[2,14] ὁ δὲ Σεβῆρος σὺν παντὶ τῷ λοιπῷ στρατῷ ὡπλισμένῳ
ἐς τὴν Ῥώμην ἀφικνεῖται, ἔκπληξίν τε καὶ δέος
ἅμα τῷ ὀφθῆναι τοῖς Ῥωμαίοις ἐνέβαλε τοῖς οὕτω τετολμημένοις
τε καὶ εὐτυχηθεῖσιν ἔργοις. ὁ δὲ δῆμος καὶ
ἡ σύγκλητος δαφνηφοροῦντες ὑπεδέχοντο πρῶτον ἀνθρώπων
καὶ βασιλέων ἀναιμωτί τε καὶ ἀκονιτὶ τοσαῦτα
κατωρθωκότα. πάντα γὰρ ἐν αὐτῷ ἐθαυμάζετο, μάλιστα
δὲ τὸ ἀγχίνουν τῆς γνώμης τό τε τῶν πόνων γενναῖον
καὶ τὸ ἐς τὰ τολμώμενα ἅμα τῷ θαρραλέῳ εὔελπι. ἐπεὶ
τοίνυν ὅ τε δῆμος αὐτὸν ὑποδεξάμενος εὐφήμησεν ἥ τε
σύγκλητος ἐπὶ ταῖς τῆς πόλεως εἰσόδοις προσηγόρευσεν,
ἀνελθὼν ἐς τὸ τοῦ Διὸς τέμενος καὶ θύσας, ἔν τε τοῖς
λοιποῖς ἱεροῖς νόμῳ βασιλικῷ καλλιερήσας, ἀνῆλθεν ἐς
τὰ βασίλεια. τῆς δὲ ἐπιούσης κατελθὼν ἐς τὴν σύγκλητον λόγους
ἐπιεικεῖς πάνυ καὶ χρηστῶν ἐλπίδων μεστοὺς
ἐποιεῖτο πρὸς πάντας, καὶ κοινῇ καὶ ἰδίᾳ δεξιούμενος, λέγων
ἥκειν μὲν ἔκδικος τοῦ Περτίνακος φόνου, τὴν δ´ ἀρχὴν
παρέξειν ἀφορμὴν καὶ εἴσοδον ἀριστοκρατίας, μήτε δὲ
ἄκριτόν τινα φονευθήσεσθαι ἢ δημευθήσεσθαι, μήτε συκοφαντοῦντος
ἀνέξεσθαι, ἀλλὰ βαρυτάτην εὐδαιμονίαν
τοῖς ἀρχομένοις παρέξειν, καὶ πάντα πράξειν ἐς ζῆλον τῆς
Μάρκου ἀρχῆς, ἕξειν δὲ τοῦ Περτίνακος οὐ μόνον τοὔνομα ἀλλὰ καὶ
τὴν γνώμην. τοιαῦτά τινα λέγων ὑπηγάγετο τοὺς πλείστους ἐς εὔνοιαν
καὶ πίστιν ὧν ὑπισχνεῖτο.
ἦσαν δέ τινες τῶν πρεσβυτέρων καὶ γνωριζόντων αὐτοῦ
τὸν τρόπον, οἳ προύλεγον λανθάνοντες, ὅτι ἄρα εἴη ἀνὴρ
πολύτροπός τις καὶ μετὰ τέχνης εἰδὼς προσφέρεσθαι
πράγμασιν, ὑποκρίνασθαί τε καὶ προσποιήσασθαι πᾶν
ὁτιοῦν ἱκανώτατος, ἔτι δ´ ἀνύσαι καὶ τὸ χρειῶδες καὶ τὸ
λυσιτελὲς αὑτῷ· ὅπερ καὶ ὕστερον ἔργῳ δέδεικται.
διατρίψας οὖν ὀλίγον χρόνον ὁ Σεβῆρος ἐν τῇ Ῥώμῃ,
καὶ νομὰς ἐπιδοὺς τῷ δήμῳ μεγαλοφρόνως, θέας τε
ἐπιτελέσας, τοῖς τε στρατιώταις πολλὰ δωρησάμενος, καὶ
τοὺς ἀκμαιοτάτους ἐπιλεξάμενος ἐς τὸ δορυφόρους εἶναι
τῆς βασιλείας τόπῳ τῶν ἀπεζωσμένων, ἐπὶ τὴν ἀνατολὴν
ἠπείγετο· ἔτι γὰρ μέλλοντος καὶ ὑπτιάζοντος τοῦ Νίγρου,
τῇ τε Ἀντιοχείᾳ ἐντρυφῶντος, ἐπιστῆναι μηδὲ προσδοκώμενος
ἤθελεν, ὅπως ἀπαράσκευον αὐτὸν λάβοι. τούς
τε οὖν στρατιώτας ἐκέλευσε παρασκευάζεσθαι πρὸς τὴν
ἔξοδον, συνεκρότει τε καὶ πανταχόθεν στράτευμα, ἔκ τε
τῶν κατὰ τὴν Ἰταλίαν πόλεων νεανίας μεταπεμπόμενος
καὶ στρατεύων, εἴ τέ τι ἦν ἐν τῷ Ἰλλυρικῷ τοῦ στρατιωτικοῦ λείψανον,
κατελθὸν ἐπὶ Θρᾴκην ἐκέλευεν αὑτῷ
συντυχεῖν. ἐξήρτυε δὲ καὶ στόλον ναυτικόν, καὶ πάσας
τὰς κατὰ τὴν Ἰταλίαν τριήρεις ὁπλιτῶν πληρώσας ἐξέπεμπε.
