[37] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ ΛΖ'.
Ἴδωμεν δὲ καὶ τὸν ἐπὶ τούτῳ λόγον ἠρωτημένον, εἰ
μὴ τὰς ὁμοίας ἀνάγκας ἔχει. Λέγει δὲ οὕτως· « Οὐ
πάντα μὲν ἔστι καθ' εἱμαρμένην, οὐκ ἔστι δὲ
ἀκώλυτος καὶ ἀπαρεμπόδιστος ἡ τοῦ κόσμου
διοίκησις. Οὐδὲ ἔστι μὲν τοῦτο, οὐκ ἔστι δὲ κόσμος,
οὐδὲ ἔστι μὲν κόσμος, οὐκ εἰσὶν δὲ θεοί. Εἰ δέ εἰσι θεοί,
εἰσὶν ἀγαθοὶ οἱ θεοί, ἀλλὰ εἰ τοῦτο, ἔστιν ἀρετή, ἀλλ'
εἰ ἔστιν ἀρετή, ἔστι φρόνησις, ἀλλ' εἰ τοῦτο, ἔστιν ἡ
ἐπιστήμη ποιητέων τε καὶ οὐ ποιητέων ἀλλὰ ποιητέα
μέν ἐστι τὰ κατορθώματα, οὐ ποιητέα δὲ τὰ
ἁμαρτήματα. Οὐκ ἄρα πᾶν μὲν γίνεται καθ'
εἱμαρμένην, οὐκ ἔστι δὲ ἁμάρτημα καὶ κατόρθωμα.
Ἀλλὰ τὰ μὲν κατορθώματα καλά, τὰ δὲ ἁμαρτήματα
αἰσχρά, καὶ τὰ μὲν καλὰ ἐπαινετά, τὰ δὲ κακὰ ψεκτά.
Οὐκ ἄρα πάντα μέν ἐστι καθ' εἱμαρμένην, οὐκ ἔστι δὲ
ἐπαινετὰ καὶ ψεκτά. Ἀλλ' εἰ τοῦτο, εἰσὶν ἔπαινοι καὶ
ψόγοι· ἀλλ' ἃ μὲν ἐπαινοῦμεν τιμῶμεν, ἃ δὲ ψέγομεν
κολάζομεν, καὶ ὁ μὲν τιμῶν γεραίρει, ὁ δὲ κολάζων
ἐπανορθοῖ. Οὐκ ἄρα πάντα μὲν γίνεται καθ'
εἱμαρμένην, οὐκ ἔστι δὲ γεραίρειν καὶ ἐπανορθοῦν ».
Καὶ οὗτος δὴ ὁ λόγος ἀπὸ τῆς αὐτῆς παλαίστρας ὢν
δῆλον ὡς διὰ τῶν αὐτῶν ἂν ψευδὴς ὢν ἐλέγχοιτο.
Πρῶτον μὲν γὰρ ἄν τις συγχωρήσειε προχείρως τῷ «
οὐ πάντα μέν ἐστι καθ' εἱμαρμένην, οὐκ ἔστι δὲ
ἀκώλυτος καὶ ἀπαρεμπόδιστος ἡ τοῦ κόσμου
διοίκησις » {ἐν} τῷ γίνεσθαι τὰ μὲν ἐξ ἀνάγκης, τὰ δὲ
ἐνδεχομένως, καὶ τούτων τὰ μὲν κατὰ φύσιν, τὰ δὲ
κατὰ προαίρεσίν τε καὶ λόγον, τὰ δὲ καθ' ὁρμήν, τὰ δ'
ἀπὸ τύχης τε καὶ αὐτομάτως. Ἀναιρεῖται δὲ πάντα τὰ
ἄλλα ὑπὸ τῆς εἱμαρμένης. Οὐκ ἄρα οὐκ ἂν
ἀπαρεμπόδιστος οὐδὲ ἀκώλυτος ἡ τοῦ κόσμου
