[6] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ Ϛ'.
Λείπεται δὴ λοιπὸν τὴν εἱμαρμένην ἐν τοῖς φύσει
γινομένοις εἶναι λέγειν, ὡς εἶναι ταὐτὸν εἱμαρμένην
τε καὶ φύσιν. Τό τε γὰρ εἱμαρμένον κατὰ φύσιν καὶ τὸ
κατὰ φύσιν εἱμαρμένον. Οὐ γὰρ κατὰ φύσιν μέν ἐστιν
ἄνθρωπον ἐξ ἀνθρώπου καὶ ἵππον ἐξ ἵππου γίνεσθαι,
οὐ καθ' εἱμαρμένην δέ, ἀλλὰ συνοδεύει τὰ αἴτια ταῦτα
ἀλλήλοις ὡς ἂν ἔχοντα κατὰ τοὔνομα μόνον τὴν
διαφοράν. Διὸ καὶ τὰ πρῶτα τῆς κατὰ φύσιν ἑκάστοις
γενέσεως αἴτια (ἔστιν δὲ ταῦτα τὰ θεῖα καὶ ἡ
τούτων εὔτακτος περιφορὰ) καὶ τῆς εἱμαρμένης αἴτια
λέγουσιν. Πάσης γὰρ γενέσεως ἀρχὴ ἡ τῶν θείων
κατὰ τὴν κίνησιν ποιὰ σχέσις πρὸς τὰ τῇδε. Οὔσης δὲ
τῆς εἱμαρμένης ἐν τούτοις τε καὶ τοιαύτης ἀναγκαῖον
ὡς ἂν ἔχῃ τὰ γινόμενα κατὰ φύσιν οὕτως ἔχειν καὶ τὰ
καθ' εἱμαρμένην. Ἀλλὰ μὴν τὰ γινόμενα κατὰ φύσιν
οὐκ ἐξ ἀνάγκης γίνεται, ἀλλ' ἔστιν ἡ γένεσις τῶν
οὕτω γινομένων ἐμποδιζομένη διὸ ποτὲ μὲν ὡς ἐπὶ
τὸ πλεῖστον μὲν γίνεται τὰ γινόμενα κατὰ φύσιν, οὐ
μὴν ἐξ ἀνάγκης {ἔχει}. Χώραν γὰρ ἐν αὐτοῖς ἔχει καὶ
τὸ παρὰ φύσιν καὶ γίνεται, ὑπό τινος αἰτίας ἔξωθεν
ἐμποδισθείσης τῆς φύσεως εἰς τὸ ἔργον τὸ ἑαυτῆς. Διὸ
οὔτε ἐξ ἀνάγκης ἄνθρωπος ἐξ ἀνθρώπου ἀλλ' ὡς ἐπὶ
τὸ πλεῖστον, ὥστε καὶ κατὰ τὴν ὡρίσθαι δοκοῦσαν
προθεσμίαν τοῖς γινομένοις κατὰ φύσιν ἕκαστον τῶν
οὕτως γινομένων ἀεὶ γίνεται. Ὄντος δὲ ἐν τοῖς
γινομένοις κατὰ φύσιν καὶ τοῦ παρὰ φύσιν, ὥσπερ
καὶ ἐν τοῖς κατὰ τέχνην, χώραν ἂν ἔχοι καὶ ἐν τοῖς
κατὰ τὴν εἱμαρμένην γινομένοις τὸ παρὰ τὴν
εἱμαρμένην, ὥστ' εἰ χώραν ἔχει τὸ παρὰ φύσιν καὶ μὴ
κενόν ἐστιν ὄνομα, ἔχοι ἂν ἐν τοῖς γινομένοις χώραν
καὶ τὸ παρὰ τὴν εἱμαρμένην. Διὸ καὶ λέγοι τις ἂν
εὐλόγως τὴν οἰκείαν φύσιν ἀρχὴν ἑκάστου καὶ αἰτίαν
εἶναι τῆς τῶν γινομένων ἐν αὐτῷ κατὰ φύσιν τάξεως.
Ἀπὸ ταύτης γὰρ ὡς ἐπὶ τὸ πλεῖστον οἵ τε βίοι τῶν
ἀνθρώπων τὴν τάξιν καὶ αἱ καταστροφαὶ
λαμβάνουσιν. Ὁρῶμεν γοῦν ὅτι καὶ τὸ σῶμα τῷ τοῖον
ἢ τοῖον εἶναι τὴν φύσιν καὶ ἐν νόσοις καὶ ἐν φθοραῖς
ἀκολούθως τῇ φυσικῇ συστάσει γίνεται, οὐ μὴν ἐξ
ἀνάγκης· ἱκαναὶ γὰρ ἐκκροῦσαι τὴν τοιάνδε τάξιν
ἐπιμέλειαί τε καὶ ἀέρων ὑπαλλαγαὶ καὶ προστάξεις
ἰατρῶν καὶ συμβουλαὶ θεῶν. Κατὰ δὲ τὸν αὐτὸν
τρόπον καὶ ἐπὶ τῆς ψυχῆς εὕροι τις ἂν παρὰ τὴν
φυσικὴν κατασκευὴν διαφόρους γινομένας ἑκάστῳ
τάς τε προαιρέσεις καὶ τὰς πράξεις καὶ τοὺς βίους.
