[294] (Ξένος)
μικρόν γε ἔφθης με ἐρόμενος, ὦ Σώκρατες. ἔμελλον (294a)
γάρ σε διερωτήσειν ταῦτα πότερον ἀποδέχῃ πάντα, ἤ τι
καὶ δυσχεραίνεις τῶν λεχθέντων, νῦν δ' ἤδη φανερὸν ὅτι
τοῦτο βουλησόμεθα τὸ περὶ τῆς τῶν ἄνευ νόμων ἀρχόντων
ὀρθότητος διελθεῖν ἡμᾶς.
611. (Νεώτερος Σωκράτης)
πῶς γὰρ οὔ;
612. (Ξένος)
τρόπον τινὰ μέντοι δῆλον ὅτι τῆς βασιλικῆς ἐστιν ἡ
νομοθετική, τὸ δ' ἄριστον οὐ τοὺς νόμους ἐστὶν ἰσχύειν
ἀλλ' ἄνδρα τὸν μετὰ φρονήσεως βασιλικόν. οἶσθ' ὅπῃ;
613. (Νεώτερος Σωκράτης)
πῇ δὴ λέγεις;
614. (Ξένος)
ὅτι νόμος οὐκ ἄν ποτε δύναιτο τό τε ἄριστον καὶ (294b) τὸ
δικαιότατον ἀκριβῶς πᾶσιν ἅμα περιλαβὼν τὸ βέλτιστον
ἐπιτάττειν, αἱ γὰρ ἀνομοιότητες τῶν τε ἀνθρώπων καὶ
τῶν πράξεων καὶ τὸ μηδέποτε μηδὲν ὡς ἔπος εἰπεῖν ἡσυχίαν
ἄγειν τῶν ἀνθρωπίνων οὐδὲν ἐῶσιν ἁπλοῦν ἐν οὐδενὶ περὶ
ἁπάντων καὶ ἐπὶ πάντα τὸν χρόνον ἀποφαίνεσθαι τέχνην
οὐδ' ἡντινοῦν. ταῦτα δὴ συγχωροῦμέν που;
615. (Νεώτερος Σωκράτης)
τί μήν;
616. (Ξένος)
τὸν δέ γε νόμον ὁρῶμεν σχεδὸν ἐπ' αὐτὸ τοῦτο (294c)
συντείνοντα, ὥσπερ τινὰ ἄνθρωπον αὐθάδη καὶ ἀμαθῆ καὶ
μηδένα μηδὲν ἐῶντα ποιεῖν παρὰ τὴν ἑαυτοῦ τάξιν, μηδ'
ἐπερωτᾶν μηδένα, μηδ' ἄν τι νέον ἄρα τῳ συμβαίνῃ βέλτιον
παρὰ τὸν λόγον ὃν αὐτὸς ἐπέταξεν.
617. (Νεώτερος Σωκράτης)
ἀληθῆ, ποιεῖ γὰρ ἀτεχνῶς καθάπερ εἴρηκας νῦν ὁ νόμος
ἡμῖν ἑκάστοις.
618. (Ξένος)
οὐκοῦν ἀδύνατον εὖ ἔχειν πρὸς τὰ μηδέποτε ἁπλᾶ τὸ διὰ
παντὸς γιγνόμενον ἁπλοῦν;
619. (Νεώτερος Σωκράτης)
κινδυνεύει.
620. (Ξένος)
διὰ τί δή ποτ' οὖν ἀναγκαῖον νομοθετεῖν, ἐπειδήπερ (294d)
οὐκ ὀρθότατον ὁ νόμος; ἀνευρετέον τούτου τὴν αἰτίαν.
621. (Νεώτερος Σωκράτης)
τί μήν;
622. (Ξένος)
οὐκοῦν καὶ παρ' ὑμῖν εἰσί τινες οἷαι καὶ ἐν ἄλλαις πόλεσιν
ἁθρόων ἀνθρώπων ἀσκήσεις, εἴτε πρὸς δρόμον εἴτε πρὸς
ἄλλο τι, φιλονικίας ἕνεκα;
623. (Νεώτερος Σωκράτης)
καὶ πάνυ γε πολλαί.
624. (Ξένος)
φέρε νῦν ἀναλάβωμεν πάλιν μνήμῃ τὰς τῶν τέχνῃ
γυμναζόντων ἐπιτάξεις ἐν ταῖς τοιαύταις ἀρχαῖς.