διοίκησις μένοι. Ἀλλ' εἰ καὶ συγχωρηθείη τοῦτό τε καὶ
τὸ κόσμος εἶναι καὶ κόσμου ὄντος θεούς, καίτοι κατ'
Ἐπίκουρον ἐκτὸς ὄντας αὐτούς, καὶ τοὺς θεοὺς
ἀγαθοὺς εἶναι, εἴη δὲ καὶ τὸ ἀρετὴν εἶναι τοῖς θεοῖς
ἑπόμενον, πῶς τῷ τὴν τῶν θεῶν ἀρετὴν εἶναι ἕποιτ'
ἂν τὸ εἶναι φρόνησιν; Τίς γὰρ ἡ τῆς ἀκολουθίας
ταύτης ἀνάγκη; Εἰ μὲν γὰρ ἦν εἰλημμένον τὸ τὴν
ἀνθρώπων ἀρετὴν εἶναι, ἕποιτ' ἂν τούτῳ καὶ ἡ
φρόνησις, ἐπεὶ δ' ἐκ τῶν κειμένων εἴληπται τὸ τὴν τῶν
θεῶν ἀρετὴν εἶναι πῶς ἂν ἔτι ἕποιτο τῇ τῶν θεῶν
ἀρετῇ φρόνησις, ἀνθρώπων οὖσα ἀρετή; Οὐ γὰρ τὰς
αὐτὰς ἀρετὰς οἷόν τε λέγειν εἶναι τῶν τε ἀνθρώπων
καὶ τῶν θεῶν. Οὔτε γὰρ ἄλλως ἀληθὲς τὸ τὰς τῶν
τοσοῦτον ἀλλήλων κατὰ τὴν φύσιν διεστώτων τὰς
αὐτὰς τελειότητάς τε καὶ ἀρετὰς λέγειν, οὔθ' οἱ πρὸς
αὐτῶν περὶ αὐτῶν λεγόμενοι λόγοι εὔλογόν τι ἐν
αὑτοῖς ἔχουσιν. Ἀνθρώπου δὲ ἡ φρόνησις ἀρετή, ἥ
ἐστιν, ὥς φασιν, ἐπιστήμη ποιητέων τε καὶ οὐ
ποιητέων. Ἐν οἷς γὰρ οἷόν τε μὴ πραχθῆναί τι καὶ
τῶν ποιητέων, ἐν τούτοις ἡ τῶν ποιητέων τε καὶ οὐ
ποιητέων ἐπιστήμη χώραν ἔχει. Ἀλλὰ μὴν πάντων
γινομένων καθ' εἱμαρμένην ἄχρηστος ἡ γνῶσις τῶν
ποιητέων τε καὶ μή. Τί γὰρ ὄφελος τῆς τοιαύτης
γνώσεως τοῖς μηδὲν ὧν πράττουσι φυλάξασθαι
δυναμένοις; Εἰ δὲ μηδὲν ἡ τούτων ἐπιστήμη χρήσιμον,
ἀναιροῖτ' ἂν ἡ φρόνησις, ὡς εἶναι τὴν ἀκολουθίαν
ἀληθεστέραν τὴν εἰ ἔστιν εἱμαρμένη, μὴ εἶναι
φρόνησιν. Καθ' ὃν γὰρ λόγον ὁ νόμος ἀνῃρεῖτο
κειμένης τῆς εἱμαρμένης, κατὰ τοῦτον ἀναιρεθήσεται
καὶ ἡ φρόνησις, ἧς ἀναιρουμένης δῆλον ὡς καὶ τῶν
ἄλλων ἓν ἕκαστον ἀναιροῖτ' ἂν τῶν κατὰ τὴν
ἀκολουθίαν τὴν πρὸς τὴν φρόνησιν τιθεμένων.
| [37] CHAPITRE XXXVII.
