[11] Ταῦτα οὐ πρὸς τοὺς ἐκ τῆς ἑτέρας ἀγωγῆς μᾶλλον
ἢ καὶ πρὸς τοὺς παρ´ ἡμῖν σὺν ἀλογίᾳ μεγαλοφώνους,
οἳ καὶ παρέσχον ἀφορμὴν τῷ λόγῳ βοηθῆσαι τοῖς
προπαιδεύμασιν· ὧν τί ἄν τις καὶ δοίη ἀνθρώπων ἀλαζόνων
καὶ ἀνοήτων; πολλοῦ μέντ´ ἂν εἶεν τρεῖς τοὐβολοῦ.
ἐγὼ δὲ χάριν οἶδα καὶ ποιηταῖς δεξιοῖς καὶ ῥήτορσιν ἀγαθοῖς,
καὶ ὅστις ἱστορίαν τινὰ κατεβάλετο λόγου ἀξίως· καὶ
ἁπαξαπλῶς οὐδένα τῶν συνεισενεγκόντων εἰς κοινὸν τοῖς
Ἕλλησιν, ὅ τις καὶ εἶχεν ἀγαθόν, ἀγέραστον εἶναι βούλομαι,
ὅτι παῖδάς τε παραλαβόντες ἡμᾶς ἐτιθηνήσαντο, καὶ
ἀσθενεῖς ὄντας ἔτι τὴν γνώμην ἐνοσοκόμησαν, τοῖς ὠφελίμοις
ἐγκαταμιγνύντες ἡδύσματα. ἄκρατα γὰρ οὐδεὶς ἂν
ταῦτα παρεδέξατο διά τε στυφότητα καὶ τὴν τότε τῶν
αἰσθήσεων ἁπαλότητα· κᾆθ´ οὕτω ῥώσαντες, καὶ παραπέμψαντες
ἄλλος δι´ ἄλλου, ταῖς ἐπιστήμαις παρέδοσαν· αἱ
δὲ παρεσκεύασαν οἵους εἶναι τῶν ἄκρων ἐπορέξασθαι· ἐκεῖ τε
γενομένων ὅταν αἴσθωνται τὰς ψυχὰς ῥαινομένας ἱδρῶτι
καὶ τὴν φύσιν ἡμῶν ἀπαγορεύουσαν, αὖθις ἀνεκαλέσαντο
πραέως, καὶ ἡ Καλλιόπη παραλαβοῦσα ἥκοντας αὐχμοῦ
πλέως, ἀνέπαυσέ τε εἰς ἀνθεινοὺς ἀγαγοῦσα λειμῶνας, ὡς
μὴ διακναισθῆναι τῷ πόνῳ, καὶ πανδαισίαν παρέθηκεν
Ἀττικῶν καταγλωττισμάτων, καὶ καρυκείας ποιητικῆς,
ὑφ´ ὧν τὴν μὲν πρώτην διέχεεν, ἔπειτα ἐμυώπισε λαθοῦσα,
καὶ κατὰ μικρόν πως ἐπέστρεψε· τελευτῶσα δὲ ἐπὶ τὸν
αὖθις ἀγῶνα ἐγύμνασε. καὶ ὅστις δὲ οὐ προτέλειον ἡγεῖται
τὰς Μούσας, ἀλλὰ τὸ κράτος αὐτῷ τῆς σοφίας ἐν ταύταις ἐστί,
καὶ οὐδ´ εἴ τι περιττὸν αἰνίττονταί ποτε καὶ παραδηλοῦσι,
συνιέναι βούλεται, τὸ δὲ ἐκκείμενον αὐτῶν κάλλος ἠγάσθη,
καὶ εἰς αὐτὸ κέχηνε, καὶ ὑπὸ τούτου κατέχεται· οὐδὲ οὗτος
μέντοι δεινὸν οὐδὲν εἴργασται, ἀλλὰ καὶ πολλὰ ἀγαθά γε
αὐτῷ γένοιτο, μουσικῷ τε ἀνδρὶ καὶ χαρίεντι. καὶ γὰρ εἰ
μὴ τεθήπαμεν τοὺς κύκνους, ὥσπερ τοὺς ἀετοὺς αἰρομένους
ὑψοῦ καὶ ὑπὲρ πᾶν τὸ ὁρώμενον, ἀλλὰ γανύμεθά γε καὶ
ὁρῶντες αὐτοὺς καὶ ἀκούοντες τῆς ᾠδῆς· καὶ ἐμοῦ γε ἕνεκα,
μηδείς ποτε κύκνων τὸ ἔσχατον ᾄσειεν. εἰ δὲ βασίλειοί τέ
εἰσιν ἐκεῖνοι, καὶ διαιτῶνται παρὰ τὰ Διὸς σκῆπτρα, καὶ
τούτους εἴληχέ τις θεῶν ἐκ Διὸς γεγονώς, καὶ οὐκ ἀπαξιοῦνται
τοῦ τρίποδος. ἀετὸν δὲ ἅμα καὶ κύκνον γενέσθαι,
καὶ τὰ ἀμφοῖν ἔχειν πλεονεκτήματα, ὄρνισι μὲν ἡ φύσις οὐ
ξυνεχώρησεν· ἀνθρώπῳ δὲ ἔδωκεν ὁ θεός, ὅτῳ καὶ ἔδωκε
γλώττης τε εὖ ἥκειν καὶ φιλοσοφίας ἐπήβολον εἶναι.
| [11] Ce que je viens de dire est encore moins à l’adresse des barbares, étrangers
à la vraie philosophie, que de ces gens dont nous entendons chez nous les
dissertations creuses et emphatiques. C’est en les écoutant que l’idée m’est venue de
