[20,5] Ὡς δ´ εὐτρεπῆ πάντ´ ἦν, πληρώσας ἑξήκοντα ναῦς
ἐπετήρει καιρὸν οἰκεῖον πρὸς τὸν ἔκπλουν. ἀγνοουμένης δὲ τῆς
ἐπινοίας αὐτοῦ τινὲς μὲν εἰς τὴν Ἰταλίαν
ὑπελάμβανον αὐτὸν στρατεύειν, τινὲς δὲ πορθήσειν
τῆς Σικελίας τὴν ὑπὸ Καρχηδονίους, πάντες δὲ ἀπ εγίνωσκον τῶν
ἐκπλεῖν μελλόντων τὴν σωτηρίαν καὶ
τοῦ δυνάστου τὴν μανίαν κατεγίνωσκον. ἐφορμούν των δὲ τῶν
πολεμίων πολλαπλασίαις
τριήρεσι τὸ μὲν πρῶτον ἐφ´ ἡμέρας τινὰς ἠνάγκαζε συνέχειν
ἑαυτοὺς ἐν ταῖς ναυσὶ τοὺς στρατιώτας, οὐ δυναμένους ἐκπλεῦσαι·
ἔπειτα δὲ σιτηγῶν πλοίων τῇ πόλει προσθεόντων οἱ
μὲν Καρχηδόνιοι παντὶ τῷ στόλῳ πρὸς τὰς ναῦς ἀνήχθησαν, ὁ
δ´ Ἀγαθοκλῆς ἀπελπίζων
ἤδη τὴν ἐπι βολήν, ὡς ἴδεν τὸ στόμα τοῦ λιμένος ἔρημον τῶν
ἐφορμούντων, ἐξέπλευσεν ὀξείαις ταῖς εἰρεσίαις χρώμενος.
εἶθ´ οἱ μὲν Καρχηδόνιοι πλησίον ἤδη τῶν
φορτηγῶν ὄντες, ὡς ἴδον τοὺς πολεμίους ἀθρόαις ταῖς
ναυσὶ πλέοντας, τὸ μὲν πρῶτον ὑπολαβόντες αὐτὸν
ὡρμηκέναι πρὸς τὴν τῶν σιτηγῶν βοήθειαν, ἀνέστρεφον καὶ τὸν
στόλον ἐξήρτυον
εἰς ναυμαχίαν· ὡς δ´ ἐπ´ εὐθείας ἑώρων παραθέοντας καὶ πολὺ
τοῦ πλοῦ προλαμβάνοντας, ἐποιοῦντο τὸν διωγμόν. ἔνθα δὴ
τούτων πρὸς ἀλλήλους φιλοτιμουμένων τὰ μὲν τὴν
ἀγορὰν κομίζοντα πλοῖα παραδόξως ἐκφυγόντα τὸν
κίνδυνον πολλὴν εὐπορίαν ἐποίησεν ἐν ταῖς Συρακούσσαις τῶν
ἐπιτηδείων, σιτοδείας ἤδη τὴν πόλιν
ἐχούσης, ὁ δ´ Ἀγαθοκλῆς περικατάληπτος ἤδη γινόμενος
ἐπιλαβούσης τῆς νυκτὸς
ἀνελπίστου σωτηρίας ἔτυχεν. τῇ δ´ ὑστεραίᾳ τηλικαύτην ἔκλειψιν
ἡλίου συνέβη γενέσθαι ὥστε ὁλοσχερῶς φανῆναι νύκτα,
θεωρουμένων τῶν ἀστέρων πανταχοῦ· διόπερ οἱ περὶ
τὸν Ἀγαθοκλέα, νομίσαντες καὶ τὸ θεῖον αὐτοῖς προσημαίνειν τὸ
δυσχερές, ἔτι μᾶλλον ὑπὲρ τοῦ μέλλοντος ἐν ἀγωνίᾳ καθειστήκεισαν.
| [20,5] Tous les préparatifs terminés, Agathocle fit embarquer
ses troupes sur soixante bâtiments, et attendit un
moment favorable pour mettre à la voile. Comme il n'avait
communiqué son projet à personne, quelques-uns conjecturaient
qu'il méditait une expédition en Italie; d'autres,
qu'il allait ravager le territoire de la Sicile, soumis
à la domination des Carthaginois ; mais tous étaient d'accord
pour désespérer du salut des hommes qui faisaient
partie de cette expédition, et pour accuser de folie le tyran.
Cependant la station navale des ennemis, qui se composait
d'un très grand nombre de trirèmes, força pendant quelques
jours les troupes d'Agathocle à rester consignées sur
leurs navires et à demeurer dans le port. Bientôt après, des
bâtiments de transport, chargés de vivres, s'approchèrent
de la ville; les Carthaginois en ayant été avertis vinrent
avec toute leur flotte attaquer ces bâtiments. Agathocle,
qui avait déjà désespéré de son entreprise, profita de ce
moment pour sortir du port, ainsi débloqué, et s'éloigna à
force de rames. Les Carthaginois étaient près d'atteindre
les bâtiments de transport, lorsqu'ils virent la flotte ennemie
marcher à voiles déployées. Ils s'imaginèrent d'abord
qu'Agathocle venait au secours des bâtiments de transport,
et ils se rangèrent en ligne de bataille. Mais lorsqu'ils
virent que la flotte ennemie continuait sa route en ligne
droite, et qu'elle avait beaucoup d'avance sur eux, ils se
portèrent à lui donner la chasse. Pendant que les deux
flottes luttaient ainsi de vitesse, les navires de transport
échappèrent inopinément au danger qui les menaçait, et
ramenèrent beaucoup de vivres à Syracuse, qui commençait
déjà à souffrir de la disette. Agathocle faillit tomber
au pouvoir des Carthaginois, mais l'approche de la nuit
lui apporta un moyen de salut inespéré. Le jour suivant
arriva une éclipse de soleil telle que le jour semblait être
changé en nuit, et que les astres se voyaient partout au
ciel. Les troupes d'Agathocle, prenant ce phénomène pour
un présage funeste de la divinité, virent leurs inquiétudes
pour l'avenir s'accroître de plus en plus.
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