Cependant, voyons encore ce que vaut une autre série
de questions auxquelles ont recours nos adversaires, et
demandons-nous si elle n’aboutit pas nécessairement
aux mêmes résultats. Voici comment nos adversaires
raisonnent. Si tout n’est pas soumis à la loi du destin, le
gouvernement du monde n’est garanti ni contre les
empêchements ni contre les obstacles, et si cela est, il
n’y a pas de monde; et s’il n’y a pas de monde, les
Dieux non plus ne sont pas. Au contraire, s’il y a des
Dieux, les Dieux sont bons; s’il en est ainsi, il y a place
pour la vertu; s’il y a de la vertu, il y a de la prudence;
s’il y a de la prudence, il y a une science de ce qu’il faut
faire et de ce qu’il ne faut pas faire. Mais ce qu’il faut
faire, c’est le bien; ce qu’il ne faut pas faire, c’est le
mal. Si donc tout n’arrive pas fatalement, il n’y a ni
bien ni mal. Or le bien est beau, le mal honteux; le bien
est digne de louange, et le mal mérite le blâme.
Conséquemment, si tout n’arrive pas fatalement, il n’y
a ni actions qui soient dignes de louange, ni actions qui
méritent le blâme; et s’il en est ainsi, il n’y a ni louange
ni blâme. Mais nous récompensons ce que nous louons,
et nous punissons ce que nous blâmons, et récompenser
c’est honorer, punir c’est corriger. Si donc toutes
choses n’arrivent pas fatalement, il n’y a lieu ni de
rémunérer, ni de redresser. Cette argumentation, qui
n’est encore qu’un artifice d’école que nous avons déjà
signalé, succombe évidemment aussi sous les raisons
que nous avons déjà produites. Premièrement, en effet,
qui accorderait facilement cette assertion si tout
n’arrive point fatalement, l’ordre du monde n’est plus
assuré ni inviolable, parce qu’alors il y a des choses qui
arrivent nécessairement et d’autres éventuellement;
celles-ci naturellement et celles-là par choix et par
raison; les unes en vertu de l’appétit et les autres par
hasard et par accident? Or, c’est là tout ce que supprime
le destin. Si donc le destin ne règle pas toutes choses, il
n’y a plus d’ordre assuré et inviolable du monde.
Accordons et qu’il y a un monde, et que, par le fait
même qu’il y a un monde, il y a des Dieux. Admettons
aussi, quoique, d’après Épicure, les Dieux soient hors
du monde, que les Dieux sont bons. S’il suit de là qu’il
y a pour les Dieux de la vertu, comment, de ce qu’il y
aura une vertu des Dieux, s’ensuivra-t-il qu’il y aura
une prudence des Dieux? On n’aperçoit pas la nécessité
de cette conséquence. Car, si l’on posait qu’il y a une
vertu humaine, s’ensuivrait-il qu’il y eût une prudence
humaine? Mais si l’on pose simplement, comme le font
nos adversaires, qu’il y a une vertu des Dieux;
comment, en même temps, et par cela même, attribuer
aux Dieux la prudence qui est une vertu humaine? Il
n’est pas possible, en effet, de soutenir que les vertus
des hommes et des Dieux sont les mêmes; car il ne
serait pas vrai non plus d’affirmer que même chez les
Dieux, qui par nature diffèrent si profondément entre
eux, les perfections et les vertus sont les mêmes, et,
sous ce rapport, les assertions de nos adversaires se
trouvent n’avoir aucun sens. Cependant la prudence est
une vertu humaine; elle est, comme le disent nos
adversaires, la science de ce qu’il faut faire et de ce
qu’il ne faut pas faire. C’est pourquoi, là où il est
possible de ne pas faire quelqu’une des actions qu’il
faut faire, là il y a place pour la science de ce qu’il faut
faire et de ce qu’il ne faut pas faire. Que toutes choses,
au contraire, arrivent fatalement, et la connaissance de
ce qu’il faut faire et de ce qu’il ne faut pas faire devient
inutile. De quel usage, en effet, peut être une telle
connaissance à ceux qui ne veut se garder de rien de ce
qu’ils font? Mais si une telle science n’offre aucune
utilité, la prudence est mise à néant. Au lieu donc de
conclure que, s’il n’y a pas de destin, il n’y a pas de
prudence; il est bien plus vrai de conclure que, s’il y a
un destin, la prudence n’est pas. Effectivement, par la
même raison que c’est anéantir la loi que d’admettre le
destin, c’est également abolir la prudence elle-même, et
il est clair que, la prudence disparaissant, disparaît aussi
tout ce que nos adversaires considèrent comme une
conséquence de la prudence.
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