[7,50] Τί οὖν ἐποίησεν ὁ χρηστὸς ἡμῖν δῆμος, ἐπειδὴ
καὶ ταύτην αὐτῷ συνεχωρήσατε τὴν ἀρχήν; οὐκ ἐταμιεύσατο τὴν
τοσαύτην χάριν οὐδ´ ἔλαβεν αἰσχυνομένως αὐτὴν καὶ σωφρόνως,
ἀλλ´ ὡς δεδοικόσι τὴν
ἰσχὺν αὐτοῦ καὶ κατεπτηχόσιν ἡμῖν - - - ἔπειτα ἱερὰν
καὶ ἄσυλον ἔφη δεῖν ἀποδειχθῆναι τὴν ἀρχὴν ὅρκοις
ἐμπεδωθεῖσαν, κρείττω τιμὴν αἰτούμενος ἧς δεδώκατε
ὑμεῖς τοῖς ὑπάτοις. ὑπεμείνατε καὶ τοῦτο καὶ στάντες
ἐπὶ τῶν τομίων κατ´ ἐξωλείας ἑαυτῶν τε καὶ τῶν ἀπογόνων
ὠμόσατε. τί οὖν ἐποίησε καὶ τούτου τυχών;
ἀντὶ τοῦ χάριτας ὑμῖν εἰδέναι καὶ σώζειν τὸν πάτριον
κόσμον τῆς πολιτείας, ἀρξάμενος ἀπὸ τούτων τῶν πλεονεξιῶν
καὶ ταύταις ταῖς παρανομίαις ἀφορμαῖς τῶν
ὕστερον χρησάμενος νόμους τ´ ἀπροβουλεύτους εἰσφέρει,
καὶ τούτους ἐπιψηφίζει δίχα τῆς ὑμετέρας γνώμης, καὶ
οἷς ἂν ὑμεῖς ἐκφέρητε δόγμασιν οὐ προσέχει τὸν νοῦν,
καὶ τῶν ὑπάτων ὡς οὐκ ὀρθῶς τὴν πόλιν ἐπιτροπευόντων
κατηγόρει, καὶ τοῖς ἐκβαίνουσι παρὰ τὰς
ὑμετέρας συνθήκας· πολλὰ δ´ ἐστίν, ὧν οὐ δύναται
στοχάσασθαι λογισμὸς ἀνθρώπινος· οὐ τὴν τύχην, ὥσπερ
ἐχρῆν, ἀλλὰ τὴν ὑμετέραν ἐπιγράφει διάνοιαν, ἐπιβουλεύεσθαί
θ´ ὑφ´ ὑμῶν σκηπτόμενος καὶ δεδιέναι, μὴ
τὴν ἐλευθερίαν ἀφέλησθε ἢ τῆς πατρίδος ἐκβάλητε,
αὐτὸς ἐφ´ ὑμῖν ταῦτα μηχανώμενος διατελεῖ, καὶ τὸ
μὴ παθεῖν ὃ δεδοικέναι φησίν, οὐκ ἄλλῳ τινὶ φυλαττόμενος
δῆλός ἐστιν, ἢ τῷ δρᾶσαι φθάσας. ἐδήλωσε
δὲ τοῦτο πολλάκις μὲν καὶ πρότερον καὶ ἐπὶ πολλῶν
ὧν ἐξείργομαι μεμνῆσθαι κατὰ τὸ παρόν, μάλιστα δὲ
Μάρκιον τουτονὶ τὸν φιλόπολιν ἄνδρα, οὔτε προγόνων
ἀφανῶν ὄντα οὔτ´ αὐτὸν ἀρετῇ λειπόμενον οὐθενὸς
ἡμῶν, αἰτιασάμενος ἐπιβουλεύειν αὐτῷ καὶ πονηρὰς
ἐνθάδε γνώμας λέγειν, ἄκριτον ἐπεχείρησεν ἀποκτεῖναι.
καὶ εἰ μὴ δεινὸν ἡγησάμενοι τὸ πρᾶγμα οἵ θ´ ὕπατοι
καὶ ὑμῶν οἱ τὰ κρείττω φρονοῦντες συνεστράφητε καὶ
τὴν παρανομίαν ἐπέσχετε αὐτῶν, ἐν μιᾷ τῇ τότε ἡμέρᾳ
πάντ´ ἂν ἀφῃρέθητε, ὅσα οἱ πατέρες θ´ ὑμῖν σὺν
πολλοῖς κτησάμενοι πόνοις κατέλιπον καὶ αὐτοὶ ὑμεῖς
οὐκ ἐλάττους ἀγῶνας ἐκείνων ὑποστάντες ἔχετε, τὸ
ἀξίωμα, τὴν ἡγεμονίαν, τὴν ἐλευθερίαν· οἱ δὲ γενναιότεροι
καὶ οὐκ ἀγαπήσαντες αὐτὸ τὸ ζῆν, εἰ μὴ μετὰ
τούτων ἐμέλλετε τῶν ἀγαθῶν βιώσεσθαι, τὰς ψυχὰς
ἂν πρότερον ἢ ταῦτ´ ἀφῃρέθητε, οἱ μὲν εὐθύς, οἱ δ´
οὐκ εἰς μακράν. τί γὰρ ἂν τὸ κωλῦσον ἦν οὕτως
αἰσχρῶς καὶ κακῶς Μαρκίου τοῦδε ἀναρπασθέντος ὥσπερ ἐν
ἐρημίᾳ κἀμὲ μετὰ τοῦτον ἀπολωλέναι διασπασθέντα ὑπὸ τῶν
ἐχθρῶν, καὶ πάντας, ὅσοι πώποτ´
ἠναντιώθησαν, καὶ τὸ λοιπὸν ἔμελλον ἐναντιώσεσθαι
ταῖς παρανόμοις ἐπιθυμίαις τοῦ δήμου; οὐ γὰρ ἂν
ἠρκέσθη τοὺς δύο μόνους ἡμᾶς ἐκποδὼν ποιησάμενος,
οὐδὲ μέχρι δεῦρ´ ἐλθὼν ἀπέστη τῆς παρανομίας, εἰ δεῖ
τὰ μέλλοντα τεκμαίρεσθαι τοῖς γεγονόσιν, ἀλλ´ ἀφ´
ἡμῶν ἀρξάμενος ἅπαν τὸ ἀντίπαλον καὶ μὴ εἶκον ὥσπερ
χειμάρρους πολὺς ἐμπεσὼν παρέσυρεν ἂν καὶ κατήνεγκεν, οὔτ´
εὐγενείας φειδόμενος οὔτ´ ἀρετῆς οὔθ´ ἡλικίας.