composer ce discours, pour prendre la défense des lettres. Mais que veulent-ils donc
ces ignorants présomptueux? Combien voudrait-on les acheter? On les paierait encore
trop cher à en prendre trois pour une obole. Pour moi ma reconnaissance est toute
acquise aux excellents poètes, aux orateurs éloquents, aux historiens dont les œuvres
méritent de fixer l’attention des hommes. En un mot je veux que tous ceux qui ont mis
au service des Grecs tout ce qu’ils avaient de talent obtiennent l’honneur qui leur est
dû : ils nous ont pris dès le berceau, ils nous ont nourris, ils ont fortifié notre faible
intelligence par des enseignements où le plaisir se mêlait à l’utile ; car nous étions
encore trop délicats pour supporter l’austérité de leçons dépouillées de tout agrément;
puis, après nous avoir ainsi donné de la vigueur, de progrès en progrès ils nous ont
conduits jusqu’aux sciences; les sciences à leur tour nous ont poussés encore plus
haut; puis, quand elles voient que parvenus au faîte nous sommes couverts de sueur,
excédés de fatigue, elles nous laissent revenir sur nos pas. Calliope nous reçoit tout
poudreux, et pour nous délasser nous mène dans ses riantes prairies; elle répare nos
forces épuisées en nous conviant au banquet de la poésie; après nous avoir fait goûter
les charmes de l’art grec, elle éveille, elle excite insensiblement notre émulation; elle
nous prépare nous aussi aux nobles travaux de l’esprit. Les lettres ne sont que le
préambule de la sagesse, elles ne sont pas la sagesse elle-même. Les Muses laissent
deviner et entrevoir quelque chose de supérieur encore à leurs attraits; et cependant si
l’on n’a des yeux que pour elles, si l’on est uniquement épris de leur beauté, on est
certes bien excusable, et des éloges mêmes sont dus aux esprits aimables qui vivent
avec elles dans un commerce étroit. Nous n’admirons pas le cygne autant que l’aigle
qui s’élève à perte de vue; et cependant nous aimons à regarder, à écouter le cygne;
et ce n’est jamais par ma volonté qu’il fera entendre son chant pour la dernière fois. Si
l’aigle est un oiseau royal, s’il vit à l’ombre du sceptre de Jupiter, le cygne a été adopté
par un dieu, fils de Jupiter, et il a sa place près du trépied sacré. Il n’est donné à aucun
oiseau d’être tout à la fois aigle et cygne, et de réunir leurs diverses qualités; mais
l’homme est plus heureux: le ciel lui accorde parfois la double gloire de l’éloquence et
de la philosophie.
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