Ἦθος γὰρ ἀνθρώπων δαίμων κατὰ τὸν Ἡράκλειτον,
τουτέστι φύσις. Ὡς ἐπὶ τὸ πλεῖστον γὰρ ταῖς φυσικαῖς
κατασκευαῖς τε καὶ διαθέσεσιν τάς τε πράξεις καὶ
τοὺς βίους καὶ τὰς καταστροφὰς αὐτῶν ἀκολούθως
ἰδεῖν ἔστι. Τῷ μὲν γὰρ φιλοκινδύνῳ καὶ θρασεῖ φύσει
βίαιός τις καὶ ὁ θάνατος ὡς ἐπὶ τὸ πλεῖστον (αὕτη γὰρ
ἡ τῆς φύσεως εἱμαρμένη), τῷ δέ γε ἀκολάστῳ τὴν
φύσιν τό τε ἐν ἡδοναῖς τοιαύταις καταζῆν καὶ ὁ τῶν
ἀκρατῶν βίος, ἂν μή τι κάλλιον ἐν αὐτῷ γενόμενον
ἐμποδίζῃ, τῷ δὲ καρτερικῷ κατὰ φύσιν αἱ τῶν
πόνων ὑπομοναὶ καὶ αἱ κακοπάθειαι καὶ αἱ ἐν τοῖς
τοιούτοις τοῦ βίου καταστροφαὶ πάλιν εἰσὶ καθ'
εἱμαρμένην. Καὶ τοῖς ἀνελευθέροις δὲ τὴν φύσιν καὶ
ἀπλήστοις περὶ κτῆσιν χρημάτων καὶ τὰ τῆς
εἱμαρμένης συνῳδά· ἐν ἀδικίαις γὰρ ὡς ἐπὶ τὸ
πλεῖστον ὁ τῶν τοιούτων βίος, καὶ ἡ τοῦ βίου δὲ
καταστροφὴ τοῖς κατ' αὐτὰ πράττουσιν ἀκόλουθος
τούτοις. Καὶ ἐπιλέγειν εἰώθασιν τοῖς τοιούτοις, ὅταν
ἐν ταῖς ἀκολούθοις τε τοῦ βίου καὶ καθ' εἱμαρμένην
περιστάσεσιν ὦσιν, ὡς ἑαυτοῖς γεγονόσιν αἰτίοις τῶν
παρόντων αὐτοῖς κακῶν. Καὶ τοῦτ' ἄν τις
παρίστασθαι βουλόμενος τοῖς τὰς μαντείας
ἐπαγγελλομένοις τοῦ μὴ πάντως αὐτοὺς
ἐπιτυγχάνειν φέροι τὸ αἴτιον, μὴ πάντα τὴν φύσιν
ἑκάστου καὶ τὴν εἱμαρμένην εὐοδεῖν, ἀλλὰ γίνεσθαί
τινα καὶ παρ' αὐτήν, εἶναι δὲ τοὺς μάντεις μηνυτὰς
τῶν γινομένων καθ' εἱμαρμένην, ὥσπερ οὖν καὶ τοὺς
φυσιογνώμονας. Εἰπόντος γοῦν Ζωπύρου τοῦ
φυσιογνώμονος περὶ Σωκράτους τοῦ φιλοσόφου
ἄτοπά τινα καὶ πλεῖστον ἀφεστῶτα τῆς προαιρέσεως
αὐτοῦ τῆς κατὰ τὸν βίον καὶ ἐπὶ τούτοις ὑπὸ τῶν περὶ
τὸν Σωκράτη καταγελωμένου οὐδὲν εἶπεν ὁ
Σωκράτης ἐψεῦσθαι τὸν Ζώπυρον· ἦν γὰρ ἂν τοιοῦτος
ὅσον ἐπὶ τῇ φύσει, εἰ μὴ διὰ τὴν ἐκ φιλοσοφίας
ἄσκησιν ἀμείνων τῆς φύσεως ἐγένετο. Καὶ αὕτη μὲν ἡ
περὶ εἱμαρμένης ὡς ἐπὶ κεφαλαίων εἰπεῖν κατὰ τοὺς
ἀπὸ τοῦ Περιπάτου δόξα.
| [6] CHAPITRE VI.
