| [16] ΚΕΦΑΛΑΙΟΝ ΙϚ'.
 Ἀλλ' ὅτι μὲν οὔτε σώζουσι τὸ ἐφ' ἡμῖν οἱ λέγοντες 
πάντα καθ' εἱμαρμένην γίνεσθαι (οὐ γὰρ περὶ οὗ 
ζητοῦμεν, εἰ σώζεται κατ' αὐτούς, τοῦτο σώζεται, οἵ γε 
καὶ αἰτίαν ἀποδιδόναι πειρῶνται τοῦ μηδὲ τὴν ἀρχὴν 
δυνατὸν εἶναι τὸ πρᾶγμα), οὐδὲ ἣν ἀποδιδόασιν 
αἰτίαν ἐπ' ἀναιρέσει τῆς τοιαύτης ἐξουσίας, ἀληθής, 
μὴ ἔχουσά τι εὔλογον, ἐκ τῶν εἰρημένων γνώριμον. 
Ἀλλὰ μὴν τοῖς ἀναιροῦσιν τὸ εἶναί τι οὕτως ἐφ' ἡμῖν 
ἕπεται τὸ συγχεῖν τε καὶ ἀνατρέπειν, ὅσον ἐπ' αὐτοῖς, 
τὸν τῶν ἀνθρώπων βίον. Εἰ γάρ, ἐχόντων μὲν οὕτως 
τῶν πραγμάτων ὡς ἔχει (οὐδὲ γὰρ αὐτῶν τινα πεῖσαι 
δυνατὸν μὴ πράττειν, ἃ πράττουσιν ὡς ἔχοντες τοῦ 
καὶ πράττειν αὐτὰ καὶ μὴ πράττειν τὴν ἐξουσίαν, μή 
τι γε τῶν ἄλλων τινά· τοσαύτην ἰσχὺν ἔχει τἀληθὲς 
καὶ τὴν παρὰ τῶν γινομένων μαρτυρίαν ἐναργῆ), εἰ δὴ 
τούτων οὕτως ἐχόντων ἰσχὺν αὐτῶν ἡ δόξα τοσαύτην 
λάβοι, ὡς πάντας ἀνθρώπους πιστεῦσαι, ὅτι ἡμεῖς μὲν 
οὐδενὸς κύριοι, ἑπόμεθα δὲ τοῖς περιεστῶσιν ἀεί, 
τούτοις ἐνδιδόντες τε καὶ συγκατατιθέμενοι, καὶ 
πράττομέν τε ἃ πράττομεν τῷ πάντως ὀφείλειν ταῦτα 
πράττειν (μὴ γὰρ εἶναι δυνατὸν ἡμῖν ὄντων τῶν 
περιεστώτων τοιούτων ἄλλο τι ποιεῖν), οὐ πράττομέν 
τε πάλιν ὁμοίως διὰ τὸ μὴ δύνασθαι ἀντιβαίνειν τοῖς 
περιεστῶσιν οὖσιν τοιούτοις, τί ἄλλο ἢ συμβήσεται, 
πάντας ἀνθρώπους διὰ τὴν τοιάνδε πίστιν τὰ μὲν ὅσα 
μετὰ πόνου τινὸς καὶ φροντίδος γίνεται, τούτοις μὲν 
χαίρειν λέγειν, αἱρεῖσθαι δὲ τὰς μετὰ ῥαστώνης 
ἡδονάς; Ὡς, πάντως ἐσομένων τῶν ὀφειλόντων 
γενέσθαι, μηδὲν αὐτοὶ περὶ αὐτῶν  ὦσιν καλόν. 
Οὕτως δ' αὐτῶν διακειμένων καὶ τῶν πραττομένων 
ἀκολουθούντων ταῖς αἱρέσεσιν αὐτῶν (οὐ γὰρ δὴ διὰ 
τὴν περὶ αὐτῶν ἐψευσμένην πίστιν ἄλλως πως ἕξει τὰ 
πράγματα, ἢ ὡς ἔχει) ἄλλο τι ἢ τῶν μὲν καλῶν 
παρὰ πάντων ὀλιγωρία τις ἔσται (πάντων γὰρ ἡ 
κτῆσίς τε καὶ παρουσία τῶν τοιούτων μετὰ καμάτου 
περιγίνεται), τῶν δὲ κακῶν αἵρεσις ἅτε γινομένων 
μετὰ ῥαστώνης τε καὶ ἡδονῆς; Πρὸς οὓς τίς ἂν ὁ παρὰ 
τούτων εἴη λόγος, ὧν πεισθέντες τοῖς δόγμασιν ἦλθον 
ἐπὶ ταῦτα; Λέγοιεν ἂν γὰρ δικαίως πρὸς αὐτούς, εἰ 
αἰτιῷντο αὐτούς, ὅτι μὴ οἷόν τε ἦν αὐτοῖς τῶν 
περιεστώτων ὄντων τοιούτων ἀλλοῖόν τι πράττειν. 
