| [30] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ Λ'.
Τὸ δὲ λέγειν εὔλογον εἶναι τοὺς θεοὺς τὰ ἐσόμενα 
προειδέναι (ἄτοπον γὰρ τὸ λέγειν ἐκείνους ἀγνοεῖν τι 
τῶν ἐσομένων) καὶ τοῦτο λαμβάνοντας 
κατασκευάζειν πειρᾶσθαι δι' αὐτοῦ τὸ πάντα ἐξ 
ἀνάγκης τε γίνεσθαι καὶ καθ' εἱμαρμένην οὔτε 
ἀληθὲς οὔτε εὔλογον. Τῆς μὲν γὰρ φύσεως τῆς τῶν 
πραγμάτων τοῦτο χωρούσης, οὐδένα {μᾶλλον} 
εὐλογώτερον εἰδέναι μᾶλλον τῶν θεῶν τὰ μέλλοντα, 
ἀδυνάτου δ' οὔσης τὴν τοιαύτην πρόρρησιν καὶ 
πρόγνωσιν δέχεσθαι, οὐδὲ τοὺς θεοὺς εὔλογον ἔτι 
γίνεται {τὸ} εἰδέναι τι τῶν ἀδυνάτων. Τὰ γὰρ ἀδύνατα 
τῇ αὑτῶν φύσει καὶ παρὰ τοῖς θεοῖς τὴν αὐτὴν 
φυλάττει φύσιν. Ἀδύνατον γὰρ καὶ τοῖς θεοῖς ἢ τὸ τὴν 
διάμετρον ποιῆσαι τῇ πλευρᾷ σύμμετρον ἢ τὰ δὶς δύο 
πέντε εἶναι ἢ τῶν γεγονότων τι μὴ γεγονέναι. Οὐδὲ 
γὰρ τὴν ἀρχὴν βούλονται  ἐπὶ τῶν ἀδυνάτων οὕτως 
γὰρ ἦν ἐν τοῖς λεγομένοις δυσχωρία. Οἷς ὁμοίως 
ἀδύνατον καὶ τὸ ἐν τῇ οἰκείᾳ φύσει ἔχον τὸ δύνασθαι 
γενέσθαι τε καὶ μὴ ὡς ἐσόμενον πάντως ἢ ὡς μὴ 
ἐσόμενον οὕτως προειδέναι. Εἰ γὰρ ἡ περὶ αὐτῶν πρὸ 
αὐτῶν πρόγνωσις ἀναιρεῖ τὸ ἐν αὐτοῖς ἐνδεχόμενον, 
δῆλον ὡς, εἰ σώζοιτο τοῦτο, ἀδύνατος ἂν ἡ περὶ αὐτῶν 
πρόγνωσις εἴη. Ὅτι γὰρ καὶ {εἰ} κατὰ τούτους τοῦτο 
οὕτως ἔχει, δῆλον ἐκ τοῦ λαβόντας αὐτούς, ὅτι οἱ θεοὶ 
προγιγνώσκουσιν τὰ μέλλοντα, δι' αὐτοῦ 
κατασκευάζειν τὸ ἐξ ἀνάγκης αὐτὰ γίγνεσθαι, ὡς οὐκ 
ἂν εἰ μὴ οὕτως γίγνοιτο προγνωσομένων. Εἰ δὲ τῇ τῶν 
θεῶν προγνώσει τε καὶ προαγορεύσει τὸ ἀναγκαῖον 
ἕπεται, καὶ κατ' αὐτούς, εἰ μὴ τὸ ἀναγκαῖον ἐν τοῖς 
γινομένοις εἴη, οὐκ ἂν κατ' αὐτοὺς οἱ θεοὶ 
προγινώσκοιεν τὰ μέλλοντα. Ὥστε καὶ αὐτοὶ τὴν 
αὐτὴν ἀδυναμίαν τοῖς θεοῖς φυλάσσουσιν, εἴ γε κατ' 
ἀδυναμίαν χρὴ καὶ ἀσθένειαν λέγειν γίνεσθαι τὸ τὰ 
ἀδύνατα μὴ δύνασθαι. Οὐ δὴ τῷ θείω πλέον τι 
δύνασθαι διὰ τῆς προρρήσεως ἀνάπτουσιν, ἀλλὰ διὰ 
τοῦ προσλαμβάνειν τοῦτο τὴν φύσιν τὴν τῶν 
πραγμάτων τοιαύτην εἰσάγουσιν οὐδαμῶς ἀκόλουθα 
καὶ συνῳδὰ τοῖς γινομένοις τε καὶ ἐναργέσιν 
λέγοντες. Τούτῳ γὰρ προσχρωμένους ἐνέσται πάντα 
τὰ ἀδύνατα δυνατὰ δεικνύναι τῷ εὔλογον εἶναι μὴ 
ἀγνοεῖν αὐτὰ τοὺς θεούς. Δύναται γάρ τις λαβὼν τὸ 
