pas qu'elle s'unit avec l'Être ou avec la Plénitude, mais avec une œuvre d'un artifice admirable, c'est-à-dire avec une chose qui n'est qu'une spécieuse apparence.
Il est impossible en effet que ce qui est en dehors de l'être en soit complètement privé : car la nature de l'être est de produire les êtres. D'un autre côté, le non-être absolu ne peut se mêler à l'être. Il en résulte une chose étonnante : c'est que la matière participe à l'être sans y participer réellement, et qu'elle en obtient quelque chose en s'en approchant, quoique par sa nature elle ne puisse s'unir avec lui. Elle reflète donc ce qu'elle reçoit d'une nature étrangère à la sienne, comme l'écho renvoie le son, dans les lieux unis et polis ; c'est ainsi que les choses qui ne demeurent pas dans la matière paraissent y résider et en venir.
Si la matière participait à l'existence des êtres véritables et les recevait dans son sein comme on pourrait le penser, ce qui entre en elle la pénétrerait profondément ; mais on voit fort bien qu'elle n'en est pas pénétrée, qu'elle est restée sans en rien recevoir, qu'elle en a au contraire arrêté la procession, comme l'écho arrête et renvoie le son, qu'elle est seulement le réceptacle des choses qui entrent en elle et qui s'y mêlent. Tout se passe ici comme dans le cas où des personnes, voulant allumer du feu aux rayons du soleil, placent devant ces rayons des vases polis et les remplissent d'eau pour que la flamme, arrêtée par les obstacles qu'elle rencontre intérieurement, ne puisse pénétrer et se concentre au dehors. C'est ainsi que la matière devient la cause de la génération ; c'est ainsi que se comportent les choses qui subsistent en elle.
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