Οἷς πῶς ἐπιτιμήσουσιν εὐλόγως οἱ διὰ τῶν δογμάτων 
τούτων αὐτοῖς διδάσκαλοι γεγονότες; Μᾶλλον δὲ οὔτε 
ἐπιτιμήσεις οὔτε κολάσεις οὔτε προτροπὴ οὔτε τιμὴ 
οὔτ' ἄλλο τι τῶν τοιούτων τὴν οἰκείαν σώσει κατ' 
αὐτοὺς φύσιν, ἀλλ' ἔσται καὶ τούτων ἕκαστον 
γινόμενον κατηναγκασμένως, ὥσπερ κἀκεῖνα, ἐφ' οἷς 
ταῦτα γίνεται. Πῶς γὰρ ἂν ἔτι Ἀλέξανδρος ὁ 
Πριάμου ἐν αἰτίᾳ εἴη ὡς διαμαρτὼν περὶ τὴν τῆς 
Ἑλένης ἁρπαγήν; Πῶς δ' ἂν Ἀγαμέμνων εὐλόγως 
αὑτοῦ καταψηφίζοιτο λέγων « οὐδ' αὐτὸς ἀναίνομαι » 
; Εἰ μὲν γὰρ εἶχεν ἐξουσίαν ὑπεριδεῖν ἢ Ἀλέξανδρος 
τῶν τότε περιεστώτων αὐτὸν καὶ παρακαλούντων ἐπὶ 
τὴν ἁρπαγήν {ἢ Μενέλαος τῶν ἀγανακτεῖν 
ἐπαιρόντων} ἢ Ἀγαμέμνων, ἐφ' οἷς ὡς ἂν ἁμαρτήσας 
αὑτοῦ κατατρέχει, εὐλόγως ἂν ἦσαν ἐν αἰτίᾳ. Εἰ δ' ἦν 
πάλαι καὶ πρόπαλαι καὶ πρὸ τοῦ τὴν ἀρχήν τινα 
αὐτῶν γενέσθαι ἀληθὲς περὶ ἑκάστου προλεγόμενον 
τούτων ἕκαστον, ἐφ' οἷς ποιήσας εὐθύνεται, πῶς ἂν 
ἔτ' αὐτῶν τῶν γενομένων τὴν αἰτίαν ἔχοιεν; Πῶς δέ 
τις ἐξηγήσεται καὶ τὸ ἐφ' ἡμῖν εἶναι τάς τε ἀρετὰς καὶ 
τὰς κακίας; Εἰ γὰρ οὕτως  ἔτι δι' ἡμῶν, πῶς ἔτ' ἂν 
εὐλόγως οἱ μὲν εἶεν ἐν ἐπαίνοις, οἱ δὲ ἐν ψόγοις; 
Οὐδὲν γὰρ ἄλλ' ἢ συνηγορίαν τοῖς κακοῖς τὸ δόγμα 
τοῦτο προξενεῖ. Ὁρῶμεν γοῦν τῶν μὲν ἀγαθῶν τε καὶ 
καλῶν πράξεων οὐδένα τὴν εἱμαρμένην οὐδὲ τὴν 
ἀνάγκην αἰτιώμενον, τοὺς δὲ κακοὺς δι' ἐκείνην 
τοιούτους εἶναι λέγοντας. Ὃ πιστεύσαντες καὶ τοὺς 
φιλοσόφους λέγειν πῶς οὐ μετὰ παρρησίας αὐτοί γε 
ἐπὶ ταῦτα ἐλεύσονται τούς τε ἄλλους 
προτρέψουσιν; 
 
 | [16] CHAPITRE XVI.  
Nous l’avons suffisamment établi par tout ce qui 
précède. Ceux qui soutiennent que toutes choses 
arrivent fatalement ne sauvent point le libre pouvoir 
humain. Car ce libre pouvoir, dont nous nous 
demandons s’il subsiste dans leur doctrine, n’y subsiste 
pas. Nos adversaires essayent même d’établir qu’en 
principe ce libre pouvoir serait chose impossible. Or 
nous avons prouvé que, dans les arguments qu’ils 
emploient pour mettre à néant une telle faculté, il n’y a 
rien de vrai, rien d’admissible. D’un autre côté, en niant 
qu’il y ait rien de tel que le libre pouvoir de l’homme, 
nos adversaires troublent et bouleversent la vie 
humaine, autant qu’il est en eux. Si en effet les choses 
sont ce qu’ils affirment, il est impossible de persuader à 
aucun d’eux de ne pas faire ce qu’il fait, comme s’il 
avait la faculté de le faire ou de ne le pas faire; et il 
devient impossible de le persuader à qui que ce soit. 