ἄτοπον εἶναι τοὺς θεοὺς μὴ εἰδέναι τὸ ἄπειρον πόσων 
ἐστὶ μέ τρων, θέμενος τοῦτο προσλαμβάνειν τὸ 
δυνατὸν εἶναι γιγνώσκεσθαι τὸ ἄπειρον πόσων ἐστὶ 
μέτρων. Εἰ δὲ τοῦτο, δυνατὸν εἶναι τὸ ἄπειρον 
ὡρισμένων τινῶν μέτρων. Εἰ γὰρ μὴ ἦν, οὐδ' ἂν οἱ θεοὶ 
ᾔδεσαν αὐτὸ πόσων ἐστὶ μέτρων. Ἐπεὶ δέ, εἰ τὸ 
προγινώσκειν τὰ μέλλοντά ἐστι τὸ ὁποῖά ἐστι τοιαῦτα 
αὐτὰ γνωρίζειν ὄντα (ἄλλο γὰρ τὸ προγινώσκειν τοῦ 
ποιεῖν) δῆλον ὅτι ὁ τὰ ἐνδεχόμενα προγινώσκων ὡς 
τοιαῦτα προγνώσεται. Οὐ γὰρ πρόγνωσις τὸ τὸ 
ἐνδεχόμενον ὡς ἐσόμενον ἀναγκαίως ἔσεσθαι λέγειν. 
Ὥστε καὶ οἱ θεοὶ τὰ ἐνδεχόμενα ἂν ὡς ἐνδεχόμενα 
προγιγνώσκοιεν, ᾧ οὐ πάντως ἀκολουθήσει τὸ 
ἀναγκαῖον διὰ τὴν τοιαύτην πρόγνωσιν. Οὕτως δὲ καὶ 
προλεγόντων ἀκούομεν. Οἱ γὰρ μετὰ τοῦ 
συμβουλεύειν τινὰ αἱρεῖσθαί τε καὶ  πράττειν ἃ χρὴ 
προλέγοντες οὐχ ὡς ἐξ ἀνάγκης ἐσομένων περὶ ὧν 
προ λέγουσιν λέγουσιν. Καθόλου δὲ εἰ μὲν πάντα 
τοῖς θεοῖς δυνατά φασιν εἶναι, ἔσται δὲ καὶ τὰ 
ἀδύνατα ἐκείνοις δυνατά, οὐ μὴν δειχθήσεται διὰ τῆς 
ἐκείνων περὶ τῶν μελλόντων προγνώσεως τὸ πάντα 
ἐξ ἀνάγκης τὰ γινόμενα γίνεσθαι. Εἰ δὲ συγχωροῦσιν 
τὰ ἀδύνατα καὶ τοῖς θεοῖς εἶναι τοιαῦτα, πρῶτον μὲν 
αὐτοὺς χρὴ δεικνύναι δυνατὴν εἶναι τὴν τοιάνδε 
πρόγνωσιν, εἶθ' οὕτως αὐτὴν ἀνατιθέναι τοῖς θεοῖς. 
Οὔτε γὰρ ἐναργὲς οὔτε ὑπὸ τῶν γινομένων 
ὁμολογούμενον τὸ τοιαύτην τὴν περὶ τῶν μελλόντων 
πρόγνωσιν ποιεῖσθαι τοὺς θεούς. Ἡμεῖς μὲν οὖν οὔτε 
ἀναιροῦμεν μαντικὴν οὔτε τὴν πρόγνωσιν τῶν θεῶν, 
ὡς ἔχει φύσεως τὰ πράγματα οὕτως αὐτοὺς περὶ 
αὐτῶν προλέγειν λέγοντες, 
 
 | [30] CHAPITRE XXX.  
Dira-t-on qu’il est légitime d’admettre que les Dieux 
connaissent à l’avance ce qui doit arriver (car il serait 
absurde de soutenir qu’ils ignorent quoi que ce soit de 
l’avenir); et, en se fondant sur cette considération, 
essayera-t-on d’établir que dès lors tout arrive d’une 
manière nécessaire et fatalement? Ce ne serait être ni 
dans la vérité, ni dans la raison. A coup sûr, en effet, si 
la nature des choses comportait une pareille prévision, 
ce serait aux Dieux plus qu’à personne que la raison 
voudrait qu’on accordât la connaissance de l’avenir. 
