[3,6,10] Ἔπειτα, εἰ πάσχει ἡ ὕλη, δεῖ τι ἔχειν αὐτὴν ἐκ τοῦ πάθους ἢ αὐτὸ τὸ πάθος ἢ ἑτέρως διακεῖσθαι ἢ πρὶν εἰσελθεῖν εἰς αὐτὴν τὸ πάθος. Ἐπιούσης τοίνυν ἄλλης μετ´ ἐκείνην ποιότητος οὐκέτι ὕλη ἔσται τὸ δεχόμενον, ἀλλὰ ποιὰ ὕλη. Εἰ δὲ καὶ αὕτη ἡ ποιότης ἀποσταίη καταλιποῦσά τι αὐτῆς τῷ ποιῆσαι, ἄλλο ἂν ἔτι μᾶλλον γίγνοιτο τὸ ὑποκείμενον. Καὶ προιοῦσα τοῦτον τὸν τρόπον ἄλλο τι ἢ ὕλη ἔσται τὸ ὑποκείμενον, πολύτροπον δὲ καὶ πολυειδές· ὥστε οὐδ´ ἂν ἔτι πανδεχὲς γένοιτο ἐμπόδιον πολλοῖς τοῖς ἐπεισιοῦσι γιγνόμενον, ἥ τε ὕλη οὐκέτι μένει· οὐδὲ ἄφθαρτος τοίνυν· ὥστε, εἰ δεῖ ὕλην εἶναι, ὥσπερ ἐξ ἀρχῆς ἦν, οὕτως ἀεὶ δεῖ αὐτὴν εἶναι τὴν αὐτήν· ὡς τό γε ἀλλοιοῦσθαι λέγειν οὐκ ἔστιν αὐτὴν ὕλην τηρούντων. Ἔπειτα δέ, εἰ ὅλως τὸ ἀλλοιούμενον πᾶν δεῖ μένον ἐπὶ τοῦ αὐτοῦ εἴδους ἀλλοιοῦσθαι, καὶ κατὰ συμβεβηκότα ἀλλ´ οὐ καθ´ αὑτά, εἰ δὴ δεῖ μένειν τὸ ἀλλοιούμενον καὶ οὐ τὸ μένον ἐστὶν αὐτοῦ τὸ πάσχον, δυοῖν θάτερον ἀνάγκη, ἢ ἀλλοιουμένην τὴν ὕλην αὑτῆς ἐξίστασθαι, ἢ μὴ ἐξισταμένην αὑτῆς μὴ ἀλλοιοῦσθαι. Εἰ δέ τις λέγοι μὴ καθ´ ὅσον ὕλη ἀλλοιοῦσθαι, πρῶτον μὲν κατὰ τί ἀλλοιώσεται οὐχ ἕξει λέγειν, ἔπειτα ὁμολογήσει καὶ οὕτω τὴν ὕλην αὐτὴν μὴ ἀλλοιοῦσθαι. Ὥσπερ γὰρ τοῖς ἄλλοις εἴδεσιν οὖσιν οὐκ ἔστιν ἀλλοιοῦσθαι κατὰ τὴν οὐσίαν τῆς οὐσίας αὐτοῖς ἐν τούτῳ οὔσης, οὕτως, ἐπειδὴ τὸ εἶναι τῇ ὕλῃ ἐστὶ τὸ εἶναι ᾗ ὕλη, οὐκ ἔστιν αὐτὴν ἀλλοιοῦσθαι καθ´ ὅ τι ὕλη ἐστίν, ἀλλὰ μένειν, καὶ ὥσπερ ἐκεῖ ἀναλλοίωτον αὐτὸ τὸ εἶδος, οὕτω καὶ ἐνταῦθα ἀναλλοίωτον αὐτὴν τὴν ὕλην.
| [3,6,10] Si la matière pouvait pâtir, elle devrait garder quelque chose de la passion qu'elle éprouve, soit retenir la passion même, soit se trouver dans un état différent de celui qu'elle avait avant de pâtir. Mais, quand une qualité survient ainsi après une autre qualité, ce n'est plus la matière qui la reçoit, c'est la matière déterminée déjà par une qualité. Si la qualité s'évanouit en laissant quelque trace d'elle-même par l'action qu'elle a exercée, le sujet s'altérera encore plus ; en procédant de cette manière, il sera toute autre chose que la matière pure, il sera quelque chose de multiple par ses formes et par ses manières d'être. Ce ne sera donc plus le commun réceptacle de toutes choses, puisqu'il aura en lui-même un obstacle à beaucoup des choses qui pourraient lui survenir ; la matière ne subsistera plus en lui, ne sera plus incorruptible. Or, s'il faut admettre que la matière reste toujours ce qu'elle était dès l'origine, c'est-à-dire matière, soutenir qu'elle est altérée, c'est ne plus conserver la matière même. D'ailleurs, si tout ce qui est altéré doit rester immuable dans son espèce et n'être altéré que dans ses accidents sans l'être en soi-même, en un mot, si ce qui est altéré doit être permanent, et si ce qui est permanent n'est pas ce qui pâtit, de deux choses l'une : ou la matière est altérée et s'écarte de sa nature, ou bien elle ne s'écarte pas de sa nature et elle n'est pas altérée. Si l'on dit que la matière est altérée, mais non en tant que matière, d'abord on ne saura dire en quoi elle est altérée, ensuite on sera par cela même obligé d'avouer qu'elle n'est pas altérée. En effet, de même que les autres choses, qui sont des formes, ne peuvent être altérées dans leur essence, parce que c'est cette inaltérabilité même qui constitue leur essence ; de même, l'essence de la matière étant d'être en tant que matière, elle ne peut être altérée en tant que matière, et elle est nécessairement permanente sous ce rapport. Donc, si la forme est inaltérable, la matière doit être également inaltérable.
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