[21] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ ΚΑ'.
Μηδὲ ἐκεῖνο δὲ ἡμῖν ἀνεξέταστον παραλελείφθω, εἴ
τις ὑποθοῖτο, μηδὲν μᾶλλον ἀληθῆ εἶναι τὸ εἶναί τι
οὕτως ἐφ' ἡμῖν, ὡς ἡμεῖς τε ἀξιοῦμεν καὶ ἡ τῶν
πραγμάτων φύσις ἔχειν μαρτυρεῖ, τοῦ πάντα ἐξ
ἀνάγκης τε γίνεσθαι καὶ καθ' εἱμαρμένην, ἀλλ' εἶναι
ἐπ' ἴσης ἑκάτερον ἢ πιστὸν ἢ ἄδηλον αὐτό, ποτέρᾳ
δόξῃ πείθεσθαι τοῖς ἀνθρώποις ἀσφαλέστερόν τε καὶ
ἀκινδυνότερον, καὶ ποῖον ψεῦδος αἱρετώτερον,
πότερον τὸ πάντων γινομένων καθ' εἱμαρμένην {ἢ} μὴ
οὕτως ἔχειν ὑπολαμβάνειν, ἀλλ' εἶναι καὶ ἡμᾶς τοῦ τι
πρᾶξαι ἢ μὴ πρᾶξαι κυρίους, ἢ ὄντος τινὸς καὶ ἐφ'
ἡμῖν οὕτως, ὡς προειρήκαμεν, πεπεῖσθαι τὸ τοῦτο μὲν
ψεῦδος εἶναι, πάντα δὲ καὶ τὰ ὑφ' ἡμῶν πραττόμενα
κατὰ τὴν ἡμετέραν ἐξουσίαν γίνεσθαι
κατηναγκασμένως. Ἢ γνώριμον ὅτι οἱ μὲν ἁπάντων
γινομένων καθ' εἱμαρμένην αὑτοὺς πείθοντες ὡς
ἐξουσίαν ἔχοντάς τινων τοῦ τε πράττειν αὐτὰ καὶ μὴ
οὐδὲν ἂν παρὰ τήνδε τὴν πίστιν ἐν τοῖς πραττομένοις
ἁμάρτοιεν, τῷ μηδὲ τὴν ἀρχὴν τῶν γινομένων τινὸς
ὑφ' αὑτῶν εἶναι κύριοι, ὥσθ' ὁ κίνδυνος τῆς κατὰ
τοῦτο διαμαρτίας πρόεισιν μέχρι ῥημάτων. Εἰ δέ γε,
ὄντος τινὸς καὶ ἐφ' ἡμῖν καὶ μὴ πάντων γινομένων ἐξ
ἀνάγκης, πείθεσθαι μὲν μηδενὸς ἡμᾶς εἶναι κυρίους,
πολλὰ παραλείψομεν τῶν δεόντως ἂν πραχθέντων
ὑφ' ἡμῶν καὶ διὰ τὸ βουλεύσασθαι περὶ αὐτῶν καὶ διὰ
τὸ τοὺς ἐπὶ τοῖς πραττομένοις καμάτους προθύμως
ὑφίστασθαι, ἀργότεροι γενόμενοι πρὸς τὸ δι' αὑτῶν τι
ποιεῖν διὰ τὴν πίστιν τοῦ, καὶ μηδὲν ἡμῶν
πραγματευομένων περὶ τῶν πρακτέων, τὸ ὀφεῖλον
ἂν γενέσθαι. Οὕτως δὲ τούτων ἐχόντων πρόδηλον
ὡς αἱρετώτερον τοῖς φιλοσοφοῦσιν, τὴν
ἀκινδυνοτέραν ὁδὸν αὐτούς τε αἱρεῖσθαι καὶ τοὺς
ἄλλους ἄγειν.
| [21] CHAPITRE XXI.
Cependant il y a un autre point de vue que nous ne
devons pas laisser de considérer. Supposons qu’il ne
soit pas plus vrai qu’il y ait en nous un libre pouvoir,
comme nous le tenons pour constant et comme le
témoigne la nature des choses, qu’il n’est vrai que tout
arrive nécessairement et fatalement. Admettons, si l’on
veut, que l’un et l’autre sentiment se trouvent
également ou acceptables ou obscurs, et examinons à
quelle opinion il est, pour les hommes, plus prudent et
moins périlleux de s’arrêter. Demandons-nous quelle
est, entre deux erreurs, celle qu’il faut choisir; ou bien,
si toutes choses se produisent fatalement, l’erreur qui
consisterait à penser qu’il n’en est pas ainsi, mais que
nous sommes maîtres de faire ou de ne pas faire; ou
bien, si nous avons, comme nous l’avons dit, un libre
pouvoir, l’erreur qui consisterait à croire que c’est là
une illusion et que c’est fatalement que se produisent
toutes les choses mêmes que nous faisons en vertu de
notre faculté d’agir. N’est-il pas manifeste que ceux qui
se persuaderaient, quoique toutes choses arrivassent
fatalement, qu’ils ont le pouvoir de faire et de ne pas
faire, n’erreraient point dans leur conduite en raison de
cette croyance même et pour n’être aucunement les
maîtres d’aucune de leurs actions? Le danger de leur
erreur n’irait donc pas plus loin que les mots. Au
contraire, qu’il y ait en nous un libre pouvoir et que
toutes choses n’arrivent pas nécessairement, si alors
nous nous persuadons qu’il n’y a rien qui soit en notre
puissance, nous omettrons un grand nombre des actions
qu’il nous eût fallu faire, et en y apportant une réflexion
sérieuse, et en affrontant avec cœur les fatigues qui en
sont inséparables. Assurément, ce sera nous condamner
à l’inertie que de croire que ce qui doit arriver n’en
arrivera pas moins, sans que nous prenions aucun soin
pour qu’il arrive. Mais, s’il en est ainsi, comment nier
que ceux qui se piquent de philosophie doivent choisir
la route qu’il leur est plus sûr à eux-mêmes de suivre, et
où il est plus sûr aussi d’engager les autres?
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