[34] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ ΛΔ'.
Πῶς δ' οὐκ ἀγνοούντων τὰ ὑφ' αὑτῶν γινόμενα τὸ τῇ
ἀληθείᾳ τῶν γινομένων, ἣν ἀναιροῦσιν διὰ τοῦ
δόγματος, αὐτῇ {πρὸς τὸ} κεχρῆσθαι πρὸς
κατασκευὴν τοῦ ἀναιροῦντος αὐτὴν δόγματος;
Λαβόντες γὰρ τὸ ἕκαστον τῶν συνεστώτων φύσει
καθ' εἱμαρμένην εἶναι τοιοῦτον, ὁποῖόν ἐστι, ὡς
ταὐτοῦ ὄντος τοῦ τε φύσει καὶ τοῦ καθ' εἱμαρμένην,
προστιθέασιν τὸ « οὐκοῦν κατὰ τὴν εἱμαρμένην καὶ
αἰσθήσεται τὰ ζῷα καὶ ὁρμήσει, καὶ τὰ μὲν τῶν ζῴων
ἐνεργήσει μόνον τὰ δὲ πράξει τὰ λογικά, καὶ τὰ μὲν
ἁμαρτήσεται τὰ δὲ κατορθώσει. Ταῦτα γὰρ τούτοις
κατὰ φύσιν μέν, ὄντων δὲ καὶ ἁμαρτημάτων καὶ
κατορθωμάτων καὶ τῶν τοιούτων φύσεων καὶ
ποιοτήτων μὴ ἀγνοουμένων, καὶ ἔπαινοι καὶ ψόγοι
καὶ κολάσεις καὶ τιμαί. Ταῦτα γὰρ οὕτως ἔχει
ἀκολουθίας τε καὶ τάξεως ». Οὐ μὴν ἀκολουθεῖ ταῦτα
ἔτι τοῦτον γίνεσθαι τὸν τρόπον τοῖς τὴν φύσιν τε καὶ
τὰ γινόμενα κατὰ φύσιν εἰς τὴν εἱμαρμένην τε καὶ τὴν
ἀνάγκην μεταφέρουσιν. Κατὰ φύσιν μὲν γὰρ τοῖς
πρακτικοῖς τε καὶ λογικοῖς ζῴοις τὸ καὶ ἁμαρτάνειν
καὶ κατορθοῦν δύνασθαι τῷ μηδέτερον αὐτῶν ποιεῖν
κατηναγκασμένως, καὶ τοῦτ' ἀληθές ἐστι καὶ τοῦτον
ἔχει τὸν τρόπον. Οὐ μὴν τοῖς
πάντα ἃ ποιοῦμεν ἐξ ἀνάγκης ἡμᾶς ποιεῖν λέγουσιν
ἕπεται τοὺς μὲν κατορθοῦν τῶν λογικῶς
ἐνεργούντων, τοὺς δ' ἁμαρτάνειν. Ἐξ ἀνάγκης δὲ
πάντα ποιοῦμεν καθ' οὓς ἀδύνατον μὲν τῶνδέ τινων
περιεστώτων μὴ πράσσειν ἡμᾶς, τὰ δ' ἐξ ἀνάγκης
ἡμᾶς ἀεὶ περιστήσεται ταῦτα δι' ἃ πράσσομεν. Οὐ γὰρ
τὸν ὁπωσοῦν χαρίεν ποιοῦντα καθορθοῦν τις λέγει,
ἀλλ' οὐδ' ἁμαρτάνειν τὸν ὁπωσοῦν φαῦλόν τι
πράττοντα, ἀλλ' εἰ ὁπωσοῦν ἐν ἐξουσίᾳ τις ὢν τῶν
χειρόνων αἱρεῖται καὶ πράσσει {ἡ} τὰ βελτίω τοῦτον
λέγομεν κατορθοῦν. Τὸν γοῦν τὰ αὐτὰ ταῦτα ἀπὸ
τύχης ποιήσαντα οὐκέτι λέγομεν κατορθοῦν ὡς τοῦ
κατορθοῦν τὴν κρίσιν οὐκ ἀπὸ τῶν πραττομένων
