[110] (110a) ὅτε οὐκ ᾤου εἰδέναι τὰ δίκαια καὶ τὰ ἄδικα; φέρε, πέρυσιν
ἐζήτεις τε καὶ οὐκ ᾤου εἰδέναι; ἢ ᾤου; καὶ τἀληθῆ
ἀποκρίνου, ἵνα μὴ μάτην οἱ διάλογοι γίγνωνται.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀλλ´ ᾤμην εἰδέναι.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τρίτον δ´ ἔτος καὶ τέταρτον καὶ πέμπτον οὐχ οὕτως;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἔγωγε.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἀλλὰ μὴν τό γε πρὸ τοῦ παῖς ἦσθα. ἦ γάρ;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ναί.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τότε μὲν τοίνυν εὖ οἶδα ὅτι ᾤου εἰδέναι.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Πῶς εὖ οἶσθα;
(110b) (ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Πολλάκις σοῦ ἐν διδασκάλων ἤκουον παιδὸς ὄντος
καὶ ἄλλοθι, καὶ ὁπότε ἀστραγαλίζοις ἢ ἄλλην τινὰ παιδιὰν
παίζοις, οὐχ ὡς ἀποροῦντος περὶ τῶν δικαίων καὶ ἀδίκων,
ἀλλὰ μάλα μέγα καὶ θαρραλέως λέγοντος περὶ ὅτου τύχοις
τῶν παίδων ὡς πονηρός τε καὶ ἄδικος εἴη καὶ ὡς ἀδικοῖ·
ἢ οὐκ ἀληθῆ λέγω;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀλλὰ τί ἔμελλον ποιεῖν, ὦ Σώκρατες, ὁπότε τίς
με ἀδικοῖ;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Σὺ δ´ εἰ τύχοις ἀγνοῶν εἴτ´ ἀδικοῖο εἴτε μὴ τότε,
λέγεις, τί σε χρὴ ποιεῖν;
(110c) (ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Μὰ Δί´ ἀλλ´ οὐκ ἠγνόουν ἔγωγε, ἀλλὰ σαφῶς
ἐγίγνωσκον ὅτι ἠδικούμην.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ὤιου ἄρα ἐπίστασθαι καὶ παῖς ὤν, ὡς ἔοικε, τὰ
δίκαια καὶ τὰ ἄδικα.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἔγωγε· καὶ ἠπιστάμην γε.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἐν ποίῳ χρόνῳ ἐξευρών; οὐ γὰρ δήπου ἐν ᾧ γε
ᾤου εἰδέναι.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐ δῆτα.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Πότε οὖν ἀγνοεῖν ἡγοῦ; σκόπει· οὐ γὰρ εὑρήσεις
τοῦτον τὸν χρόνον.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Μὰ τὸν Δί´, ὦ Σώκρατες, οὔκουν ἔχω γ´ εἰπεῖν.
(110d) (ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Εὑρὼν μὲν ἄρ´ οὐκ οἶσθα αὐτά.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οὐ πάνυ φαίνομαι.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ἀλλὰ μὴν ἄρτι γε οὐδὲ μαθὼν ἔφησθα εἰδέναι·
εἰ δὲ μήθ´ ηὗρες μήτ´ ἔμαθες, πῶς οἶσθα καὶ πόθεν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἀλλ´ ἴσως τοῦτό σοι οὐκ ὀρθῶς ἀπεκρινάμην, τὸ
φάναι εἰδέναι αὐτὸς ἐξευρών.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Τὸ δὲ πῶς εἶχεν;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ἔμαθον οἶμαι καὶ ἐγὼ ὥσπερ καὶ οἱ ἄλλοι.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Πάλιν εἰς τὸν αὐτὸν ἥκομεν λόγον. παρὰ τοῦ;
φράζε κἀμοί.
(110e) (ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Παρὰ τῶν πολλῶν.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὐκ εἰς σπουδαίους γε διδασκάλους καταφεύγεις
εἰς τοὺς πολλοὺς ἀναφέρων.
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Τί δέ; οὐχ ἱκανοὶ διδάξαι οὗτοι;
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Οὔκουν τὰ πεττευτικά γε καὶ τὰ μή· καίτοι
φαυλότερα αὐτὰ οἶμαι τῶν δικαίων εἶναι. τί δέ; σὺ οὐχ οὕτως οἴει;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Ναί.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Εἶτα τὰ μὲν φαυλότερα οὐχ οἷοί τε διδάσκειν, τὰ
δὲ σπουδαιότερα;
(ΑΛΚΙΒΙΑΔΗΣ) Οἶμαι ἔγωγε· ἄλλα γοῦν πολλὰ οἷοί τ´ εἰσὶν διδάσκειν
σπουδαιότερα τοῦ πεττεύειν.
