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[4,61] ’Καίτοι τῇ ἑαυτῶν ἑκάστους, εἰ σωφρονοῦμεν, χρὴ τὰ μὴ
προσήκοντα ἐπικτωμένους μᾶλλον ἢ τὰ ἑτοῖμα βλάπτοντας
ξυμμάχους τε ἐπάγεσθαι καὶ τοὺς κινδύνους προσλαμβάνειν,
νομίσαι τε στάσιν μάλιστα φθείρειν τὰς πόλεις καὶ τὴν Σικελίαν,
ἧς γε οἱ ἔνοικοι ξύμπαντες μὲν ἐπιβουλευόμεθα, κατὰ
(4.61.2) πόλεις δὲ διέσταμεν. ἃ χρὴ γνόντας καὶ ἰδιώτην ἰδιώτῃ
καταλλαγῆναι καὶ πόλιν πόλει, καὶ πειρᾶσθαι κοινῇ σῴζειν τὴν
πᾶσαν Σικελίαν, παρεστάναι δὲ μηδενὶ ὡς οἱ μὲν Δωριῆς
ἡμῶν πολέμιοι τοῖς Ἀθηναίοις, τὸ δὲ Χαλκιδικὸν τῇ Ἰάδι
(4.61.3) ξυγγενείᾳ ἀσφαλές. οὐ γὰρ τοῖς ἔθνεσιν, ὅτι δίχα πέφυκε,
τοῦ ἑτέρου ἔχθει ἐπίασιν, ἀλλὰ τῶν ἐν τῇ Σικελίᾳ ἀγαθῶν
(4.61.4) ἐφιέμενοι, ἃ κοινῇ κεκτήμεθα. ἐδήλωσαν δὲ νῦν ἐν τῇ τοῦ
Χαλκιδικοῦ γένους παρακλήσει· τοῖς γὰρ οὐδεπώποτε σφίσι
κατὰ τὸ ξυμμαχικὸν προσβοηθήσασιν αὐτοὶ τὸ δίκαιον μᾶλλον
(4.61.5) τῆς ξυνθήκης προθύμως παρέσχοντο. καὶ τοὺς μὲν Ἀθηναίους
ταῦτα πλεονεκτεῖν τε καὶ προνοεῖσθαι πολλὴ ξυγγνώμη, καὶ
οὐ τοῖς ἄρχειν βουλομένοις μέμφομαι, ἀλλὰ τοῖς ὑπακούειν
ἑτοιμοτέροις οὖσιν· πέφυκε γὰρ τὸ ἀνθρώπειον διὰ παντὸς
(4.61.6) ἄρχειν μὲν τοῦ εἴκοντος, φυλάσσεσθαι δὲ τὸ ἐπιόν. ὅσοι δὲ
γιγνώσκοντες αὐτὰ μὴ ὀρθῶς προσκοποῦμεν, μηδὲ τοῦτό τις
πρεσβύτατον ἥκει κρίνας, τὸ κοινῶς φοβερὸν ἅπαντας εὖ
(4.61.7) θέσθαι, ἁμαρτάνομεν. τάχιστα δ' ἂν ἀπαλλαγὴ αὐτοῦ γένοιτο,
εἰ πρὸς ἀλλήλους ξυμβαῖμεν· οὐ γὰρ ἀπὸ τῆς αὑτῶν ὁρμῶνται
Ἀθηναῖοι, ἀλλ' ἐκ τῆς τῶν ἐπικαλεσαμένων. καὶ οὕτως οὐ
πόλεμος πολέμῳ, εἰρήνῃ δὲ διαφοραὶ ἀπραγμόνως παύονται,
οἵ τ' ἐπίκλητοι εὐπρεπῶς ἄδικοι ἐλθόντες εὐλόγως ἄπρακτοι ἀπίασιν.
| [4,61] Pourtant, si nous sommes sages, c'est pour
acquérir ce que nous n'avons pas et non pour
amoindrir ce que nous possédons, que nous
faisons appel à des alliés et que nous acceptons les
risques. Sachons-le : les dissensions sont la mort
de tous les États, mais plus encore pour la Sicile,
car les habitants sont d'autant plus exposés que
les divisions entre cités sont plus graves. Il faut
nous convaincre de cette vérité, réconcilier le
citoyen avec le citoyen, la cité avec la cité.
Bref il faut tâcher de sauver en commun la Sicile
entière. Nul ne doit se mettre dans l'esprit que les
Athéniens n'en veulent qu'aux seuls Siciliens
d'origine dorienne et que les Chalcidiens sont en
sécurité, parce qu'ils sont d'origine ionienne. Ce
n'est pas par antipathie de race qu'ils viennent
nous attaquer, mais par convoitise des biens que
nous tous, Siciliens, nous possédons en commun.
Ils l'ont bien montré, tout dernièrement à l'appel
des gens d'origine chalcidienne. Ceux-là n'avaient
jamais attardé leur concours en vertu d'un traité.