Mais, comme il est impossible que la nature des choses 
comporte une semblable prévision, une telle 
connaissance anticipée, il cesse d’être raisonnable de 
croire que les Dieux mêmes connaissent quoi que ce 
soit d’impossible. Car les choses impossibles par leur 
nature conservent aussi cette nature même à l’égard des 
Dieux. Ainsi, il est impossible, même au regard des 
Dieux, ou qu’un diamètre soit égal à un côté, ou que 
deux fois deux fassent cinq, ou que ce qui est arrivé ne 
soit pas arrivé. Effectivement, les Dieux eux-mêmes ne 
veulent quoi que ce soit d’impossible. Or ce que nous 
venons de dire impliquerait contradiction. Il est donc 
également impossible aux Dieux de connaître à 
l’avance comme devant absolument être ou n’être pas, 
ce qui a pour nature propre de pouvoir être ou ne pas 
être éventuellement. Si, en effet, la connaissance 
anticipée de ce qui doit arriver, avant qu’il arrive, en 
détruit l’éventualité, il est manifeste qu’en maintenant 
l’éventualité de l’avenir, on en rend impossible la 
connaissance anticipée. Toutefois, qu’il en soit ainsi 
d’après nos adversaires mêmes, c’est ce qui est 
incontestable; car c’est en supposant que les Dieux 
connaissent à l’avance l’avenir, qu’ils établissent que la 
réalisation de cet avenir est nécessaire, parce que, si elle 
ne l’était pas, il n’y aurait pas de prescience de l’avenir. 
D’un autre côté, la nécessité étant inséparable de la 
prévision et de la connaissance anticipée des Dieux, il 
s’ensuit, d’après nos adversaires encore, que s’il n’y 
avait point nécessité dans ce qui arrive, les Dieux, à 
leur avis, n’auraient point la prescience de ce qui doit 
arriver. De la sorte, nos adversaires eux-mêmes 
reconnaissent aux Dieux la même impuissance que 
nous, si tant est qu’il faille appeler impuissance et 
faiblesse le fait de ne pas pouvoir ce qui est impossible. 
Accorder aux Dieux la prescience, ce n’est donc point, 
de la part de nos adversaires, leur attribuer une plus 
grande puissance. Cependant cette prescience, telle 
qu’ils l’imaginent, les obligeant à concevoir une nature 
des choses qui s’y accommode, c’est-à-dire une nature 
nécessitée, ils se trouvent conduits à des assertions qui 
ne sont aucunement en rapport ni en accord avec la 
réalité et l’évidence. Ce n’est pas tout: à l’aide d’une 
argumentation pareille, il n’est pas d’impossibilités 
dont nos adversaires ne puissent prouver la réalité, sous 
prétexte qu’il est conforme à la raison que les Dieux ne 
les ignorent pas. Par exemple, en partant de ce principe 
qu’il est absurde que les Dieux ignorent de quelle 
mesure est l’infini, on pourrait conclure qu’il est 
possible de savoir de quelle mesure est l’infini, et, si 
cela est possible, que l’infini admet une mesure 
déterminée. Effectivement, que cela ne fût pas, et les 
Dieux eux-mêmes ignoreraient de quelle mesure est 
l’infini. Mais si prévoir les choses à venir, c’est les 
connaître telles qu’elles sont (car prévoir est autre 
chose que faire), il est évident que prévoir les possibles, 
c’est les prévoir en tant que possibles. Ce n’est plus en 
effet, parler de prévision, que parler du possible comme 
de quelque chose qui doit nécessairement être. Les 
Dieux eux-mêmes auront donc la prévision des 
possibles en tant que possibles, d’où il suit qu’une telle 
prévision n’entraînera nullement la nécessité de ce qui 
sera prévu. Et c’est bien ainsi que nous comprenons 
qu’on annonce l’avenir. Car, lorsqu’on conseille à 
quelqu’un de prendre un parti et de tenir une conduite 
qui soit en rapport avec ce parti même, on annonce ce 
qui doit être, mais il ne vient point à l’esprit que ce 
qu’on annonce doive être nécessairement. En résumé, si 
nos adversaires soutiennent que pour les Dieux tout est 
possible, il en résultera que pour les Dieux les choses 
même impossibles sont possibles; et néanmoins ce ne 
sera point avoir établi, par cette prescience que les 
Dieux auront de ce qui doit être, que tout ce qui arrive 
arrive nécessairement. Si, au contraire, nos adversaires 
accordent que les choses impossibles le sont même au 
regard des Dieux, il faut d’abord qu’ils prouvent que la 
prescience des possibles futurs n’est pas impossible; 
ensuite, qu’une prescience de cette sorte appartient aux 
Dieux. Car il n’est, en réalité, ni évident ni démontré 
que les Dieux aient relativement à l’avenir une pareille 
prescience. Quant à nous, nous ne détruisons ni la 
divination, ni la prescience des Dieux, en affirmant que 
les Dieux prédisent les choses en raison même de ce 
que les fait leur nature. 
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