(ΣΩΚΡΑΤΗΣ) Ποῖα ταῦτα;
| [110] où tu ne croyais pas connaître le juste et l’injuste ? Voyons : était-ce l’an
passé que tu le cherchais et croyais ne pas le savoir ? Ou bien croyais-tu le savoir ?
Réponds-moi sincèrement, afin que nous ne discutions pas inutilement.
(ALCIBIADE)
En bien, je croyais le savoir.
(SOCRATE)
Il y a deux ans, trois ans, quatre ans, ne le croyais-tu pas de même ?
(ALCIBIADE)
Si.
(SOCRATE)
Mais avant ce temps-là, tu n’étais qu’un enfant, n’est-ce pas ?
(ALCIBIADE)
Oui.
(SOCRATE)
Et en ce temps-là, je sais bien que tu croyais le savoir ?
(ALCIBIADE)
Comment le sais-tu ?
(SOCRATE)
C’est que, quand tu étais enfant, je t’ai souvent entendu à l’école et ailleurs,
et quand tu jouais aux osselets ou à quelque autre jeu. Or tu ne balançais pas
sur le juste et l’injuste ; au contraire, tu disais très haut et hardiment de
tel ou tel de tes petits camarades qu’il était méchant, injuste et qu’il avait
tort. Est-ce que je ne dis pas la vérité ?
(ALCIBIADE)
Eh bien, que devais-je faire, Socrate, quand on était injuste envers moi ?
(SOCRATE)
Mais si tu ignorais alors si l’on te traitait ou non injustement, comment
peux-tu me demander ce que tu devais faire ?
(ALCIBIADE)
Non, par Zeus, je ne l’ignorais pas, et je voyais clairement qu’on me traitait
injustement.
(SOCRATE)
Alors tu croyais connaître, même dès ton enfance, le juste et l’injuste ?
(ALCIBIADE)
Oui et je les connaissais fort bien.
(SOCRATE)
Et en quel temps l’avais-tu découvert ? Ce n’est pas, n’est-ce pas ? lorsque tu
croyais le savoir.
(ALCIBIADE)
Non, assurément.
(SOCRATE)
En quel temps croyais-tu donc l’ignorer ? Réfléchis ce temps-là, tu ne le
trouveras pas.
(ALCIBIADE)
En vérité, par Zeus, je ne saurais te le dire.
(SOCRATE)
Ce n’est donc pas pour les avoir trouvées que tu connais ces choses ?
(ALCIBIADE)
Evidemment non.
(SOCRATE)
Or tu avouais tout à l’heure que ce n’est pas non plus pour les avoir apprises
que tu les connais. Mais, si tu ne les as ni trouvées ni apprises, comment les
sais-tu et d’où les tiens-tu ?
(ALCIBIADE)
CHAPITRE VII. — Mais peut-être que j’ai mal répondu en disant que je les
connaissais pour les avoir découvertes moi-même.
(SOCRATE)
Mais en réalité, qu’en était-il ?
(ALCIBIADE)
C’est que je les ai apprises, j’imagine, comme tout le monde.
(SOCRATE)
Nous voilà revenus au même point. De qui les as-tu apprises ; explique-le-moi.
(ALCIBIADE)
Du public.
(SOCRATE)
Tu n’as pas recours à un maître bien sérieux, en faisant remonter ta science au
public.
(ALCIBIADE)
Eh quoi ? n’est-il pas capable d’enseigner, ce public ?
(SOCRATE)
Pas même d’enseigner ce qui est bien ou mal au jeu du trictrac, qui est pourtant
plus simple que la justice. Et toi, n’es-tu pas de cet avis ?
(ALCIBIADE)
Si.
(SOCRATE)
Alors, tout incapable qu’il est d’enseigner des matières légères, il pourrait
enseigner des matières sérieuses ?
(ALCIBIADE)
Je le crois pour ma part. En tout cas, il est capable d’enseigner beaucoup
d’autres choses plus sérieuses que le trictrac.
(SOCRATE)
Lesquelles ?
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