Tant la vérité a de force, et si éclatant est le témoignage 
que rendent les choses! Qu’on suppose que nos 
adversaires aient raison, et que leur doctrine prenne 
assez d’empire pour que tous les hommes soient 
persuadés que, n’étant maîtres de rien, nous cédons 
toujours aux circonstances qui nous environnent, nous 
livrant à elles, y conformant tous nos actes, et que nous 
faisons ce que nous faisons parce que nous devons 
absolument le faire, attendu que, certaines 
circonstances étant données, il est impossible que nous 
fassions autre chose que ce que commandent ces 
circonstances; et que, de même, nous n’agissons point 
en sens contraire, par l’impossibilité où nous sommes 
de résister à des influences déterminées. Qu’arrivera-t-il, 
sinon que tous les hommes, en vertu de cette 
croyance même, diront adieu, pour choisir les plaisirs 
faciles, à tout ce qui se produit avec peine et avec 
souci? Cela seul devant être qui doit être 
nécessairement, rien de bien ne pourra plus résulter 
pour eux de leurs actions. Effectivement, si les hommes 
sont dans ces dispositions, leurs actes devenant dès lors 
conformes à leurs sentiments (car la fausse créance qui 
les aura gagnés ne leur permettra point d’admettre que 
les choses puissent se passer autrement qu’elles se 
passent), qu’adviendra-t-il, sinon que ce sera de la part 
de tous une négligence de ce qui est bien, parce qu’on 
ne réalise et on n’exécute tout ce qui est bien qu’avec 
effort; et de la part de tous le choix de ce qui est mal, 
parce que le mal s’accomplit facilement et avec plaisir? 
Qu’auront d’ailleurs à leur objecter ceux qui par leurs 
doctrines mêmes les auront conduits à ces excès? S’ils 
s’avisent de leur adresser quelque reproche, ceux-ci ne 
seront-ils pas autorisés à leur répondre que, des 
circonstances déterminées étant données, il ne leur était 
pas possible d’agir différemment? Et qu’auront le droit 
de leur répliquer ceux qui par leurs enseignements se 
seront faits les inspirateurs, les précepteurs d’une 
pareille conduite? Désormais, ni reproches, ni 
châtiments, ni exhortation, ni louange, ni rien de 
semblable ne gardera pour eux sa nature propre; mais 
tout cela aussi se produira nécessairement, comme les 
actes mêmes qui y donnent lieu. Comment en effet 
Pâris, le fils de Priam, serait-il encore accusé d’avoir 
commis un crime en enlevant Hélène? Comment 
Agamemnon pourrait-il raisonnablement se condamner 
lui-même en s’écriant: Ni moi non plus, je ne le nie 
pas? Sans doute, si Pâris avait eu le pouvoir de se 
placer au-dessus des circonstances qui le sollicitaient au 
rapt, ou Ménélas celui de surmonter les motifs qui le 
portaient à s’indigner, ou Agamemnon le pouvoir de 
résister à cela même dont il s’accuse lui-même comme 
coupable, ce serait justement qu’on les mettrait en 
cause. Mais si depuis longtemps, si de tout temps, et 
avant qu’aucun de ces faits commençât à s’accomplir, il 
n’y avait pas un des faits dont nous avons parlé qui ne 
fût vrai, c’est-à-dire pas un des faits mêmes qu’on 
impute à mal à leurs auteurs; comment pourrait-on 
considérer ceux-ci comme la cause de ce qui s’est 
produit? Comment expliquer aussi que les vertus et les 
vices soient en notre pouvoir? Car, si nous agissons 
toujours d’une manière nécessaire, comment les uns 
pourraient-ils raisonnablement mériter des louanges et 
les autres le blâme? De toute évidence, cette doctrine ne 
fait que fournir aux mauvaises actions une apologie. 
Nous voyons en effet que ce n’est nullement au destin, 
nullement à la nécessité que l’on attribue les bonnes et 
belles actions, tandis que les méchants prétendent que 
c’est à la fatalité qu’ils doivent d’être méchants. Or, si 
les méchants se persuadent que les philosophes eux-mêmes 
tiennent le même langage, comment ne se 
porteront-ils pas en toute sécurité au désordre, et ne 
chercheront-ils point à y entraîner autrui? 
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