[5] Ὁ δὲ λόγος οὗτος τεχνίτην μὲν καὶ ἐπιστήμονα
καλεῖ τὸν ἀποτεμνόμενον ἡντινοῦν εἴδησιν, ἄλλον ἄλλῃ
προσήκοντα δαίμονι· φιλόσοφον δὲ τὸν ἡρμοσμένον ἐκ τῆς
ἁπασῶν συμφωνίας καὶ ἓν τὸ πλῆθος ποιήσαντα· ἢ τοῦτον
μὲν οὔπω, προσεῖναι δὲ δεῖ τὸ καὶ ἔχειν αὐτὸν ἴδιον ἔργον
ὑπερκείμενον τοῦ χοροῦ· ὥσπερ τὸν Ἀπόλλω λόγος ἔχει
νῦν μὲν ταῖς Μούσαις συνᾴδειν αὐτὸν ἐξάρχοντα καὶ ἐνδιδόντα
ῥυθμὸν τῷ συστήματι, νῦν δὲ αὐτὸν κατὰ μόνας
ᾄδειν· ἐκεῖνο δ´ ἂν εἴη τὸ μέλος τὸ ἱερὸν καὶ ἀπόρρητον.
καὶ ὁ καθ´ ἡμᾶς φιλόσοφος συνέσται μὲν ἑαυτῷ τε καὶ τῷ
θεῷ διὰ φιλοσοφίας, συνέσται δὲ τοῖς ἀνθρώποις διὰ τῶν
ὑφειμένων τοῦ λόγου δυνάμεων· ἐπιστήσεται μὲν οὖν ὡς
φιλόλογος, κρινεῖ δὲ ὡς φιλόσοφος ἕκαστόν τε καὶ πάντα.
οἱ δὲ ἀστεμφεῖς οὗτοι καὶ ὑπερόπται ῥητορικῆς καὶ ποιήσεως
οὔ μοι δοκοῦσιν οὐδὲ ἑκόντες εἶναι τοιοῦτοι, πενίᾳ
δὲ φύσεως μηδὲ τὰ σμικρὰ ἱκανοί, ὧν θᾶττον ἂν ἴδοις τὴν
καρδίαν, ἢ τὰ ἐν τῇ καρδίᾳ, ἀδυνατούσης τῆς γλώττης
ἐξερμηνεῦσαι τὴν γνώμην. ἐγὼ μὲν οὖν καὶ ἀπιστεῖν αὐτοῖς
βούλομαι, καὶ οὐδ´ ἂν φαίην ἀπόρρητόν τι κρύπτειν
αὐτούς, ὥσπερ τὰς Ἑστιάδας τὸ πῦρ, πρῶτον μὲν ὅτι
μηδὲ ὅσιόν ἐστι τὰ μεγάλα σοφὸν γενέσθαι τὸν τὰ μικρὰ
μὴ δυνάμενον· ἔπειτα ὥσπερ ὁ θεὸς τῶν ἀφανῶν ἑαυτοῦ
δυνάμεων εἰκόνας ἐμφανεῖς ὑπεστήσατο τῶν ἰδεῶν τὰ
σώματα, οὕτως ἔχουσα κάλλος ψυχὴ καὶ γόνιμος οὖσα
τῶν ἀρίστων, διαδόσιμον ἔχει μέχρι τῶν ἔξω τὴν δύναμιν·
οὐδὲν γὰρ ἐθέλει τῶν θείων ἔσχατον εἶναι. εἰ δὲ καὶ κρύπτειν
ἐπιτηδειότερος τὰ ἀβέβηλα ὁ παντοδαπῶς ἔχων τοῦ
λόγου, καὶ περιβαλλόμενος δύναμιν τοῦ διατίθεσθαι τὰς
συνουσίας ᾗ βούλεται, καὶ οὕτω μειονεκτεῖν ἀνάγκη τὸν
ἄνδρα ἐκεῖνον, ὃς οὐ προετελέσθη τῷ κύκλῳ, καὶ τὰ Μουσῶν
οὐκ ὠργίακε. δυεῖν γὰρ αὐτὸν καταλαμβάνει τὸ ἕτερον,
ἤτοι σιγᾶν, ἢ λέγειν ὅσα νόμος σιγᾶσθαι· ἢ γὰρ δὴ τὰς
τῶν ἐν ἄστει τύχας διαλέξεων ὑποθέσεις ποιήσεται, καὶ
φορτικῶς τοῖς ἀνθρώποις συνέσται, ὃ μηδεὶς ἂν ἐλεύθερος
ἀξιώσειεν, ἢ βιώσει ἐν σχολῇ γε ὁ τὴν σοφίαν κορυφαῖος
εἶναι ποιούμενος. τυχὸν μὲν γὰρ οὐδ´ ἂν εἰ βούλοιτο,
δύναιτο· πάντως δὲ οὐδ´ ἄν, εἰ δύναιτο, βούλοιτο. ἄγαμαι
δὲ ἐγὼ καὶ τὸν Πρωτέα τὸν Φάριον, εἰ σοφὸς ὢν τὰ
μεγάλα, σοφιστικήν τινα θαυματολογίαν προὐβέβλητο, καὶ
παντοδαπῶς τοῖς ἐντυγχάνουσι συνεγίγνετο· ᾤχοντο
γὰρ ἂν τὴν περὶ αὐτὸν τραγῳδίαν τεθαυμακότες, ὡς μὴ
ἐπιζητῆσαι τὴν ἀλήθειαν περὶ ὧν πραγματεύοιτο. ἔστω
δέ τι τοῦ νεὼ προτεμένισμα τοῖς ἀτελέστοις· ὁ δὲ καθάπαξ
ἀποσεμνυνόμενος, οὐ κρύπτει μᾶλλον ἢ ἐρεθίζει καὶ
ἀναρριπίζει τὴν ἐν τῇ φύσει λιχνείαν, ὑφ´ ἧς ἕκαστός ἐστι
πολυπράγμων τοῦ ἀπορρήτου. εἰ δὲ μὴ ὁ Ἰξίων ἀντὶ τῆς
Ἥρας τὴν νεφέλην ᾑρήκει, καὶ ἠγαπήκει συνὼν τῷ εἰδώλῳ,
οὐκ ἄν ποτε ἑκὼν εἶναι μεθεῖτο τῆς ἀτόπου διώξεως.
