[9,875] καὶ ζῆν κατὰ νόμους (875a) ἢ μηδὲν διαφέρειν τῶν πάντῃ
ἀγριωτάτων θηρίων. ἡ δὲ αἰτία τούτων ἥδε,
ὅτι φύσις ἀνθρώπων οὐδενὸς ἱκανὴ φύεται ὥστε
γνῶναί τε τὰ συμφέροντα ἀνθρώποις εἰς πολιτείαν καὶ γνοῦσα,
τὸ βέλτιστον ἀεὶ δύνασθαί τε καὶ ἐθέλειν πράττειν. γνῶναι μὲν
γὰρ πρῶτον χαλεπὸν ὅτι πολιτικῇ καὶ ἀληθεῖ τέχνῃ οὐ τὸ ἴδιον
ἀλλὰ τὸ κοινὸν ἀνάγκη μέλειν - τὸ μὲν γὰρ κοινὸν συνδεῖ, τὸ δὲ
ἴδιον διασπᾷ τὰς πόλεις - καὶ ὅτι συμφέρει τῷ κοινῷ τε καὶ ἰδίῳ,
τοῖν ἀμφοῖν, ἢν τὸ κοινὸν (875b) τιθῆται καλῶς μᾶλλον ἢ τὸ
ἴδιον· δεύτερον δέ, ἐὰν ἄρα καὶ τὸ γνῶναί τις ὅτι ταῦτα οὕτω
πέφυκεν λάβῃ ἱκανῶς ἐν τέχνῃ, μετὰ δὲ τοῦτο ἀνυπεύθυνός τε
καὶ αὐτοκράτωρ ἄρξῃ πόλεως, οὐκ ἄν ποτε δύναιτο ἐμμεῖναι
τούτῳ τῷ δόγματι καὶ διαβιῶναι τὸ μὲν κοινὸν ἡγούμενον
τρέφων ἐν τῇ πόλει, τὸ δὲ ἴδιον ἑπόμενον τῷ κοινῷ, ἀλλ' ἐπὶ
πλεονεξίαν καὶ ἰδιοπραγίαν ἡ θνητὴ φύσις αὐτὸν ὁρμήσει ἀεί,
φεύγουσα μὲν ἀλόγως τὴν λύπην, διώκουσα δὲ τὴν ἡδονήν, τοῦ
δὲ (875c) δικαιοτέρου τε καὶ ἀμείνονος ἐπίπροσθεν ἄμφω τούτω
προστήσεται, καὶ σκότος ἀπεργαζομένη ἐν αὑτῇ πάντων
κακῶν ἐμπλήσει πρὸς τὸ τέλος αὑτήν τε καὶ τὴν πόλιν ὅλην.
ἐπεὶ ταῦτα εἴ ποτέ τις ἀνθρώπων φύσει ἱκανὸς θείᾳ μοίρᾳ
γεννηθεὶς παραλαβεῖν δυνατὸς εἴη, νόμων οὐδὲν ἂν δέοιτο τῶν
ἀρξόντων ἑαυτοῦ· ἐπιστήμης γὰρ οὔτε νόμος οὔτε τάξις
οὐδεμία κρείττων, οὐδὲ θέμις ἐστὶν νοῦν οὐδενὸς ὑπήκοον οὐδὲ
(875d) δοῦλον ἀλλὰ πάντων ἄρχοντα εἶναι, ἐάνπερ ἀληθινὸς
ἐλεύθερός τε ὄντως ᾖ κατὰ φύσιν. νῦν δὲ οὐ γάρ ἐστιν οὐδαμοῦ
οὐδαμῶς, ἀλλ' ἢ κατὰ βραχύ· διὸ δὴ τὸ δεύτερον αἱρετέον, τάξιν
τε καὶ νόμον, ἃ δὴ τὸ μὲν ὡς ἐπὶ τὸ πολὺ ὁρᾷ καὶ βλέπει, τὸ δ'
ἐπὶ πᾶν ἀδυνατεῖ. ταῦτα δὴ τῶνδε εἵνεκα εἴρηται· νῦν ἡμεῖς
τάξομεν τί χρὴ τὸν τρώσαντα ἤ τι βλάψαντα ἕτερον ἄλλον
παθεῖν ἢ ἀποτίνειν. πρόχειρον δὴ παντὶ περὶ παντὸς ὑπολαβεῖν
ὀρθῶς, “τὸν τί τρώσαντα ἢ (875e) τίνα ἢ πῶς ἢ πότε λέγεις;
μυρία γὰρ ἕκαστά ἐστι τούτων καὶ πάμπολυ διαφέροντα
ἀλλήλων.” ταῦτ' οὖν δὴ δικαστηρίοις ἐπιτρέπειν κρίνειν πάντα
ἢ μηδὲν ἀδύνατον. ἓν μὲν γὰρ κατὰ πάντων ἀναγκαῖον
ἐπιτρέπειν κρῖναι, τὸ πότερον ἐγένετο ἢ οὐκ ἐγένετο ἕκαστον τούτων·
| [9,875] et ils doivent régler leur conduite sur elles, et en voici la raison : c'est
qu'aucun homme, sortant des mains de la nature, n'est capable de connaître
ce qui est utile aux hommes pour vivre en société, et s'il connaît ce qui
est le plus avantageux, d'avoir toujours assez de force et de bonne
volonté pour le mettre en pratique. Car premièrement il est difficile de