Il reste à démontrer que le destin se trouve dans les
choses qui arrivent naturellement, en sorte que ce soit
tout un que la nature et le destin. Et effectivement ce
qui est fatal est naturel, et ce qui est naturel, fatal. Ainsi
il n’est pas naturel qu’un homme vienne d’un homme,
et un cheval d’un cheval, sans que cela soit fatal. Le
destin et la nature sont des causes qui marchent
ensemble, et n’ont de différence que le nom. C’est
pourquoi les premières causes de tout ce qui arrive
naturellement, c’est-à-dire les astres, sont réputés
choses divines aussi bien que la régulière révolution
qu’ils accomplissent, en même temps qu’on les dit
causes du destin. Car le principe de toute génération est
l’influence qu’exercent dans leur mouvement les choses
divines sur les choses d’ici-bas. Puis donc que le destin
préside à ces choses et y préside ainsi, la logique veut
que ce qui arrive fatalement se produise de la même
manière que ce qui arrive naturellement. Toutefois les
choses qui arrivent naturellement n’arrivent point
nécessairement; car la génération des choses qui
arrivent naturellement est sujette à être contrariée. C’est
le plus souvent que les choses qui arrivent
naturellement se produisent conformément à leur
nature; ce n’est point nécessairement. Il y a lieu en effet
pour ces choses à ce qui est contre nature, et ce cas se
réalise lorsque quelque cause extérieure empêche la
nature d’accomplir son travail. Aussi n’est-ce point:
nécessairement qu’un homme vient d’un homme, mais
ordinairement. Il suit de là que, même dans les choses
qui arrivent naturellement et d’après des lois qui
paraissent certaines, chacune des choses qui se
produisent de la sorte ne se produit pas toujours. De
même donc que dans les choses naturelles se trouve ce
qui est contre nature, et dans les choses d’art ce qui est
contre l’art; de même dans les choses qui viennent du
destin a place aussi ce qui va contre le destin.
Conséquemment, s’il y a lieu à ce qui est contre nature
et si ce n’est pas là une expression vide de sens; dans ce
qui arrive doit également trouver place ce qui est contre
le destin. Ainsi on dirait bien que la nature propre de
chaque être est le principe et la cause de la disposition
de tout ce qui s’accomplit naturellement chez cet être.
Car c’est de cette nature propre qu’en somme les vies
des hommes reçoivent leur ordre et la fin qui les
termine. Nous voyons, par exemple, que le corps,
suivant qu’il est naturellement de telle ou telle
complexion, se comporte dans les maladies et dans les
affaiblissements qu’il éprouve conformément à cette
disposition naturelle, mais non point nécessairement.
En effet, les soins et les changements d’air, et les
préceptes des médecins, et les conseils des Dieux, sont
capables de modifier les suites de cette disposition. De
la même façon, en ce qui concerne l’âme, c’est aussi de
la disposition naturelle que naît chez chacun la diversité
des goûts, des actions et des conduites. Car les mœurs
d’un homme sont pour lui son démon, suivant la parole
d’Héraclite, c’est-à-dire sa nature. La plupart du temps,
en effet, on voit les actions des hommes, leurs
conduites, leurs fins répondre à leurs dispositions
naturelles et à leurs caractères. Ainsi celui qui aime le
danger et qui est d’un naturel audacieux périt
ordinairement d’une mort violente; car c’est là le destin
de sa nature. De même, pour l’homme d’un naturel
intempérant, c’est son destin de s’enfoncer dans les
voluptés, de vivre sans règle, et, à moins que de
meilleures influences ne surviennent qui l’arrachent à
sa nature, de subir mille maux, d’être en proie à mille
souffrances et d’y trouver le terme misérable de sa vie.
De leur côté, les hommes d’un naturel bas et qui
recherchent les richesses avec une avidité insatiable ont
également un destin qui convient avec ce caractère.
C’est effectivement dans les injustices que se passe
d’ordinaire la vie de tels hommes, et la fin de leur
existence répond à leurs actions. Aussi a-t-on coutume
de leur dire, lorsqu’ils éprouvent des vicissitudes
conformes à leur vie et qui sont des vicissitudes fatales,
qu’ils ont été à eux-mêmes les causes des maux qu’ils
endurent. Cependant, si l’on voulait rechercher
pourquoi ceux qui prédisent l’avenir ne rencontrent pas
toujours juste, on pourrait en apporter pour raison,
qu’au lieu que toutes choses répondent à la nature et à
la destinée de chacun, il y en a qui leur sont contraires,
tandis que les devins, aussi bien que les
physiognomonistes, ne sont que les indicateurs de ce
qui arrive conformément au destin. C’est ainsi que le
physiognomoniste Zopyre ayant articulé relativement à
Socrate, le philosophe, certains détails déshonnêtes et
absolument contraires au genre de vie que celui-ci avait
embrassé; comme les disciples qui entouraient Socrate
se moquaient de ce discours, Socrate déclara que
Zopyre n’avançait rien de faux, qu’il eût été tel en effet
naturellement, si, par l’exercice de la philosophie, il
n’avait rendu sa nature meilleure. Et voilà quelle est, en
somme, relativement au destin, la doctrine de l’École
péripatéticienne.
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