Mais les Athéniens sont venus à leur aide avec plus
d'empressement que n'en demandait le traité. Que
les Athéniens aient cette ambition et ces visées,
c'est bien pardonnable et je blâme, non pas ceux
qui veulent établir leur domination, mais ceux qui
sont prêts à la subir. Car la nature de l'homme est
ainsi faite ; il subordonne ce qui lui cède, il se
garde de ce qui lui résiste. Cela, nous le savons, et
nous ne prenons pas nos précautions et nous ne
jugeons pas que l'essentiel est de nous mettre à
l'abri du danger commun ! Quelle folie ! Pourtant
nous serions vite délivrés de ce danger, si nous
voulions nous mettre d'accord. Car la base
d'opération des Athéniens n'est pas chez eux, mais
chez ceux qui les ont appelés. De la sorte, ce n'est
pas la guerre qui mettra fin à la guerre ; mais c'est
la paix qui terminera sans difficultés nos
dissensions. Et ces auxiliaires qui se parent de
beaux prétextes, mais qui sont de coupables
agresseurs, s'en retourneront, comme il convient,
sans avoir atteint leur but.
| [4,62] ‘Καὶ τὸ μὲν πρὸς τοὺς Ἀθηναίους τοσοῦτον ἀγαθὸν εὖ
(4.62.2) βουλευομένοις εὑρίσκεται· τὴν δὲ ὑπὸ πάντων ὁμολογουμένην
ἄριστον εἶναι εἰρήνην πῶς οὐ χρὴ καὶ ἐν ἡμῖν αὐτοῖς ποιήσασθαι;
ἢ δοκεῖτε, εἴ τῴ τι ἔστιν ἀγαθὸν ἢ εἴ τῳ τὰ ἐναντία,
οὐχ ἡσυχίαν μᾶλλον ἢ πόλεμον τὸ μὲν παῦσαι ἂν ἑκατέρῳ,
τὸ δὲ ξυνδιασῶσαι, καὶ τὰς τιμὰς καὶ λαμπρότητας ἀκινδυνοτέρας
ἔχειν τὴν εἰρήνην, ἄλλα τε ὅσα ἐν μήκει λόγων ἄν τις
διέλθοι, ὥσπερ περὶ τοῦ πολεμεῖν; ἃ χρὴ σκεψαμένους μὴ
τοὺς ἐμοὺς λόγους ὑπεριδεῖν, τὴν δὲ αὑτοῦ τινὰ σωτηρίαν
(4.62.3) μᾶλλον ἀπ' αὐτῶν προϊδεῖν. καὶ εἴ τις βεβαίως τι ἢ τῷ
δικαίῳ ἢ βίᾳ πράξειν οἴεται, τῷ παρ' ἐλπίδα μὴ χαλεπῶς
σφαλλέσθω, γνοὺς ὅτι πλείους ἤδη καὶ τιμωρίαις μετιόντες
τοὺς ἀδικοῦντας καὶ ἐλπίσαντες ἕτεροι δυνάμει τινὶ πλεονεκτήσειν,
οἱ μὲν οὐχ ὅσον οὐκ ἠμύναντο, ἀλλ' οὐδ' ἐσώθησαν,
τοὺς δ' ἀντὶ τοῦ πλέον ἔχειν προσκαταλιπεῖν τὰ
(4.62.4) αὑτῶν ξυνέβη. τιμωρία γὰρ οὐκ εὐτυχεῖ δικαίως, ὅτι καὶ
ἀδικεῖται· οὐδὲ ἰσχὺς βέβαιον, διότι καὶ εὔελπι. τὸ δὲ
ἀστάθμητον τοῦ μέλλοντος ὡς ἐπὶ πλεῖστον κρατεῖ, πάντων
τε σφαλερώτατον ὂν ὅμως καὶ χρησιμώτατον φαίνεται· ἐξ
ἴσου γὰρ δεδιότες προμηθίᾳ μᾶλλον ἐπ' ἀλλήλους ἐρχόμεθα.
| [4,62] Si nous voulons prendre une sage
résolution, tel sera l'immense avantage que nous
retirerons du côté des Athéniens. Si la paix est,
comme tous en conviennent, le premier des biens,
pourquoi ne pas l'instituer parmi nous ? Si l'un y
gagne, si l'autre y perd, ne croyez-vous pas que la
tranquillité, plus que la guerre, soit propre à faire
cesser les maux de l'un et à conserver à l'autre ses
avantages ? N'est-ce pas la paix qui assure
honneurs, distinctions éminentes et toutes sortes
de biens qu'il serait trop long d'énumérer ?
Réfléchissez-y bien et ne dédaignez pas mes
paroles ; profitez-en au contraire pour assurer votre salut.
Si vous croyez compter dans vos entreprises sur la justice
ou la force, craignez de voir vos espérances terriblement
trompées.
On a vu maintes fois, sachez-le, des gens poursuivre une
juste vengeance ou compter sur leur puissance
pour satisfaire leurs ambitions ; les uns, loin d'y
parvenir, n'ont pas même réussi à se sauver ; les
autres, loin d'accroître leur puissance, ont perdu ce
qu'ils avaient en propre. Car la justice ne suffit
pas, à elle seule, à assurer le châtiment du
coupable ; la force n'est pas solide parce qu'elle est
portée par l'espérance. Ce sont les incertitudes du
destin, qui très souvent l'emportent ; si peu
nécessaires qu'elles soient, elles ont aux yeux de
tous cet immense avantage, que, toutes craintes
égales, on met dans l'attaque plus de circonspection.
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