connaître que l'art politique véritable doit avoir en vue, non pas les
intérêts particuliers, mais l'intérêt général, parce que l'intérêt général
unit et que l'intérêt particulier divise les États, et que le public et
les particuliers ont tous deux plus à gagner à la bonne administration du
bien commun qu'à celle du bien particulier. En second lieu, même si l'on
est assez habile pour se rendre compte que telle est la nature des choses,
et qu'on ait à gouverner un État avec un pouvoir absolu et sans rendre
aucun compte, on ne pourrait pas rester fidèle à cette maxime et faire
passer pendant toute sa vie le bien commun de l'État au premier rang et le
bien particulier au deuxième. Mais la nature mortelle portera toujours
l'homme à vouloir plus que les autres et à s'occuper de ses intérêts
privés, parce qu'elle fuit la douleur et poursuit le plaisir sans tenir
compte de la raison, qu'elle les fera passer l'une et l'autre avant le
plus juste et le meilleur, et, s'aveuglant elle-même, elle finira par se
remplir, elle et tout l'État, de toutes sortes de maux. Car, si jamais un
homme, né avec la faveur des dieux, était par sa nature capable de se
rendre compte de cela, il n'aurait pas besoin de lois pour le commander,
parce qu'aucune loi, aucun arrangement n'est supérieur à la science, et
qu'il n'est pas dans l'ordre que l'intelligence soit sujette ni esclave de
quoi que ce soit, étant faite pour commander, si elle est, conformément à
sa nature, véridique et réellement libre. Malheureusement elle n'est telle
aujourd'hui nulle part, sauf en de faibles proportions. Il faut donc avoir
recours à ce qui tient le second rang, à l'ordre et à la loi, qui voit et
envisage un grand nombre de choses, mais ne saurait étendre sa vue sur
tout. Voilà ce que j'avais à dire à ce sujet.
Nous allons à présent régler les peines et les amendes que méritent les
blessures et les torts faits à autrui. On peut naturellement et justement
nous poser cette question à propos de chaque cas : de quelle blessure
parles-tu, qui a été blessé, comment et quand ? Car ces cas varient à
l'infini et sont très différents les uns des autres. S'en remettre aux
juges pour trancher toutes ces questions, ou ne leur en laisser aucune à
résoudre est également impossible. Il y en a toujours une en tous les cas
où il faut s'en remettre à leur jugement, c'est à savoir si le fait a eu
lieu ou n'a pas eu lieu.
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