625. (Νεώτερος Σωκράτης)
τὸ ποῖον;
626. (Ξένος)
ὅτι λεπτουργεῖν οὐκ ἐγχωρεῖν ἡγοῦνται καθ' ἕνα ἕκαστον,
τῷ σώματι τὸ προσῆκον ἑκάστῳ προστάττοντες, (294e)
ἀλλὰ παχύτερον οἴονται δεῖν ὡς ἐπὶ τὸ πολὺ καὶ ἐπὶ
πολλοὺς τὴν τοῦ λυσιτελοῦντος τοῖς σώμασι ποιεῖσθαι τάξιν.
627. (Νεώτερος Σωκράτης)
καλῶς.
628. (Ξένος)
διὸ δή γε καὶ ἴσους πόνους νῦν διδόντες ἁθρόοις ἅμα μὲν
ἐξορμῶσιν, ἅμα δὲ καὶ καταπαύουσι δρόμου καὶ πάλης καὶ
πάντων τῶν κατὰ τὰ σώματα πόνων.
629. (Νεώτερος Σωκράτης)
ἔστι ταῦτα.
| [294] (L’ÉTRANGER)
Tu ne m’as devancé que d’un instant, Socrate, avec ta question ; car j’allais te
demander si tu approuves tout ce que j’ai dit, ou si tu y trouves quelque chose
de choquant. Mais, à présent, il est clair que ce que nous aurons à coeur de
discuter, c’est la légitimité d’un gouvernement sans lois.
(SOCRATE LE JEUNE)
Sans contredit.
(L’ÉTRANGER)
Il est évident que la législation appartient jusqu’à un certain point à la
science royale, et cependant l’idéal n’est pas que la force soit aux lois, mais
à un roi sage. Sais-tu pourquoi ?
(SOCRATE LE JEUNE)
Et toi, comment l’entends-tu ?
(L’ÉTRANGER)
C’est que la loi ne pourra jamais embrasser exactement ce qui est le meilleur et
le plus juste pour tout le monde à la fois, pour y conformer ses prescriptions :
car les différences qui sont entre les individus et entre les actions et le fait
qu’aucune chose humaine, pour ainsi dire, ne reste jamais en repos interdisent à
toute science, quelle qu’elle soit, de promulguer en aucune matière une règle
simple qui s’applique à tout et à tous les temps. Accordons-nous cela ?
(SOCRATE LE JEUNE)
Comment s’y refuser ?
(L’ÉTRANGER)
Et cependant, nous le voyons, c’est à cette uniformité même que tend la loi,
comme un homme buté et ignorant, qui ne permet à personne de rien faire contre
son ordre, ni même de lui poser une question, lors même qu’il viendrait à
quelqu’un une idée nouvelle, préférable à ce qu’il a prescrit lui-même.
(SOCRATE LE JEUNE)
C’est vrai : la loi agit réellement à l’égard de chacun de nous comme tu viens
de le dire.
(L’ÉTRANGER)
Il est donc impossible que ce qui est toujours simple s’adapte exactement à ce
qui ne l’est jamais.
(SOCRATE LE JEUNE)
J’en ai peur.
(L’ÉTRANGER)
XXXIV. — Alors, pourquoi donc est-il nécessaire de légiférer, si la loi n’est
pas ce qu’il y a de plus juste ? Il faut que nous en découvrions la raison.
(SOCRATE LE JEUNE)
Certainement.
(L’ÉTRANGER)
N’y a-t-il pas chez vous, comme dans d’autres Etats, des réunions d’hommes qui
s’exercent soit à la course, soit à quelque autre jeu, en vue d’un certain
concours ?
(SOCRATE LE JEUNE)
Si, et même beaucoup.
(L’ÉTRANGER)
Eh bien, remettons-nous en mémoire les prescriptions des entraîneurs
professionnels qui président à ces sortes d’exercices.
(SOCRATE LE JEUNE)
Que veux-tu dire ?
(L’ÉTRANGER)
Ils pensent qu’il n’est pas possible de faire des prescriptions détaillées pour
chaque individu, en ordonnant à chacun ce qui convient à sa constitution. Ils
croient, au contraire, qu’il faut prendre les choses plus en gros et ordonner ce
qui est utile au corps pour la généralité des cas et la généralité des individus.
(SOCRATE LE JEUNE)
Bien.
(L’ÉTRANGER)
C’est pour cela qu’imposant les mêmes travaux à des groupes entiers, ils leur
font commencer en même temps et finir en même temps, soit la course, soit la
lutte, ou tous les autres exercices.
(SOCRATE LE JEUNE)
C’est vrai.
|