[7,48] Ἐβουλόμην μὲν ἂν ἔγωγε καὶ τοῖς
θεοῖς ηὐξάμην πολλάκις ἐμαυτὸν μὲν ἁμαρτεῖν τῆς
γνώμης, ἣν εἶχον ὑπὲρ τῶν πρὸς τὸν δῆμον διαλύσεων, ὡς οὔτε
καλὴν καὶ δικαίαν οὔτε συμφέρουσαν
ἡμῖν ὑπελάμβανον ἔσεσθαι τὴν τῶν φυγάδων κάθοδον
καὶ διὰ παντός, ὁσάκις περὶ τούτου προὐτέθη σκοπεῖν,
πρῶτός τε τῶν ἄλλων καὶ τελευτῶν μόνος, ἐπειδὴ οἱ
λοιποὶ ἀπέστησαν, ἠναντιούμην· ὑμᾶς δ´, ὦ βουλή,
τοὺς ἐπὶ τὰ κρείττω τὴν ἐλπίδα λαμβάνοντας καὶ πάντα
τῷ δήμῳ δίκαιά τε καὶ ἄδικα προθύμως χαριζομένους
ἄμεινον ἐμοῦ δόξαι φρονεῖν. ἐπειδὴ δ´ οὐχ, ὡς ἐβουλόμην τε καὶ
τοῖς θεοῖς ηὐχόμην, τὰ πράγματα ὑμῖν
κεχώρηκεν, ἀλλ´ ὡς ᾤμην, καὶ περιεστήκασιν αἱ χάριτες
ὑμῖν εἰς φθόνους καὶ μίση, τὸ μὲν ἐπιτιμᾶν τοῖς ἡμαρτημένοις
ὑμῖν καὶ λυπεῖν ὑμᾶς διὰ κενῆς, ὃ ῥᾷστόν
ἐστι καὶ πᾶσιν ὡς τὰ πολλὰ ποιεῖν σύνηθες, οὐκ ἐν
καιρῷ νυνὶ γενησόμενον ὁρῶν ἐάσω. ἐξ ὧν δὲ τά τε
παρελθόντα ἐπανορθωσόμεθα, ὅσα μὴ παντάπασιν ἀνιάτως
ἔχει, καὶ περὶ τῶν παρόντων ἄμεινον φρονήσομεν,
ταῦτα πειράσομαι λέγειν. καίτοι με οὐ λέληθεν, ὅτι
μαίνεσθαι καὶ θανατᾶν δόξω τισὶν ὑμῶν γνώμην περὶ
τούτων ἐλευθέραν ἀποφαινόμενος ἐνθυμουμένοις, ἡλίκους ἔχει
κινδύνους ὁ μετὰ παρρησίας λόγος, καὶ τὰς
Μαρκίου συμφοράς, ὃς οὐ δι´ ἕτερόν τι νυνὶ τὸν ὑπὲρ
τῆς ψυχῆς ἀγῶνα τρέχει, λογιζομένοις. ἀλλ´ οὐκ οἴομαι
δεῖν τῆς ἰδίας ἀσφαλείας πλείω ποιεῖσθαι πρόνοιαν ἢ
τῆς κοινῆς ὠφελείας. δέδοται γὰρ ἤδη τοῖς ὑπὲρ ὑμῶν
κινδύνοις τὸ σῶμα τοὐμόν, ὦ βουλή, καὶ καθωσίωται
τοῖς ὑπὲρ τῆς πόλεως ἀγῶσιν, ὥστε ὅ τι ἂν τῷ δαίμονι δοκῇ, μετὰ
πάντων τε καὶ σὺν ὀλίγοις, εἰ δ´
ἀνάγκη καὶ μόνος εὐγενῶς πείσομαι· ἕως δ´ ἂν ἔχω
τὴν ψυχήν, οὐδείς με ἀφέξει φόβος μὴ οὐχ ἃ φρονῶ λέγειν.
| [7,48] « Je souhaiterais de tout mon cœur (et c'est une grâce que j'ai
souvent demandée aux dieux) m'être trompé dans l'opinion que j'ai eue
au sujet de la réconciliation du peuple, {lorsque je vous ai prédit} que le
rappel des fugitifs ne vous serait jamais ni honorable, ni utile, ni
avantageux. Toutes les fois qu'il s'est agi de cette matière dans nos
délibérations, j'ai été le premier à m'y opposer, et j'ai persisté seul jusqu'à
la fin dans la même résolution, après m'être vu abandonné de tout le
sénat. Quelque attaché néanmoins que j'aie été à mon propre sentiment,
je voudrais bien, Messieurs, qu'il parût aujourd'hui que vous fûtes les plus
sages, et que vous prîtes le meilleur parti, lorsque concevant de
meilleures espérances, vous accordâtes volontiers au peuple toutes les
conditions qu'il demandait, sans examiner à la rigueur si elles étaient
justes ou injustes. Mais aujourd'hui que nous ne voyons que trop
clairement que les affaires n'ont pas tourné comme je le souhaitais et
comme je le demandais aux dieux, puisqu'elles ont pris le train que je
craignais qu'elles ne prissent, et que les grâces que vous avez accordées
au peuple n'ont servi qu'à vous attirer de la haine et de l'envie, je ne
prétends pas m'en prévaloir pour vous faire des reproches ou pour vous
chagriner en vain. Il me serait très aisé de le faire, comme c'est la
coutume de bien des gens, mais je vois qu'il n'en est pas temps,
présentement que nous avons d'autres affaires plus importantes. Je
tâcherai seulement de vous dire par quels moyens nous pourrons nous
relever des fautes passées quant à ce qui n'est pas absolument sans
remède, et prendre un meilleur parti pour le présent. Je n'ignore pas qu'il
s'en trouvera plusieurs parmi vous qui me traiteront de forcené, et qui
croiront que je cours à la mort, si je parle avec liberté sur ce sujet. Je vois
aussi bien que tout autre qu'il y a du danger à dire ouvertement sa
pensée. Je me représente les malheurs de Marcius, qui n'est maintenant
en péril de la vie, qu'à cause de la liberté avec laquelle il a dit ce qu'il
pensait. Mais je ne crois pas après tout, que ma propre sûreté doive
l'emporter sur l'utilité publique. En effet, Sénateurs, il y a déjà longtemps
que mon corps a été exposé aux dangers pour vous-mêmes, et dévoué
aux combats pour Rome ma patrie. C'est pourquoi je souffrirai
généreusement avec vous tous, ou avec un petit nombre de personnes,
ou même moi seul, s'il le faut, tout ce que la fortune en décidera ; et tant
que mon âme animera mon corps, rien ne m'empêchera de dire
franchement ce que je pense.
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