| [7,50] Qu'a-t-il donc fait le peuple, après tant de grâces que vous lui avez
accordées ? Au lieu de vous en avoir obligation et de conserver le bon
ordre du gouvernement, ses premiers avantages lui on servi
d'acheminement à de plus grandes entreprises. Il a poussé l'insolence
jusqu'à faire des lois sans consulter le sénat, il les a confirmées par ses
suffrages sans votre consentement. En un mot, il ne fait plus aucun cas
de vos décisions, il méprise vos ordonnances, et accuse les consuls de
ne pas bien administrer les affaires de l'état. S'il arrive quelque chose
d'extraordinaire et contre notre intention, n'étant pas possible que les
conseils et la prudence des hommes réussissent en toutes choses, en
rejette la faute, comme j'ai dit, non pas sur la fortune, mais sur notre
prétendue mauvaise volonté. Il fait semblant d'être persuadé que vous lui
dressez des embûches, et qu'il est en danger d'être dépouillé de sa liberté
ou chassé de sa patrie. Sous ce prétexte il ne cesse de machiner contre
vous ce qu'il feint d'appréhender pour lui-même, et il fait assez voir qu'il
ne fait point d'autre moyen pour se mettre à couvert des malheurs dont il
se croit menacé, que de nous prévenir en faisant tomber sur nous ces
mêmes malheurs.
III. C'est ce qu'il nous a déjà fait connaître bien des fois par plusieurs
de ses actions, dont il ne vous souvient que trop, mais particulièrement
lorsque sans aucune forme de jugement, il a voulu faire mourir Marcius
(ce brave guerrier, cet homme issu d'illustres ancêtres, et qui n'est inférieur
en vertu à aucun de nous) sous prétexte qu'il lui dressait des embûches,
et qu'il donnait de mauvais conseils dans nos assemblées. Si les consuls
indignés de cette entreprise trop hardie, et les sénateurs les mieux
intentionnés, ne se fussent unis ensemble pour arrêter la fureur du
peuple, en un seul jour on vous aurait enlevé tout ce que vos pères vous
ont acquis par tant de travaux, et que vous conservez avec autant de soin
et de peines qu'ils en ont eu à le gagner, je veux dire qu'on vous aurait ôté
vos dignités, votre puissance, et votre liberté : et les plus généreux,
d'entre vous ne pouvant vivre sans ces avantages, auraient sacrifié leur
vie, les uns dans le moment même, les autres bientôt après, plutôt que de
se laisser dépouiller de leurs charges et des honneurs dont ils jouissent.
En effet, si on avait laissé enlever Marcius d'une manière si honteuse et si
indigne, et que tout le monde l'eût abandonné lâchement, qui aurait
empêché que nos ennemis ne m'eussent enlevé après lui pour me faire
mourir, moi et tous ceux qui se sont déjà déclarés contre lui, ou qui se
seraient opposés dans la suite à ses injustes prétentions ? Car il ne se
serait pas contenté de se défaire de nous deux ; son iniquité n'en serait
pas restée là s'il faut juger de l'avenir par le passé : mais après avoir
commencé par nous, semblable à un torrent qui roule ses eaux avec
violence, il aurait enseveli sous les mêmes ruines tout ce qui se serait
opposé à lui, sans épargner ni dignité, ni noblesse, ni mérite, ni âge.
Voila, Messieurs, les belles récompenses que le peuple vous a déjà
rendues pour tant de bienfaits dont vous l'avez comblé : il vous en aurait
encore rendu d'autres dans la suite, si vous ne vous étiez et opposés à
ses pernicieux desseins. Voyons maintenant comment il en a usé après
votre prudente et généreuse démarche, afin que vous connaissiez de
quelle manière il faut vous comporter envers lui. Aussitôt qu'il s'est aperçu
que vous étiez bien résolus de ne plus souffrir son insolence, mais de la
réprimer vivement, la crainte l'a arrêté pour quelque temps. Mais peu
après, se réveillant comme d'une espèce d'ivresse ou de folie, il a passé
des voies de fait aux voies de droit. Il a assigné Marcius à comparaître à
un certain jour devant son tribunal, où il devait être lui-même accusateur,
témoin et juge dans la même cause. Vous vous y êtes opposés, parce
que vous avez senti qu'il ne citait pas le prétendu coupable pour le juger,
mais pour l'envoyer au supplice. Comme il a vu qu'il n'était maître absolu
d'aucune chose, et qu'il n'avait que le droit de confirmer vos décisions, il a
mis bas cette fierté insupportable qu'il respirait alors, et aujourd'hui il vient
encore vous demander une dernière grâce.
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