| [5] Appelons artiste ou savant celui qui, n’écoutant que l’une ou l’autre des Muses,
lui voue un culte exclusif; le philosophe est celui qui unit leurs divers accords pour en
former un tout harmonieux. Mais ce n’est pas encore assez: il doit aussi, en dehors du
chœur, avoir à lui son instrument. C’est ainsi qu’Apollon, dit-on, tantôt mêle sa voix à
celle des Muses; il donne le signal du concert et règle la cadence; tantôt il chante seul,
et son chant est une musique ineffable et sacrée. Le philosophe, tel que je le conçois,
dans sa vie intérieure et dans ses rapports avec Dieu ne s’attachera qu’à la
philosophie; mais, pour communiquer avec les autres hommes, il ne dédaignera point
de cultiver en lui certaines qualités inférieures de l’esprit. Avec les lettres il acquerra
des connaissances variées, avec la philosophie il jugera de tout et de chaque chose.
Mais des personnages austères et superbes que vous connaissez méprisent, et pour
cause, la rhétorique et la poésie: de leur part c’est pure impuissance; ils ne sont
capables de rien; on pourrait voir jusqu’au fond de leur cervelle sans trouver dans
cette cervelle aucune idée; leur langue ne saurait exprimer la moindre pensée. Pour
moi je ne peux leur reconnaître aucun mérite; je n’admettrai point qu’ils cachent en eux
quelque chose de divin, comme le feu sacré des Vestales. D’abord les dons
supérieurs de l’intelligence ne peuvent exister là où ne se rencontrent point des
qualités secondaires; ensuite de même que Dieu a produit les idées pour nous laisser
deviner ses perfections qui échappent à nos regards, ainsi un esprit richement doué
révèle sa vigueur et sa fécondité en se répandant au dehors. Dans tout ce qui est divin
rien ne doit être défectueux. Si l’homme qui s’est livré à l’étude des lettres sait mieux
qu’un autre tenir caché ce qui doit rester interdit aux profanes, s’il possède cette
éloquence avec laquelle on tourne à son gré les esprits, n’est-il pas supérieur à celui
qui n’a pas eu cette préparation littéraire, et n’a pas été initié aux mystères des
Muses? Faute de cette culture intellectuelle, il faut se condamner au silence, ou
s’exposer à dire ce qu’il vaut mieux taire. Car on prendra pour sujet de discours les
misères des gens de la ville, au risque de se rendre insupportable au public, fâcheuse
conséquence qu’un honnête homme évite avec soin; ou bien on passera sa vie à se
tenir en repos: et l’on a la prétention d’être un des coryphées de la sagesse! Se tenir
même en repos, peut-être, tout en le voulant, ne le pourrait-on pas; mais sûrement,
tout en le pouvant, on ne le voudrait pas. Pour moi j’admire Protée de Pharos : malgré
sa science si étendue il éludait, par des discours évasifs et des apparences
trompeuses, la curiosité des visiteurs qui voulaient l’interroger; ils s’en allaient
émerveillés des prodiges dont il leur avait donné le spectacle, et ne songeant plus au
sujet sur lequel ils étaient venus le consulter. Ne permettons point à ceux qui ne sont
point encore initiés de dépasser le vestibule du temple. A force de vanter la
philosophie on ne la tient plus secrète; on provoque, on excite cette curiosité naturelle
qui pousse l’homme à vouloir pénétrer tous les mystères. Ixion, croyant tenir Junon, ne
saisissait qu’une nuée: s’il n’avait été satisfait d’embrasser ce fantôme, il se serait
obstiné à poursuivre follement la déesse.
|