πολλή τε αὐτῷ καὶ παντοδαπὴ δύναμις μεγίστῳ
τάχει συνεσκευάσθη· ᾔδει γὰρ οὐ μικρᾶς δυνάμεως δεόμενος πρὸς
πᾶσαν τὴν ἀντικειμένην ἤπειρον Εὐρώπῃ τὰ Νίγρου φρονοῦσαν.
| [2,14] XLV. Sévère fit aussitôt son entrée dans Rome avec le reste de sa
nombreuse et brillante armée. Cette vue remplit les Romains d'étonnement
et de crainte : ils étaient frappés de tant d'audace et de fortune. Le
sénat et le peuple entier accueillirent Sévère en portant des branches de
laurier : c'était le premier de tous les hommes, de tous les empereurs,
qui eût achevé une aussi grande œuvre, sans effusion de sang et sans
combats. Tout paraissait admirable en lui, mais principalement sa
pénétration, sa patience dans les fatigues, l'audace de son entreprise et
sa noble confiance dans le succès. Le peuple le salua d'unanimes
acclamations; le sénat en corps vint le complimenter aux portes de la
ville. Sévère entra dans le temple de Jupiter; il y fit un sacrifice, puis
se rendit successivement, suivant la coutume des nouveaux empereurs, dans
tous les autres temples, et se retira enfin au palais.
XLVI. Le lendemain il vint au sénat; le discours qu'il y prononça et les
paroles qu'il adressa soit en particulier, soit en public, à tous ceux qui
se présentèrent à lui, firent concevoir d'heureuses espérances : « Il
n'était venu, disait-il, que pour venger l'assassinat de Pertinax,
rétablir la dignité de l'empire et jeter les fondements d'un gouvernement
aristocratique. Personne ne serait condamné sans jugement à la mort et à
la confiscation de ses biens; il ne souffrirait point de délateurs ; il
assurerait le bonheur de tous les citoyens; dans toutes ses actions, il
chercherait à imiter Marc-Aurèle sur le trône; il n'aurait pas seulement
le nom de Pertinax, mais le cœur et les sentiments de ce prince. » La
modération qu'annonçaient les paroles du nouvel empereur lui attira
l'amour et la confiance de la multitude.
XLVII. Mais il se trouva quelques vieillards qui, connaissant son
caractère, disaient en secret que Sévère était un homme habile à revêtir
toutes les formes, rusé, artificieux, n'agissant jamais avec franchise et
capable de tout sacrifier à son intérêt et à son élévation. L'événement
devait confirmer ces prédictions sinistres. Sévère ne resta que peu de
temps à Rome : quand il eut fait au peuple et aux soldats de magnifiques
et abondantes largesses, quand il eut choisi dans son armée les soldats
les plus robustes, pour les préposer à la garde du trône, en remplacement
des prétoriens licenciés, il se prépara à partir pour l'Orient. Tandis que
l'indolent Niger différait toujours d'agir, et que les habitants
d'Antioche ne songeaient qu'à se livrer aux plaisirs et aux fêtes, il
résolut de marcher sans délai vers son imprudent compétiteur, et de tomber
sur lui à l'improviste. Il ordonne à ses soldats de se préparer au départ,
rassemble des troupes de tout côté, décrète dans toute l'Italie de
nouvelles levées de jeunes gens, et commande au reste des troupes
illyriennes, qui n'avaient point quitté la Thrace, de venir au plus tôt le
rejoindre. En même temps il réunit une grande flotte, et fait partir
toutes les trirèmes de l'Italie, après les avoir remplies de soldats. Avec
une étonnante promptitude, il sut ainsi rassembler des forces immenses de
toute espèce : il sentait qu'il avait besoin de vastes ressources pour
soumettre cette grande partie de l'Asie que s'était conciliée Niger, et il
poussa vivement les préparatifs de cette guerre.
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