ἔχοντος μόνον, ἀλλὰ πολὺ πρότερον ἀπὸ τῆς ἕξεώς τε
καὶ δυνάμεως ἀφ' ἧς πράσσεται. Καὶ ὁ αὐτὸς λόγος
ἐπὶ τῶν ἁμαρτημάτων. Ὧν δὲ ἡ ἐξουσία τοῦ πράττειν
ἄλλα τινὰ παρ' ἃ πράττουσιν ὑπὸ τῶν περιεστώτων
ἀφῄρηται, οὐδὲν αὐτοὶ συντελοῦσιν εἰς τὸ {τὰ} αὐτοῖς
περιεστάναι δι' ἃ πράττουσιν. Πῶς ἂν ἔτι τούτους τις
ἢ ἁμαρτά νειν ἢ κατορθοῦν λέγοι; Οὔτε γὰρ τῆς
τοιαύτης ἕξεως, ἀφ' ἧς τῶνδέ τινων περιεστώτων περὶ
τὸ τάδε τινὰ πράττειν ὁρμὴ γίνεται, αὐτός ἐστιν ἐν
ἐξουσίᾳ οὔτε τοῦ τὰ περιεστῶτα τοιαῦτα εἶναι. Διὰ
τοῦτο γὰρ τῶν ἀλόγων ζῴων οὐδὲν τούτων
κατηγορεῖται. Ἀγόμενος δὴ ἐπὶ τὸ πράττειν ὑπό τε
ἕξεως καὶ περιστάσεών τινων μηδενὸς κύριος αὐτὸς
τοῦ μὴ τοῦτον ἔχειν τὸν τρόπον, οὐδ' ἂν ἁμαρτάνειν
ἔτι ἢ κατορθοῦν ἐπὶ τοῖς οὕτως πραττομένοις λέγοιτο.
Ἐπεὶ δὲ οἵ τε ἔπαινοι καὶ ψόγοι, κολάσεις τε καὶ τιμαὶ
ἐπὶ τοῖς ἁμαρτήμασίν τε καὶ κατορθώμασιν, ὡς καὶ
αὐτοὶ λέγουσιν, δῆλον ὡς ἀναιρουμένων τούτων
ἀναιροῖτ' ἂν κἀκείνων ἕκαστον. Τὸ δὲ κατορθοῦν ἐπὶ
τῶν θεῶν οὐ κυρίως ἂν λέγοιτο, ἀλλ' ὡς ἴσον τῷ τὰ
ἀγαθὰ ποιεῖν, εἴ γε ἐν οἷς μὲν τὸ κατορθοῦν, ἐν
τούτοις καὶ τὸ ἁμαρτάνειν, {ἐν τούτοις} ἀνεπίδεκτον
δὲ ἁμαρτημάτων τὸ θεῖον. Διὰ τοῦτο γὰρ οὐδὲ
ἐπαινοῦ μεν τοὺς θεούς, ὅτι κρείττους εἰσὶν ἢ κατ'
ἐπαίνους καὶ τὰ ἐφ' οἷς οἱ ἔπαινοι κατορθώματα.
| [34] CHAPITRE XXXIV.
Nos adversaires l’ont-ils remarqué? C’est évidemment
ne pas savoir ce qu’ils disent que de se servir, comme
ils le font, de la réalité même que met à néant leur
doctrine, afin d’établir la doctrine qui met à néant cette
réalité? En effet, prenant pour accordé que tout ce qui
est naturellement est fatalement tel qu’il est, et
ramenant ainsi à une seule et même chose la nature et la
fatalité, nos adversaires ajoutent que c’est donc
naturellement que les animaux sentiront et se mouvront.
Parmi les animaux, il y en aura d’ailleurs qui ne feront
simplement qu’agir; il y en aura dont les opérations
seront raisonnables, et qui tantôt se tromperont et tantôt
resteront dans la droite voie. Car toutes ces dispositions
sont conformes à la nature. Cependant, comme de
bonnes et de mauvaises actions s’accomplissent, et que
le bien n’est pas plus ignoré que le mal, de là naissent la
louange et le blâme, les récompenses et les châtiments,
toutes choses qui ont entre elles dépendance et étroit
enchaînement. Or cet enchaînement est rompu et la
réalité renversée si l’on suit l’opinion de ceux qui
rapportent et la nature et les faits naturels au destin et à
la nécessité. Il est effectivement dans la nature des êtres
actifs et raisonnables de pouvoir et faillir et rester dans
la droite voie parce qu’ils ne font ni l’un ni l’autre
d’une manière nécessaire. Voilà ce qui est vrai; voilà ce
qui a lieu. Il n’est pas nécessaire, au contraire, que nous
fassions, ainsi que l’affirment nos adversaires, qui n’en
persistent pas moins à soutenir que les uns restent dans
la droite voie et que les autres s’égarent, en même
temps qu’ils professent que nous faisons toutes choses
nécessairement. Car, suivant eux, certaines
circonstances étant données, il est impossible que nous
n’agissions pas d’une certaine manière, et c’est
nécessairement que se produisent les circonstances qui
nous déterminent à agir. Toutefois, comment ne pas le
constater? Il ne suffit pas qu’un homme fasse une chose
qui plaise pour qu’on dise qu’il agit bien; ni, pour qu’on
dise qu’il a commis une faute, qu’il ait fait quelque acte
fâcheux. Nous ne disons que quelqu’un a bien agi,
qu’autant qu’ayant la possibilité d’aller au pire, il a
choisi et exécuté le meilleur. Que la même action soit
accomplie, mais qu’elle l’ait été fortuitement, nous ne
disons plus que celui qui l’a faite a bien agi; car ce n’est
point seulement par l’événement que nous jugeons de la
bonté d’une action, mais bien plutôt et tout d’abord par
la disposition et le pouvoir de celui qui l’a faite. Et on
peut appliquer aux fautes les mêmes observations.
Imaginez que les circonstances enlèvent à des hommes
la faculté d’agir autrement qu’ils agissent comme ils ne
contribuent pas d’ailleurs à former les circonstances qui
les déterminent à agir, quel moyen de soutenir encore
qu’ils agissent mal ou bien? il ne dépend en effet de
personne d’être dans la disposition d’où il suit que,
certaines circonstances étant données, il se trouve porté
à agir d’une certaine façon, non plus que de faire que
ces circonstances soient telles. Aussi ne songe-t-on à
adresser aucun reproche aux animaux privés de raison.
Supposez donc un homme qui a été conduit à agir par
suite de sa disposition et des circonstances. Comme
évidemment il n’était pas maître qu’il n’en fût pas ainsi,
il n’est plus possible de dire, à propos de ses actes, qu’il
a mal agi, ou qu’il a bien agi. Quant aux éloges et aux
blâmes, aux châtiments et aux récompenses qui se
rapportent aux mauvaises et aux bonnes actions, il est
manifeste, ainsi que nos adversaires eux-mêmes en
conviennent, que si on met à néant le bien et le mal, on
met à néant du même coup toute récompense et toute
punition. Pour ce qui est des Dieux, ce ne serait point
parler correctement que de dire qu’ils agissent bien;
mieux vaudrait dire qu’ils font les biens. Bien agir
suppose en effet qu’on puisse agir mal; et la nature
divine est incapable de mal. C’est pourquoi nous ne
louons pas non plus les Dieux, parce qu’ils sont
supérieurs et aux éloges et aux actions qui appellent l’éloge.
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